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Guerre contre le terrorisme ou expansion de l’Empire Américain ?


Rares sont les Américains qui s’opposent publiquement aux campagnes militaires des États-Unis. William Blum, ancien fonctionnaire du département d État, journaliste et essayiste, n’hésite pas à s’en prendre à son propre gouvernement. Depuis le 11 septembre, il prononce des discours sur les campus universitaires pour dénoncer la politique étrangère des États-Unis et expliquer pourquoi il ne se considère pas comme un patriote.

NB : Ce texte est long. Vous pouvez le télécharger en bas de page (format Word) afin de le lire hors ligne.



Intervention de William Blum le 16 Octobre 2002
A l’Université du Colorado à Boulder (USA) :


Je suis heureux d’être parmi vous, d’autant plus que les bombes n’ont pas encore commencé à tomber. Je veux dire sur l’Irak, pas sur Boulder. Le tour de Boulder viendra après celui de l’Irak et de l’Iran si des gens comme vous continuent d’inviter des gens comme moi à s’exprimer.

Ma première intervention publique après les événements du 11 Septembre 2001 s’est déroulée à l’Université de Caroline du Nord. Suite à cette intervention, moi-même ainsi que quelques autres intervenants avons été placés sur une liste publiée par une organisation créée par Lynne Cheney, la femme de qui vous savez. Le programme de l’organisation peut être facilement résumé par un rapport qu’elle a publié, intitulé "En Défense de notre Civilisation : Comment nos Universités Trahissent l’Amérique et Comment y Remédier". Dans ce rapport ainsi que sur leur site Internet, ils ont publié une longue liste de commentaires, formulés principalement par des professeurs et des étudiants de nombreuses écoles, qui indiquent que ces personnes ne soutenaient pas avec enthousiasme la dernière frénésie de bombardements de l’Amérique et que ces personnes étaient coupables de laisser sous-entendre qu’il y avait peut-être bien de bonnes raisons de haïr les Etats-Unis, ou plutôt de haïr la politique étrangère des Etats-Unis.

A cause de cette liste, et aussi à cause de certains de mes écrits qui ont suivi, je reçois de nombreux courriers haineux depuis un an, des courriers électroniques pour être précis. J’attends de recevoir mon premier courrier électronique infecté par la maladie du charbon. Il y a bien des virus dans les courriers électroniques, pourquoi pas des bactéries ?

Ces courriers haineux ne remettent pratiquement jamais en cause un fait ou une idée que je pourrais formuler. Ils me reprochent principalement d’être antipatriotique. Ils font référence à une sorte de patriotisme aveugle, mais même s’ils s’étaient exprimés en termes plus nuancés, ils auraient raison à mon sujet : je ne suis pas patriotique. Je ne veux pas être patriotique. J’irais même jusqu’à dire que je suis patriotiquement mis en cause.

De nombreuses personnes à gauche, aujourd’hui comme dans les années 60, refusent d’abandonner le terrain du patriotisme aux conservateurs. La gauche insiste pour dire que ce sont eux les véritables patriotes parce qu’ils exigent que les Etats-Unis agissent en respectant les principes affichés.

Tout ceci est parfait, mais je ne fais partie de cette gauche là . Je ne crois pas que le patriotisme soit une des caractéristiques les plus nobles de l’humanité.

George Bernard Shaw a écrit que le patriotisme était la conviction que votre pays était supérieur à tous les autres parce que vous y êtes né.

Et souvenez-vous que les Allemands qui ont soutenu le gouvernement Nazi peuvent être considérés comme des patriotes, et c’est justement ainsi que le gouvernement Allemand les qualifiait.


L’année qui vient de s’écouler n’a pas été facile pour les gens comme moi, entourés que nous sommes par cette orgie de patriotisme. Comment échapper à "Nous Sommes Unis" et "Dieu Bénisse l’Amérique" ? Et le drapeau — on le voit partout. Si j’achète une banane on me la donne avec un drapeau Américain collé dessus.

A présent n’importe qui devient un héros, le maire de New York, Rudy Giuliani est devenu un héros. Jusqu’au 10 septembre il n’était un réactionnaire arrogant et sans pitié. Tout d’un coup, il est devenu un héros, et même un homme d’état, s’exprimant devant les Nations Unies. George Bush est aussi devenu un héros. Ceux qui le qualifiaient d’abruti le 10 septembre l’ont accueilli en héros et dictateur à partir du 11.

Dans la pièce de Bertholt Brecht, Galileo, un personnage déclare à un autre "Malheur au pays qui n’a pas de héros". Et l’autre répond "Non, malheur au pays qui a BESOIN de héros".

Bien que je ne sois fidèle à aucun pays ou gouvernement, je suis, comme la plupart d’entre vous, fidèle à certains principes comme la justice politique et sociale, la démocratie économique, les droits de l’homme.

Ce que je veux dire est ceci : si votre coeur et votre esprit vous disent clairement que le bombardement de pauvres innocents affamés est une chose terrible à faire et n’apportera pas plus de sécurité au peuple Américain, alors vous devez protester par tous les moyens possibles sans vous préoccuper d’être qualifiés d’antipatriotiques.

