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Sur la question politique de la liberté de penser

À JC, qui écrit : « Je pense que tu vois le fond de ma pensée, soyons également des penseurs libres, et notamment libres d’en écouter d’autres sans perdre son esprit critique et sans se sentir obligé de se rallier à un camp. Les plus libres que je connaisse maintenant sont etc. »

Au risque d’être traité de dogmatique, tout en ne l’étant dans le fond pas plus que le patelin JC, et combien d’autres, pour qui la liberté de pensée est, elle est - a priori, posons la question : existe-t-il pour la pensée en politique deux camps, et seulement deux camps, en clair celui du travail et le camp du capital, entre lesquels la pensée la plus libre doit nécessairement choisir ?

La première liberté qui lui est offerte résidant précisément dans le choix de sa réponse à cette question :

 Je refuse d’écouter la question. C’est ma liberté.
Tout le monde aura compris quel camp je défends, malgré toutes les grimaces que je pourrai faire pour fuir.

 Bien sûr ! - À part : Je fais mine, mais dans toute mon action, comme je dois tout au premier, je compte bien faire passer en contrebande ma lutte contre le camp du travail.
Combien n’en n’entend-on pas sur les ondes, des esprits objectifs, qui sont sur cette ligne ?

 Je réponds : oui.
Quitte à passer pour un esprit obtus, voire à me faire traiter d’« encarté ».

 Je ne récuse pas la question, mais il existe le pré carré de la pensée libre dans lequel j’entends me tenir à l’écart du tumulte de la bataille. Je multiplie mes sources d’information, et j’écoute ceux qui sont libres.
Suprême sagesse et objectivité ! Sur quel critère, parmi la masse d’opinions, vais-je me faire la mienne ? Et m’en remettre à ces penseurs non-engagés, ne revient-il à rejeter sur eux la question ?

Il s’agit simplement de montrer ici que selon la réponse à cette question, qui n’est donc pas posée aux premiers, ni à ceux qui sont rémunérés pour défendre quotidiennement le capital, la pensée se trouve inconsciemment du côté de ces derniers, ou alors du côté du travail.

La pensée qui défend lucidement le travail n’est pas exempte d’erreurs ou d’illusions, elle peut se trouver temporairement ou sur tel ou tel point dans la situation de défense involontaire du capital, mais elle conquiert sa liberté dans sa lutte quotidienne contre les forces qui obscurcissent la question.

La pensée qui croit pouvoir se maintenir libre et en dehors du champ et du tumulte, peut occasionnellement se trouver du côté du travail et offrir un point d’appui à la précédente, mais en gros, étant donné que l’idéologie dominante est celle de la classe dominante, elle se trouve massivement et à son insu dans le camp du capital. Elle n’est absolument pas libre, quoi qu’elle pense d’elle-même.

Il n’y a bien que deux camps, et deux camps seulement, entre lesquels il faut choisir si l’on veut penser librement, c’est-à-dire lutter.

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Cette démocratie si parfaite fabrique elle-même son inconcevable ennemi, le terrorisme. Elle veut, en effet, être jugée sur ses ennemis plutôt que sur ses résultats. L’histoire du terrorisme est écrite par l’État ; elle est donc éducative. Les populations spectatrices ne peuvent certes pas tout savoir du terrorisme, mais elles peuvent toujours en savoir assez pour être persuadées que, par rapport à ce terrorisme, tout le reste devra leur sembler plutôt acceptable, en tout cas plus rationnel et plus démocratique.

Guy DEBORD

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