RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

La pub ou la vie

La publicité s’est emparée de la vie pour l’insuffler à un objet mort, la marchandise.

La publicité croit être la vie (il suffit d’entendre parler les publicitaires !) alors qu’elle la tient prisonnière comme le possesseur d’un oiseau qui projette sur l’animal encagé ses visions de liberté. Elle envahie notre univers et apparaît comme l’expression de la vie alors qu’elle n’en est que l’occupante indésirable.

L’expression de nos désirs trébuche en permanence sur la publicité au point d’en faire des désirs « hors de nous-mêmes », au point de nous rendre complices non consentant de décisions, de plaisirs étrangers à nous-mêmes.

Consommer devient alors un acte de trahison de nos propres désirs. La publicité nous dépossède de notre libre arbitre, de l’image que nous avons de nos propres besoins et désirs. Elle est l’oeil impudique et totalitaire qui nous renvoie en permanence la réalité de notre soumission à la marchandise.

On ne consomme plus « pour... », mais on consomme « parce que... ». Le « vu à la télé » donne une dimension mythique à l’objet qui en fait un élément indispensable de la reconnaissance sociale. Consommer permet de « passer (symboliquement) à la télé »... c’est-à -dire exister aux yeux des autres dans la logique de la société d’images qui est la notre.

La publicité est un instrument de torture qui tourmente celle ou celui qui n’est pas dans la norme marchande, autrement dit celle ou celui qui ne peut pas payer. Elle lui renvoie le besoin de satisfaction de son besoin comme un interdit social. Elle lui rappelle qu’il n’est pas de ce monde, celui de la marchandise, qu’il est, en tant qu’exclu, inutile à la production marchande, autrement dit qu’il n’existe pas. Elle le sanctionne dans ce qu’il y a d’essentiel pour un individu : la reconnaissance sociale.

La publicité jette un voile pudique sur les conditions sociales de la production, sur l’immense gâchis de notre environnement, sur le monde détruit qu’elle nous prépare.

Elle nous trompe en jonglant habilement avec sa valeur d’usage et sa valeur d’échange en nous faisans miroiter le fameux « rapport qualité/prix » comme la quintessence de la rationalité en matière de comportement économique du consommateur. En fait, la qualité n’a de sens qu’au regard de la valeur marchande qu’elle permet de faire réaliser, de même que le prix n’a de sens qu’au regard du coût de la production et du rapport de force qu’il permet d’établir vis-à -vis des concurrents... Le soit disant avantage dont bénéficie le « client », n’est qu’un sous produit, souvent avarié, de conditions auxquelles il est parfaitement étranger.

Elle nous interdit le choix parce qu’elle le guide. Elle prend notre libre arbitre en otage. Quoi qu’on choisisse elle est là pour nous dire que c’est elle qui a décidé et nous donner l’illusion que c’est nous.

La publicité est le masque dont se pare la marchandise pour nous asservir.

L’acharnement des pouvoirs publics à lutter contre les campagnes anti publicitaires, par justice interposée évidemment, est tout à fait logique. Le système n’est pas fou, il a tout de suite senti la dimension subversive de telles actions qui ont désormais dépassé le stade de la simple dénonciation. Action d’autant plus subversive qu’elles se font suivant des schémas pas du tout conventionnel : il n’y a pas d’organisation, de chefs ou de mots d’ordre... c’est de l’action spontanée au sens le plus positif du terme. Action d’autant plus dangereuse qu’elle est sympa, conviviale et non violente. L’ensemble de celles et ceux qui y participent sont mus par la conscience et non par un réflexe bureaucratiquement réfléchi dans ses dimensions tactiques et stratégiques par des appareils clairement identifiés et présentant toutes les garanties de l’inoffensivité.

S’en prendre à la marchandise c’est s’en prendre à l’image sociale de la valeur d’échange de la marchandise, autrement au coeur du système marchand, à ce qui lui donne un sens. S’en prendre à la publicité dans un système marchand, c’est s’en prendre à l’image de l’idole ou de Dieu dans une religion. Ce n’est pas l’affiche qui est salie ou son support, ce n’est pas le créateur de l’affiche qui est insulté c’est l’idole qu’elle représente qui est foulée au pied : la marchandise... la marchandise dans ce qu’elle doit, croit, avoir de plus désirable, sa valeur d’usage, mais qui n’a de sens dans ce système que par sa valeur d’échange. Toucher à sa valeur d’usage c’est mettre en péril la valeur d’échange... La marchandise est une dans l’ambivalence des valeurs qui l’a constituent.

