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Nouvelle provocation d’un site rouge-jaune.

Le Grand Soir est allé se pavaner à la réception de l’ambassade de Chine.

Le Grand Soir, qui n’en est pas à une provocation près, est allé se montrer à la réception donnée le 24 septembre 2012 dans les salons du Pavillon Dauphine à Paris par l’ambassade de Chine à l’occasion du 63 ème anniversaire de la fondation de la République populaire de Chine (RPC).

Autour du Pavillon, des barrières de sécurité, des policiers, des messieurs à oreillettes. Il faut montrer patte blanche,( carton d’invitation) pour approcher à moins de 50 mètres de la concentration de VIP.

1500 invités, des diplomates à foison, des militaires français décorés comme des généraux de l’Armée Rouge, des Chinois partout, des dames élégantes, des messieurs inconnus mais costumés et des hommes politiques français.

Ah, la Chine !

Vous le saviez, vous que les Chinois sont obligés de construire une université par semaine pour accueillir leurs étudiants ? Non ? Mais vous saviez que les « incidents » (grèves, manifestations) se comptent par dizaines de milliers dans le pays ? Que des ponts neufs s’écroulent ?

Giscard d’Estaing est là , dans un salon moquetté, affable, les yeux bridés, debout malgré le poids de ses 86 ans, entouré de fans ou de flatteurs ou de fats qui veulent une photo avec lui.
Vous le saviez, vous, que les USA comptent en pourcentage et en nombre absolu plus de citoyens emprisonnés que la Chine ? Ah, vous l’ignoriez ?

Vous savez tout de même que le premier porte-avions chinois vient d’être livré à la Marine de l’« Armée populaire de libération ». Vous saviez que les USA en ont 11, qui croisent loin de leurs côtes ?

Une rumeur (invérifiée) dans les salons du pavillon Dauphine annonce l’arrivée d’Edouard Balladur. On a peine à le croire après cette histoire de frégates vendues à Taïwan. Ce qui avait agacé Pékin.

Vous saviez qu’en Chine on parle chinois ? Oui, sauf quand on parle une des 200 autre langues que le mandarin.

Vous le saviez, vous, que dans la région du Xingjiang, peuplée de Ouïghours (et non de yoghourts comme a dit un jour Bernard Kouchner, ministre socialo-sarkoziste) quand l’assemblée des élus se réunit il faut 5 interprètes pour qu’ils se comprennent ?

Patrick Ollier, ancien président de l’Assemblée nationale, compagnon de Michèle Alliot Marie, s’inquiète de l’endroit où l’on peut trouver des petites cuillères à piocher les crevettes cernées de fromage frais dans les verrines. En ces lieux où il convient d’être poli, personne ne lui dit : « En Tunisie ! ».

Vous le saviez que, 48 ans après le rétablissement des relations diplomatiques de la France avec la Chine par la volonté du général de Gaulle, Hollande a prononcé à l’ONU (ce « machin ») un discours d’où il ressort qu’il est temps de taper sur la g… de quelques pays qui commencent à nous chauffer les oreilles ?

Jean-Marc Sylvestre, chroniqueur économique qui prévoit chaque jour depuis des lustres sans se tromper ce qui est arrivé hier s’active à emplir son assiette à l’un des buffets, tout en soutenant une conversation animée avec des amis (qui lui ont demandé d’évaluer l’incidence du coût de la réception sur l’insolent taux de croissance chinois ?).

Vous saviez que le « Free Tibet » revendiqué par le dalaï lama est grand comme 5 fois la France et recèle les principales ressources en eau et minerais de la Chine ? On vous a dit que le Tibet était chinois avant que la Provence soit devenue terre française (en 1481), ou la Bretagne (1532), la Corse (1768), le Comté de Nice (1860) ? Vous comprenez, vous, pourquoi la région du Tibet qui occupe tout un flanc de la Chine devrait être indépendante mais pas la Nouvelle Calédonie, archipel français situé à 17 000 KM de l’Hexagone ?

Vous le saviez que, chaque fois que possible, les USA installent une base militaire aux alentours de la Russie et de la Chine ? Et que « Le toit du monde » serait un endroit idéal ?

Jack Lang est arrivé, taillé comme un jeune homme maigre, la tignasse d’une noirceur (naturelle, s’pas ?) de jais malgré ses 73 ans qu’il vient de fêter quelques jours avant. Il serre des mains, penché en avant dans des amorces de courbettes, il rit de toutes ses dents (naturelles). Il existe encore, quoi.

Vous le saviez, vous, qu’il y a trop de milliardaires en Chine et trop de milliardaires russes hors de la Russie (Côte d’Azur, Monaco…) ? Qu’il y a moins de pauvres en Chine qu’hier et toujours plus en Russie et en France ?

Vous le saviez, vous, que chaque fois qu’un journaliste chinois (même indépendant) parle, c’est de la propagande et que David Pujadas fait de l’info sur France 2 ?

