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L’avenir de l’Espagne passe par « Unidos Podemos »

« Les résultats ne sont pas satisfaisants, ils ne sont pas à la hauteur de ce que nous attendions (...) Ils ne sont pas bons ». Pablo Iglesias ne cache pas sa déception, entouré des principaux animateurs de « Unidos Podemos », tous visage grave. Aucune démagogie ; un constat lucide, honnête, et une confiance dans l’avenir.

Les meetings de l’UP ont drainé un public majoritairement jeune, des foules immenses, venues d’horizons multiples. L’avenir d’une Espagne plurinationale passe par cette « UP » si elle se prolonge, s’élargit, se construit politiquement sur la durée, si elle devient plus qu’un accord électoral.

Les deux partis du bipartisme néolibéral s’en sortent eux plutôt bien. Le PSOE (22,83% et 85 députés) perd cinq sièges mais reste stable en nombre de voix. Le PP se renforce et progresse par rapport à la consultation du 20 décembre 2015 (33,28%). Il gagne 14 sièges. PP et PSOE ont « récolté » les fruits pourris de la « stratégie de la peur », d’une monopolisation des médias, de l’intox exponentielle permanente sur le Venezuela notamment, sur l’alliance avec « les communistes », du matraquage sur le « retour des rouges ».

Pour les médias qui dépendent tous de grands groupes liés au PP ou au PSOE, la cause est entendue : l’accord avec Izquierda Unida et les communistes a plombé « Podemos » qui, sous sa seule bannière, obtint de meilleurs résultats le 20 décembre 2015. L’« UP », avec 21,26% et cinq millions de suffrages perd 1,2 millions de voix par rapport à la somme Podemos-IU du 20/12. Les perroquets médiatiques reprennent tous en chœur : l’alliance n a pas payé !! Il faut donc renoncer à la « confluencia » (convergence). Ils vont taper sur ce clou jusqu’à le tordre.

Pablo Iglesias fait face. « Nous continuerons à marcher ensemble ». Le jeune leader assume et revendique l’alliance avec IU (8 députés) comme « le bon chemin ». Il ne cache pas sa préoccupation devant le relatif affaiblissement de ce qu’il appelle le « bloc progressiste ». Nous l’avons déjà écrit : la montée de « Podemos », spectaculaire en deux ans seulement, ses velléités hégémoniques , ses « ambiguïtés calculées », ont partiellement, et c’est un paradoxe, « anesthésié » le vigoureux mouvement social (« mareas », marches de la dignité, plateforme contre les expulsions...), dans l’attente du dénouement électoral... Moins de rue et plus de bataille électorale, pour faire court. Cette conséquence négative est pointée du doigt par les dirigeants de l’UP. Ils appellent à « reprendre la rue ». Pas de changement sans coupler la mobilisation en bas et le combat en haut dans les institutions...

Pendant six mois, l’appel du Parti Populaire à « la grande coalition » contre-nature, l’alliance PP-PSOE, et l’accord du PSOE avec une partie de la droite (« Ciudadans », déguisée en centre-gauche), et refusant la main tendue de « Podemos », a plongé le pays dans « l’ingouvernabilité », provoquant la lassitude de nombreux électeurs. D’où la forte abstention. Les uns et les autres ont accusé « Podemos » de « bloquer » la situation par intérêt boutiquier. Pure calomnie. mais qui semble avoir marché...

La crise a plongé l’Espagne populaire dans des inégalités vertigineuses, dans une pauvreté et un chômage record, mais a enrichi les plus riches, une couche large de parasites, les banques, renflouées avec de l’argent public, la « caste » constituée de milliers de « rateros » (profiteurs) qui ont « mamado », se sont goinfrés. Corruption, clientélisme, austérité et pouvoir vont de pair. Dans des zones plutôt rurales, le néofranquisme enraciné, le poids archiconservateur de l’Eglise, rendent encore allergiques au « changement » (assimilé souvent à la Guerre) de nombreux Espagnols. Et puis le look de ces jeunes qui veulent gouverner autrement. Comment un chef de gouvernement pourrait-il porter « coleta » (queue de cheval) ! En Espagne, il n’y a pas eu rupture avec le franquisme ni de véritable défranquisation. Le franquisme politique, économique, sociologique s’est enkysté et à la fois recyclé. Il domine l’Ibex 35 (Cac 40). La « transition », en évacuant le contenu et les enjeux de classe, en imposant l’oubli et l’impunité négociés, en abandonnant la revendication républicaine, en inventant un récit consensuel, a permis à la monarchie (illégitime) d’assurer la continuité relookée d’un système dont chacun peut constater les dégâts, et la lente agonie.

L’avenir de l’Espagne passe par « Unidos Podemos », par la convergence entre les nouvelles forces politiques, la gauche « historique », les mouvements sociaux, les mobilisations autour des revendications environnementales, féministes, des services publics, par le combat anti-austéritaire, sur des positionnements clairs. L’affirmation « social démocrate » de Pablo Iglesias, les débats internes à « Podemos » et à IU, le bombardement ininterrompu contre l’UP, ont pu faire obstacle à une dynamique de victoire, qui reste à portée de la main.

Jean ORTIZ

»» http://www.humanite.fr/blogs/lavenir-de-lespagne-passe-par-unidos-podemos-610561
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