La photo qui illustre l’article est significative,l’attribution du "Nobel" est
un signe de plus de la desagregation de l’Empire que des elites divisées cherchent a
contenir :
Tensions entre la Maison-Blanche et l’armée à propos de l’Afghanistan
Par Patrick Martin
10 octobre 2009
Les tensions croissantes entre des sections de l’état-major et l’administration Obama ont éclaté au grand jour dans le conflit opposant le commandant en chef en Afghanistan, le général Stanley McChrystal, et la Maison-Blanche.
Les demandes de plus en plus acharnées de McChrystal pour l’envoi de 40 000 soldats supplémentaires, couronnées par son discours la semaine dernière à Londres devant l’Institut international pour les études stratégiques (IISS), ont provoqué des réprimandes de la part du conseiller d’Obama à la sécurité nationale, le marine à la retraite, général James L. Jones, et de la part aussi du secrétaire à la Défense, Robert Gates.
Bien qu’aucun des deux officiels n’aient mentionné le nom de McChrystal, ils ont clairement souligné que sa campagne publique pour l’envoi de troupes additionnelles, avant même une prise de décision du président Obama, était en violation des règles de subordination des officiers militaires en service au commandant en chef civil.
Dimanche, lorsque CNN lui a posé la question s’il était approprié pour un officier en uniforme de faire campagne publiquement pour un choix spécifique de politique de guerre, Jones a déclaré que, « Idéalement, les conseils militaires devraient passer par la hiérarchie de commandements. »
Gates a fait une déclaration encore plus catégorique lundi, affirmant devant une convention de l’armée à Washington que les officiels civils et militaires avaient l’obligation de maintenir leurs opinions privées lorsqu’ils tentent de conseiller le président.
« Je crois que les décisions que va prendre le président pour la prochaine étape de la campagne afghane seront parmi les plus importante de sa présidence », a-t-il dit. « Il est donc important de prendre notre temps pour faire en sorte que ce soit les bonnes décisions. Et dans ce processus, il est impératif que tous ceux d’entre nous qui prennent part à ces délibérations (les civils tout comme les militaires) offrent leurs meilleurs conseils au président, franchement mais en privé. »
Il a ensuite ajouté : « Et parlant au nom du département de la Défense, une fois que le commandant en chef prendra ses décisions, nous allons saluer et exécuter fidèlement ces décisions au meilleur de nos capacités. »
Le 31 août, McChrystal a rendu un long rapport au Pentagone sur la position de l’armée en Afghanistan, qui a été suivi d’un appel officiel pour plus de troupes. Il a mis en garde sur le fait que le délai pour une victoire militaire américaine en Afghanistan se rétrécissait. Il a évalué ce délai à aussi peu que 12 mois, parce que les Talibans et d’autres insurgés gagnent en force et parce que l’appui populaire pour la guerre est en chute.
Il a appelé à une stratégie de contre-insurrection, impliquant beaucoup plus de troupes américaines que celles présentement déployées. Le rapport été approuvé par le général David H. Petraeus, le chef du CENTCOM américain ainsi que par l’amiral Mike Mullen, le chef d’état-major interarmées.
Selon plusieurs reportages médiatiques, des éléments de l’administration Obama, ainsi que de l’armée elle-même, sont sceptiques face à la proposition de McChrystal et soutiennent des alternatives, comme l’escalade des opérations militaires américaines ciblant les refuges talibans et les insurgés anti-américains au Pakistan.
Lundi, le Daily Telegraph britannique a publié un rapport intitulé « Barack Obama furieux contre le discours du général Stanley McChrystal en Afghanistan ». Dans son discours à Londres, McChrystal a référé à une autre stratégie « contre-terroriste » attribuée au vice-président Joseph Biden, la comparant à la stratégie du « chaosistan », dans laquelle on laisserait le pays sombrer dans le chaos pour ensuite s’en occuper « de l’extérieur ».
