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Etats Unis / Russie : de la menace politique à la menace terroriste

La crise diplomatique autour de la Syrie prend des proportions rappelant les tensions américano- soviétiques lors de la guerre froide. Et le fait que la communication sur la question passe par l’intermédiaire du porte-parole du Kremlin, montre, s’il en est besoin, que le risque d’escalade militaire est pris au sérieux. Il est en effet difficile de ne pas réagir lorsqu’un pays comme les Etats Unis menace les villes russes d’actes terroristes.

Suite à l’inefficacité de la coalition américaine à atteindre le véritable but de cette campagne lancée en Syrie sous label "lutte contre le terrorisme", à savoir renverser Assad et mettre en place un dirigeant censé être plus docile, même si "extrémiste modéré", la position américaine se radicalise et passe le cap de la menace directe, plaçant le conflit entre les Etats-Unis et la Russie à un niveau de danger extrême.

Les Etats-Unis protégeant de facto Al Nusra et ne pouvant donc pas différencier sur le terrain les groupes dits "modérés" de ceux qui collaborent avec Al Nusra et Daesh, puisque sur le terrain cette frontière n’existe pas, le porte-parole de Département d’état, John Kirby, est passé à la vitesse supérieure et, le 28 septembre, menace directement la Russie de mesure de représailles, sous forme d’actes terroristes, si elle continue à soutenir Assad :

« Les conséquences sont telles que la guerre civile en Syrie se poursuivra, les extrémistes et les groupes extrémistes continueront de profiter du vide (du pouvoir — ndlr) en Syrie pour étendre leurs opérations qui comprendront des frappes contre les intérêts russes à l’étranger et peut-être même contre des villes russes. La Russie continuera de rapatrier dans des sacs ses militaires tués, et ils (les Russes — ndlr) continueront de perdre des ressources, peut-être de nouveaux avions »

Le ministère russe des affaires étrangères, ayant eu connaissance de ce message dans la nuit, a attendu jusqu’au matin un démenti. Mais non, les mots furent bien pensés et bien posés, puisque les journalistes ont fait précisé à J. Kirby sa position et il l’a répété deux fois. En voici la version en russe :

Suite à cela, les réactions officielles furent cinglantes. Maria Zakharova a comparé cette déclaration avec une commande d’attaque que l’on donne à son chien. Les terroristes ont très bien compris le message. Elle a également posé quelques questions intéressantes, avant qu’une réaction officielle ne soit formulée :

"Qui va commettre ces actes terroristes ? Les "modérés ? Ceux, justement, que les Etats Unis ne peuvent différencier de Al Nusra depuis plus de 6 mois ?"

Le vice-directeur du Ministère des affaires étrangères russe, Sergueï Riabkov, a confirmé cette analyse :

"Nous ne pouvons caractériser autrement cette déclaration que comme un soutien direct des Etats Unis, de cette Administration, aux terroristes."

La situation fut suffisamment sérieuse pour que D. Peskov, le porte-parole du Kremlin, intervienne personnellement :

"Conformément à notre législation, nous avons des services spéciaux, qui s’occupent de la lutte contre le terrorisme et qui fonctionnent de manière permanente. C’est pourquoi, je le rappelle, toutes les mesures nécessaires sont prises non pas de manière aléatoire en fonction des moments, mais de manière permanente. (...) Jusqu’à présent les Etats-Unis n’ont pas pu déterminer qui, en Syrie, appartient à l’opposition "modérée" et qui est terroriste. (...) Par cette rhétorique contreproductive, les Etats-Unis cherchent à mettre sur le dos de la Russie leur incapacité à réaliser les obligations qu’ils avaient prises."

Il faut dire que juste avant la déclaration de J. Kirby, J. Kerry, le Secrétaire d’état américain lors de la dernière conversation téléphonique avec le ministre russe des affaires étrangères, S. Lavrov, a affirmé que les Etats Unis pouvaient sortir des accords de coopération sur la Syrie. La coopération, en fait, est à ce jour unilatérale. Comme l’avait souligné S. Lavrov à la BBC, les Etats-Unis ne frappent pas Al Nusra. Jamais. Le porte-parole du Pentagone a bien du le confirmer, mais il doit se renseigner, il n’est pas sûr. Manifestement, la coalition américaine ne sait pas très bien sur quoi ou qui ils tirent ... Comme on dit, Dieu reconnaîtra les siens ... En attendant l’intervention divine, la coalition américaine a, elle, fait son choix.

