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Élections présidentielles de 2012 : la démocratie ou la dictature.

Le bal des clowns aux nez de toutes les couleurs, des rouges, roses, oranges, bleus, et bruns touchera bientôt à sa fin. Fin janvier 2012, et les jeux semblent déjà faits, disent les journalistes de grande audience. Tu m’étonnes ! Comme d’habitude, les médias tronquent les débats, fixent le temps de parole, adoubent celui qui fâche le moins les institutions financières et règnent en maîtres sur la dictature de l’agenda. Ils sur-médiatisent les thèmes néolibéraux et leurs porte-banderoles. Et ils censurent et taxent d’extrêmes les antilibéraux (notamment le Front de Gauche), qui sont loin d’être extrémistes. Après, ces mêmes médias s’étonnent presque que les « jeux » soient faits. Enfin, ils parviennent, comme à l’habitude française, à faire de la résignation un mode de vie dont le patronat et les banques pourront apprécier les bienfaits d’une masse de salariés corvéables à merci qui acceptent les attaques récurrentes au droit du travail. En retour, sur le plateau télé, les invités aseptisent les discours et se querellent comme dans une cour de récréation.

Tant et si bien que, à l’instar d’un D. Pujadas servile qui tente de poser des questions intelligentes sans y parvenir, dès qu’un sujet est fouillé dans son fondations, un autre sujet de seconde importance est imposé. Dès qu’une discussion aborde les points névralgiques de la guerre économique, celle qui donnerait aux spectateurs les idées et les armes de la résistance contre la machine, aussitôt, le maître de scène (journaliste) intervient pour scléroser et clore la discussion. Tous les sondages battent la chamade sur leurs études focalisées sur quatre candidats bien connus, et oublient volontairement de sonder les autres (Front de Gauche, Europe Écologie/Les Verts notamment), comme s’ils étaient insignifiants. Et surtout, comme si sélectionner un échantillon de mille personnes était représentatif d’une globalité d’électeurs. Le message de cet article n’est pas la critique des médias, et l’influence de la propagande sur l’opinion publique, on pourrait en écrire des dizaines à ce sujet.

1-Le clivage gauche/droite n’existe plus.

Le message de cet article, le voilà  : n’allez pas voter F. Hollande, ni E. Joly, mais J-L Mélenchon si vous vous reconnaissez comme étant de Gauche. En démocratie, il est mal vu de dire aux gens ce qu’il faut penser, dire, faire et voter. Mais nous ne sommes plus en démocratie, nous sommes en guerre (économique et sociale). Le clivage à l’ancienne gauche/droite n’existe plus. Des crises successives depuis 2008, un seul clivage viable d’analyse politique, à mon sens, a nouvellement émergé : l’antagonisme Relance de l’État/Austérité des marchés financiers, État public/État privatisé géré pour les banques et multinationales.

Et de tous les gloseurs de promesses électorales, seul un se propose de confier le pouvoir aux citoyens s’il est élu, en organisant une Assemblée Constituante, une Sixième République citoyenne, d’économie socialiste et écologique, le tout sans que personne ne soit lésé, laissé sur le carreau. Pas même les plus hauts revenus, puisqu’ils seraient taxés à 100% à partir d’un revenu déclaré de 300 000€ par an, somme qui somme toute, permet encore de bien vivre.