Malheureusement, il y a eu très peu de protestations contre les bombardements en Afghanistan. Je crois que cela démontre jusqu’à quel point les événements ont rendus les gens craintifs. Les événements et l’extension des pouvoirs de la police, menée par l’Ayatollah John Ashcroft [ministre de la justice des Etats-Unis - NDT]. Je crois aussi que les gens pensaient que quelles que soient les horreurs commises par les bombardements, nous allions être débarrassés de quelques très vilains terroristes anti-américains.

Mais parmi les milliers d’Afghans qui ont péri sous les bombes Américaines, combien pensez-vous ont eu un rôle quelconque à jouer dans les événements du 11 Septembre ? Je vais faire une estimation approximative et répondre "aucun". Et combien pensez-vous ont pris part un jour à un acte terroriste quelconque contre les Etats-Unis ? Nous ne le saurons jamais avec certitude, mais je pense que le nombre se situe entre zéro et dix, plus proche de zéro. Après tout, les actions terroristes ne sont pas si fréquentes que ça et sont généralement exécutées par une poignée d’hommes. Alors parmi tous ceux tués par les actions Américaines, combien faisaient partie d’une de ces poignées de terroristes, dont beaucoup sont par ailleurs déjà en prison ?

Souvenez-vous que la grande majorité de ceux qui se trouvaient dans un camp d’entraînement d’Al Qaeda en Afghanistan étaient là pour aider les Talibans dans la guerre civile et n’avaient rien à voir avec le terrorisme ou les Etats-Unis. Pour eux, il s’agissait d’une mission religieuse, rien à voir avec nous. Mais nous les avons tués ou maintenus dans des conditions de détention terribles sur la base navale de Guantanamo à Cuba depuis très longtemps maintenant, et ce n’est pas près de se terminer, et il y a eu de nombreuses tentatives de suicide parmi les détenus.


Il est tout à fait remarquable de constater que ce que nous appelons notre gouvernement continue de larguer des quantités énormes d’explosifs très puissants sur les têtes de personnes sans défense. Ce n’est pas ce qui avait été prévu. A la fin des années 80, Mikael Gorbatchev mit fin à l’état policier Soviétique, puis le Mur de Berlin est tombé et partout en Europe de l’Est les gens célébrèrent l’avènement d’une ère nouvelle. L’Afrique du Sud libéra Nelson Mandela et l’apartheid commença à se disloquer. Haïti connut ses premières élections libres et un président authentiquement progressiste fut élu... tout paraissait désormais possible et l’optimisme était aussi répandu que le pessimisme aujourd’hui.

Et les Etats-Unis se joignirent à la fête en envahissant et en bombardant Panama, quelques semaines à peine après la chute du Mur de Berlin.

Au même moment, les Etats-Unis sont intervenus sans vergogne dans une élection au Nicaragua pour défaire les Sandinistes.

Ensuite, lorsque l’Albanie et la Bulgarie, "fraîchement libérés de l’emprise du communisme", selon les termes employés par nos média, osèrent élire des gouvernements inacceptables au yeux de Washington, Washington intervint et renversa ces gouvernements.

Peu après il y eut le bombardement impitoyable du peuple Irakien pendant 40 horribles jours, sans aucune raison valable et ce fut la fin de nos espoirs d’un monde meilleur.

Mais nos dirigeants n’en avaient pas terminé pour autant. Peu après ils olt attaqué la Somalie, encore des bombardements et des tueries.

Et pendant ce temps, en Irak, les bombardements ont continué pendant des années.

Ils sont intervenus pour écraser des mouvements dissidents au Pérou, au Mexique, en Equateur et en Colombie, tout comme pendant la guerre froide des années 50 en Amérique latine, et les années 60, et les années 70, et les années 80 et encore pendant les années 90.

Puis ils ont bombardé le peuple Yougoslave pendant 78 jours et 78 nuits.

Puis, une fois de plus, ils sont ouvertement intervenus dans les élections au Nicaragua pour empêcher la victoire de la gauche.

Bien Sûr, pendant ce temps, ils étaient en train de bombarder l’Afghanistan et selon toute vraisemblance ont à présent tué plus de civils innocents dans ce pauvre pays qu’il n’y a eut de victimes dans les attentats du 11 septembre. Sans parler des victimes qui continueront de mourir de leurs blessures, des mines laissés par les bombes à fragmentation et de la contamination par l’uranium appauvri.

Et après toutes ces années, ils maintiennent toujours la corde serrée autour du cou de Cuba. Et ceci n’est qu’une liste partielle.

Nous n’avons pas touché les dividendes de la paix qu’on nous avait pourtant promises, pas plus les Américains que le reste du monde.

Mais que se passe-t-il, bon sang ? On nous avait appris depuis l’enfance que la guerre froide, y compris la guerre de Corée, la guerre du Vietnam, les budgets militaires colossaux, toutes ces invasions et tous ces renversements de gouvernements - ceux qu’on connaissait - on nous apprenait que tout cela avait été accompli pour combattre une menace unique : La Conspiration Communiste Internationale, dont le siège se trouvait à Moscou.