Vous le savez, vous, comment s’appelle le premier ministre d’un pays d’un milliard trois cent millions d’habitants et qui compte autant d’étudiants que le canada compte d’habitants ?

Manuel Valls arrive, entouré de proches et d’une escouade de journalistes. Un accompagnateur chinois lui fait traverser les salons et ils s’arrêtent tout au fond, presque dos au mur. Valls a oublié d’enlever le manche à balai cousu dans le dos de sa veste. Raide, droit, mal à l’aise. Il regarde à droite et à gauche sans bouger la tête (une minerve ?). On lui colle un verre de champagne dans les mains. Il bavarde avec son Chinois, sans trop le regarder, figé (seules les mâchoires bougent, mais pas sûr).

Vous le saviez que selon le dernier rapport du « Department of Defense », les bases militaires étatsuniennes à l’étranger comptent 190 000 soldats et 115 000 employés civils répartis sur 909 implantations dans 46 pays différents sans compter les déploiements en Irak et en Afghanistan ? Et vous avez une idée du nombre de bases chinoises à l’étranger ? Combien ?

Vous savez pourquoi vous avez peur des Chinois ?

Vous savez pourquoi les hommes politiques français, tout au moins en privé, ne partagent pas le quasi-racisme anti-chinois de nos médias ?

Passe Elisabeth Guigou dans un imper bien fermé (il pleuviote à Paris), léger sourire aux lèvres : le prend pour lui qui veut.

Vous savez, vous, pourquoi LGS vous donne tant de choses à lire sur le monde, hormis sur le pays qui en sera demain (dans 20 ans ?) la première puissance ? C’est un mystère.

Enfin Jean-Marc Ayrault vint, discours en main et charisme au vestiaire. Une estrade, un micro. La foule s’agglutine, délaissant un instant les buffets sans cesse réapprovisionnés de délicieuse cuisine chinoise. Le chef d’état major des armées, l’amiral Edouard Guillaud est attentif.

Notre premier ministre se félicite des « années linguistiques croisées, qui ont célébré en 2011 et 2012 l’essor de l’apprentissage du français en Chine et du chinois en France » et qui sont « un exemple de ce qu’il faut faire ». Bien, ça ne mange pas de pain. La France et la Chine doivent aussi « nourrir et faire prospérer le partenariat global stratégique forgé il y quinze ans et ouvrir de nouveaux secteurs de coopération. Les deux pays mènent déjà une coopération fructueuse en matière d’aéronautique et d’énergie nucléaire civile », mais attention à la réciprocité dans les échanges, etc. Applaudissements.

L’ambassadeur de Chine, Kong Quan, se doit alors d’exprimer aussi sa satisfaction car « les relations sino-françaises sont remarquables de par leur caractère stratégique et global et elles constituent un modèle de coopération internationale ». Les Droits de l’homme ? « Une démocratie davantage élargie et valorisée, préservera la cohésion, la dignité et l’autorité des lois et garantira la justice sociale ». Devant un premier ministre français chargé d’appliquer un plan de rigueur, il parle de garantir au peuple chinois « une meilleure vie par la réalisation de nouveaux progrès dans l’éducation, les soins médicaux, la retraite et le logement qui touchent la vie quotidienne ». Et il évoque au passage « les principes de respect mutuel, de traitement d’égal à égal, de bénéfices réciproques et de coopération gagnant-gagnant ». Applaudissements.

Respect mutuel, ça signifie que les vociférations de RSF, de nos médias et de quelques politiciens autour de la flamme olympique en 2008 ne sont pas tout à fait oubliées et que les tergiversations de Sarkozy qui hésita alors à assister à la cérémonie d’ouverture de JO. à Pékin gagneraient à rester dans le passé.

Toujours du monde autour des buffets. On ne sert plus de champagne, mais du vin français et des jus de fruits. Excellent, le vin (ils n’ont pas acheté des vignobles bordelais, les Chinois ? Si !).

Vous savez que si LGS se met à mieux vous informer sur la vie d’un cinquième de la population mondiale, sans pour autant préconiser de copier les systèmes politique, économique, médiatique, social, syndical, judiciaire de la Chine, les administrateurs de ce site vont néanmoins se voir coller l’étiquette de jaunes-bruns ou rouges-jaunes ? Tiens, ça changerait un peu.

« Que faire ? » demandait Lénine dans le titre d’un de ses livres, sans pour autant dévoiler le fond d’une pensée qui éclairerait notre chemin d’aujourd’hui : insondable, il était, avec ses yeux bridés de descendant de Mongols.

Le Grand Soir.

Une fausse note dans cette soirée si bien organisée ? Un grand type jovial prenant dans ses bras un autre type ravi pour une embrassade peu protocolaire. Et vas-y que je te tapote le dos. C’était la rencontre de l’ambassadeur de Cuba et du Grand Soir. Enfin, on a échappé à deux pas de salsa.


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Wolfgang Sofsky

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