RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

Egypte : vers un avenir de plus en plus sanglant

Alors que la foule des pauvres se rassemble en soutien de Mohamed Morsi, les bien-nantis marchent derrière les images de leur général. Des centaines de milliers soutiennent le coup d’Etat – et il y en a autant qui ne le font pas.

Des centaines de milliers de personnes se sont rendus hier autour de la mosquée de Rabaa au Caire pour protester contre le coup d’Etat en Egypte, tandis que des centaines de milliers d’autres se déversaient dans la place Tahrir pour soutenir leur général favori , Abdel Fattah El-Sisi, qui a organisé le ‘’coup-d’état-que-nous-ne-devons-surtout-pas-appeler-coup-d’état’’.

Grotesque, sans précédent, bizarre. Appelez ça comme vous voulez. Mais, d’un côté, les hélicoptères plongeant joyeusement au-dessus Tahrir, et de l’autre, la ligne de la police anti-émeute avec leurs casques à visière et les troupes debout en face des barricades des Frères Musulmans, deux histoires différentes. Les journalistes ne devraient pas être des marchands de malheur, mais les choses n’avaient pas l’air trop bonnes au Caire hier soir.

La chose la plus triste – le plus tragique, si vous voulez -, c’est que les foules dans Nasr City, à proximité de la route de l’aéroport où se situe la mosquée, étaient aussi gais et accueillants que les masses dans Tahrir qui considèrent leurs homologues comme des « terroristes » plutôt que des partisans de Mohamed Morsi, le Président légalement et démocratiquement élu de l’Egypte qui a été renversé par l’armée il y a trois semaines. Les dizaines de milliers d’Egyptiens traversant les ponts sur le Nil ou transpirant sous une chaleur de 40°C sur la route de l’aéroport étaient aussi heureux que s’ils se rendaient à un match de football.

Mais la gaieté s’arrête là. Les Frères musulmans, hommes et femmes, avaient amené des photos de Morsi et avaient peint des étoiles de David sur la caserne militaire près de la mosquée. Ils avaient empilé des milliers de sacs de sable autour de leur campement de tentes et des tas de pierres à lancer à tous ceux qui essaient de les déplacer. Mais les soldats sur la route – eux aussi, il faut le dire, gais et très amicaux – tenaient des armes automatiques à côté de véhicules blindés français et de fabrication américaine, et des matraques en bois, et étaient flanqués de policiers en uniformes noirs de mauvaise qualité.

Il semblait qu’ils n’étaient qu’à quelques heures du moment où ils allaient charger les frères musulmans, et peu importe combien d’hommes barbus étaient en train de lire le Coran sur la chaussée – ce qu’ils étaient effectivement en train de faire – et il était difficile d’imaginer les heures qui allaient venir autrement que mortelles.

Un point qui se distingue – et ce n’est peut-être pas à la mode de dire ça -, c’est que les partisans des Frères musulmans étaient généralement pauvres et avaient l’air pauvres dans leurs abayas sales et sandales en plastique. Certains des manifestants de la place Tahrir, qui étaient vraiment révolutionnaires contre Moubarak en 2011, ont paradé sur les ponts du Nil brandissant des affiches du général al-Sisi. Et il faut dire, aussi douloureux que cela puisse être, que la vue de gens bien nantis brandissant la photo d’un général en lunettes de soleil – quoique merveilleux et très démocratique général – était profondément déprimante. Qu’est-il vraiment arrivé à la révolution du 25 Janvier 2011 ?

« Nous aimons les soldats, mais nous n’avons pas besoin du général", a crié une femme en foulard près de la mosquée Rabaa, mais Sisi est maintenant un visage bien connu, l’homme qui va faire revenir l’Egypte dans sa véritable voie révolutionnaire, si vous pouvez oublier pour le moment que le premier président réellement élu dans l’histoire égyptienne moderne est probablement incarcéré dans une de ces baraques que nous longeons si allègrement sur ​​la route de l’aéroport.

