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La propagande anti-syrienne n’a d’égale que le silence sur les révoltes populaires au Yémen, à Bahreïn, en Arabie Saoudite, au Maroc...

L’impérialisme est l’ennemi des peuples : le cas de la Syrie

L’impérialisme américain et son caniche européen cherchent par tous les moyens à déstabiliser la Syrie pour mieux l’asservir. Après la Libye, c’est le tour de la Syrie. L’impérialisme avait déjà , dans un passé récent, détruit la Yougoslavie, envahi l’Afghanistan, ravagé l’Irak et ruiné la Côte d’Ivoire. Destructions, massacres, génocides et violence extrême sont ses caractéristiques essentielles. Poussé par la recherche effrénée du profit, l’impérialisme en tant qu’instrument du pouvoir de la bourgeoisie, tente de soumettre tous les peuples de la planète. Esclavage, colonialisme, néocolonialisme etc., son histoire n’est, en dernière analyse, que pillage, par la violence et la cruauté, des richesses des peuples. Vouloir installer en Syrie par la force un gouvernement à sa botte, l’impérialisme ne fait que perpétuer cette logique hégémonique et despotique. L’impérialisme est toujours et partout l’ennemi des peuples.

Dès ses origines, le parti Baath éprouvait une aversion profonde pour le marxisme et la lutte des classes qui, selon ses fondateurs, étaient étrangers aux valeurs de la nation arabe. Le communisme à leurs yeux était par essence internationaliste, incompatible avec l’union des peuples arabes. Leur foi mythique dans cette « nation arabe » et dans « le socialisme arabe » a fait du Baath, en dernière analyse, un parti plutôt nationaliste au service des intérêts de la bourgeoisie et de la classe moyenne syrienne.

En 1963, lors du sixième Congrès National, l’aile gauche du parti avait adopté des résolutions réellement progressistes. Il faut préciser que les militants qui animent cette tendance radicale du Baath ont des origines sociales populaires contrairement à la vieille garde dont les dirigeants appartiennent à la bourgeoisie citadine. La lutte des classes s’est en quelque sorte introduite, au grand dam des conservateurs, à l’intérieur même du parti !

Pour contrecarrer ces résolutions et renverser cette tendance, Michel Aflak, Salah Bitar et leurs fidèles ont pris la décision, lourde de conséquences, de recourir à l’armée. En militarisant le parti, les fondateurs ont de fait éliminé toute possibilité de régler les conflits et les divergences d’opinions par le débat et les urnes. En Irak comme en Syrie, deux pays où le Baath est arrivé au pouvoir, le parti est devenu un repère d’officiers assoiffés de pouvoir. « La renaissance arabe », « L’unité arabe » et « le socialisme arabe » ont été relégués aux calendes grecques. Leur seul et unique objectif est de se maintenir, vaille que vaille, au pouvoir.

La répression sous toutes ses formes est devenue pour ces militaires le moyen le plus efficace pour taire toute contestation et éliminer toute opposition. Les services de renseignements, les redoutables « Moukhabarat » pourchassent, torturent et éliminent impitoyablement les opposants. Le général Hafez Al Assad a pris le contrôle de la Syrie en 1970. Trente ans plus tard, il livre à son fils Bachar une Syrie « nettoyée » de toute opposition. Même les fondateurs historiques du Baath n’ont pas échappé à la répression. Michel Aflak et Salah Bitar ont été condamnés à mort par contumace avant d’être graciés. Mais Salah Bitar a été assassiné rue Hoche à paris en 1980.

Aujourd’hui encore, l’état d’urgence est toujours en vigueur et l’article 8 de la constitution donne au Baath le statut de dirigeant exclusif de l’État et de la société (1).

Mais le Baath est le produit des rapports sociaux de la société syrienne. Il appartient au peuple syrien et à lui seul, en fonction de ces mêmes rapports sociaux, de le garder ou au contraire de le renverser.

Les soulèvements populaires en Tunisie, en Égypte, au Yémen, à Bahreïn etc. ont suscité d’énormes espoirs de changement dans les masses arabes opprimées y compris en Syrie.

Mais l’impérialisme ne peut supporter cette marche autonome des peuples vers la démocratie et le progrès. Les maintenir dans la soumission et la misère qui bloquent leur vitalité et leur émancipation reste pour lui le meilleur moyen de les dominer pour mieux les exploiter.

