A Genève, nous avions eu droit à deux journées entières consacrées à la crise financière. De nombreuses personnalités européennes ont fait aux organisateurs (Attac, Les Amis suisses du Monde Diplômatique), l’honneur d’accepter cette invitation.
L’exposé de Frédéric Lordon semble donner les bonnes clefs pour vérouiller la spéculation, en quatre grandes mesures.
(voir son site et son livre)
Ma contribution ici se limite à ce que j’apprends et connais sur place, dans mon lieu d’études et de vie de cette année. Mais je pense que le modèle financier et économique des pays d’Europe se ressemblent du fait qu’il découle d’un même marché et d’une même culture dominés jusque là , par le dollar et les guerres d’occupation très intéressées.
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Mon intervention
au débats de Lucy Komisar :
Il apparait clairement, à travers de nombreuses lectures et comme soulevé par les précédents orateurs, notamment par Frédéric Lordon, que le coeur du problème c’est toute de même la "Titrisation", celle-ci responsable de la profonde contamination mondiale d’illiquidité.
Pourquoi nos autorités ne font elles rien pour désigner les vrais coupables ?
Greenspan, gouverneur de la Réserve Fédérale des USA pendant 20 ans n’avait fait que fermer les yeux sur cette pratique. Le collègue de l’ex-conseiller Nixon, Paulson, avec Rubin, a manié abondamment la titrisation qu’il a fait vendre au monde entier comme des valeurs sur le marché boursier au travers de ses banques New Yorkaises. L’escroquerie était sciemment commise. Donc les autorités américaines connaissent les coupables, pourquoi font elles semblant de les chercher ?
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Quelle proposition d’action en commun ? (C’était l’invite à la synthèse de l’organisateur du cycle de conférences de ces deux jours).
Voici mon intervention.
A l’instar de la très libérale Grande Bretagne et de l’Allemagne qui ont nationalisé en partie ou en totalité leurs plus grandes banques, du moins dans une certaine durée, pour se rembourser du prêt public avec un certain taux d’intérêt et une participation aux plus-values comme actionnaires institutionnels, la Suisse aurait dû faire de même, dans le devoir de responsabilité de prendre le contrôle total d’UBS.
En tout cas, pas de renflouement sans contre-partie ni sans contrôles et nouvelles mesures.
Dans une ultime alternative à l’éventuel refus du peuple de nationaliser UBS, l’idée de créer un nouveau statut pour UBS ne me semble pas utopique.
Pour empêcher UBS de nuire à l’économie réelle, dans quelle mesure la volonté politique des dirigeants irait à donner législation et statut spécial à UBS d’exister comme banque internationale privée d’affaires et d’investissements aux vocations extérieures au pays. (En quelque sorte, des pirates libres de sévir ailleurs sans aucun soutien ni juridique ni droit au sauvetage de l’état).
Ou alors, le compromis suivant :
Un statut et une licence de Banques spécialisée en affaires dans lesquels, au moins, les conditions suivantes doivent y figurer.
* Son champ d’activités essentiellement extérieur à la Suisse.
* Ses relations avec les banques cantonales et autres banques coopératives et privées de dimension nationale doivent être limitées et ciconsrites requérant une autorisation préalable à chacun de ses concours.
* Lui interdire de prendre des participations ou des options en titre, dans des entreprises et sociétés suisses, installées sur sol suisse.
* Lui interdire toute relation directe avec l’économie réelle intérieure, contrôler les mandats.
* L’obliger à traiter au cas par cas (perspective d’OPA amicales ou inamicales ou offres de fonds) avec les banques cantonales sous contrôle de l’état.
* Lui interdire les activités généralistes.
* L’obliger à maintenir un ensemble équilibré, par exemple 30% de fonds propre permanent, et 30% du volume en actifs courants et à court terme, et un maximum de 20% en actifs à long terme, entre 30 à 40% de liquidités.
* L’obliger à maintenir son panier en monnaies et devises étrangères à hauteur de 30%. (ce n’est pas trop demander ni contradictoire puisqu’elle est une banque d’affaires. Autrement il faut lui retirer la licence).
Une autre proposition qui peut être faite à nos gouvernements respectifs. Du coup, on passerait en revue aussi le statut et les pratiques des caisses de crédit(pour la France par exemple) car certaines de ces caisses, d’après l’histoire des établissements financiers depuis 1888, elles sont restées essentiellement des caisses de crédits, les unes mutuelles, d’autres corporatistes et d’investissements ciblés mais elles sont régionales couvrant inégalement le territoire français, sans réel statut de banque d’où leur non connection avec les banques nationales. Tout en opérant à l’étranger, elles échappent aux règles de procédure internes et externes, elles échappent à la surveillance du clearing de banques.
Qui dit non loi et non règle dit discrétionnaire, dit paradis. Il n’y a pas toujours besoin d’un secret bancaire pour frauder le fisc, pour évader des capitaux.
Si le maillage est surveillé et le trafic rendu traçable, il sera possible de donner forme et contenu à l’instrument de régulation. C’est du moins ma conviction.
Lucy Komisar (http://komisarscoop.com) propose de
rendre illégales les ventes à découvert pour éviter la spéculation parce que invisible.
Ma proposition ci-dessous est encore confuse, il reste encore à creuser l’idée.
Avec autant de milliards (68mds, vote du Conseil Fédéral, approbation cette semaine du Conseil des Etats) accordées à UBS, la création d’une banque de financement à vocation industrielle et domestique est largement possible, entre le constat de ce qui reste du fonds propre actuel (avoué d’UBS) et la projection de centaines de milliards, en dotation en cas de besoin, nos autorités fédérales devraient préférer fonder entièrement une nouvelle banque. Ce qui ne manquerait pas d’attraits pour les investisseurs et déposants qui ont déserté et qui déserteront encore UBS et Crédit Suisse, recherchant désespérément un refuge sûr.
Une telle banque serait même utile, dans des périodes de crise comme celle-ci, pour garantir le financement de grands projets d’infra-structure que nos pays (émergents ou non) ont constamment besoin.
Alors ma dernière interrogation est la suivante : Si nos dirigeants observaient une certaine attente ou s’ils refusaient le moindre renflouement, que se passerait-il ?
Certains prédisent l’effondrement total de l’économie réelle, l’évaporation complète de nos épargnes ; d’autres pensent que les pertes doivent bien pouvoir se retrouver quelque part. Aux auteurs de la titrisation et à Wall Street d’aller les rechercher.
A mon avis, les renflouements par les pouvoirs publics n’y feront plus rien, Les places boursières sont devenues des lieux dangereux. On devraient les fermer.
Il semble que les actionnaires, heureux et malheureux, soudain réveillés dans leur sommeil, ont ouvert grand leurs yeux et se sont rendus compte que rien ne serait réparé tant que les tricheurs restent en place, ceux qui ont fabriqué le système et malmené le marché boursier.
Comme pour la peur du noir (obscurité), demeurer immobile jusqu’à ce qu’un rayon de lumière filtre ?
Plus bas, un autre éclairage de William Engdahl
http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=10558