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Liban : Force de paix ou « sale besogne » ?







[L’analyse des circonstances de la "conférence internationale de Rome" pour un cessez-le-feu au Liban plein de conditions meurtrières, par Stefano Chiarini, envoyé spécial d’ il manifesto au Moyen-Orient, ]



il manifesto, 25 juillet 2006.


L’attaque brutale contre la Bande de Gaza, la dure répression en Cisjordanie et la nouvelle destruction-invasion du Liban témoignent, tragiquement, de la faillite de la politique israélienne des « retraits unilatéraux » et du refus, à Tel-Aviv, d’une tractation avec les parties adverses arabes qui conduirait à l’échange de « la paix contre les territoires ».

Les points centraux de cette politique, soutenue avec force par l’administration Bush et une grande partie de l’Union européenne, ont été : la fin du processus de négociations, la non reconnaissance des représentants légitimes du peuple palestinien, l’assimilation de la résistance au terrorisme, l’empêchement de la naissance d’un véritable état palestinien par l’annexion à Israël d’une grande partie de la Cisjordanie avec Jérusalem-est, et en concentrant les palestiniens à l’intérieur de « réserves indiennes » entourées par le Mur, ainsi que : la déstabilisation du régime syrien, l’installation à Beyrouth d’un gouvernement allié des Usa et le maintien du contrôle des Fermes de Chebaa (enclave libanaise sur les pentes du Mont Hermon) et, surtout, du Golan syrien. Bien plus que la capture de deux soldats !

Cette stratégie du refus de la légalité (l’illégitimité de l’acquisition de territoires par la force) et d’imposer manu militari ses propres conquêtes par la fixation unilatérale de « frontières temporaires », lèse les aspirations et les droits légitimes du peuple palestinien, du Liban et de la Syrie ; et on ne s’étonnera pas que cette stratégie soit refusée par ceux qui devraient en payer le prix, et qu’elle n’ait pas conduit à l’arrêt des opérations militaires de la résistance palestinienne et libanaise.

Face à ce refus, le gouvernement israélien, de concert avec les Usa, a essayé de liquider toute opposition à ses projets annexionnistes et essayé de résoudre un problème de cette ampleur par la force des armes. Cette illusion tragique a été nourrie non seulement par les Etats-Unis mais aussi par l’Europe elle-même et par l’ONU aussi, en partie, qui ont célébré les retraits unilatéraux israéliens comme si c’étaient des pas vers la paix, sans reconnaître le gouvernement légitime palestinien. Alors qu’au Liban, ils soutenaient la tentative d’imposer le désarmement de la résistance libanaise et palestinienne en le déclanchant par un retrait israélien des territoires occupés.

Pour réaliser un tel projet, les USA et l’Ue ont tout misé sur la composante sunnite-saoudienne (la Hariri Inc. avec son premier ministre Siniora), sur l’extrême droite chrétienne pro-israélienne et sur le leader druze Walid Joumblatt. Cette opération a échoué grâce à la force du Hezbollah au parlement et dans le pays, grâce au refus de la composante chiite de revenir à l’époque de l’axe chrétien sunnite qui l’avait toujours exclue du pouvoir, grâce à l’alliance avec l’ex-général chrétien maronite Michel Aoun, partisan d’un nationalisme laïc, avec les Hezbollah (qui représentent 40% de la population) et avec d’importants secteurs sunnites et druzes. A ce moment là , les USA ont donné leur feu vert à Israël pour détruire la résistance et précipiter le pays dans un nouveau conflit dont devrait émerger un gouvernement collaborationniste disposé à renoncer à la restitution des territoires occupés par Israël et à collaborer à la déstabilisation de la Syrie.

La partie politico-militaire de l’opération post-guerrière - après l’occupation et la destruction du Liban du sud par Israël - pourrait être réalisée à travers une sorte de mandat Otan-Ue-Usa-Arabie saoudite sur le Liban : avec l’envoi d’une force militaire qui devrait faire la « sale besogne » de détruire la résistance contre Tel-Aviv.

L’objectif ultime serait d’arriver à une paix séparée entre le Liban et Israël de façon à pouvoir consolider l’occupation de la Cisjordanie et du Golan (et des Fermes de Chebaa) en isolant et les palestiniens et le gouvernement de Damas.

On ne pourra donc pas s’étonner que la proposition du gouvernement italien d’une « force de paix » (mauvaise copie du plan Usa de 1996) pour défendre la frontière israélienne, imposer le désarmement du Hezbollah et sceller les frontières vis-à -vis de Damas, ait été accueillie favorablement par Washington et Tel-Aviv.

La conférence de Rome de demain (mercredi 26 juillet) dans laquelle ne sont pas prises en considération les demandes de la résistance libanaise et palestinienne d’un retrait des territoires occupés et de l’échange des prisonniers, ni les demandes syriennes concernant le Golan, se présente comme un nouveau chapitre de cette politique « unilatérale » d’imposition aux présumés vaincus des diktats américains et israéliens qui avaient déjà échoué pendant ces derniers mois. Pourquoi donc la résistance libanaise et palestinienne - tout comme la Syrie- devraient-elles respecter les résultats d’une tractation qui ne les a pas impliqués ? Comment peut-on appeler « force de paix » un contingent armé qui aurait la tâche de combattre le Hezbollah ? Comment un gouvernement de centre gauche eut-il envoyer nos soldats mourir pour défendre l’occupation israélienne du Golan, des Fermes de Chebaa, de la Cisjordanie, et parler encore de paix ?

Stefano Chiarini

 Source : il manifesto www.ilmanifesto.it

 Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio


L’alliance, le 8 juin 2006, du Hezbollah avec le général Aoun, et non la capture de deux soldats, est sans doute l’élément déclencheur de l’offensive israélienne.


Chaos oriental, par Mounir Boudjema.

Liban : La guerre préventive permanente d’Israël et les limites de l’unilatéralisme, par Michel Warschawsky.




 Dessin : Alex Falco Chang


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