RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

J’ai aimé Castro ! Je fais mes valises pour la CPI.

Dans le Grand Soir l'exemplaire Ignacio Romanet a déjà tout dit. Mais ce tout n'est pas assez. Convoquons les témoins pour lire nos mémoires d'outre tombe. Car sommes morts, socialement morts. Des morts vivants, des "rouges bruns" qui ont eu l'audace de briser l'esprit de la "nouvelle démocratie" -forgée à Washington- en lui mettant sous le nez le rêve et la réalité de Fidel. Quand le chemin de la liberté était le sentier de la vie.

CHRONIQUE D’UN MONSTRE.

Tant pis, à mon âge avec une vie mal faite derrière moi, je peux vous le confier au risque de me retrouver devant la Cour Pénale Internationale : j’ai admiré Castro. Admiré sans réserve. Pas comme mon ami Régis Debray qui n’a pas été nul dans l’éloge, et même émouvant. Mais qui a émis les réserves habituelles, comme les suspects arrêtés par le commandant Renault dans le film Casablanca. Des mots parachute qui vous évitent le pilori. Le problème de Régis, pourtant grand croyant et souvent grand crédule, est d’être parfois un « in-fidèle », de ne pas aller jusqu’au bout alors qu’il le devrait, de lâcher la cause en route. Comme on abandonne dans le col parce que le boyau est crevé et que soudain, coup de mou et faute de Rustines, on se demande si la vie vaut la peine d’être vécue l’humanité étant dégueulasse. L’esprit de révolution est comme la pierre ponce, il s’use. Et il use. Régis est passé à une autre pierre, un autre Pierre où Jésus a bâti son Eglise. Dommage, mais admirons le salut final du dernier des Mohicans : il a toujours le goût à la liberté et refuse la vie au caviar proposée par les petits maîtres de la sociale démocratie française. La mort du Lider maximo nous a permis de savoir qu’il y a toujours du fidèle en lui. Et je ne peux oublier une soirée heureuse, avec un retour à la case départ, celle qui précède « Révolution dans la Révolution ». Autour d’une table parisienne, dans un titre à la Alexandre Dumas nous étions réunis « Cinquante ans après ». Régis s’est retrouvé là ému, en militant prodigue rentré à la base pour honorer celui qui fût un temps son maître, Jacques Vergés. C’est l’avocat ami de Mao et rédacteur en chef, qui l’avait, pour la revue Révolutions, expédié en première patrouille sur les terres explosives de l’Amérique du Sud.

Si, parlant de Castro je vous parle de Debray c’est par commodité. Car évoquer aujourd’hui en France le suprême barbu est une entreprise impossible pour qui n’a pas d’outil, de toise, de cadran. Equipé on plonge alors dans le bazar du temps pour retrouver un étalon, un échantillon témoin. Avons-nous rêvé que nous, et des millions d’autres, aimions Castro ? Sommes-nous seuls « rouges-bruns » survivants de cette admiration devenue honteuse ? Pour nous pincer, nous réveiller, j’ai donc convoqué Régis, le vrai expert devenu plus crédible en homme du réel qui porte des costumes balzaciens. Il est notre témoin de moralité. A la barre de l’histoire il comparait pour dire aux incroyants qu’il est vrai que nous avons été fous, que nous n’étions pas seuls et avions raison de l’être.

Si dans un pays de liberté agonisante, la France où Chomsky est interdit de parole, je sonne le rassemblement de ceux qui ont accompagné Fidel, c’est par peur de ne pas être cru. Oui nous avons supporté avec lui, et portons encore l’utopie d’un monde plus juste. Une idée qui se sent maintenant seule comme une petite vieille la nuit sur un banc du Métro. Sur les écrans des télévisions on voit ces maîtres d’hôtel chargés de servir la vérité bien chaude, nous affirmer qu’avoir une émotion à l’annonce de la mort de l’ami du Che est grandement coupable. La preuve, dès qu’un politicien se montre –et nous n’en manquons pas, ce sont des gibiers de saison – il est assommé d’une question unique : « que pensez-vous des propos de Ségolène Royal sur Fidel Castro ? ». Disparu le vrai débat, l’œuvre et l’homme Fidel n’ont pas d’importance. Ne pas introduire l’idée contagieuse qu’hors le vin le rouge puisse être bon. Ce qui compte, c’est de demander à Bayrou, le Commandante du Béarn, ce qu’il pense des justes paroles sorties naturellement de la bouche innocente d’une ministre linotte : « Cuba n’est pas une dictature ».

Cette impossibilité de dire un mot positif, fut-il orphelin, sur l’œuvre de Castro – sauf à être un nouveau Faurisson – est un indicateur. Un indice scientifique comme celui qui mesure les marées. Puisqu’il est impossible de dire « Castro » sans recevoir de tomates, cela signifie que nos libertés sont mortes. Avec elles notre imaginaire et le devoir du contradictoire, du doute.

