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Tout cela pour la démocratie.

Le 16 juillet, le correspondant à Bagdad du journal australien Sydney Morning Herald, Paul McGeough, indiquait que des témoins crédibles avaient assisté à l’exécution de plusieurs prisonniers, fin juin 2004, par l’actuel Premier ministre du gouvernement nommé par Paul Bremer ! Allaoui, ancien membre du Baas, est connu pour sa « poigne » et ses liens avec la CIA et les services anglais (MI 6). Il ose aujourd’hui parler au nom de la démocratie et de la défense des droit de la personne humaine.

Alors que loi martiale et état d’urgence deviennent des thèmes quotidiens repris par le gouvernement intérimaire irakien, les attaques contre les forces d’occupation et la « nouvelle armée irakienne » - dont les cadres sont ceux de l’armée de Saddam - ne cessent pas. Le chef de la sécurité du ministre des Affaires étrangères vient d’être tué lors d’un déplacement de Bagdad à Kirkouq. Selon le quotidien du Caire Al-Hayat , le 15 juillet, dans la ville Haditah, au nord-ouest de Bagdad, une bombe a tué 10 policiers irakiens et blessé de nombreux civils. Les affrontements dans Kirkouk sont aussi très importants. L’oléoduc entre Kirkouk et Ceyhun (en Turquie) a été gravement endommagé. Le 15 et 16 juillet, les nouvelles forces de sécurité irakiennes continuaient leur opération de « nettoyage » dans la rue Haifa (voir article ci-dessous).

Les conflits entre diverses fractions chiites continuent, entre autres entre Moqtada al-Sadr et le chef religieux (Ayatollah) Ali Sistani ; toutefois, dans une déclaration faite au Los Angeles Times, il ressort qu’Ali Sistani fait attention de ne pas susciter une division irréparable au sein de la communauté chiite ; divisions qui sont stimulées par les forces d’occupation ainsi par le nouveau gouvernement irakien.

Le 16 juillet 2004, de nombreuses manifestations ont eu lieu à Bagdad, Karbala, Nadjaf, Bassora contre l’intégration d’éminents membres du régime de Saddam Hussein dans les hautes sphères du gouvernement d’Allaoui. Des slogans contre les Etats-Unis, le « Sionisme » (Israël) et le « terrorisme » étaient lancés. Les forces qui stimulent ces manifestations sont diverses ; on y retrouve aussi bien des partis chiites que des « clients » d’Ahmad Chalabi, l’ancien protégé de l’administration de G.W. Bush.

Dans un article du 16 juillet, Robert Fisk (dans l’Independent) montre que de nombreux civils - entre autres ceux qui cherchent un emploi auprès des autorités irakiennes et attendent devant des bâtiments officiels - sont les victimes des actions militaires de ceux qui s’opposent à l’occupation ; ce qui renvoie à un débat existant en Irak sur les modalités de conduite de la résistance. En même temps, souligne Fisk, ces actions (bombes, voitures qui explosent) devant les bâtiments officiels des autorités mises en place par les Etats-Unis révèlent et renforcent leur isolement. Réd.

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Dix-sept mois après l’invasion anglo-américaine lors de laquelle le Président G. W. Bush avait promis d’apporter la démocratie à l’Irak, Iyad Allaoui, le premier Ministre du pays (avec approbation américaine), a décrété hier une nouvelle législation autorisant les autorités irakiennes à imposer loi martiale, couvre-feu, interdiction de manifestations, limitation de mouvement, écoute téléphonique, ouverture de courrier et gel d’avoirs bancaires.

Des dirigeants militaires peuvent être désignés pour avoir le commandement sur certaines régions d’Irak. Une réintroduction temporaire de la peine de mort en vigueur sous Saddam Hussein est même maintenant probable. Déjà l’Irak a commencé à ressembler à n’importe quel autre pays arabe. Mais l’insurrection que ces lois sont censées briser a explosé en tirant des coups de fusil en plein centre de Bagdad à l’annonce de la nouvelle législation.

De façon incroyable, la bataille a commencé dans la rue Haifa, l’une des rues les plus passantes près du Tigre, quand des hommes armés ont attaqué la police et les troupes irakiennes.

Des hélicoptères transporteurs d’armes ont été vus à la hauteur des toits lançant des roquettes contre un bâtiment qui s’est enflammé. Des balles ont traversé le Tigre et au moins trois soldats supposés Irakiens ont été tués sur l’autre rive du fleuve.

