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Les dirigeants européens, réunis à Sibiu, s’approchent du sublime ridicule

Angoissés par la perspective d’abstention massive aux européennes, les Vingt-sept multiplient les déclarations pathétiques et livrent involontairement un aveu

Décidément, ces dirigeants européens sont vraiment impayables. Particulièrement quand ils sont pris, si ce n’est de panique, du moins d’une extrême fébrilité.

Tel est le cas avec l’approche des élections renouvelant les eurodéputés. Le scrutin est programmé du 23 au 26 mai, et pourrait bien marquer une nouvelle étape dans la progression continue de l’abstention, une tendance qui gagne régulièrement en ampleur depuis 1979. A cette époque, la participation globale était de 62% ; en 2014, elle n’était plus que de 43%. Cette année, un nouveau record pourrait bien être battu.

De nombreuses raisons peuvent expliquer cette chute. La principale n’est jamais citée par les discours officiels et les médias dominants : l’Assemblée de Strasbourg usurpe le nom de « Parlement ». Car l’essence d’un Parlement est de représenter un peuple ; or il n’existe pas de « peuple européen ». Et, plus ou moins distinctement, de plus en plus de citoyens en ont l’intuition : on leur demande de donner, à travers le vote, un semblant de légitimité à une institution qui n’en a en réalité aucune ; et d’accorder, un vernis démocratique à une Union européenne dont la raison d’être est précisément de priver chaque peuple de la liberté de ses choix politiques, c’est-à-dire le droit de faire des choix éventuellement radicalement différents de ceux des pays voisins.

Pour conjurer le spectre du boycott massif des urnes, les grands médias se mettent en ordre de bataille. Arte bat des records, et devient une véritable chaîne de propagande continue. Et la « société civile » est mobilisée : quasiment pas un seul jour ne se passe sans qu’un appel pathétique soit rendu public sur le thème : « peu importe pour qui vous votez, mais votez ! ».

En Allemagne, plusieurs PDG de grands groupes avaient donné le ton en mars, parmi lesquels ceux de E.ON, de RWE, de Thyssen-Krupp qui s’étaient directement adressés à leurs salariés. Plus d’une centaine de grands patrons et de hauts cadres français les avaient imités en avril. Le 29 avril, Le Monde publiait un texte commun signé en France par les présidents des organisations patronales (dont le Medef) et les chefs de certaines organisations syndicales (dont la CFDT) exhortant les citoyens à « se mobiliser » pour « l’Europe que nous voulons ».

Le 1er mai, c’était au tour des archevêques catholiques d’Allemagne, de France, de Belgique, des Pays-Bas et du Luxembourg qui conjuraient leurs ouailles de voter pour s’opposer aux « menaces du Brexit, du populisme et du nationalisme ». La liste des textes analogues est interminable, jusqu’à un article du petit groupe politique français baptisé Sauvons l’Europe, arguant que voter pour l’UE constitue « une dette à honorer face aux victimes du nazisme ».

Lettre ouverte

Bien sûr, les dirigeants eux-mêmes ne sont pas en reste. Dans une lettre ouverte publiée le 9 mai, vingt-et-un chefs d’Etat de l’UE se montraient tout à la fois scandalisés et terrorisés : « pour la première fois dans l’histoire de l’histoire de l’intégration, il y a des voix qui réclament de revenir sur la libre circulation ou d’abolir les institutions communes ». Mais ils concluaient, sur le ton de l’adjudant de service : « il ne peut y avoir de retour en arrière ». (Dans les sept autres pays, les chefs d’Etat sont des têtes couronnées qui n’étaient pas habilités à se joindre à cette tirade).

Mais ce sont bien les dirigeants politiques – chefs d’Etat ou de gouvernement – des Vingt-sept qui se sont retrouvés ce même 9 mai dans la ville roumaine de Sibiu. Le principe de ce sommet informel avait été décidé dans la panique qui avait suivi le référendum britannique du 23 juin 2016. Pour les dirigeants européens, la priorité était d’éviter que l’UE ne s’effondre comme un château de cartes. La réunion devait initialement se tenir au lendemain de la sortie officielle du Royaume-Uni. Celle-ci ayant été différée (jusqu’au 31 octobre au plus tard), c’est finalement le jour de la « fête de l’Europe » qui a été choisi.