Et que s’est-il passé ? L’Union Soviétique fut dissoute. Le Pacte de Varsovie fut dissout. Les pays satellites de l’Europe de l’Est retrouvèrent leur indépendance. Les anciens communistes sont même devenus capitalistes... et rien ne changea dans la politique étrangère des Etats-Unis. Mais l’OTAN a été maintenue, l’OTAN qui avait été créée - c’est du moins ce qu’on nous avait dit - dans le but de protéger l’Europe Occidentale contre une invasion Soviétique. Mais l’OTAN est toujours là , plus grande que jamais et devenant de plus en plus grande et de plus en plus forte de jour en jour. Une OTAN investie d’une mission globale. La charte de l’ONU fut même invoquée pour justifier la participation de ses membres à l’invasion de l’Afghanistan par les Etats-Unis.


Toute cette histoire a été une arnaque. L’Union Soviétique et cette chose appelée le communisme n’étaient pas, en tant que telles, l’objet des nos attaques. Il n’y a jamais eu de Conspiration Communiste Internationale. L’ennemi était, et demeure, tout gouvernement ou mouvement, ou même individu, qui se trouve sur le chemin de l’expansion de l’Empire Américain, et ce quel que soit le nom que nous donnons à notre ennemi : communiste, état voyou, trafiquant de drogue ou terroriste...

Vous pensez que l’Empire Américain est contre les terroristes ? Comment appelez-vous un type qui fait exploser un avion en plein vol en tuant 73 personnes ? Qui tente d’assassiner plusieurs diplomates ? Qui tire au canon contre des bateaux mouillés dans un port des Etats-Unis ? Qui place des nombreuses bombes dans des bâtiments commerciaux et diplomatiques aux Etats-Unis et ailleurs ? Et des dizaines d’actes similaires. Son nom est Orlando Bosch, il est Cubain et il vit à Miami et les autorités le laissent tranquille. La Ville de Miami a même déclaré une journée en son honneur - une Journée Orlando Bosch. Il sortit d’une prison au Venezuela, où il était détenu pour l’attentat contre l’avion, en partie grâce aux pressions exercées par l’Ambassadeur des Etats-Unis, Otto Reich, qui lui-même a été nommé au Département d’Etat au début de l’année par George Bush.

Bosch retourna aux Etats-Unis en 1988 et le Département de Justice le condamna en tant que terroriste violent et tout avait été préparé pour l’extrader. Mais la procédure fut bloquée par le Président Bush, le père, avec l’aide de son fils Jeb Bush en Floride. Est-ce que George W. et sa famille sont contre le terrorisme ? Et bien oui, ils sont contre les terroristes qui ne sont pas les alliés de l’Empire.

Soit dit en passant, l’avion que Bosch fit exploser était un avion Cubain. Les Cubains le veulent pour ce crime et de nombreux autres. Les Cubains ont demandé à Washington son extradition. Pour Cuba, il est comme Ben Laden pour les Etats-Unis. Mais les Etats-Unis refusent. Pouvez-vous imaginer la réaction à Washington si Ben Laden devait se promener à la Havane et que les Cubains refusent de l’extrader ? Pouvez-vous imaginer la réaction des Etats-Unis si la Havane devait proclamer une "Journée Ben Laden" ?

Le soutien accordé par Washington à d’authentiques organisations terroristes est très vaste. Pour ne donner que quelques exemples au cours de ces dernières années : les Albanais du Kosovo ont mené de nombreuses attaques terroristes pendant des années en différents endroits des Balkans, mais ils sont nos alliés parce qu’ils s’en sont pris à des gens que Washington ne porte pas dans son coeur.

Les paramilitaires en Colombie, aussi cruels soient-ils, seraient incapables de mener à bien leur sale boulot sans le soutien des militaires Colombiens, qui eux-mêmes sont les bénéficiaires d’un soutien quasi illimité des Etats-Unis. Ne serait-ce que pour cette seule raison, Washington est disqualifié pour mener une guerre contre le terrorisme.

Bush vocifère souvent contre l’asile accordé au terroristes. Est-ce que ce type est sérieux ? Quel pays héberge plus de terroristes que les Etats-Unis ? Orlando Bosch n’est qu’un exemple parmi les nombreux Cubains anti-castristes à Miami qui ont effectué des centaines, sinon des milliers, d’actes terroristes, aux Etats-Unis, à Cuba et ailleurs ; toutes sortes d’incendies volontaires, d’assassinats, d’attentats. Ils sont à l’abri ici depuis des décennies. Tout comme de nombreux autres terroristes amis, tortionnaires et violeurs des droits de l’homme du Guatemala, du Salvador, de Haïti, d’Indonésie et d’ailleurs, tous alliés de l’Empire.

La CIA cherche des terroristes dans les cavernes des montagnes d’Afghaniqtan tout en sirotant des bières avec les terroristes à Miami.


Que faut-il en conclure ? Comment faut-il comprendre la politique étrangère de notre gouvernement ? Si je devais écrire un livre intitulé "L’Empire Américain pour les Nuls", sur la première page j’écrirais : Ne cherchez jamais le facteur moral. La politique étrangère des Etats-Unis n’a pas de facteur moral incorporé dans ses gênes. Ne vous encombrez pas l’esprit avec cette idée qui vous empêche de voir au-delà des clichés et des banalités.