L’impérialisme s’immisce directement dans les affaires des peuples en leur refusant le droit de prendre eux-mêmes en charge leur propre destin. C’est ainsi qu’il a écrasé dans le sang, par l’intermédiaire de l’Arabie Saoudite, la révolution du peuple de Bahreïn pour maintenir au pouvoir la dynastie des Al khalifa, son fidèle serviteur local. C’est toujours lui qui a financé, armé et porté au pouvoir le Conseil National de Transition (CNT) en Libye au prix de milliers de morts et de destruction de tout un pays. Et c’est encore l’impérialisme qui a manoeuvré au Yémen, par le biais du Conseil de Coopération du Golfe, pour confisquer la révolution au peuple en demandant à Ali Abdallah Saleh de mettre le pouvoir entre des mains sûres avant de s’exiler en Arabie Saoudite ou aux États-Unis. L’impérialisme est la négation du Droit des nations à disposer d’elles-mêmes.

L’hystérique propagande menée contre la Syrie n’a d’égale que le silence sur les révoltes réellement populaires au Yémen, à Bahreïn, en Arabie Saoudite ou encore au Maroc. Combien de citoyens américains et européens savent que le peuple marocain par exemple manifeste massivement et pacifiquement tous les dimanches depuis le 20 février 2011 ? Cette intense propagande dans l’occident impérialiste rappelle étrangement celle qui a précédé l’invasion de l’Irak et de la Libye.

L’impérialisme américain avec l’aide notamment de la Grande Bretagne, de la France, de la Turquie, de l’Arabie Saoudite et du Qatar se prépare activement à intervenir militairement en Syrie pour installer un pouvoir qui servira ses intérêts comme en Afghanistan, en Irak ou encore en Libye. Déjà l’Armée Libre Syrienne (ALS), pure créature de la Turquie, revendique un certain nombre d’actions sanglantes contre l’armée régulière syrienne. L’opposition au régime de Bachar Al Assad, dominée par les Frères Musulmans est de plus en plus violente. Il s’agit d’affaiblir la Syrie avant de l’envahir comme ce fut le cas en Libye.

Dans le monde arabe, l’impérialisme brise l’élan des soulèvements populaires pacifiques et le remplace par la violence d’une opposition qui lui est soumise. Il écrase les aspirations et les luttes des peuples pour leur imposer des régimes qui lui sont totalement acquis. L’exemple de la Libye est édifiant à cet égard. Aujourd’hui, il tente d’envahir la Syrie pour servir ses intérêts et tenir son peuple dans l’oppression et la servitude.

Un régime installé à Damas par la volonté des États-Unis et de leurs satellites est la pire chose qui puisse arriver au peuple syrien, notamment pour ses classes laborieuses. Il suffit de voir dans quelle situation tragique se trouve aujourd’hui la population irakienne sans eau ni électricité pour s’en convaincre. Avant leur départ tout relatif, les américains ont laissé derrière eux, en plus d’un pouvoir corrompu et à leur solde, un pays divisé, ravagé, martyrisé et meurtri : plus d’un million de victimes et des centaines de milliers de blessés (2). Ce crime contre l’humanité « donne la mesure de la cruauté dont le capitalisme et la bourgeoisie qui le porte sont capables » (3). Et on va taire par pudeur les pratiques barbares des soldats américains sur des prisonniers irakiens sans défense notamment dans la tristement célèbre prison d’Abou Ghraib. La propagande la plus odieuse et les mensonges les plus grotesques ont été utilisés pour justifier l’invasion de l’Irak. La bourgeoisie, on le voit, ne recule devant rien pour assouvir sa soif du pétrole irakien.

Ce qui est vrai de l’Irak ne l’est pas moins de la Libye où la population survit dans des conditions dramatiques après les destructions massives de l’OTAN, bras armé de l’impérialisme. Pendant ce temps-là , les grandes compagnies pétrolières comme ENI, Total, BP, ExxonMobil, Shell etc., continuent, tels des vampires, à pomper allègrement le pétrole libyen !

Par ailleurs, l’Alliance atlantique refuse toujours de fournir le moindre chiffre sur le nombre de civils innocents tués par ses soldats. Ce silence en dit long sur les massacres perpétrés par l’OTAN et le CNT contre le peuple libyen. Rappelons tout de même que ces crimes ont été commis sous la bannière de la protection des civils et de l’aide humanitaire comme le précise la résolution 1973 de l’ONU : « Le Conseil de sécurité(...) se déclarant résolu à assurer la protection des civils et des secteurs où vivent des civils, et à assurer l’acheminement sans obstacle ni contretemps de l’aide humanitaire » !

