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Signes de récession aux États-Unis et de ralentissement économique mondial.


WSWS, 19 août 2006.


Trois commentaires publiés dans le Financial Times durant la dernière semaine ont indiqué qu’une récession aux États-Unis était de plus en plus probable, ce qui aurait d’importantes conséquences pour l’économie mondiale.

Dans un article publié le 10 août et intitulé « Le monde doit se préparer à la récession aux États-Unis », l’économiste de l’Université de New York Nouriel Roubini a fait l’avertissement que, bien que la Réserve fédérale des États-Unis ait pu avoir espéré un « atterrissage en douceur » lorsqu’elle a mis un terme à sa série de hausses de taux d’intérêt, la décision est venue trop tard et la Réserve fait maintenant face à une récession.

« La récession américaine sera déclenchée par trois forces irrésistibles : le ralentissement du marché de l’immobilier ; les prix plus élevés du pétrole ; et de plus hauts taux d’intérêts. Le consommateur américain, portant déjà le fardeau d’un endettement élevé et de salaires réels à la baisse, sera durement frappé par ces chocs, » a-t-il écrit.

Selon Roubini, les effets de la récession dans l’immobilier seront plus graves que ceux qui ont suivi l’éclatement de la bulle technologique en 2000. La raison en est que la propriété constitue une part beaucoup plus grande de la richesse d’un ménage que des actions en technologie et qu’environ 30 pour cent de l’augmentation des emplois aux États-Unis depuis la récession de 2001 est relié à l’immobilier. (N.d.l.r. Lire USA : l’ampleur du ralentissement immobilier commence à devenir inquiétante, AFP, 23/08/2006.
et aussi USA : le ralentissement immobilier risque de déteindre sur toute l’économie, AFP, 24/08/2006.)

Les dernières statistiques du produit intérieur brut (PIB) des États-Unis sont un « signe inquiétant », avec la baisse de la consommation des biens durables, l’investissement résidentiel en « chute libre », et les inventaires qui augmentent alors que la production fait face à des ventes en baisse. « L’investissement accru dans des équipements et logiciels informatiques, supposé compenser les plus faibles dépenses en immobilier et en consommation, est plutôt en train de diminuer. »

Alors que la Réserve peut essayer de contrer l’impact d’une récession en abaissant les taux d’intérêt, « la récession dans les marchés de l’immobilier et de la consommation dominera tout soulagement monétaire. »

Une récession aux États-Unis s’étendrait internationalement car « la marge de manoeuvre pour un soulagement monétaire et fiscal est beaucoup plus limitée maintenant qu’en 2001, lorsque le Groupe des Sept pays industrialisés ont diminué leurs taux d’intérêts et facilité la politique fiscale. Il existe maintenant d’importantes limites au soulagement monétaire alors que l’inflation mondiale est en hausse ; et la politique fiscale ne peut être facilitée car presque tous les pays du G7 font face à de sérieux déséquilibres fiscaux. »

Des prédictions similaires ont été faites dans un commentaire de l’économiste en chef de Morgan Stanley, Stephen Roach, publié lundi. Ce serait une « grave erreur », a-t-il écrit, d’anticiper un taux de croissance mondiale de 4,8 pour cent pour les trois prochaines années. « Il est beaucoup plus probable que la croissance mondiale ait atteint un sommet et que le boum soit à la veille de prendre fin. »

«  Le principal moteur de la croissance mondiale, les États-Unis, est au ralenti. C’est le verdict du marché de l’emploi, avec une croissance de l’emploi au cours des 4 derniers mois de 35 pour cent en dessous de la moyenne depuis 2004. C’est également le verdict du marché immobilier, dont la chute qui s’annonce dans la construction résidentielle a déjà fauché 1 pour cent du PIB de la croissance au cours des 3 dernières années. »

Les changements aux États-Unis ont été déterminants pour l’économie mondiale, qui est devenue de plus en plus dépendante des dépenses en consommation comme source finale de la demande. Il est peu probable que le fossé laissé par un recul dans la consommation aux États-Unis puisse être comblé. Même si l’on prévoyait une croissance économique dans la zone euro de 2,5 pour cent cette année, la plus élevée depuis 2000, il est peu probable qu’elle puisse être soutenue et elle pourrait retomber en dessous de 1,5 pour cent l’an prochain. « L’économie européenne est sur le point de frapper un "triple mur’ : un gros resserrement de la politique fiscale, un impact qui se fait attendre du resserrement monétaire et le poids d’une Euro plus forte. »

La croissance de l’économie japonaise ne peut combler le fosse laissé par le ralentissement aux États-Unis. Alors que la croissance devrait dépasser 2,5 pour cent cette année, il pourrait ralentir à moins de 2 pour cent en 2007.