Il n’est pas facile pour la plupart des Américains de me croire sur parole. Mon discours est difficile à digérer. Ils voient nos dirigeants à la Télé et leur photo dans la presse, ils les voient sourire et rire, raconter des blagues. Ils les voient avec leurs familles, ils les entendent parler de Dieu et d’amour, de paix, de démocratie, de liberté, de droits de l’homme, de justice et même de base-ball... Comment de telles personnes pourraient-elles être des monstres sans morale ?

Ils se prénomment George, Dick ou Donald, jamais un Mohammed ou Abdulhah parmi eux. Même qu’ils parlent anglais. Enfin, George y arrive presque... Les personnes appelées Mohammed ou Abdulhah coupent les mains et les pieds pour punir un vol. Nous savons que c’est horrible. Nous sommes trop civilisés pour faire de telles choses. Mais les prénommés George, Dick et Donald larguent des bombes à fragmentation sur des villes et des villages, dont beaucoup n’explosent pas et se transforment en mines, et peu après un enfant va en ramasser une ou marcher dessus et perdre un bras ou une jambe, ou les deux bras et les deux jambes, et parfois la vue. Et les bombes à fragmentation qui explosent accomplissent leur propre version de l’horreur.

Mais nos dirigeants sont peut-être finalement moins immoraux qu’amoraux. Ce n’est pas que cela leur fasse plaisir de provoquer autant de morts et de souffrances. C’est juste qu’ils s’en fichent... au cas où cette distinction en vaille la peine. Tant que la mort et la souffrance font avancer les projets politiques de l’Empire, tant que les bonnes personnes et les bonnes multinationales obtiennent richesse, pouvoir, privilège et prestige, tant que la mort et la souffrance ne les touche pas personnellement ou leurs proches... alors ils s’en fichent de ce qui peut bien arriver aux autres, y compris aux soldats Américains qui sont jetés dans des guerres et qui reviennent - pour les plus chanceux - intoxiqués par l’Agent Orange ou le Syndrome de la Guerre du Golfe qui ronge leurs corps. Nos dirigeants n’occuperaient pas les postes qu’ils occupent s’ils étaient préoccupés par de telles choses.

Cela doit être très amusant d’être un dirigeant de l’Empire, génial en fait...enivrant...le sentiment de pouvoir faire ce que vous voulez à qui vous voulez aussi longtemps que vous voulez pour toute raison que vous jugerez bon d’avancer... parce que vous avez le pouvoir... car la puissance et la gloire leur appartient.

Il y a quelques années, lorsque j’étais en train de rédiger mon livre "l’Etat Voyou", j’ai employé le terme "Empire Américain" qui jusqu’à là n’avait pas encore été employé, je crois. J’ai eu recours à ce terme avec précaution parce que je n’étais pas certain que le public Américain était prêt à l’entendre. Mes craintes étaient injustifiées. Le terme est à présent fièrement employé par les partisans de l’Empire.

Il y a Dinesh D’Souza, l’intellectuel conservateur de Hoover Institution. Il a écrit cette année un article intitulé "A la Gloire de l’Empire Américain", dans lequel il dit que les Américains doivent finalement reconnaître que les Etats-Unis "sont devenus un empire, la puissance impériale la plus magnanime de tous les temps".

Robert Kagan de Carnegie Endowment écrit : "Et la vérité est que l’hégémonie bienveillante exercée par les Etats-Unis est une bonne chose pour une vaste majorité de la population du globe. C’est certainement une meilleure solution que toutes les alternatives réalistes."

L’éditorialiste Charles Krauthammer parle de "l’empire bienfaisant et unique" des Etats-Unis.

Et c’est ainsi que les gens qui sont impliqués dans la politique étrangère des Etats-Unis vivent avec — ils concluent, et proclament, et peut-être même croient, que leur politique étrangère est une force bienfaisante, un empire éclairé, qui apporte l’ordre, la prospérité et un comportement civilisé dans toutes les parties du globe et que lorsque nous nommes obligés de faire une guerre nous faisons une guerre humanitaire.

Et bien, considérant que j’ai passé une bonne partie de ma vie d’adulte à documenter en détail l’exact contraire, à montrer les effets cruels et horribles des interventions des Etats-Unis aux quatre coins du globe, vous comprendrez, je crois, que ma réaction devant de telles affirmations soit... HEIN ?!?

Ces intellectuels conservateurs - n’est-ce pas une contradiction ? - sont aussi amoraux que les gens de la Maison Blanche et du Pentagone. Après tout, les particules d’uranium appauvri ne sont pas logées dans "leurs" poumons et n’émettront pas des radiations pour le reste de "leur" vie ; Le Fonds Monétaire International n’est pas en train de détruire "leur" économie et ne fait pas de coupes dans "leurs" services sociaux ; ce ne sont pas "leurs" familles qui errent dans le désert comme des réfugiés.


Les dirigeants de l’Empire, la mafia impériale — Bush, Rumsfeld et Cheney et Powell et Rice et Wolfowitz et Perle — et leur scribes aussi, sont aussi fanatiques et intégristes que Oussama Ben Laden. Et le changement de régime qu’ils ont accompli en Afghanistan leur est vraiment monté à la tête. Aujourd’hui Kaboul, demain le monde entier.