L’exercice consistait donc à afficher une unité de façade – alors que les divergences et tensions n’ont jamais été aussi fortes – et de se mettre d’accord sur une adresse aux citoyens, suppliant ceux-ci de se rendre dans les bureaux de vote. Et c’est là que la prose officielle touche au sublime. D’abord par la modestie des propos.

« Une Europe réunifiée dans la paix et la démocratie ne constitue qu’une réalisation parmi de nombreuses autres », proclament en toute humilité les Eminences. Qui poursuivent sans ciller : « depuis sa genèse, l’Union européenne, mue par ses valeurs et libertés, a assuré la stabilité et la prospérité en Europe, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de ses frontières ». Bref, grâce à Bruxelles, les peuples au sein de l’UE mais aussi ceux du reste de l’Europe ont connu des décennies de bonheur aussi intense que paisible.

Emportés dans leur élan, les hôtes de Sibiu se sont « à l’unanimité » fixé « dix engagements ». Parmi ces derniers figure ainsi la promesse de « rester unis, envers et contre tout ». Contre les réticences des peuples, en particulier ? « Nous nous attacherons à obtenir des résultats là où cela compte le plus », poursuit cette version moderne des Dix commandements. Et les auteurs de marteler : « nous continuerons d’être attentifs aux préoccupations et aux espoirs de tous les Européens, rapprochant l’Union de nos citoyens, et agirons en conséquence, avec ambition et détermination ». Nous voilà rassurés.

Et le meilleur : « nous aiderons toujours les plus vulnérables en Europe, faisant passer les hommes et les femmes avant la politique ». Déprécier ainsi la politique est assurément le moyen de redonner le goût de voter...

Enfin, jurent les Vingt-sept, « nous protégerons nos citoyens et nous assurerons leur sécurité en investissant dans notre pouvoir de convaincre et notre pouvoir de contraindre ». On appréciera le « nous » seigneurial (« nos citoyens »), qu’on retrouve bizarrement dans un autre engagement : « nous continuerons à protéger notre mode de vie ». « Nous », les chefs d’Etat ?

« Programme stratégique »

Les participants au sommet ont également avalisé les grandes lignes d’un « programme stratégique » prévu pour être adopté formellement lors du Conseil européen des 20 et 21 juin. Parmi les grandes orientations figurent l’ambition de « protéger les citoyens et les libertés » ; de développer le « modèle économique européen pour l’avenir » (dont la libre concurrence et l’euro) ; de « construire un avenir plus vert, plus équitable et plus inclusif » (dont l’aide aux « communautés pour gérer la transition écologique » ; et de « promouvoir les intérêts et les valeurs de l’Europe dans le monde » (et pour cela notamment : « intensifier les investissements de l’UE en matière de défense et renforcer la coopération y compris avec l’OTAN) ».

Enfin, les Vingt-sept ont prévu de se retrouver en sommet extraordinaire le 28 mai. Avec pour ordre du jour : commencer le grand marchandage pour les postes des futurs présidents de la Commission européenne, du Conseil européen, de la Banque centrale européenne, et du chef de la diplomatie de l’UE. D’ores et déjà, les couteaux sont tirés. Et ce, malgré l’un des engagements solennels : « nous parlerons d’une seule voix ».

En conclusion de leur déclaration, les dirigeants européens promettent : « les décisions que nous prendrons respecteront l’esprit et la lettre » des dix commandements proclamés ce 9 mai 2019, car « tel est notre engagement pour les générations futures ».

Et ce, quel que soit le résultat des élections du 26 mai (et des élections nationales à venir). On ne pouvait mieux définir la « démocratie » à l’européenne.

Pierre Lévy,
rédacteur en chef du mensuel Ruptures

»» https://ruptures-presse.fr/actu/elections-europeennes-abstention-sibiu/
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Sir Josiah Stamp,
Directeur de la Banque d’Angleterre 1928-1941,
2ème fortune d’Angleterre.

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