Les « deux dynamos » de l’Asie, la Chine et l’Inde, ne seront pas plus en mesure de contrer cette tendance des principales économies. La Chine faisant face au risque d’une surchauffe économique, les autorités financières n’ont guère d’autre choix que d’adopter des mesures restrictives.

Il devait vraisemblablement y avoir " une modération dans la croissance de la Chine débutant en 2007, avec une réduction correspondante dans sa voracité pour les marchandises. Cela devrait produire une onde à travers les manufacturiers en Australie, au Canada, au Brésil et en Afrique. » Un ralentissement en Chine aura également un impact sur les principaux producteurs de pétrole aussi bien que sur ses fournisseurs asiatiques, tels le Japon, la Corée et Taiwan.

«  Il y a une signification plus profonde au ralentissement à venir », conclut Roach. « Le boum global des 4 dernières années n’a jamais été soutenable. Il était soutenu par l’excès du cycle de liquidité, qui est venu des mesures d’urgence anti-déflationnistes prises par les grandes banques centrales du monde. La vigueur de la croissance mondiale qui s’ensuivit était dominée par les consommateurs américains mais la noce américaine à été payée au prix d’une chute record dans l’épargne personnelle soutenue par une entrée massive de capitaux et un déficit record du compte courrant américain. Ce boum reposait précairement sur un déséquilibre global sans précédent. L’excès de capital acheta du temps pour un monde précaire. Maintenant que les banques centrales entreprennent de normaliser la politique monétaire, ce temps est écoulé. »

Autrement dit, l’instabilité sous-jacente à l’économie mondiale, qui s’est manifestée dans la crise asiatique de 1997-98 et l’effondrement de la bulle boursière de 2000-2001, pour ensuite reculer suite à une politique monétaire et du crédit particulièrement souple, peut bien être sur le point de faire une réapparition.

Dans un commentaire également publié lundi, le chroniqueur du Financial Times, Wolfgang Munchau, a conclu que quiconque pensait que l’Europe et l’Asie pourraient prendre la relève en cas de sérieux ralentissement dans la croissance économique américaine « voudrait peut-être ajouter que la fée des dents allait passer au cours de la nuit et laisser des liasses d’argent sous l’oreiller ». Loin d’échapper aux conséquences d’un ralentissement aux États-Unis, la zone euro pourrait en subir un contre-coup encore plus grave qu’en Amérique.

Alors que les États-Unis ont mis cinq mois à se remettre de la récession de 2001, a-t-il noté, il a fallu cinq ans à la zone euro pour revenir au taux de croissance économique d’avant-récession. Le Japon et la Chine ne sauraient non plus faire office de substituts tant les deux pays dépendent directement ou indirectement pour leur croissance économique de la demande des consommateurs américains.

L’ampleur de cette dépendance est indiquée par les données sur l’exportation. En 2005, 32 pour cent des exportations de marchandises de la Chine sont allées aux États-Unis, ainsi que 23 pour cent de celles du Japon et 20 pour cent de celles des 10 pays de l’Association des nations de l’Asie du sud-est.

Au cours de la dernière décennie, le taux de croissance économique asiatique a été plus élevé que celui des États-Unis, mais la part des exportations de la région allant aux États-Unis est restée la même. Autrement dit, les économies de la région asiatique sont devenues plus dépendantes de la demande des consommateurs américains. Ceci signifie que loin d’être en mesure de parer à l’impact de la récession aux États-Unis, elles en seront sensiblement affectées.

Nick Beams


 Source : www.wsws.org




Cent quarante milliards de dollars pour éviter la récession. Mondialisation sadomaso, par Fabio lo Verso.




Robert Reich : La situation aux Etats-Unis est "potentiellement vraiment grave".


Fatal freinage aux Etats-Unis, par Joseph E. Stiglitz.




Crise mondiale : les banques, le brut et... l’emploi, par Fabio lo Verso.



* * * Immobilier, subprime : les racines de la crise, par Michel Husson.





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