Alors le monde a intérêt à s’y préparer, à l’Empire Américain. Un film à grand spectacle qui sortira dans les salles bientôt.

Il y a quelques temps, j’ai entendu à la radio un syndicaliste qui proposait ce qu’il appelait "une solution radicale à la pauvreté : donner aux gens de quoi vivre". Et bien j’aimerais proposer une solution radicale au terrorisme anti-Américain : arrêter de donner aux terroristes la motivation pour attaquer les Etats-Unis.

Nos dirigeants et souvent nos média veulent nous faire croire que nous sommes des cibles à cause de notre liberté, de notre démocratie, de notre richesse, de notre modernité, de notre gouvernement séculier, de notre simple bonté, et autres balivernes. George W. répète encore ces clichés un an après le 11 Septembre. Et bien, peut-être qu’il y croit mais d’autres officiels en savent plus depuis longtemps déjà . Une étude du Département de la Défense de 1997 arriva à la conclusion suivante : "les données historiques démontrent une corrélation étroite entre l’engagement des Etats-Unis dans des situations internationales et l’accroissement des attaques terroristes contre les Etats-Unis."

Jimmy Carter, quelques années après son départ de la Maison Blanche, exprimait sans ambiguïté son accord avec une telle conclusion. Il dit : "Nous avons envoyé des Marines au Liban, et il suffit d’aller au Liban, en Syrie ou en Jordanie pour voir de ses propres yeux la haine intense que ressentent beaucoup de gens là -bas envers les Etats-Unis parce que nous avons bombardé et tué sans pitié des villageois totalement innocents - des femmes et des enfants et des paysans - dans ces villages autour de Beyrouth... Le résultat... nous sommes devenus une sorte de Satan dans l’esprit des ces gens qui nous en veulent beaucoup. C’est cela qui a provoqué la prise d’otages et qui a provoqué une partie des attaques terroristes."

Les auteurs de l’attentat de 1993 contre le World Trade Center envoyèrent une lettre au New York Times qui disait, entre autres : "Nous reconnaissons notre responsabilité pour l’explosion dans cet immeuble. Cette action fut menée en riposte au soutien politique, économique et militaire des Etats-Unis à l’égard d’Israël, l’état terroriste, et au reste des dictatures de la région".

Et enfin, plusieurs membres d’Al Qaeda ont fait clairement comprendre tout au long de l’année que ce sont des choses comme le soutien des Etats-Unis aux massacres Israéliels et le bombardement de l’Irak qui sont à l’origine de leur haine des Etats-Unis.

Je fournis d’autres éléments du même ordre dans un de mes livres où je publie une longue liste des actions US au Moyen-Orient qui ont provoqué la haine de la politique internationale des Etats-Unis.

Et, soi dit en passant, je ne crois pas que la pauvreté joue un grand rôle dans la fabrication de terroristes. Il ne faut pas confondre terrorisme et révolution. Et les attaques ne cesseront pas tant que nous continuerons à bombarder des innocents et à dévaster des villages et d’anciennes cités grandioses, à empoisonner l’air et les gênes avec de l’uranium appauvri. Les attaques ne cesseront pas tant que nous continuerons à soutenir les auteurs des atteintes aux droits de l’homme les plus flagrantes, tant que nous continuerons à faire tout un tas de choses terribles. Nous renforcerons les mesures de sécurité qui sont en train de transformer notre société en un état policier, mais nous ne serons pas plus en sécurité.

Il n’y a pas qu’au Moyen Orient qu’on trouve de bonnes raisons de haïr ce que fait notre gouvernement ; nous avons créé une très longue liste de terroristes potentiels partout en Amérique latine pendant un demi-siècle d’actions Américaines bien pires que celles du Moyen-Orient. Je pense que si les latino-américaines partageaient la croyance des musulmans qu’ils iraient directement au paradis s’ils donnaient leur vie en tant que martyr pour le grand ennemi, nous aurions déjà connu des décennies d’horreurs terroristes qui arriveraient par la frontière sud. Il y a déjà eu de nombreuses attaques terroristes sans suicide contre des Américains et leurs bâtiments en Amérique latine depuis des années.

Et il y a l’Asie et l’Afrique. Même histoire.

Récemment le Département d’Etat a tenu une conférence sur la manière d’améliorer l’image des Etats-Unis à l’étranger et réduire ainsi le niveau de haine ; ils travaillent sur l’image, pas sur un changement de politique.

Mais, sur le tableau de la politique, voici ce qu’on peut lire : de 1945 jusqu’à la fin du siècle, les Etats-Unis ont tenté de renverser plus de 40 gouvernements étrangers et à écraser plus de 30 mouvements populaires qui luttaient contre des régimes insupportables. Dans le même temps, les Etats-Unis ont bombardé plus de 25 pays, provoqué la mort de plusieurs millions de personnes et condamné plusieurs millions à une vie de souffrance et de désespoir.