La victoire de l’impérialisme en Syrie, est la défaite non seulement du peuple syrien mais de tous les peuples.

Mais ces guerres que les bourgeoisies américaines et européennes imposent aux peuples à travers le monde ne sont, en dernière analyse, que le prolongement des guerres économiques et sociales qu’elles livrent dans leur propre pays aux travailleurs et aux salariés en général. Les plans de rigueur et d’austérité qui se succèdent aux États-Unis et en Europe constituent une véritable guerre que la bourgeoisie livre aux classes populaires. « La guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens » disait Clausewitz. La guerre est directement liée à la lutte des classes.

Guerres de classes à l’intérieur, guerres impérialistes à l’extérieur, voilà ce que l’histoire nous enseigne sur cette classe sociale, la bourgeoisie, dont la seule et unique raison d’être est la maximisation du profit par tous les moyens y compris par le plus abject, la guerre sous toutes ses formes. D’une manière générale, les guerres intérieures et extérieures sont intimement liées à l’exploitation des uns par les autres. « Abolissez l’exploitation de l’homme par l’homme, et vous abolirez l’exploitation d’une nation par une autre nation » écrivaient Marx et Engels dans le Manifeste (3).

Mohamed Belaali

(1) « The leading party in the society and the state is the Socialist Arab Ba’ath Party. It leads a patriotic and progressive front seeking to unify the resources of the people’s masses and place them at the service of the Arab nation’s goals ».
http://www.mideastinfo.com/documents/Syria_Constitution.htm

(2) http://www.justforeignpolicy.org/iraq/iraqdeaths_fr.html

(3) Voir, entre autres, « Les ravages de la guerre impérialiste en Irak »
http://belaali.over-blog.com/article-les-ravages-de-la-guerre-imperialiste-en-irak-48981793.html

(4) K. Marx et F. Engels dans le « Manifeste du parti communiste », page 56. Éditions de Pékin.

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COMMENTAIRES  

05/01/2012 18:13 par Anonyme

Merci Mohamed Belaali pour ce portrait sur les exactions de la bourgeoisie impérialiste internationale.

Que devrons-nous faire pour arrêter tout cela ? Le temps n’est-il pas arrivé où ces tueurs par gouvernements interposés doivent cesser de se sentir en sécurité dans leurs riches bunkers ?

Michel Rolland

05/01/2012 22:17 par Geb

Que devrons-nous faire pour arrêter tout cela ?

Peut-être commencer par s’occuper des "tueurs bien de chez nous" avant de donner des leçons aux autres pour qu’ils s’occupent des leurs.

On peut ne pas approuver et même condamner, (à juste raison à mon avis), le régime syrien, comme on a pu le faire avec celui de la Libye, ou de l’Irak, mais attendre de ceux qui nous oppriment qu’ils aillent "libérer" les autres, et même le leur demander, (Comme l’a fait la totalité de la classe politique française), est un crime majeur qui je l’espère ne sera pas pardonné à ceux à ceux qui l’ont soutenu.

Geb.

06/01/2012 10:32 par Eléanor

Article pertinent et juste. Le silence sur les révoltes au Yémen, à Bahreïn, etc… est si je peux dire révoltant !
Cet été, j’ai participé à plusieurs reprises aux manifestations pacifiques au Maroc. Le Mouvement du 20 février appelle tous les dimanches, comme l’a rappelé l’auteur, le peuple marocain à descendre dans la rue mais les médias occidentaux ne soufflent mot sur ces révoltes.
Que faire ? Il faut partout lutter et dénoncer les massacres et la propagande impérialistes !
Heureusement qu’il existe encore quelques médias courageux (comme Le Grand Soir) pour informer les citoyens en publiant ce genre d’articles.

06/01/2012 15:32 par cassiopea

C’est terrible de se dire que l’on ne peut empêcher ce rouleau compresseur ’impérialiste vampirique de spolier, tuer, torturer, des populations qui n’aspirent en fait que de pouvoir vivre librement !
Les nombreuses manifestations partout dans le monde n’ont malheureusement pas empêcher l’administration Bush et son "caniche européen" d’attaquer l’Irak.
Sans ce cas, que vaut donc la voix du peuple ?

