RSS SyndicationTwitterFacebook
Rechercher

CHE et « l’Humain au centre ».

7 septembre 2017
Che, ce guérillero de la pensée, était d’une lucidité prémonitoire. En 1965, il écrit dans des notes de réflexion sur le socialisme (publiées près de 40 ans plus tard) : « On (l’URSS) est en train de retourner au capitalisme ». On (la pensée unique) a voulu faire passer le camarade Guevara pour un « doux rêveur » (et à la fois un assassin).

Le romantisme révolutionnaire ? Cela ne le gênait pas outre mesure, lui qui se voyait dans des lettres à sa famille comme un don Quichotte, lui qui répondait à ceux qui « nous disent que nous sommes des romantiques » : « sí se puede ! », « oui, c’est possible » : et alors ?

Dans une multitude de discours, d’écrits, surtout à partir de 1962, Che insiste sur la nécessité pour un révolutionnaire, d’être « essentiellement humain » et de « ressentir chaque problème de l’humanité dans sa propre chair ». Il combat la bureaucratie, le dogmatisme, le formalisme, la « scholastique » officielle...

Pour le Che, « les marxistes ont longtemps sous-estimé l’individu ». En 1964, il insiste : « C’est sans doute la première fois au monde, à Cuba, qu’un système socialiste met l’homme au centre, parle de l’individu, de son importance en tant que facteur principal de la révolution ». Che considère « l’humain » comme un levier, moteur et base de la transformation sociale, comme objectif principal de toute révolution. Les classes dominantes présentent, elles, ce point de vue comme « totalitaire », « utopique ». C’est bon signe !

Fripouilles ! Elles nous ressortent la fable (efficace) du « Che boucher de l’épuration », etc. Mais rien sur ses pratiques de ministre, sur son internationalisme, sur sa pensée en permanente remise en cause. Nous sommes prêts au débat avec qui voudra. Nous avons démontré dans notre livre "Vive le Che !" le caractère fallacieux, criminalisant, de ces allégations.

L’humain ? Impossible, pour Guevara, de le déconnecter du politique et de l’économie, le premier primant sur la seconde. Che appelait à poursuivre simultanément l’émancipation de l’homme et de la société. « L’économie et l’homme doivent se transformer dans un même mouvement ou la révolution échouera ». Belle lucidité. Le Che refusait "l’étapisme". Les objectifs de la révolution, de la libération nationale et sociale, ne deviennent possibles que s’ils sont simultanément et clairement menés, identifiés, explicités.

La pensée du Che reste pour nous une formidable boîte à idées... Nous n’avons pas parlé de « modèles », Che les haïssait. Il disait : "C’est notre expérience, pas un modèle." Accusé bêtement « d’exporter la révolution », il répondait : « L’époque des transplantations mécaniques est passée, heureusement ». Comme pour Mariátegui, le projet de socialisme guévarien, en perpétuelle élaboration, relève de la « création héroïque » de chaque peuple.

Che abhorrait les « vérités éternelles » des « manuels » de l’URSS. Dans une lettre de Tanzanie, en 1965, à Armando Hart, il se moque des « pavés soviétiques », « qui font que tu n’as pas besoin de réfléchir, parce que le parti l’a déjà fait pour toi ».

Ne nous laissons pas voler ce Che, ce rebelle absolu, cet intellectuel communiste de haut niveau. Ne le laissons pas salir non plus. En le salissant, c’est tous les militants anticapitalistes que le système entend stigmatiser, décrédibiliser. Alors, Ernesto... « hasta siempre ».

Jean ORTIZ

EN COMPLEMENT PAR LGS :

URL de cet article 35301
   
Même Auteur
Vive le Che !
Jean ORTIZ
Comment expliquer en 2017 le prestige têtu de Che Guevarra, la fascination qu’il exerce encore et toujours ? Le nouvel ouvrage de Jean Ortiz propose une analyse et un point de vue fournis et argumentés, à contre-courant des poncifs et des contre-vérités qui ne manqueront pas de ressurgir en ce cinquantième anniversaire de son assassinat. Il est évident que se joue sur cette figure du combat anticapitaliste comme dans son legs au mouvement pour l’émancipation humaine, une bataille toujours (…)
Agrandir | voir bibliographie

 

« (...) on a accusé les communistes de vouloir abolir la patrie, la nationalité. Les ouvriers n’ont pas de patrie. On ne peut leur ravir ce qu’ils n’ont pas. Comme le prolétariat de chaque pays doit en premier lieu conquérir le pouvoir politique, s’ériger en classe dirigeante de la nation, devenir lui-même la nation, il est encore par là national, quoique nullement au sens bourgeois du mot. »

Karl Marx, Friedrich Engels
Manifeste du Parti Communiste (1848)

© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.