Si j’étais le président, je pourrais arrêter le terrorisme contre les Etats-Unis en quelques jours. Définitivement. D’abord je demanderais pardon - très publiquement et très sincèrement - à tous les veuves et orphelins, les victimes de tortures et les pauvres, et les millions et millions d’autres victimes de l’Impérialisme Américain. Puis j’annoncerais la fin des interventions des Etats-Unis à travers le monde et j’informerais Israël qu’il n’est plus le 51ème Etat de l’Union mais - bizarrement - un pays étranger. Je réduirais alors le budget militaire par au moins 90% et consacrerais les économies réalisées à indemniser nos victimes et à réparer les dégâts provoqués par nos bombardements. Il y aurait suffisamment d’argent. Savez-vous à cmmbien s’élève le budget militaire pour une année ? Une seule année. A plus de 20.000 dollars par heure depuis la naissance de Jésus Christ.

Voilà ce que je ferais au cours de mes trois premiers jours à la Maison Blanche.

Le quatrième jour, je serais assassiné.

Sur la deuxième page de "L’Empire Américain pour les Nuls", j’écrirais ceci et l’encadrerait en rouge :

Après le bombardement de l’Irak, les Etats-Unis se sont retrouvés avec des bases militaires en Arabie Saoudite, au Koweït, Bahreïn, Qatar, Oman et les Emirats Arabes Unis.

Après le bombardement de la Yougoslavie, les Etats-Unis se retrouvèrent avec des bases militaires au Kosovo, en Albanie, en Macédoine, en Hongrie, en Bosnie et en Croatie.

Après le bombardement de l’Afghanistan, les Etats-Unis se retrouvent avec des bases militaires en Afghanistan, au Pakistan, Kazakhstan, Ouzbékistan, Tadjikistan, Kirghizstan, Géorgie et peut-être ailleurs dans la région.

Pas très subtile n’est-ce pas ? Pas très discret. Ceux qui dirigent l’Empire ne se gênent pas trop. Et c’est ainsi que grandit l’Empire, une base dans chaque coin, prête à se mobiliser pour écraser toute menace au règne impérial, réelle ou imaginaire. 57 ans après la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, les Etats-Unis ont toujours des bases importantes en Allemagne et au Japon. 49 ans après la fin de la guerre en Corée, l’armée des Etats-Unis est toujours présente en Corée.

Il y a quelques années, un rapport du Pentagone disait :

"Notre premier objectif est d’empêcher l’émergence d’un nouveau rival, que ce soit sur le territoire de l’ex-Union Soviétique ou ailleurs.... nous devons maintenir les mécanismes pour empêcher un concurrent potentiel de prétendre jouer un plus grand rôle régional ou global".

Le bombardement, invasion et occupation de l’Afghanistan ont réussi à mettre en place un nouveau gouvernement qui sera suffisamment servile devant les objectifs internationaux de Washington, y compris devant l’installation de bases militaires et de stations d’écoute et, peut-être le plus important, la construction d’oléoducs et de gazoducs à travers l’Afghanistan depuis la Mer Caspienne. Je suis sûr que vous en avez déjà entendu parler.


Depuis des années, les barons Américains du pétrole lorgnentsurles vastes réserves de pétrole et de gaz autour de la Mer Caspienne, avec de préférence une route Afghano-pakistanaise jusqu’à l’Océan Indien, tenant ainsià l’écart la Russie et l’Iran. Les nababs du pétrole ont été très francs sur cette question, jusqu’à témoigner devant le Congrès, par exemple.

A présent ils ont les yeux rivés sur les réserves encore plus vastes de l’Irak. Si les Etats-Unis renversent Saddam Hussein et installent un gouvernement marionnette, comme en Afghanistan, les compagnies pétrolières américaines entreront en Irak et se régaleront. L’Empire Américain comptera un pays de plus et quelques bases supplémentaires.

Ou comme le Général William Looney, chef des opérations conjointes anglo-britanniques qui survolent et bombardent l’Irak tous les deux-trois jours depuis quelques années, a dit il y a quelques années :

"S’ils mettent en route un de leurs radars nous ferons exploser leurs fichus missiles. Ils savent que leur pays nous appartient. Leur espace aérien nous appartient. Nous dictons leur manière de vivre et de parler. Et c’est ça qui est bien avec les Etats-Unis en ce moment. C’est une bonne chose, surtout qu’il y beaucoup de pétrole là -bas dont nous avons besoin."

Depuis plusieurs mois déjà nous assistons à un pas de danse qui veut se faire passer pour un débat, un débat sur le fait d’attaquer un pays souverain qui ne nous a pas attaqué, qui n’a pas menacé de nous attaquer, qui sait que cela signifierait pour eux un suicide collectif s’ils devaient nous attaquer. Ce débat est absurde, pas simplement parce que l’Irak n’est pas une menace - à l’heure qu’il est, même les martiens doivent être au courant - mais parce que notre mafia impériale sait que l’Irak ne représente aucune menace.

Ils nous ont raconté une histoire derrière l’autre pour expliquer pourquoi l’Irak serait une menace, une menace imminente, une menace nucléaire, une menace qui grandissait de jour en jour, que l’Irak était un état terroriste, que l’Irak avait des liens avec Al Qaeda, pour finalement voir chaque histoire déboucher sur le néant. Pendant longtemps ils nous ont dit qu’il fallait que l’Irak accepte le retour des Inspecteurs, et lorsque l’Irak donna son accord ils ont dit "Non, non, c’est insuffisant".