Hier la violence était impossible à éviter dans la capitale. Celle-ci a commencé par des attaques au mortier dans des quartiers sécurisés où vivent des officiels du gouvernement sous protection américaine. L’un des mortiers est tombé près de la maison de M Allaoui et un autre a explosé à côté d’une clinique médicale près du siège du parti de ce dernier. Les explosions ont retenti dans toute la ville.

Une bombe dans une camionnette, entourée d’éclats d’obus et d’obus d’artillerie, a été désamorcée près du siège du gouvernement dans la matinée. En sortant de Bagdad à 11 heures du matin, j’ai vu une autre explosion énorme crachant fumée et débris dans l’air près d’un convoi américain. Dans la région, les troupes américaines ont fermé tous les ponts sur l’autoroute dans une tentative désespérée de protéger un long convoi de camions et de provisions se rendant vers la ville depuis l’ouest. Il y avait des embouteillages sur des kilomètres dans tout Bagdad, cela sous une température de 150 degrés Fahrenheit (65 degrés Celsius).

Beaucoup d’Irakiens ont commencé par accueillir favorablement ces nouvelles lois. La sécurité - ou plutôt l’absence de sécurité - a constitué leur crainte principale depuis que l’armée américaine a autorisé des milliers de pilleurs à mettre à sac Bagdad après l’invasion de l’année passée. Ceux-ci ont de toute façon vécu à l’ombre de lois de sécurité sévères pendant plus de deux décennies sous le régime de Saddam. Mais la nouvelle législation risque d’arriver trop tard pour sauver le " nouvel " Irak de M. Alloui.

Cela parce que de nombreuses régions du pays - comprenant au moins quatre des villes principales - sont déjà aux mains des insurgés. Des centaines d’hommes armés sont censées contrôler Samara au nord de Bagdad, alors que Fallujah et Ramadi - où quatre " marines " américains ont été tués mardi passé - sont aujourd’hui dans les faits des républiques autonomes.

Bakhityar Amin, le nouveau " ministre de la justice et des droits humains " irakien, une combinaison de rôles jamais vue nulle part au monde, a été choisi pour annoncer la législation martiale. " La vie du peuple irakien est en danger, menacée par des forces du mal, des gangs et des terroristes " a-t-il dit. " Nous réalisons que cette loi risque de restreindre certaines libertés, mais il y a un grand nombre de garanties. Nous avons essayé de garantir la justice et les droits humains. "

Celui-ci a encore ajouté que cette législation était nécessaire pour combattre les insurgés qui étaient en train d’"empêcher des employés du gouvernement de faire leur travail, d’empêcher des travailleurs étrangers d’entrer dans le pays pour aider à reconstruire l’Irak... et de faire dérailler les élections générales. "

C’est en raison de tout cela que nous pouvons dire que l’Irak est entré hier dans un nouveau chapitre fatal de son histoire, chapitre qui ne ressemble guère à la démocratie.

Robert Fisk écrit régulièrement dans les colonnes de The Independent, quotidien britannique. Cet article date du 8 juillet 2004.

Source : www.alencontre.org

 Lire aussi :

L’impérialisme US dans les braises orientales. Entretien avec Gilbert Achcar.

URL de cet article 1691
   
En finir avec l’eurolibéralisme - Bernard Cassen (dir.) - Mille et Une Nuits, 2008.
Bernard GENSANE
Il s’agit là d’un court ouvrage collectif, très dense, publié suite à un colloque organisé par Mémoire des luttes et la revue Utopie critique à l’université Paris 8 en juin 2008, sous la direction de Bernard Cassen, fondateur et ancien président d’ATTAC, à qui, on s’en souvient, le "non" au référendum de 2005 doit beaucoup. La thèse centrale de cet ouvrage est que l’« Europe » est, et a toujours été, une machine à libéraliser, au-dessus des peuples, contre les peuples. Dans "La fracture (…)
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"Avec une bonne dose de peur et de violence, et beaucoup d’argent pour les projets, je pense que nous arriverons à convaincre ces gens que nous sommes là pour les aider."

Un commandant a expliqué la logique derrière les mesures extrêmement répressives
(prises par les forces d’occupation pour faire régner l’ordre en Irak)
[New York Times, Dec. 7, 2003]

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