L’élément, à mon sens, décisif, fut la réaction du ministère russe de la défense, par la voix de son représentant, I. Konachenkov. La Russie ne négocie pas la sécurité de ses citoyens, civils ou militaires. Leur protection est la priorité absolue du ministère de la défense. Mais il a également ajouté, un petit détail, en passant comme ça :

"La Russie sait parfaitement qui concrètement et exactement combien de spécialistes "non officiels" se trouvent en Syrie, et notamment dans la province d’Alep, qui s’occupent opérationnellement de l’organisation et de la direction des opérations des groupes combattants. Et dans le cas d’une tentative de réalisation des menaces contre la Russie et contre les militaires russes en Syrie, il se peut que les groupes combattants ne trouvent pas suffisamment de temps et de sacs pour enlever tous les morceaux."

Le lendemain, le porte-parole du Département d’état américain, J. Kirby, a très rapidement corrigé le tir : il ne s’agit pas du tout d’une menace, ils ne possèdent aucune information précise à ce sujet, il a été mal compris.

Une nouvelle conversation téléphonique est attendue entre Kerry et Lavrov. Les Etats Unis menacent de chercher une autre solution, puisque Assad viole le cessez-le-feu. Lavrov rappelle que les groupes terroristes et les mythiques "modérés" ne cessent d’attaquer. Mais la question reste toujours la même : les Etats-Unis sont-ils à ce point désespérés pour provoquer un conflit militaire ouvert contre la Russie, sur territoire interposé ?

Karine Bechet-Golovko

PS : L’échec attendu et répété des différents cessez-le-feu montre les limites de la conception post-moderne de la guerre. Quelle que soit le caractère multidimensionnel des conflits modernes (Syrie, Ukraine), il reste toujours des hommes et des armes, des clans opposés et des intérêts divergents, inconciliables. Un cessez-le-feu permanent ne peut que marquer la fin d’un conflit, il ne peut intervenir avant la fin du conflit armé. Or, pour cela, il faut un vainqueur. Un compromis n’est pas tenable lorsque les intérêts ne sont pas conciliables. Notre monde a peur de la partition, des vainqueurs et des perdants, il faudrait toujours trouver une solution qui satisfasse tout le monde. C’est un signe de faiblesse de notre époque, de notre génération, cette solution n’existe pas. Dans un conflit armé, le vainqueur impose sa vision de la victoire au perdant. Pour l’instant personne n’a perdu ou gagné le conflit en Syrie. Aucun cessez-le-feu ne peut être mis en place. Mais le risque, en sortant de l’espace politique, est d’arriver à une confrontation directe en les Etats Unis et la Russie, chacun soutenant "son poulain". Cynisme de circonstance mis à part, chacun soutenant une vision de la civilisation. Des groupes extrémistes contre un Président légitime. L’Europe, en sortant de sa léthargie, pourrait faire pencher la balance en se rappelant les valeurs qui furent les siennes. Mais encore faudrait-il qu’elle ait la force vitale nécessaire à cela.

»» http://russiepolitics.blogspot.fr/2016/10/etats-unis-russie-de-la-menace.html
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Jean ORTIZ
Recueil d’interventions d’une vingtaine d’auteurs latino-américains et européens réunis à Pau en avril 2007 pour un colloque portant sur l’éthique dans la pratique et la pensée d’Ernesto Che Guevara, une pensée communiste en évolution, en recherche, qui se transforme en transformant, selon les intervenants. Quatrième de couverture On serait tenté d’écrire : enfin un livre sur le Che, sur la pensée et la pratique d’Ernesto Guevara, loin du Che désincarné, vidé d’idéologie, doux rêveur, (…)
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"Les Etat-Unis eux-mêmes, par leur tendance croissante à agir de manière unilatérale et sans respect pour les préoccupations d’autrui, sont devenus un état voyou."

Robert MacNamara
secrétaire à la défense étatsunien de 1961 à 1968
paru dans l’International Herald Tribune, 26 juin 2000.

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