Le 21 mai 2014 au cimetière Diar Essaada, le soleil d’Alger était au rendez-vous d’Annik Hurst, de son père Jean-Louis, qui a déserté la machine du crime pour le combat de l’humain, et de sa mère Heike, la « femme aux cheveux rouges », qui « sera restée le phare en pleine mer jusqu’à son dernier regard ». Le soleil était là qui illuminait l’air et les couleurs de la nature printanière, la blancheur de la ville blanche aussi. En bas, en face la méditerranée brillait de son bleu argent, son hommage. Annik n’a pas dormi de la nuit, elle était pressée d’être là pour sa mère, pour son père, pour exaucer leur rêve. Ils étaient là aussi les frères de ce combat, passé et à venir. Les compagnons d’idéal, venus les accueillir, qui communient, qui comprennent le sens du sacrifice de ces deux militants.
Elle était là Djamila Boupacha l’insurgée. Et tant d’autres, ceux qui ont porté et qui portent la flamme que les Hurst ont portée, jusqu’à leur dernier souffle. Qu’ils sont venus transmettre, par cet ultime geste de se poser en cette terre libérée. Leur dernier vœu. Sur la pierre tombale, des mots simples, des mots qui brûlent de mille feux, des mots fulgurants :
J’ai quitté ma famille/
J’ai quitté mon pays/
Je suis un homme du monde...
J’ai quitté ma famille/
J’ai quitté mon pays/
Je suis une femme du monde...
Jean-Louis et Heike Hurst.
Un message planétaire. D’Alger ils disent à l’humanité entière la fraternité contre la barbarie. D’Alger conquise contre le colonialisme ils disent le devoir d’être un Juste. D’Alger ils demandent de dire non à la bête immonde. Ils auront, jusqu’au bout, par delà la mort, voulu porter un coup aux ennemis des hommes. Ils ont réussi. Ils sont citoyens du monde. Ils sont de partout.
A partir d’Alger qu’ils ont choisie pour avoir été de ses libérateurs, ils sont de partout. Annik qui rayonnait le savait si bien pour contenir ce souffle qu’ils lui ont transmis. Son sourire éclatant, son allant, sa verve étaient là pour dire ce qui l’animait. La joie d’être de Jean-Louis et de Heike, de ces parents qui lui ont insufflé « leur engagement et leur foi en la justesse et justice des hommes ».
Elle a dit : « Chacun d’eux m’a appris l’exigence de trouver sa place et son rôle dans l’univers ». Ils auront réussi. Il n’y avait qu’à la voir comblée de ce bonheur intense qui émanait de ses mots et de ses gestes.
Elle a dit débordant d’émotion : « c’est ici j’ai appris à marcher et courir dans le vent », car c’est ici qu’il y a cinquante ans, sa mère et son père l’ont mise au monde, après que leur lutte pour la libération de l’Algérie a réussi à chasser l’oppression colonialiste.
Ahmed Halfaoui