Continuer avec Macron, c’est en réalité, sous les discours pseudo-patriotiques du chef de l’Etat et le saupoudrage “social” paternaliste de Jean Castex, opter pour l’extinction programmée d’une France indépendante et tant soit peu sociale. Chaque contre-réforme annoncée signe la mise en extinction d’un acquis du CNR, d’une partie du produire en France, d’un service public, d’un pan nouveau de la souveraineté nationale, d’une liberté démocratique durement conquise ; sans parler de l’officialisation galopante du tout-anglais à l’Université, du démantèlement des communes au nom des « euro-métropoles » et du démontage de la République une et indivisible au nom du « pacte girondin » et des euro-régions. Au rythme infernal où va Macron, après Sarkozy, Hollande et Raffarin, la « France » ne sera bientôt plus qu’un « couteau sans manche dont on a jeté la lame » à l’intérieur d’une « construction » euro-atlantique elle-même en crise dont les membres ne s’accordent que pour financer l’OTAN, maintenir l’euro-austérité, multiplier les emprunts non remboursables aux marchés financiers, aggraver la tutelle continentale de Berlin et la supervision de Washington, adouber des gouvernements cléricaux et nostalgiques du fascisme (pays baltes, Hongrie, Pologne, Ukraine...) et criminaliser les symboles communistes sur tout le continent (voir la résolution du parlement européen qui ose mettre sur le même plan le IIIème Reich et son principal vainqueur militaire, l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques...).
Quant à la prétendue « alternative » que prétend porter le RN, non seulement elle menace lourdement l’unité du monde du travail, la paix civile et la démocratie, mais elle ne nous tirerait même pas des griffes de l’OTAN belliciste, de l’euro austéritaire et de l’UE sous tutelle allemande, la pseudo-souverainiste Le Pen ayant déjà « mangé son chapeau » sur la question du Frexit entre les deux tours de la dernière présidentielle. Il n’en reste pas moins que, dans l’actuelle ambiance d’explosion de la misère, des licenciements et de désespoir civique, de fascisation galopante d’une partie de la police (et de l’armée ?), de montée du racisme et des fausses réponses communautaristes qui lui sont apportées, de discours quasi putschiste de certains cadres de l’appareil répressif, il est de moins en moins niable que l’euro-fédéralisme macroniste et la xénophobie lepéniste forment les feux faces d’une même politique capitaliste et impérialiste : celle d’une oligarchie prête à effacer et/ou à déshonorer la France (via l’Europe fédérale ou par la xénophobie f’Etat), voire à détruire la démocratie pour inscrire solidement les super-nantis du CAC-40 dans la course mondiale au profit maximal. Avec à l’arrière-plan, le repartage mondial des zones d’influences, alors que la crise du capitalisme s’aiguise et que le bloc euro-atlantique « cherche la bagarre » avec la Chine, la Russie, l’Iran et les pays progressistes de l’Amérique latine, Cuba et Venezuela en tête.
Dans ces conditions, comment croire que l’« union de la gauche » que ressuscitent diverses initiatives rivales, parallèles ou convergentes, puisse apporter une alternative sérieuse, susceptible à la fois d’être approuvée par le monde du travail écœuré par quarante ans de trahisons ? Car ni l’union des euro-gauches chère au PCF, incurablement arrimé au PS maastrichtien, au Parti de la Gauche Européenne (PGE) et au mensonge de l’« Europe sociale », ni les « CNNR » et autres euro-alternatives mises en place par les europhiles Manon Aubry, Olivier Besancenot, François Ruffin (pressé de succéder à Jean-Luc Mélenchon dans la course présidentielle ?), etc., n’assument clairement la rupture avec l’UE, l’euro et l’OTAN que portaient en filigranes, notamment dans la classe ouvrière et la jeunesse, le NON de classe à Maastricht de 1992 (49% des voix) et le NON populaire victorieux et aussitôt trahi à la constitution européenne de 2005. Quant à la France insoumise officielle, force est de constater que pour l’heure, sous la pression des Clémentine Autain, Ruffin et autres Manon Aubry, sa position sur le Frexit est sensiblement en retrait sur celle, déjà timorée, qu’affichait JLM en 2017 (« l’UE, on la change ou on la quitte »).