07/01/2012 11:31 par Karl

L’attentat d’hier qui a fait des dizaines de victimes en plein coeur de Damas montre à quel point l’impérialisme américain est déterminé à déstabiliser la Syrie afin d’y installer un gouvernement fantoche comme en Libye.
Aucune dénonciation de ces crimes dans les médias bourgeois occidentaux.

A bas les crimes et la propagande impérialistes.

07/01/2012 18:08 par le moine obscur

Je pense personnellement que ceux qui sont derrière ces guerres ou ces futures guerres n’ont d’humains que le nom. Comment lutte-t-on contre des monstres ? Des monstres qui ont de plus à leur disposition des centaines de milliers (dans certains cas des millions) de marcheurs au pas (alias les militaires et affidés) prêts à trucider sur commande. Sans doute n’y a t il pas d’espoir. Comment aussi soutenir ce dont on n’est même pas au courant comme les marches pacifiques au Maroc ?
Je le dis souvent à mon sens il n’y a que deux races humaines, les humains normaux capables d’émotions, de compassion, d’amour et de solidarité et l’élite vampirique qui semble se nourrir du sang, de la souffrances, de la mort voire de la vie des masses d’humains normaux. Certains se demandent qu’est-ce qu’ils veulent enfin ? Plus de pouvoir ? Mais pour quoi faire serait-on tenté de dire ?
Enfin je pense qu’il n’y a plus aucune trace de raison ni de bon sens chez ces gens. Peut-être qu’il faudrait effacer cette race humaine maudite (à laquelle appartient les gens de la haute finance, la plupart des politiciens et tous les assoiffés de pouvoir et affiliés) de la surface de la terre pour que les humains normaux puissent (au moins ça) essayer de vivre en paix. Car je le pense (sans doute ne suis-je qu’un doux rêveur) que nous avons les moyens de vivre en paix sur ce monde. Vivre en paix en coopérant, en échangeant et en nous respectant. Mais cela relève sans doute plus de l’utopie que d’autre chose, pauvres de nous !

07/01/2012 20:57 par Anonyme

Merci de vos « lumières » moine obscur !

Ce que vous dites de ces inhumains me fait penser à la conclusion du film de Simoneau, de Nuremberg à Nuremberg. Parlant des criminels nazis, un psychologue dit (en gros) : « Ce qu’il y a de commun entre tous ces gens est leur manque d’empathie ».

Si un nouveau Nuremberg devait revoir le jour, où se trouveraient les auteurs de ce tribunal, les États-Unis, l’Angleterre, la France et les pays de l’ex-URSS (en retenant surtout la Russie) : du côté de l’accusation... ou au banc des accusés ?

Michel Rolland

12/01/2012 08:06 par calame julia

le moine obscur,
si nous avons les moyens de vivre heureux sur notre terre où nous ne sommes que de passage ( il est parfois
bon de le rappeler) comment se fait-il que les organisations diplomatiques ne puissent résoudre certains
conflits ? Mohamed Belaali nous donne une partie de la réponse.
Sans doute avons-nous manqué de vigilance ; négligé de lire quelles conséquences pourraient découler
de décisions prises chez nous ?
Actuellement, même les esprits aguerris pour ne pas écrire très modérés ont du mal à se sentir en sécurité
et pour ceux qui pensent plus global qu’individuel c’est carrément la déprime.

09/03/2012 11:39 par hassinus

C’est bien, mais pas suffisant... On ne peut plus aujourd’hui différencier l’impérialisme du sionisme et donc parler de l’un sans parler de l’autre. Au Moyen Orient, ce qui est en jeu c’est la survie d’Israel cause pour laquelle l’Impérialisme redouble de férocité en se donnant pour but de détruire, semer la guerre civile et tuer sans limite et sans vergogne. L’impérialisme - domination et spoliation des peuples par tous les moyens, corruption, manipulation, guerre, est dirigé par descentres sionistes dont la théorie du "Peuple Elu" correspond à cet esprit de domination ( Nous peuple élu et tous les autres peuples y compris européens des riens du tout... Le Yemen et consort ne menacent pas aujourd’jui Israël n’empêche que lorsque les cas de la Syrie et de l’Iran seront réglés et à mon avis ils le seront ( l’impérialo-sionisme est comme bouledogue, il s’accroche aux mollets et ne lache plus...) ce sera leur tour, cela y compris l’Arabie Saoudite. C’est la fameuse stratégie des Horaces...

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