Si Jean-Luc Mélenchon n’est pas élu (et il ne le sera pas), la démocratie en tant qu’idéal et régime politique sera définitivement enterrée dans les pages de l’Histoire au profit d’une dictature financière. En votant en Avril prochain pour les adoubés médiatiques F. Hollande, F. Bayrou, N. Sarkozy ou M. Le Pen, les électeurs vont une fois de plus voter un changement qui n’arrivera jamais, ils donneront leur consentement pour la survie d’une monarchie qui verrouille les possibilités pour le peuple d’avoir du pouvoir face aux gouvernants. La fonction de ces gens est de protéger les intérêts du capital financier. Uniquement. Tous, à l’unanimité, acceptent la politique de rigueur imposée par les néolibéraux de Goldman Sachs et pratiquée par l’Union Européenne, même au FN, dont la candidate proposait, grosso modo, de faire une rigueur lavée de l’immigration. Mais c’est une austérité quand-même, ou plutôt préférons le terme de politique de rigueur (ce qui ni plus ni moins qu’une récession de long terme). Les oppositions qui les fâchent, sur le travail, les cotisations ou les retraites, l’immigration, la sécurité, l’écologie sont la face visible de l’iceberg. En substance, ils ne remettent pas en cause les écarts abyssaux des salaires, ni le rôle de la BCE et des banques, ni l’illégitimité de la dette publique. J’oublie volontairement la critique économique portée par M. Le Pen, car elle a beau critiquer le capital et les lois qui lui ont conférées son pouvoir, son programme xénophobe ne fait rien de plus que de le protéger.

Admettons que François Hollande soit élu : les soixante mesures qu’il préconise au micro auront pour résultat de ne pas fâcher la finance, contrairement à ce qu’il annonce. Les écarts de salaires continueront de se creuser, et les spéculateurs continueront de faire grimper les prix. Il faut aussi s’attendre à ce qu’aucune des coupes franches de la politique néolibérale menée par le tandem sans roues Fillon-Sarkozy, ne soit remise en cause (expulsions, lois sécuritaires, traitement et recrutement des fonctionnaires, carte judiciaire, privatisation des universités, accroissement de la dette publique sans refonte de la fiscalité, etc.). Au pire, le rouage continuera tout pareil. Les mesures fiscales annoncées par le PS auront pour conséquence de taxer les revenus, certes, mais d’une manière que les travailleurs indépendants et les entreprises individuelles devront supporter aussi les coûts d’une économie de casino qu’ils n’ont pas générée. Ce n’est pas au peuple de payer la casse des spéculateurs, et même le PS ne s’insurge pas contre les mécanismes de socialisation des pertes couplée de la privatisation des profits. Enfin, les mesures proposées par Mr. Hollande n’empêcheront en rien les marchés financiers de prendre le contrôle des institutions communautaires de l’Union Européenne. Ce qui risque de se produire, c’est qu’en même temps que le PS taxera les revenus des petits patrimoines, les spéculateurs au chevet des grandes banques, continueront de faire leur commerce sur les intérêts des prêts consentis aux pays pour payer une dette publique illégitime. Et comme le parti élu renâclera à refuser les politiques de rigueurs, les déficits issus de la récession pousseront l’État à souscrire de nouveaux prêts aux banques commerciales, à taux plus élevés puisqu’une bande de gangsters auront encore changé la réputation financière des États (le fameux triple A).

2-Une bonne raison de voter Front de Gauche : mettre un coup d’arrêt au néolibéralisme.

Je ne dis pas qu’il faut voter pour J-L Mélenchon, mais bien pour l’alliance du Front de Gauche. L’homme en lui-même, peut avoir bien des défauts, on lui reproche d’être trop enragé, trop endiablé, trop sectaire ou pas assez calme ou ouvert…on s’en moque, ce n’est pas un homme qui gouverne une Nation. Ce sont en l’occurrence, cinq partis politiques qui se proposent de donner le pouvoir à tous les citoyens qui seraient intéressés pour contribuer à la gestion des affaires publiques.

En novembre 2011, trois figures de proue de la puissante banque d’investissement Goldman Sachs ont fait irruption sur les institutions : Mario Monti en Italie, Loukás Papadà­mos en Grèce, et Mario Draghi à la tête de la Banque Centrale Européenne (BCE). J’ai déjà écrit deux articles à ce sujet, je n’en ferai pas un troisième volet, mais il y a eu un Coup d’État sur l’Europe où, ces derniers mois, une dizaine de gouvernements ont été renversés sans élection, sans motion de censure ni même de mouvement social, juste sous la pression des fameux marchés financiers. Dans le même temps, les agences de notation telle Standards & Poor’s déclaraient quinze pays, sur dix-sept de la zone euro, insolvables. Alors que, raisonnablement, un État n’est pas une entreprise, une entité qui peut faire faillite ou défaut de paiement, surtout lorsque ses dettes sont constituées d’anciennes dettes privées, issues de la crise de 2008-2009.

