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Spéculation sur les devises comment ? Pourquoi ?

Pourquoi, comment et quelles conséquences pour les salariés canadiens entraînent ces variations de la valeur de la devise canadienne ? Variation sur laquelle la classe ouvrière n’a aucune prise, aucune influence, aucun moyen d’interférer ?

Dévaluation du dollar canadien

La Banque Toronto Dominion du Canada, l’une des six grandes banques canadiennes « too big to fail » comme disent les capitalistes financiers et leurs plumitifs économistes – vient de prophétiser que le dollar ne vaudra plus que 0,85 $ US en août 2014. Le huard canadien s’échange présentement à 0,90 $ US. Il a perdu 6% de sa valeur en 2013 et 4% supplémentaire depuis le 1er janvier 2014 (1).

Pourquoi, comment et quelles conséquences pour les salariés canadiens entraînent ces variations de la valeur de la devise canadienne ? Variation sur laquelle la classe ouvrière n’a aucune prise, aucune influence, aucun moyen d’interférer ? La classe ouvrière est ici une victime impuissante et ne peut que subir ce drame dont on voudrait lui faire porter les conséquences ?

L’Euro soutenu par l’économie impérialiste allemande

La monnaie d’un État fournit un indice de la santé de l’économie de ce pays. Tous conviendront que si l’Euro (principale monnaie en circulation dans le monde ayant déclassé le dollar à ce titre) ne s’est pas encore effondré c’est que l’Économie allemande est suffisamment puissante pour empêcher l’écroulement de l’Euro (pour le moment du moins). Il en sera autrement dans quelques temps mais pour l’instant que les spéculateurs respirent, l’Allemagne maintien le train de vie de l’Europe des dix-huit en spoliant de grandes sections des ouvriers d’Europe. C’est que l’Allemagne produit, pas toujours sur son territoire national, de nombreuses marchandises de grande valeur ajoutée (machines-outils, armements, appareils électriques et électroniques, équipements de transports, éoliennes, etc.) et elle en exporte une forte quantité dans le monde entier, si bien que sa balance commerciale (ce qu’elle vend moins ce qu’elle achète) est excédentaire et sa balance des paiements (ce qu’elle débourse moins ce qu’elle rapatrie en profits) est encore plus avantageuse.

L’économie impérialiste moderne est chaque jour plus dépendante des exportations et de la conquête des marchés étrangers. Sur ce point l’Allemagne impérialiste performe bien. Si ce n’était que de l’économie allemande l’euro vaudrait davantage que 1,35 $ US ou 1,50 $ CAD. Vous aurez compris que le dollar étatsunien qui sert d’étalon de comparaison révèle de facto que l’économie américaine performe moins bien que les économies européennes prises globalement.

Le dollar canadien attaqué-spéculé de tous côtés

Si le dollar canadien est en « berne » ce doit être que l’économie canadienne ne se porte pas très bien ? En effet, Le Canada est d’abord un exportateur de matières premières et de produits agricoles en vrac – sans grande valeur ajoutée (pétrole, minerais, céréales = 50% des exportations), ou de produits semi-ouvrés et transformés (fer, acier, titane, aluminium, produits chimiques, machinerie et équipements de transport = 50% des exportations). L’économie mondiale en crise réduit ses commandes de matières premières. À preuve la balance commerciale du Canada (biens et services) est déficitaire depuis des années et ne va pas s’améliorer (2).

Contrairement à ce que prétendent les économistes utopistes ceci n’explique pas cela. Toutes les économies nationales sont interdépendantes et en baisse d’activité économique globale. La crise systémique est mondiale. Cent ballons qui dégonflent à l’unisson conservent habituellement les mêmes proportions (3). La situation est semblable pour les devises de pays émergent exportateurs de matières premières dont les banques centrales ont récemment et soudainement haussées le taux directeurs à 10 et à 12% (4). Tout comme ces monnaies « émergentes » la devise canadienne subit des assauts répétés depuis plus d’une année. Pourquoi et comment ?

C’est que le président de la Banque du Canada, un riche oligarque au service des capitalistes monopolistes canadiens, orchestre la charge contre le dollar canadien afin de soutenir ses patrons. Afin de réduire le prix de revient des marchandises fabriquées au Canada il existe au moins deux méthodes :

a) La première consiste à augmenter la productivité du travail salarié afin qu’une plus petite portion du temps de travail de l’ouvrier soit consacrée à rembourser son salaire tout en maintenant à bon niveau la valeur du surtravail – de la plus-value et des profits – tout en permettant une réduction du prix à l’unité pour chaque marchandise écoulée. Cette performance est difficile à réaliser car dans la plupart des pays concurrents du Canada les capitalistes locaux en font autant et ils pressurent suffisamment leurs travailleurs pour maintenir leurs dividendes à la hauteur. Pour gagner cette course à la productivité-profitabilité (lire à la surexploitation du travail salarié) les patrons canadiens doivent accélérer les cadences et mécaniser davantage. Il faudrait soit déqualifier les travailleurs canadiens, comme les capitalistes étasuniens sont parvenus à le faire chez-eux ; soit opprimer davantage les ouvriers canadiens qui, plus syndiqués que dans les pays étrangers, résistent mieux à ce type de déqualification et à ce type d’oppression.