Mais l’Egypte a besoin d’un gouvernement. En revenant de Nasr City pour me rendre au centre du Caire, ce soir, ma voiture a été bloquée dans un embouteillage parce que les familles rivales se battaient dans une fusillade à travers l’autoroute. Environ 1.000 Cairotes s’y étaient joints en jetant des pierres à partir d’une passerelle. Deux miles plus loin, une femme d’âge moyen avait été traînée par une moto et était allongée, souffrante, sur la chaussée. Bon nombre de conducteurs qui l’ont vue ont continué leur chemin, le nez de leurs familles pressées contre la vitre pendant que cette dame gisait bras et jambes écartés sur l’autoroute dans sa robe noire. Le proche avenir se présente mal.

Robert Fisk

http://www.independent.co.uk/news/world/africa/robert-fisk-on-egypt-as...

Traduction AVIC : http://avicennesy.wordpress.com/2013/07/28/egypte-vers-un-avenir-de-pl...

URL de cet article 21591
  
AGENDA

RIEN A SIGNALER

Le calme règne en ce moment
sur le front du Grand Soir.

Pour créer une agitation
CLIQUEZ-ICI

Désobéir : le petit manuel, de Xavier Renou
"Celui qui n’essaie pas, et celui-là seul, a déjà perdu." On a tous déjà manifesté des dizaines de fois. On a tous signé des centaines de pétitions. Mais combien sommes-nous à nous être demandés, lucidement, sans faux-semblant, ce qu’il en était de l’efficacité, et donc, de la pertinence, de nos moyens d’actions traditionnels ? Combien sommes-nous à nous réfugier dans une espèce de pensée magique chaque fois que nous sommes en colère, en nous habituant à considérer nos modes de protestation non plus comme (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

Si le climat avait été une banque, ils l’auraient déjà sauvé.

Hugo Chavez
Président du Vénézuela, au somment de Copenhague, Déc. 2009
en citant un slogan lu dans les rues de la ville.

Le DECODEX Alternatif (méfiez-vous des imitations)
(mise à jour le 19/02/2017) Le Grand Soir, toujours à l’écoute de ses lecteurs (réguliers, occasionnels ou accidentels) vous offre le DECODEX ALTERNATIF, un vrai DECODEX rédigé par de vrais gens dotés d’une véritable expérience. Ces analyses ne sont basées ni sur une vague impression après un survol rapide, ni sur un coup de fil à « Conspiracywatch », mais sur l’expérience de militants/bénévoles chevronnés de « l’information alternative ». Contrairement à d’autres DECODEX de bas de gamme qui circulent sur le (...)
103 
Appel de Paris pour Julian Assange
Julian Assange est un journaliste australien en prison. En prison pour avoir rempli sa mission de journaliste. Julian Assange a fondé WikiLeaks en 2006 pour permettre à des lanceurs d’alerte de faire fuiter des documents d’intérêt public. C’est ainsi qu’en 2010, grâce à la lanceuse d’alerte Chelsea Manning, WikiLeaks a fait œuvre de journalisme, notamment en fournissant des preuves de crimes de guerre commis par l’armée américaine en Irak et en Afghanistan. Les médias du monde entier ont utilisé ces (...)
17 
Le fascisme reviendra sous couvert d’antifascisme - ou de Charlie Hebdo, ça dépend.
Le 8 août 2012, nous avons eu la surprise de découvrir dans Charlie Hebdo, sous la signature d’un de ses journalistes réguliers traitant de l’international, un article signalé en « une » sous le titre « Cette extrême droite qui soutient Damas », dans lequel (page 11) Le Grand Soir et deux de ses administrateurs sont qualifiés de « bruns » et « rouges bruns ». Pour qui connaît l’histoire des sinistres SA hitlériennes (« les chemises brunes »), c’est une accusation de nazisme et d’antisémitisme qui est ainsi (...)
124 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.