Sauf erreur, aucun parti si ce n’est ceux du Front de Gauche, n’évoquent cette nécessité de résister, de ne pas céder à la peur et la résignation face aux financiers. Contrairement à mes habitudes de libertaire enragé, j’exhorte mes lecteurs-électeurs qui se sentent de gauche à profiter de cette élection pour cracher enfin à la face de l’Europe et du monde, qu’en France, le peuple n’est pas un troupeau de moutons résignés qui attendent que l’abattoir ne vienne les tailler en gigots pour les festins du dimanche après la messe des bourgeois.

La France arrive à une échéance qui pourrait faire basculer son destin, et incarner dans son sillage le changement à toutes les politiques de l’Union Européenne. Imaginez qu’une bande de bourgeois depuis 54 ans (1958) discutent autour d’une table pour savoir ce qui sera bon à faire dans le royaume. 54 ans, même les régimes dictatoriaux maghrébins n’ont pas duré aussi longtemps ! Imaginez que depuis 1973, ces mêmes hommes mangent à la table de ceux qui vous affament : avec les patrons des multinationales et des grandes banques, ils cèdent à leurs caprices de petits gamins moutonniers. Avec tous le fatras que leur gourmandise a généré, ces élections, répétons-le inlassablement, sont l’occasion de les jeter dehors de notre pouvoir citoyen. Si un seul gouvernement socialiste (de type PG) était porté au pouvoir au sein des pays membres de l’UE, le pari peut être fait, j’en endosse la responsabilité, que la logique et l’exemple se reproduiraient outre-Hexagone, de la même manière que la révolte tunisienne s’est étendue à toute l’Afrique du Nord, puis au Moyen-Orient en 2011. Si cette logique de résignation et d’hypnose collective perdure, tant qu’aucun gouvernement ne porte son courage à deux mains sur la table, en criant son insoumission et sa résistance sur les toits et sur l’air des lampions, nul n’est à l’abri d’un éclatement social débouchant sur la guerre, le racisme et les replis communautaristes. Or, pour une fois, les élections présidentielles pourraient empêcher cela.

La France aux yeux du monde, c’était les grèves, les conflits de classe gagnés du prolétariat, du salariat contre le patronat. C’était la république des Lumières, une terre d’accueil et les Droits de l’Homme. Ce pays, c’était les progrès du Front Populaire (1936), les innovations sociales du Conseil National de la Résistance (1944). C’est grâce à ces innombrables acquis sociaux qui ont été durement conquis, qu’un travailleur, bien qu’il soit l’esclave d’un patron, pouvait se soigner, manger, partir en vacances et payer l’éducation à ses enfants. Bizarrement, on ne fait pas de comparaison européenne sur le nombre d’avancées sociales que les voisins européens ont puisé de droite et de gauche dans ce pays.

En fait, les élites néolibérales ont toléré jusqu’aux années 1975 ce capitalisme social, porté en France par les Gaullistes et qui dura quand-même jusqu’au crépuscule des années 2000. Mais le compromis n’était point souhaitable trop longtemps, alors, médias à l’appui, il a fallu asséner au peuple, sur qui repose tous les impôts injustes, que l’État n’existait plus, et que celui-ci n’avait plus de « marges de manoeuvre » face à la finance. Mais de marges, l’État en a étrangement gardées pour faire les lois sécuritaires, les lois de renflouement des banques en faillite, pour saigner à blanc le « petit » peuple et soigner ses riches. Les néolibéraux ont mis quarante ans à détruire, à l’échelle planétaire, tout ce qui faisait une civilisation progressiste. Et quasiment dix ans après le refus de Mr. Chirac, de s’engager dans une guerre inutile en Irak, il ne reste plus grand-chose, aux yeux du monde, de toutes ces valeurs d’universalisme républicain, de lutte sociale, de résistance. Nous avons une occasion en 2012 de récupérer tout cela, ne ratons pas l’heure en se trompant d’ennemis.