b) Le grand capital monopoliste canadien s’est donc tourné vers la seule alternative envisageable dans les circonstances, soit de dévaluer le huard canadien par rapport aux devises de ses concurrents qui exportent sur le marché canadien et sur les différents marchés étrangers convoités. Ainsi, les économistes le font remarquer, les produits canadiens coûteront moins chers que ceux des concurrents. Cette dévaluation internationale du dollar a le même effet que de hausser le prix des produits offert aux canadiens – réduisant le salaire réel des travailleurs (une valeur fixe et inélastique) en diminuant la valeur de chaque dollar reçu en salaire par l’ouvrier canadien.

Conséquemment, soit le salarié cessera d’acheter les biens importés à prix surélevés, soit il consacrera une plus forte portion de son revenu pour sa subsistance, réduisant ses dépenses pour des produits et des services moins essentiels. Ce faisant le salarié réduira sa consommation globale, comprimant d’autant le marché canadien mais pas les dividendes des marchands qui maintiendront pour un temps leur taux de profit… jusqu’à ce que le marché s’effondre complètement.

Le président de la Banque supervise la crise contre la devise

De quelle façon le Président de la Banque du Canada parvient-il à orchestrer l’assaut des « banksters » canadiens et internationaux contre la devise canadienne direz-vous ? Le pseudo-économiste nous le révèle dans son article. Il écrit : « le ton conciliant de la Banque du Canada a été perçu comme un feu vert sur les marchés pour faire plonger le dollar canadien ». Le coolie-économiste de service rapporte également, à l’intention de ses lecteurs argentés : « En décembre dernier, les autorités américaines rapportaient que les paris contre le huard explosaient ». Le scribouilleur souligne même que les banques canadiennes sont de la partie dans l’assaut contre le vaisseau canadien. Il ajoute « Cette observation arrivait après plusieurs prévisions pessimistes de grosses banques à l’égard de la monnaie du pays. Parmi les moins optimistes figurait la banque Goldman Sachs qui ciblait un huard à 88 cents US. (…) Pour sa part, l’OCDE évalue la juste valeur du dollar canadien à 81 cents US, selon son indice de parité du pouvoir d’achat » (5). Si un spéculateur n’a pas compris ce qu’il doit faire c’est qu’il ne mérite pas de participer à la curée.

Ajoutez à cela que les travailleurs canadiens croulent sous les dettes personnelles et hypothécaires et, disent les cambistes, leur résidence est surévaluée de 30 à 60% ce qui plus tard amènera les banques à charte à hausser les taux d’intérêts sur les prêts de façon à tondre le mouton deux fois. C’est exactement ce que font présentement en urgence les banques centrales de cinq pays émergents (Afrique du Sud, Inde, Turquie, Indonésie, Brésil). Vous aurez compris que la dévaluation du huard aura des effets catastrophiques pour les ouvriers alors que les spéculateurs transformeront leurs dollars canadiens en devises étrangères s’échappant de la galère dans laquelle les salariés et leur famille resteront prisonniers (6).


INFORMATION : http://www.robertbibeau.ca/Palestine.html

1. http://www.lesaffaires.com/bourse/nouvelles-economiques/le-huard-a-85-cents-dans-six-mois-dit-la-td/565832
2. http://affaires.lapresse.ca/economie/macro-economie/201401/07/01-4726288-canada-la-balance-commerciale-fortement-deficitaire.php
3. http://www.les7duquebec.com/7-au-front/crise-economique-et-austerite-2e-partie/
4. http://www.les7duquebec.com/actualites-des-7/attention-cyclone-financier-a-lhorizon/
5. http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMImportExportPays?codePays=CAN
6. http://www.lesaffaires.com/bourse/nouvelles-economiques/le-huard-a-85-cents-dans-six-mois-dit-la-td/565832 et http://www.lesaffaires.com/secteurs-d-activite/immobilier/l-immobilier-n-est-surevalue-que-de-10-disent-le-fmi-et-la-td/565903

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« Cremada » de Maïté Pinero
Bernard Revel
Prix Odette Coste des Vendanges littéraires 2017 Maïté Pinero est née à Ille-sur-Têt. Journaliste, elle a été correspondante de presse en Amérique Latine dans les années quatre-vingts. Elle a couvert la révolution sandiniste au Nicaragua, les guérillas au Salvador et en Colombie, la chute des dictatures chiliennes et haïtiennes. Elle a écrit plusieurs romans et recueils de nouvelles dont « Le trouble des eaux » (Julliard, 1995). Les huit nouvelles de « Cremada », rééditées par Philippe (…)
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