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Quand "l’ennemi de mon ennemi" n’est pas mon ami - Du Hamas palestinien à l’Azov ukrainien et l’EOKA chypriote...

Le déclencheur de ce qui suit a été le très important texte de la jeune Ukrainienne Hanna Perekhoda "Si au nom de la "paix" nous trahissons les Ukrainiens, comme les Palestiniens..."(1), dans lequel - comme elle le dit - elle essaie de voir "les structures qui permettent non pas d’« exotiser » la Palestine mais de la rendre potentiellement comparable à d’autres situations d’oppression coloniale et de résistance légitime menées néanmoins par des organisations d’extrême-droite ultra-réactionnaires”. Et en effet, tout Grec et tout Chypriote ne pourrait voir rien d’"exotique" dans le cas du Hamas palestinien car à Chypre aussi, au temps de l’"oppression coloniale" britannique, à la tête de la "résistance légitime" se trouvait pendant au moins cinq ans (1954-1959), "l’organisation d’extrême droite ultra-réactionnaire" qu’était l’EOKA du tristement célèbre général -collabo et massacreur des résistants communistes- Georgios Grivas.

Il n’y a donc rien de nouveau sous le soleil, puisque, comme c’est le cas aujourd’hui avec le Hamas, l’action de l’EOKA avait déconcerté et finalement divisé la gauche et les gens de gauche de l’époque, qui ont été incapables de trouver une explication satisfaisante à la question de savoir comment une organisation ultra-réactionnaire avait pu prendre la tête de la résistance et de la lutte anti-coloniales. Le texte de Perekhoda apporte la réponse : en dernière analyse, c’est toujours l’abdication par la gauche de ses tâches historiques qui conduit à des monstruosités telles que celles que nous avons vues à Chypre avec l’EOKA, que nous voyons aujourd’hui en Palestine avec le Hamas, et que nous pourrions voir dans un avenir proche en Ukraine, avec peut-être un certain Azov si, au nom de la "paix", nous trahissons les Ukrainiens comme nous l’avons fait avec les Palestiniens. (2)

Le problème de "l’impuissance de toutes les forces progressistes, qui n’ont pas fait – et ne font pas – assez pour soutenir la cause des opprimés" n’est pas nouveau, mais il a pris aujourd’hui des dimensions sans précédent et fait plus mal que jamais. Et cela pour deux raisons : parce que notre époque est marquée par la montée impétueuse de l’extrême droite et du "fascisme qui se répand comme un virus", même parmi les opprimés. Et parce que la gauche qui s’est réduite comme peau de chagrin, voit la plupart de ses forces sombrer dans la confusion et être de plus en plus déboussolées, avec pour résultat que nombre d’entre elles non seulement « ne font pas assez pour soutenir la cause des opprimés », mais font quelque chose d’encore pire : elles soutiennent les oppresseurs (!) au nom de l’adage séculaire selon lequel "l’ennemi de mon ennemi est mon ami".

Encore une fois, "rien de nouveau sous le soleil" car ce n’est pas un hasard si l’histoire récente des opprimés et leurs luttes anti-coloniales ont été marquées de manière indélébile par les durs dilemmes que leur impose ce même "adage séculaire" qui fait actuellement des ravages dans le monde entier. Alors, le rappel de quelques cas emblématiques tirés du passé récent peut nous aider à mieux comprendre ce qui se passe aujourd’hui.

Bien sûr, tout le monde a entendu parler de l’Armée républicaine irlandaise (IRA), mais peu sont conscients des liens étroits que ses dirigeants ont tissés avec le régime nazi en Allemagne de 1937 jusqu’au début de la Seconde Guerre mondiale. À la base de cette coopération - à première vue "contre nature" - nous trouvons la variante irlandaise du même "adage séculaire" : “England’s difficulty is Ireland’s opportunity » (les difficultés de l’Angleterre sont les opportunités de l’Irlande) ! Et dans ce cas, cette "difficulté de l’Angleterre" n’était autre que l’Allemagne nazie qui, en gagnant sa guerre contre l’Empire britannique, pouvait libérer l’Irlande du Nord du joug anglais, conduisant à sa réunification avec la République d’Irlande !

Il ne faut pas croire que cette coopération "contre nature" n’était que verbale ou limitée à quelques actions insignifiantes. Outre les contacts quasi constants entre fonctionnaires des deux camps (jusqu’à Hitler lui-même !), cette alliance a pris les dimensions d’une véritable coopération militaire avec de nombreuses victimes tout en jouissant de la “tolérance” d’une grande partie de l’opinion publique irlandaise.

Le deuxième cas que nous voulons rappeler est celui de la coopération militaire de la lutte anti-coloniale de l’Inde avec le Troisième Reich contre la puissance coloniale qu’était alors l’Empire britannique. Cette coopération, qui a notamment conduit à la formation d’unités militaires indiennes qui ont combattu aux côtés de la Wehrmacht en Asie et en Europe, était fondée sur le même raisonnement omniprésent selon lequel "l’ennemi de mon ennemi est mon ami" : la défaite militaire de la Grande-Bretagne entraînerait l’effondrement de son empire et, partant, l’indépendance de l’Inde. Ce n’est pas une coïncidence si l’instigateur de cette collaboration "contre nature", Subhas Chandra Bose, qui avait été président du Congrès national de Gandhi, avait tenté en vain de persuader Staline de soutenir la lutte armée indienne de libération nationale avant de rencontrer Hitler à Berlin. Et ce n’est pas un hasard si, aujourd’hui encore, il est considéré comme un héros national par un grand nombre de ses compatriotes.

Nous nous arrêtons là, bien que les cas analogues à ceux mentionnés ci-dessus soient nombreux et instructifs, et qu’ils couvrent tout le globe. Néanmoins, leur exposé permet de tirer une conclusion assez catégorique : l’adage "l’ennemi de mon ennemi est mon ami" peut être appliqué sans problème par les politiciens bourgeois caractérises par leur cynisme, mais elle ne peut en aucun cas être le lot des gens de gauche censés avoir des principes et des valeurs. D’ailleurs, son résultat a toujours été tragique : "l’ennemi de mon ennemi" n’a jamais été et ne sera jamais un allié sur lequel on peut compter. Soit il fera de vous son serviteur et son clone réactionnaire, voire d’extrême droite, soit il vous trahira à la première occasion.

Que les gens de gauche de toute sensibilité gardent tout cela à l’esprit à l’heure où Gaza et l’Ukraine demandent désespérément leur aide tout en résistant à leurs bourreaux qui promettent des bains de sang encore plus cauchemardesques.

Notes

1. https://courrierdeuropecentrale.fr/si-au-nom-de-la-paix-nous-trahisson...

2. Nous avons fait substantiellement le même constat quand nous écrivions que « c’est sur les ruines du message émancipateur socialiste et communiste que prospèrent à notre époque ces obscurantismes réactionnaires tant religieux que néo-libéraux, qui gangrènent à notre époque l’humanité » dans notre texte “Massacres et impasses moyen-orientales - Au-delà du sionisme et du djihadisme !.

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