Combien de temps avant que l’horreur de Bali ne soit imputée à l’Irak ?

Y a-t-il un sens à cette soudaine urgence de mener une guerre en absence de conflit ? Oui, mais seulement si vous comprenez que cette histoire n’a rien à voir avec Saddam Hussein et sa méchanceté, ou ses armes ou le terrorisme. C’est parce que l’Empire a encore faim et veut avaler l’Irak et son pétrole et doit présenter une raison pour satisfaire quelques cas de conscience. Ensuite ils veulent avaler l’Iran.

L’Empire, au cas où vous ne seriez pas au courant, ne se contente pas uniquement de la Terre ; l’Empire a été officiellement étendu vers l’espace. Le Pentagone le reconnaît fièrement et ils ont même un joli nom pour en parler. Ils appellent ça "la domination totale" [full-spectrum dominance] et depuis des années déjà ils se préparent aux combats dans l’espace, à partir de l’espace et vers l’espace. Je cite.

Concernant l’Irak, si vous vous posez la question "pourquoi maintenant ?", je crois, comme beaucoup l’ont dit avant moi, que les prochaines élections ont quelque chose à voir. Ces élections vont décider du parti qui contrôlera le Congrès et il n’y a rien de tel que de parler de guerre et de défendre l’Amérique pour obtenir des voix et faire oublier dans le même temps l’économie et le système de santé.

En plus de toutes les absurdités et mensonges qu’ils nous ont servies, je trouve remarquable et dérangeant par les temps qui courent l’absence dans les mass média du simple rappel qu’une attaque des Etats-Unis sur l’Irak signifierait des bombes tombant sur des gens, exterminant des maisons, des écoles, des hôpitaux, des emplois, des futurs. La discussion s’est focalisée presque exclusivement sur "faut-il ou non s’en prendre au méchant Saddam et à ses supposées méchantes armes ?". Ce que cela suppose en termes de souffrances humaines ne mérite pratiquement aucune attention. Cela ne vous parait pas étrange ?

Absent aussi du débat ces dernières années est le fait que les inspecteurs de l’ONU ont trouvé et détruit de grandes quantités d’armes chimiques, biologiques et nucléaires en Irak. Je suis sûr que la plupart des Américains sont convaincus que Saddam a réussi a cacher pratiquement toutes ses armes et qu’il le ferait encore si les inspections devaient reprendre. Mais ce n’est pas ce qui s’est passé. Scott Ritter, chef des inspecteurs de l’ONU, a récemment déclaré :

"depuis 1998, l’Irak a été pour ainsi dire désarmée ; 90 à 95 % des armes de destruction massive Irakiennes ont été détruites de manière vérifiable. Cela inclut toutes les usines employées à fabriquer des armes chimiques, biologiques et nucléaires, les missiles de longue portée ; l’équipement associé à ces usines ; et la grande majorité des produits sortis de ces usines."

Il y a des témoignages similaires d’autres personnes impliquées dans les inspections.

Chacune des grandes campagnes de bombardements Américains charrie ses mythes, les uns plus gros que les autres. Je vais vous rafraîchir la mémoire.


On nous a dit que les bombardements US/OTAN sur la Yougoslavie en 1999 étaient destinés à empêcher le nettoyage ethnique du Kosovo par les Serbes. Et puisque le nettoyage ethnique a cessé, c’est que les bombardements ont été efficaces, correct ? Il y a d’abord eu le nettoyage ethnique, puis les bombardements, puis la fin du nettoyage ethnique. Difficile de faire plus simple. Je suis sûr que 90% des Américains qui réfléchissent à ce genre de questions croient à cette version, y compris parmi vous, j’imagine.

Mais ce n’était qu’un mensonge. Les bombardements n’ont pas mis fin au nettoyage ethnique. Les bombardements ont PROVOQUÉ le nettoyage ethnique. Le déplacement forcé de nombre de Kosovars - ce qu’on appelait le nettoyage ethnique - n’a commencé que deux jours après le début des bombardements, et était à l’évidence une réaction des forces Serbes, folles de rage et impuissantes devant les bombardements. On peut facilement le vérifier en examinant les pages d’un quotidien sur plusieurs jours en commençant quelques jours avant le début des bombardements dans la nuit du 23/24 Mars, et les quelques jours qui ont suivi. Ou alors jetez un coup d’oeil au New York Times du 26 Mars, 1ere page, qui dit : "alors que les bombardements de l’OTAN ont commencé, la crainte s’est renforcée à Pristina [la principale ville du Kosovo] que les Serbes retournent MAINTENANT leur colère contre les civils Albanais en guise de représailles".

Le lendemain, on trouve une première référence à une "marche forcée" ou quelque chose de similaire.

Comment peut-on faire avaler un si gros mensonge au peuple Américain sans qu’il s’étouffe ? Une des raisons est que les média ne dénoncent pas explicitement les mensonges ; au mieux, il faut savoir lire entre les lignes.