Lorsque quelques journalistes de l’auditoire lui ont demandé s’il croyait que la stratégie attribuée à Biden pourrait fonctionner, McChrystal a répondu : « La réponse courte et facile est non. »
Le Telegraph a noté que seulement un jour après le discours, McChrystal « fut convoqué à une réunion embarrassante de 25 minutes à bord d’Air Force One sur le tarmac de Copenhague, lors d’un entretien privé avec le président, où ce dernier était venu vendre, sans succès, la candidature de Chicago pour les Jeux olympiques ».
Il n’y a pas d’aile « pacifique » dans les discussions sur la politique en Afghanistan à l’intérieur du Pentagone ou de la Maison-Blanche. Cela a été mis en évidence dans une déclaration faite lundi par le porte-parole de la Maison-Blanche, Robert Gibbs, qui a dit que l’« option » qui ne serait pas considérée dans l’examen des politiques était le retrait des troupes américaines du pays occupé.
Bien que toutes les parties dans le débat à Washington s’opposent à tout retrait de l’Afghanistan, cette politique est de plus en plus favorisée par la population américaine. De récents sondages ont confirmé qu’une claire majorité était opposée à la guerre.
L’intervention de commandants en uniforme dans la discussion sur la politique en Afghanistan est l’expression claire du rôle de plus en plus sûr de soi qu’adopte l’état-major militaire dans la vie politique américaine. Le Pentagone accapare actuellement la part du lion des dépenses discrétionnaires fédérales, soit plus de 700 milliards de dollars en dépenses militaires pour l’année fiscale en cours, incluant les deux guerres et la maintenance de l’énorme stock d’armes nucléaires des Etats-Unis.
L’an dernier, en pleine campagne électorale, l’amiral Mullen, le chef d’état-major interarmées, avait attaqué publiquement la politique irakienne défendue par Obama durant la campagne présidentielle. Il alla jusqu’à se présenter au réseau Fox, un organe des républicains, pour critiquer le candidat démocrate à la présidence.
Le fait que le secrétaire à la Défense Gates s’est senti obligé de rappeler publiquement au corps d’officiers qu’il est subordonné aux dirigeants civils élus est en soi une démonstration de l’immense développement, sur de nombreuses années, du pouvoir et de l’indépendance de l’appareil militaire et de sécurité. On ne peut que présumer, avec l’immense crise des Etats-Unis en Afghanistan, que des éléments au sein de l’armée menacent de défier ouvertement l’autorité civile.
Les travailleurs doivent considérer cela comme une mise en garde contre la profonde érosion des procédures démocratiques et la menace croissante de dictature. La combinaison de la crise militaire à l’étranger, la plus profonde crise économique depuis la Grande Dépression et le développement de la misère sociale et de l’inégalité économique pousse inévitablement la classe dirigeante vers des formes de pouvoir autoritaires et répressives.
La source fondamentale de la désintégration de la démocratie américaine se trouve dans la crise du système de profit. Il est impossible de maintenir des procédures démocratiques dans une société où tout le pouvoir est entre les mains d’une minuscule couche de super riches, qui contrôle le gros de la richesse et a à sa disposition l’énorme appareil militaire et de renseignement basé à Washington.
http://www.wsws.org/francais/News/2009/oct2009/afgh-o10.shtml
Mais les illusions du pouvoir du Nobel semblent encore operer :
Le Nobel de la paix au président Obama, un défi à la Pax Americana ?
Par Jules Dufour
Le 10 octobre 2009
La remise du Prix Nobel de la Paix au Président Obama en 2009 s’avère l’expression d’un défi lancé aux États-Unis et à leurs alliés regroupés au sein de l’OTAN. Cet honneur de très haut prestige place le président dans une situation intenable en tant que chef de l’armée la plus puissante du monde. Il lui est demandé, dans un message planétaire, de mettre fin aux agressions guerrières de son pays dans le cadre de la guerre mondiale contre le terrorisme et de faire la lumière sur les événements qui l’ont enclenchée. C’est le prix que le nouveau président doit payer pour mériter cette reconnaissance. Réussira-t-il à renverser le courant général qui le pousse vers une guerre mondiale de grande ampleur ou empruntera-t-il la voie de la justice distributive et de la diplomatie préventive ?