Il importe donc, dans les plus brefs délais (le temps c’est de l’argent), d’identifier celui ou celle qui est à la base du complot, d’abord et surtout pour le faire cesser. Le système ne comprend l’action que par l’existence d’instigateur, à l’image de l’entreprise qui ne saurait se passer d’un chef. Trouvez le chef, trouvez le meneur et le trouble cessera. Il faut aussi trouver le chef pour faire un diagnostic du mal, savoir par exemple si c’est une action traditionnelle, autrement dit bien encadrée et donc à terme contrôlable, ou s’il s’agit d’une autre forme de contestation, non dirigée et donc beaucoup plus dangereuse, signifiant une prise de conscience individuelle à dimension collective

Consciemment ou pas (peut-être est ce une réaction purement épidermique) celles et ceux qui ont entrepris cette action ont touché le coeur du système. Ils, elles ont touché ce qui est essentiel dans ce système.

Nous devons méditer cette expérience et nous demander si elle n’ouvre pas une voie nouvelle dans la lutte que nous menons, au même titre que la lutte pour la gratuité ou la mise en place de rapports sociaux nouveaux et non marchands. A l’heure d’une campagne électorale où l’on va nous bombarder d’informations, de pseudo analyses, de promesses, de projets tous plus minables les uns que les autres, cette bouffée d’oxygène devrait nous permettre de reprendre le souffle d’une action qui serait cette fois (enfin !) plus prometteuse que les vieilles lunes électoralistes que l’on nous sert régulièrement.

URL de cet article 1795
  
AGENDA

RIEN A SIGNALER

Le calme règne en ce moment
sur le front du Grand Soir.

Pour créer une agitation
CLIQUEZ-ICI

Même Thème
Bernard Klein. Les expressions qui ont fait l’histoire. Paris, E.J.L. 2008
Bernard GENSANE
Ce qu’il y a d’intéressant avec les phrases historiques, c’est que, souvent, elles n’ont pas été prononcées par les personnes à qui on en a attribué la paternité. Prenez la soutière (je sais, le mot "soutier" n’a pas de féminin, mais ça ira quand même) du capitalisme américain qui siège au gouvernement français, Christine Lagarde. Elle a effectivement, lors de la flambée du prix des carburants, conseillé au bon peuple d’utiliser le vélo plutôt que la voiture. Mais la reine Marie-Antoinette, qui a tant fait (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

Je ne pense plus que les journalistes devraient bénéficier d’une immunité particulière lorsqu’ils se trompent à ce point, à chaque fois, et que des gens meurent dans le processus. Je préfère les appeler "combattants des médias" et je pense que c’est une description juste et précise du rôle qu’ils jouent dans les guerres aujourd’hui.

Sharmine Narwani

La crise européenne et l’Empire du Capital : leçons à partir de l’expérience latinoaméricaine
Je vous transmets le bonjour très affectueux de plus de 15 millions d’Équatoriennes et d’Équatoriens et une accolade aussi chaleureuse que la lumière du soleil équinoxial dont les rayons nous inondent là où nous vivons, à la Moitié du monde. Nos liens avec la France sont historiques et étroits : depuis les grandes idées libertaires qui se sont propagées à travers le monde portant en elles des fruits décisifs, jusqu’aux accords signés aujourd’hui par le Gouvernement de la Révolution Citoyenne d’Équateur (...)
Médias et Information : il est temps de tourner la page.
« La réalité est ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est ce que nous croyons. Ce que nous croyons est fondé sur nos perceptions. Ce que nous percevons dépend de ce que nous recherchons. Ce que nous recherchons dépend de ce que nous pensons. Ce que nous pensons dépend de ce que nous percevons. Ce que nous percevons détermine ce que nous croyons. Ce que nous croyons détermine ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est notre réalité. » (...)
55 
Analyse de la culture du mensonge et de la manipulation "à la Marie-Anne Boutoleau/Ornella Guyet" sur un site alter.
Question : Est-il possible de rédiger un article accusateur qui fait un buzz sur internet en fournissant des "sources" et des "documents" qui, une fois vérifiés, prouvent... le contraire de ce qui est affirmé ? Réponse : Oui, c’est possible. Question : Qui peut tomber dans un tel panneau ? Réponse : tout le monde - vous, par exemple. Question : Qui peut faire ça et comment font-ils ? Réponse : Marie-Anne Boutoleau, Article XI et CQFD, en comptant sur un phénomène connu : "l’inertie des (...)
93 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.