Il y a une blague de la période de la Guerre Froide qui raconte une tournée aux Etats-Unis d’un groupe d’écrivains Russes. Ils étaient étonnés de trouver, après avoir lu les journaux et regardé la télévision, que pratiquement toutes les opinions exprimées sur pratiquement toutes les questions importantes étaient identiques. "Dans notre pays", dit l’un entre eux, "pour obtenir ce résultat nous avons du imposer une dictature. Nous devons emprisonner les gens. Nous devons les torturer. Il n’y a rien de tout ça ici, alors, comment faites vous ? Quel est votre secret ?"

Qui peut me citer le nom d’un seul quotidien des Etats-Unis qui se soit clairement opposé au bombardement de la Yougoslavie il y a trois ans ? Qui peut me citer le nom d’un seul quotidien des Etats-Unis qui se soit clairement opposé au bombardement de l’Irak il y a onze ans ? Qui peut me citer le nom d’un seul quotidien des Etats-Unis qui se soit clairement opposé au bombardement de l’Afghanistan ?

Remarquable, n’est-ce pas ? Dans une société supposée libre, avec une presse supposée libre, avec environ 1500 quotidiens, la logique voudraient que les choses soient très différentes de ce qu’elles sont. Mais c’est ainsi.

Je suppose que certains d’entre vous aimeraient que je leur explique comment nous pourrions mettre un terme à toutes ces horreurs dont je vous ai parlé. Et bien, bonne chance à tous.

Pour ma part, je peux dire que je pars de l’idée que si suffisamment de personnes comprennent ce que fait leur gouvernement et le mal qu’il provoque, à un point donné le nombre de personnes sera suffisamment grand pour provoquer certains changements. Mais cela pourrait prendre beaucoup de temps. J’espère vivre assez longtemps pour le voir.

Je suis sûr que si tous les Américains pouvaient voir de près les victimes des bombardements de leur gouvernement, voir les débris des corps, sentir la chair brûlée, voir les maisons et les vies dévastées, il y aurait une exigence pour mettre fin à cette horreur, une exigence si forte que même les enragés de la mafia impériale ne pourraient l’ignorer. Mais comment montrer les victimes aux Américains ? Moi, comme beaucoup d’entre vous, je n’ai pas besoin de telles images pour m’opposer à la politique des enragés, mais la plupart des Américains si. Si nous pouvions découvrir pourquoi nous ressentons cette profonde empathie pour les victimes, pourquoi une telle imagination, cela pourrait devenir un très bon outil d’organisation.

Gandhi a dit "Presque tout ce que vous faites est insignifiant, mais vous devez le faire." Et la raison pour laquelle je dois le faire est exprimée par une autre citation, de différents sources religieuses, "Nous faisons ces choses non pour changer le monde mais pour empêcher qu’il ne nous change."

Sam Smith, un journaliste à Washington, que certains d’entre vous connaissent, dans son nouveau livre, dit ceci "Ceux qui croient que l’histoire nous a ôté tout espoir devraient se souvenir des abolitionnistes de 1830, des féministes de 1870, des syndicalistes de 1890, des écrivains gays et lesbiennes de 1910. Eux, comme nous, n’ont pas pu choisir leur moment historique mais eux, comme nous, ont choisi ce qu’ils en ont fait." Plus loin il pose la question "En sachant ce que nous savons sur la manière que certaines choses se sont déroulées, mais en sachant aussi le temps que cela a pris, aurions nous été abolitionnistes en 1830 ou féministes en 1870, et ainsi de suite ?"

Nous ne savons pas ce que l’histoire nous réserve mais on peut toujours donner un coup de pouce, tout comme l’histoire a donné un coup de pouce personnel à chacun d’entre nous. Dans les années 60, je travaillais au Département d’Etat, destiné à faire carrière dans les Affaires Etrangères. J’étais loin de penser que j’allais bientôt devenir un ennemi coco, rose, subversif, râleur et radoteur devant tout ce qui est décent et sacré à cause d’une chose appelée le Vietnam. Alors il y a toujours de l’espoir.


Permettez-moi de conclure avec deux lois de la politique apprises par le scandale du Watergate dans les années 70, que j’aime citer :

La première loi du Watergate sur la Politique Américaine est : "Quelque soit votre degré de paranoïa, ce que fait le gouvernement est pire que ce que vous imaginez".

La deuxième loi du Watergate est : "Ne croyez en rien tant que cela n’a pas été officiellement démenti".

Ces deux lois s’appliquent toujours.

William Blum

email : bblum6@aol.com


William Blum est, entre autres, l’auteur de :

Killing Hope : U.S. Military and CIA Interventions Since World War II (extrait français)

et Rogue State : A Guide to the World’s Only Superpower (extraits du livre en anglais)

(présentation du livre en français)


Ce texte a été traduit et nous a été transmis par

CUBA SOLIDARITY PROJECT



"Guerre contre le Terrorisme" , par Noam Chomsky - Amnesty International .


Le rapport Anti-Empire. Certaines choses que vous devez savoir avant la fin du monde, par Wiliam Blum.

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Texte de William Blum
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William BLUM
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A la fin, nous nous souviendrons non pas des mots de nos ennemis, mais des silences de nos amis.

Martin Luther King

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