En France, ce n’est pas Nicolas Sarkozy l’unique responsable, comme si une fois son départ très apprécié, les choses iraient soudainement mieux. C’est que les dramatiques causes-conséquences de la globalisation commencent tout juste à se faire sentir, les institutions ayant été malgré tout protégées par le gaullisme et son capitalisme social (1). On peut d’ailleurs se souvenir à ce titre que le Parti Socialiste a toujours été plus enclin à conclure des accords de privatisation des entreprises publiques, que n’en ont fait le RPR et l’UMP du temps de Jacques Chirac. Les années 1980, sous l’ère Mitterrand, ont été marquées par le rapprochement avec M. Thatcher et R. Reagan et les premières grandes privatisations dans l’économie française. A un tel point, que, ironie amère du sort, le programme électoral de Jacques Chirac en 1995 (la fracture sociale) put paraître plus socialiste que celui du PS. En 1997, le gouvernement de Lionel Jospin était prêt à signer l’Accord Multilatéral sur l’Investissement, lequel aurait eu pour conséquences deux régressions importantes : une multinationale pouvait assigner un gouvernement en justice si l’exercice de son activité fut entravée (manifestation, grève, panne de courant, etc.) ; secondement, une même entreprise aurait pu assigner un même gouvernement en justice pour avoir pratiqué du protectionnisme ou bien une concurrence déloyale. En fait, c’était juste pour les entreprises occidentales, la porte ouverte vers l’implantation dans n’importe quel pays, sans que le gouvernement ne puisse s’y opposer, garanties contraignantes de l’OMC à l’appui. Lionel Jospin, sous la pression de la rue, revient sur la signature et l’AMI n’est jamais entré en vigueur. La politique est donc bien à l’origine de toutes les décisions en matière d’économie ou de finance publique. Cette victoire de la rue fut d’ailleurs un symbole fort lors de la création d’Attac (1998).

Bien loin de tirer dans les pattes du socialisme, mon voeu est de montrer qu’en France, avant la création du Parti de Gauche, tous les partis politiques s’agenouillent toujours au lit des marchés financiers, et donc il ne peut y avoir de clivage gauche/droite en ces conditions.

Et pourtant, les quarante millions d’inscrits (base de 2007) s’en vont aller voter par millions pour le PS, l’UMP ou le FN. Parce que les médias leurs ont dit qu’ailleurs, c’était dangereux. Dangereux pour le capital, on se comprend. Alors ils iront voter pour ceux qui vont faire sombrer la cinquième puissance mondiale dans la récession, l’obscurantisme, le chômage, la pauvreté, la misère ou la guerre. Et les électeurs abreuvés de promesses d’ivrognes s’en vont cautionner ce néolibéralisme flamboyant qui achèvera de dilapider tous nos savoirs-faires, toute l’émulation qui fait avancer une société.

A l’électeur peu convaincu qui me lit, j’aimerais lui dire en guise de paraphe, que si nous sommes dans le pétrin à cause de politiques corrompues, irresponsables et bien enracinés dans leurs dominations de classe sociale bourgeoise, c’est parce que la population les laisse faire lorsqu’elle se rend aux urnes et qu’elle se tait dans la rue ou bien à l’entreprise.

Résistons ! Et comme dit l’autre, si l’économie socialiste fâche les entreprises et les riches, qu’ils s’en aillent tous, nous avons largement de quoi nous débrouiller ici !

Samuel Moleaud,
27 Janvier 2012.

http://sam-articles.over-blog.com.

(1) Loin de faire l’éloge de la droite gaulliste, qui possède son petit lot de honte (colonialisme, mise au banc de la société de milliers d’immigrés, paupérisation des travailleurs peu qualifiés, début des délocalisations, etc.), l’on pourrait avoir de quoi regretter le temps où les hauts-fonctionnaires, toutes idéologies confondues, étaient des hommes politiques, et non des businessmen.

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