Ce prix s’avère un cadeau « empoisonné » pour l’administration américaine, car il se présente carrément à l’intérieur du processus de mise en place d’une nouvelle politique étrangère et de diverses réformes à l’intérieur des États-Unis eux-mêmes. C’est la raison pour laquelle les grands médias de droite des États-Unis ont qualifié le prix de « prématuré » et de « risqué », car ils craignent qu’il ait des conséquences négatives sur leurs intérêts. Il pose, en effet, pour les tenants de la poursuite des guerres, un frein réel et surtout il se présente au moment où celle qui sévit en Afghanistan est entrée dans une phase où des décisions aux conséquences majeures doivent être prises. Ce prix exercera-t-il un effet sur l’orientation de ces décisions ? Il est plus que probable que l’on cherchera, dans ce contexte, à lui accorder une valeur plutôt symbolique en faisant triompher le concept du proverbe latin « Si vis pacem para bellum ».
Pour d’autres analystes comme Paul Rogers cette nomination constitue « un affront tacite à l’ex-administration de G.W. Bush, à la fois en termes de sa réticence à négocier sur les questions nucléaires, son retrait du traité anti-missiles balistiques, et aussi de sa vision du monde islamique et du changement climatique » (Obama : un prix Nobel controversé et risqué).
Pour une « paix sans armes »
La population mondiale se tourne ainsi vers l’Amérique pour lui demander de mettre fin à ses actes d’agression et à ses ambitions de conquêtes. C’est ce message que sous-tend cette nomination. Pour la plus grande puissance de cette planète ce message sera-t-il interprété comme étant la consécration du rôle de gendarme qu’elle s’est évertué à jouer au cours des dernières décennies ou l’entrée dans une ère de coopération pour le développement équitable pour tous ?
Transformera-t-elle la vision du monde qu’elle a développée ou participera-t-elle plutôt activement et réellement à l’entreprise du désarmement et à l’instauration de la paix par le triomphe de la justice économique et sociale ?
Références
AFP. 2009. La nomination d’Obama « n’est pas prématurée », affirme le comité Nobel. En ligne : http://www.cyberpresse.ca/dossiers/prix-nobel-2009/200910/09/01-909988-la-nomination-dobama-nest-pas-prematuree-affirme-le-comite-nobel.php
AFP. 2009. Nobel : fierté à Harlem, scepticisme à Wall Street. Cyberpresse. Le 9 octobre 2009. En ligne : http://www.cyberpresse.ca/international/etats-unis/200910/09/01-910091-nobel-fierte-a-harlem-scepticisme-a-wall-street.php
BELAND, Cyril. 2009. Obama : un prix Nobel controversé et risqué. Agence France-Presse. Cyberpresse. Le 9 octobre 2009.
En ligne : http://www.cyberpresse.ca/international/etats-unis/200910/09/01-910046-obama-un-prix-nobel-controverse-et-risque.php
DUFOUR, Jules. 2009. G.W. Bush : Post mortem d’un régime politique odieux pour l’humanité. Une autopsie de l’administration de G.W. Bush. Montréal, Centre de recherche sur la mondialisation (CRM). Le 26 mai 2009. En ligne : http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=13735
Jules Dufour, Ph.D., est président de l’Association canadienne pour les Nations Unies (ACNU) /Section Saguenay-Lac-Saint-Jean, professeur émérite à l’Université du Québec à Chicoutimi, membre du cercle universel des Ambassadeurs de la Paix, membre chevalier de l’Ordre national du Québec.
www.mondialisation.ca/index.php?context=viewArticle&code=DUF20091010&articleId=15613