Comment croire davantage à la prétendue « union des souverainistes des deux rives » que prônent, à des degrés divers et chacun à son avantage, Nicolas Dupont-Aignan, « premier-ministrable » de Mme Le Pen en 2017, Florian Philippot, son ex-bras droit, divers courants de l’UPR et aussi – hélas – certaines personnalités issues de la FI ou de la gauche anti-Maastricht ? Dans les rapports de forces actuels, comment ce regroupement dénué de clarté sur l’antifascisme, sur le Frexit lui-même (Dupont-Aignan est contre...), et bien entendu, sur l’anticapitalisme et l’anti-impérialisme, pourrait-il finir autrement qu’en force d’appoint objective au RN ? Symétriquement, l’euro-gauche nous refera sûrement le coup d’appeler « à utiliser le bulletin Macron » au second tour de la présidentielle pour « barrer la route au fascisme ». Oubliant au passage, pour des motifs électoralistes, les militants tués ou éborgnés par les « forces de l’ordre » à l’époque où les « républicains » Valls ou Castaner dirigeaient la répression à l’encontre des Gilets jaunes, des « zadistes » et des manifs syndicales ?
Certes, il reste le point d’appui majeur des luttes sociales et syndicales à peine ralenties par le confinement, alors que les colères virent au rouge dans les services publics strangulés et les industries à la fois bradées et gavées d’argent public ; il y aussi le ras-le-bol des couches moyennes inquiètes du déclassement de la France (crûment révélé par la crise sanitaire) et de la précarisation galopante des jeunes diplômées. Mais là encore, comment ne pas observer que les confédérations syndicales ménagent toutes la sacro-sainte « construction » européenne, affiliées ou affiliantes qu’elles sont, toutes ou presque, à la C.E.S., cette courroie de transmission de Bruxelles dont la mission de classe est de substituer le prétendu « dialogue social » (sur des contre-réformes !) à l’« archaïque » – mais gagnante ! – lutte des classes chère aux anciens dirigeants confédéraux de la CGT et à l’actuelle Fédération Syndicale Mondiale. On a eu ainsi la stupéfaction, en mai 2020, de voir Philippe Martinez cosigner avec Laurent Berger (CFDT), Yves Verrier (FO) et la DGB (la confédération allemande unique) un texte appelant tous les syndicats et gouvernants d’Europe à soutenir l’appel commun de Merkel et de Macron à souscrire un emprunt paneuropéen auprès des marchés financiers : sa caractéristique serait pourtant de court-circuiter les Etats, de mettre en concurrence les régions de France et d’ailleurs et de soumettre les futures « aides » de l’UE à l’adoption de nouvelles contre-réformes...
Ce tableau n’est pas rassurant tant il est clair que le Parti Maastrichtien Unique étend désormais son réseau à de nouveaux secteurs de la société française fragmentée et en plein désarroi. Mais si la grande bourgeoisie a ainsi besoin de rallier tous ceux qui veulent composer avec l’UE et/ou avec le capitalisme, voire fermer les yeux sur la fascisation de moins en moins rampante de l’Europe et de notre pays, c’est que les dominants sont eux-mêmes effarés par la crise explosive du consentement populaire. Cette crise n’a fait que s’aggraver depuis, notamment, que notre peuple a voté NON à l’euro-constitution et que, toutes ensemble, la droite pseudo-gaulliste, la gauche ex-socialiste, la fausse « extrême gauche » (qui confond patriotisme populaire et racisme), les euro-« écologistes » et les directions eurocommunistes successives du PCF ont tacitement décidé de ménager l’UE, y compris sous les slogans mensongers et inconsistants de, au choix, « l’Europe sociale », « une autre Europe » ou encore « l’Europe des patries ». Et bien entendu, pour corser le mensonge, est brandi le slogan de « l’Europe de la paix » alors que, pressés par Donald Trump et par Joe Biden, tous les États européens (Allemagne en tête) abondent leurs budgets militaires pour faire face à l’« adversaire stratégique » chinois ou pour prendre la revanche capitaliste attendue depuis si longtemps contre le pays de Stalingrad ; et dire que c’est désormais à La Rochelle que débarquent les soldats étasuniens qui viennent se préparer à une éventuelle guerre contre le peuple russe...
