Edwy Plenel, c’est l’heure du peuple-classe !
http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article1311
Dans un article récent, fort intéressant au demeurant, le célèbre journaliste de Médiapart ignore le terme de peuple-classe fort différent de peuple. La différence n’est pas mince car dans le peuple il y a la classe dominante, la bourgeoisie, l’oligarchie au pouvoir.
L’heure du peuple, Edwy Plenel
http://www.mediapart.fr/journal/france/201010/lheure-du-peuple
La vérité impose de dire que la bourgeoisie n’étant pas dans la rue et qu’elle n’est pas plus "au travail tout en soutenant les grévistes et manifestants" (dans une démarche certes délégataire mais appréciable). Elle n’est et ne sera jamais une composante du peuple qui résiste. Pire c’est elle qui est la classe bénéficiaire des réformes de son valet Woerth. C’est elle qui fait écrire des articles à son profit contre la France émeutière dans Le Figaro comme dans Ouest France. Par contre, c’est l’ensemble des composantes du peuple-classe, travailleurs salariés du privé ou du public, travailleurs indépendants, jeunes, et même retraités qui vont subir cette réforme si elle passe. Mais ce n’est pas toute la société qui gronde. Une minorité de grands possédants et de grands dirigeants fulmine contre la "démocratie de la rue".
1) Le social ou les exigences du plus grand nombre.
Imposer les exigences du plus grand nombre contre les privilèges de quelques-uns dit Edwy Plenel mais c’est là la tâche principale tout à à la fois syndicale et politique des organisations qui n’ont pas abandonné le point de vue de classe. Chacun a son rôle à jouer. Aux syndicats le maintien de la mobilisation et du cahier revendicatif, aux partis de gauche de choisir un projet véritablement "à gauche", c’est à dire en soutien du peuple-classe et pas pour la classe dominante. Est-ce clair ? Est-ce bien clair aussi pour la CFDT et le PS qui défendent "l’économie" beaucoup plus que "le social" ; l’entreprise et les patrons plus que les travailleurs ; la nation et l’oligarchie plus que le peuple-classe ! Notez bien en outre qu’une réforme favorable au peuple-classe peut être prise par la droite sous forte pression de la rue. La rue c’est le lobby du peuple-classe. Nul besoin de la gauche aux commandes et surtout pas d’une gauche qui "à froid" va s’employer à transformer le cahier revendicatif en mesures de gestion compatibles avec ce que veut le patronat et le MEDEF.
2) Le "social" devrait être la vérité de la démocratie
Le social devrait être la vérité de la démocratie et non un supplément d’âme caritatif ajouté sur l’économisme dominant . Le social ne saurait être un coup de colère périodique qui tend à se généraliser en Europe face aux politiques d’austérité. Le social ne peut être la vérité de la démocratie que si les intérêts du plus grand nombre à partir de ceux d’en-bas sont politiquement institutionnalisés et satisfaits. Autant parler de démocratie socialiste !A l’évidence, la démocratie libérale est un mensonge permanent de ce point de vue. En contrepoint, l’alterdémocratie est alors à construire tout à la fois dans la rue et dans les urnes.
Une tâche loin d’être secondaire consisterait à transformer le statut des "grands élus" sur deux plans d’une part la casse du cumul vertical et horizontal des mandats et d’autre part la casse des traitements très élevés (1).
Une autre tâche serait aussi de mieux assurer le droit de grève et de manifestation car pour la droite UMP la bonne grève doit être rare, espacée et non bloquante car elle doit uniquement servir de décorum démocratique permettant d’affirmer que le pays n’est pas une dictature mais elle ne doit aucunement gêner "l’économie", entendez les entreprises et les patrons !
3) De la retraite à l’emploi : Vive la RTT contre le chômage et le travaillisme !