Je m’explique. Le droit de vomir Castro étant acquis et gravé dans les livres par la bande des Courtois, le gang des « Nouveaux » philosophes et autres techniciens de surface comme Enthoven, est-il possible d’introduire une nuance de Mandela dans le vert olive ? Non. L’affaire est pliée. Dire que Castro a mis un continent debout, et même un et demi en comptant l’Afrique, qu’il a rendu les frères de son île à l’état d’hommes, c’est postuler à l’opprobre. Celle d’une Cour de magistrats mondialisés qui tient open bar à La Haye. Voilà l’état de notre liberté. Et son emprisonnement dans la cellule de la pensée néo conservatrice, droit-de-l’hommiste, pourrait ne pas être grave... Il faudrait, pour un nano gramme d’optimisme, sentir pousser des lutteurs capables de cisailler ses barreaux. Bien non. Il n’y a pas grand monde. Il n’y a plus de lutteurs, ils ont rendu leurs paquetages à la globalisation. Restent des naufragés de Facebook communiquant entre eux comme des tôlards, en faisant du tam-tam dans les tuyaux, qui osent dirent les gros mots : « Fidel... je resterai fidèle ». Car, pour la pensée Pujadas, celle qui compte comme devant un guichet banque dans ce temps qui tourne le dos à l’espérance pour embrasser Wall Street, Castro avec « ses camps » est devenu un peu Hitler. Et Kissinger un Prix Nobel combattant pour la démocratie. Ainsi va la nouvelle histoire écrite par la sociale démocratie de France made in Washington. Celle qui envoie des gendarmes, à propos du contenu de son cours sur la Russie délivré en collège, poser des questions à un professeur breton.

Je pense qu’il serait souhaitable que les fabricants de jeux pour enfants nous facilitent la tâche. Qu’ils inventent une tablette sur laquelle, dès que les petits doigts pianotent l’icône Castro, ils reçoivent une petite décharge électrique. Le logiciel devra laisser de l’espace « libre » afin que cette gégène, l’enfer de l’histoire, puisse regrouper tous les monstres en une correcte haine. Ainsi notre monde deviendra juste et nos enfants heureux.

Ne dites plus « no pasaran », puisque les éradicateurs sont passés en piétinant nos raisons de vivre. Fidel tu as eu raison de mourir, ce monde n’est plus pour nous.

Jacques-Marie BOURGET

Texte à paraitre dans le magazine mensuel Afrique Asie de janvier 2017.

URL de cet article 31294
  
AGENDA

RIEN A SIGNALER

Le calme règne en ce moment
sur le front du Grand Soir.

Pour créer une agitation
CLIQUEZ-ICI

Même Thème
« Fidel Castro, Biographie à deux voix », interview d’Ignacio Ramonet
Hernando CALVO OSPINA, Ignacio RAMONET
« Ce livre est une semence qui va germer » Paris le 22 février 2007. Ignacio Ramonet est le directeur du mensuel français de référence Le Monde Diplomatique, mais aussi l’une des personnalités les plus prestigieuses parmi les intellectuels progressistes à travers le monde. Voici un an qu’est sortie en Espagne la première édition de son livre « Fidel Castro, Biographie à deux voix » où il s’entretient longuement et sans réserves avec le dirigeant principal de la révolution cubaine. Le livre se vend (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

L’un des plus gros mensonges officiels de notre temps est que les États-Unis et le Royaume-Uni sont en guerre contre l’islam radical. De l’Afghanistan à l’Arabie Saoudite en passant par la Syrie et la Libye, les extrémistes islamiques ont été pendant des décennies un allié vital dans leur véritable guerre : contre l’indépendance, l’unité panarabe et la souveraineté économique au Moyen-Orient.

Matt Kennard

"Un système meurtrier est en train de se créer sous nos yeux" (Republik)
Une allégation de viol inventée et des preuves fabriquées en Suède, la pression du Royaume-Uni pour ne pas abandonner l’affaire, un juge partial, la détention dans une prison de sécurité maximale, la torture psychologique - et bientôt l’extradition vers les États-Unis, où il pourrait être condamné à 175 ans de prison pour avoir dénoncé des crimes de guerre. Pour la première fois, le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, Nils Melzer, parle en détail des conclusions explosives de son enquête sur (...)
11 
Médias et Information : il est temps de tourner la page.
« La réalité est ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est ce que nous croyons. Ce que nous croyons est fondé sur nos perceptions. Ce que nous percevons dépend de ce que nous recherchons. Ce que nous recherchons dépend de ce que nous pensons. Ce que nous pensons dépend de ce que nous percevons. Ce que nous percevons détermine ce que nous croyons. Ce que nous croyons détermine ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est notre réalité. » (...)
55 
Ces villes gérées par l’extrême-droite.
(L’article est suivi d’un « Complément » : « Le FN et les droits des travailleurs » avec une belle photo du beau château des Le Pen). LGS Des électeurs : « On va voter Front National. Ce sont les seuls qu’on n’a jamais essayés ». Faux ! Sans aller chercher dans un passé lointain, voyons comment le FN a géré les villes que les électeurs français lui ont confiées ces dernières années pour en faire ce qu’il appelait fièrement « des laboratoires du FN ». Arrêtons-nous à ce qu’il advint à Vitrolles, (...)
40 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.