Par élimination, tout esprit rationnel saisira donc qu’il ne reste qu’une issue possible pour tenter d’éviter le faux « duel » et vrai duo Macron/Le Pen, pour conjurer les phénomènes concomitants de l’euro-fascisation et de l’euro-dissolution de la France, pour stopper les contre-réformes, pour faire revivre l’idéal d’une République sociale, souveraine et fraternelle et pour rouvrir à notre classe travailleuse toujours frondeuse la voie d’une autre société débarrassée de l’exploitation capitaliste. Cette voie est à la fois celle du Frexit progressiste – de la sortie par la porte de gauche (nationalisations démocratiques, reconstruction du produire en France éco-compatible, nouvelle constitution démocratique, réduction drastique des inégalités, défense du droit de tous les peuples – y compris ceux qu’opprime la « Françafrique » – à disposer d’eux-mêmes) et celle d’une Convergence Nationale des Résistances. Pour cela, unissons le drapeau rouge de la Commune au drapeau tricolore de 1789, l’Internationale à la Marseillaise, construisons « en bas » un Front antifasciste, patriotique, populaire et écologiste : c’est indispensable pour chasser Macron, rompre avec cette UE supranationale pré-totalitaire (qui se définit comme une « économie de marché ouverte sur le monde où la concurrence est libre et non faussée »...), sortir de l’OTAN qui nous met à la remorque de l’Oncle Sam, appeler à la lutte les peuples frères d’Europe et d’ailleurs, et affronter l’oligarchie capitaliste – et en priorité l’oligarchie « française » qui sacrifie notre pays à la mondialisation de ses profits !
C’est dans cet esprit que nous, militants franchement communistes, travaillons avec des forces communistes et franchement insoumises, des gaullistes de progrès, des artistes révolutionnaires, des syndicalistes de combat et des gilets jaunes, pour construire, dans l’esprit du CNR et en traitant les questions d’aujourd’hui, une Convergence Nationale des Résistances. C’est dans cet esprit aussi que nous appelons les Gilets jaunes et les syndicalistes combatifs de la grande CGT, de la FSU, de FO aussi, à construire le tous ensemble en même temps indispensable pour gagner les bras de fer sociaux et politiques qui s’annoncent.
Et cela ne nous empêche nullement de militer parallèlement pour un parti communiste de combat indispensable à la classe laborieuse pour « remettre le monde du travail au centre de la vie nationale ». Ce chemin est sans cesse obstrué par toutes sortes d’imposteurs qui, pour sauver le capital, cultivent l’anticommunisme et ne cessent d’opposer le drapeau du prolétariat au drapeau de l’indépendance nationale. Mais d’une part, cette voie qui réactualise le Front populaire et la Résistance est la seule à pouvoir unir cette majorité de Français qui votèrent NON en 2005 et qui, depuis lors, sont orphelins de perspective franchement républicaine et progressiste. Et surtout, nous venons de le démontrer par élimination, ce chemin est le seul possible : si nous tardons trop à le prendre résolument ensemble, alors le seul « choix » offert au peuple de France sera celui de l’euro-dislocation et/ou celui de la fascisation.
Vous qui avez compris cela, rapprochez-vous de la Convergence Nationale des Résistances lancée par l’appel du 29 mai 2020, ralliez le syndicalisme de classe et, si vous êtes communistes, renforcez le Pôle de Renaissance Communiste en France.
Georges Gastaud et Fadi Kassem sont secrétaire national et secrétaire national adjoint du PRCF
https://www.initiative-communiste.fr/articles/prcf/la-seule-alternative-a-macron-et-au-r-n-sappelle-frexit-progressiste-par-georges-gastaud-et-fadi-kassem/