Edwy Plenel affirme que l’alternative à la réforme de Sarkozy est sur le terrain de l’emploi et que la gauche est attendue ici. Il me semble que certains syndicats et certains partis de gauche ne sont déjà prononcés sur ce terrain. Sans doute faut-il lancer une grande votation citoyenne sur une nouvelle RTT hebdomadaire qui tout à la fois lutte contre le travaillisme des uns (2) et contre le chômage et la précarité des autres. Cette RTT devra tenir compte des échecs de la précédente réforme du point de vue des salariés et non du point de vue patronal à qui les représentants des travailleurs doivent toujours imposer un cadre légal contraignant.
4) Emanciper le travail contre l’intensification issue de la mise en concurrence généralisée .
Le lieu de travail est trop souvent, dans le privé surtout, le lieu d’une "dictature patronale" qui prend pour prétexte "la guerre économique" et la mise en concurrence généralisée entre pays, entre entreprises et surtout entre travailleurs. On sait que cette "guerre" sert de prétexte au harcèlement moral et plus généralement aux pressions pour intensifier le travail (3). Le secteur public qui s’est vu introduire artificiellement depuis 1989 les logiques privatistes et marchandes n’échappe plus à ces pressions. Le système capitaliste fondé sur la propriété privée des moyens de production et sur la rationalité marchande s’appuit sur cette concurrence généralisée. Il importe d’agir contre ces trois vecteurs. C’est là que l’on lit un projet de gauche authentique. Il en va de même d’un projet écologique soucieux du "social".
De façon générale, il importe que les travailleurs cessent d’être soumis à leurs maîtres et cessent de consentir librement et démocratiquement leur abdication et ce même si perdure une division du travail et une hiérarchie des qualifications personnelles. La compétence reconnue par l’Education nationale et par l’Etat n’est pas un motif de pouvoir constamment maintenu sur les autres travailleurs moins qualifiés. La qualification a pour fonction de servir à améliorer la qualité du travail, de la prestation fournie au client (privé) ou à l’usager (public) et non à extorquer du surtravail, de l’humiliation et de la soumission.
Il y a bien sûr le mur de la menace, à niveau variable, qui fonde sur le contrat de subordination constitutif du travail salarié privé. Dans le public la chaîne hiérarchique impose aussi la subordination. On ne saurait faire "comme si" cela n’existait pas. Cette spécificité fait que la soumission voire le zèle est une seconde nature dans le monde du travail salarié. L’entreprise vient ici compléter la famille dans la vielle reproduction de l’idéologie d’apprentissage de la soumission. Mais on n’a pas à obéir à tous les ordres ! Il y a milles manières de détourner les ordres lorsque la contrainte se fait plus pesante.
Pour ne pas sombrer dans un anarchisme de collégien ou un retrait psychologique total il importe de souligner une fois de plus que tout un chacun se doit comme être social de participer à la production de l’existence sociale tant dans la famille que dans la société. On ne lui demande ni de se taire, ni de travailler vite ni de travailler plus mais de prendre sa part fût-ce une part moindre qu’autrui. L’enjeu à ce stade n’est pas l’égalité mais que soit supprimé le fait que certains travaillent et d’autres pas. Le système capitaliste s’appuie sur les éléments zélés, les accros ou addicts du travail, pour imposer le travaillisme et le productivisme mais cela n’est pas une fatalité.
Christian DELARUE
Reprenons donc certains propos d’ Edwy Plenel : "Depuis les premiers défilés du 4 et du 7 septembre, chacun sent bien que nous vivons l’un de ces moments où le peuple-classe, dans sa diversité d’âge et de condition, entend faire valoir ses droits légitimes contre une légalité illusoire." - "La démocratie est du côté du peuple-classe, sur l’asphalte des rues, dans les établissements scolaires ou dans les lieux de travail."
1) Casser le dispositif de formation des "grands élus" en classe dirigeante autonomisée.
http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article692
2) Sarkozysme : l’avant-garde du travaillisme
http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article1273
3)A propos de l’intensité et l’intensification du travail.
http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article1310