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L’Iran, havre de paix pour les Chrétiens du Moyen-Orient

Photo : Cathédrale catholique arménienne Saint-Sauveur, à Ispahan (par l’auteur)

Dans un article intitulé « SOS Chrétiens » et publié dans Le Point et La Libre Belgique, le philosophe français Bernard-Henri Lévy incrimine l’Iran, pays où « les derniers catholiques, malgré les dénégations du régime, (…) sont, en pratique, interdits de culte ».

Il y apparaît clairement, d’une part, que le souci de Monsieur Lévy est, en évoquant les récentes attaques qui ont visé les Chrétiens au Moyen-Orient, de discréditer l’Islam et, d’autre part, que ses « informations » concernant l’Iran sont en tous points erronées, puisque les communautés chrétiennes, dans ce pays, jouissent en réalité d’une complète liberté de culte, comme nous avons pu le constater lors de notre présence en Iran, en juillet dernier.

Ceux qui colportent des « informations » contraires ou bien ne connaissent pas la réalité du terrain et ne savent pas de quoi ils parlent, ou bien, volontairement, désinforment l’opinion en propageant des mensonges de manière éhontée. Dans les deux cas, ils participent à la diabolisation de l’Iran, leitmotiv du moment, par une manipulation qui confine à la propagande, dans le contexte international que l’on sait.

« Méfions-nous des faux prophètes, qui se déguisent en rebelles plein de compassion, pour nous convaincre d’accepter le monde tel qu’il est. »

Depuis plusieurs années et plus encore de ces derniers mois, les attaques contre les communautés chrétiennes se sont multipliées dans plusieurs pays du monde arabo-musulmans, et d’aucuns n’hésitent plus à parler de véritables persécutions organisées.

Certes, divers attentats ont frappé les Chrétiens du Maghreb. Toutefois, il s’est là toujours agi d’actes isolés et perpétrés par des groupuscules intégristes radicaux, sans que les gouvernements des Etats concernés n’eussent eux-mêmes été impliqués ; au contraire, ces derniers ont mis en oeuvre les moyens nécessaires pour lutter contre le terrorisme islamiste, qui menaçait également leur souveraineté et l’Etat de droit.

Mais il en va tout autrement aux Proche et Moyen-Orient, et en particulier en Egypte, en Arabie saoudite et en Irak, pourtant tous trois alliés objectifs de l’Occident et dont les gouvernements servent plus qu’à leur tour ses intérêts.

En Egypte, le gouvernement d’Hosni Moubarak, pour se maintenir au pouvoir, depuis 1981, a fait de nombreuses concessions aux milieux intégristes, surtout depuis une dizaine d’années : la société s’est transformée ; l’alcool, par exemple, n’est plus en vente libre et le port du foulard se généralise ; et, dans ce contexte, les communautés chrétiennes, coptes notamment, sont devenues les cibles de nombreuses exactions, sans recevoir de l’Etat la protection qu’elles sont en droit d’en attendre.

Plus radicalement, en Arabie saoudite, Etat islamique intransigeant, aucune pratique religieuse n’est autorisée, sinon l’Islam. Le culte chrétien est donc formellement prohibé (on n’y trouve aucune église), l’importation dans le pays de tout écrit chrétien ou instrument cultuel et la possession de vin sont sévèrement punis et interdiction est faite aux Chrétiens de s’approcher des lieux saints de La Mecque et de Médine.

En Irak, enfin, depuis la chute du gouvernement de Saddam Hussein, baathiste laïc qui maintenait le statu quo entre les différentes confessions et garantissait la liberté des cultes, des attaques de grande ampleur ont causé la mort de nombreux Chrétiens, sans, toutefois, que les responsables de ces actes aient pu être précisément identifiés, ni leurs objectifs clairement définis. Tout récemment encore, une cinquantaine de Chrétiens syriaques catholiques étaient massacrés dans leur cathédrale, à Bagdad.

En revanche, parmi ces Etats musulmans, l’Iran fait figure d’exception.

Cathédrale catholique arménienne Saint-Sauveur, à Ispahan (par l’auteur)

Bien que République islamique, l’Iran n’a en effet aucune politique d’hostilité à l’égard des Chrétiens et abrite d’ailleurs de vastes communautés chrétiennes : un peu plus de deux cent cinquante mille Chrétiens, majoritairement catholiques arméniens, y vivent en sécurité et pratiquent ouvertement leur religion, à condition de ne pas faire de prosélytisme. C’est ce que nous avons pu constater, il y a quelques mois, à travers les nombreux contacts que nous avons pris en parcourant l’Iran durant plusieurs semaines.

A cette occasion, nous avons pu visiter plusieurs communautés chrétiennes, participer à des offices religieux et rencontrer de nombreux chrétiens, en divers lieux du pays, qui vivent sans être nullement inquiétés, en citoyens ordinaires. Les prêtres marchent en rue avec le col romain et les églises ressemblent au nôtres, surmontées de grandes croix, au vu de tous.

A Téhéran, à notre grande surprise, nous avons même pu observer une reconstitution de la grotte de Lourdes.

A Ispahan, troisième ville d’Iran en importance, la communauté catholique arménienne ne possède pas moins de douze églises, avec pignon sur rue, dont la plus ancienne, la cathédrale Saint-Sauveur, date du XVIème siècle. Elle est en outre flanquée d’un grand musée dédié à la communauté arménienne et où la mémoire religieuse occupe une place non négligeable.

La culture de la vigne et la fabrication de vin sont même autorisés aux Chrétiens, non seulement pour l’exercice du culte, mais également pour leur consommation quotidienne.

Plus encore, la constitution iranienne garantit aux Chrétiens un nombre de sièges minimum, qui leur assurent une représentation systématique au Parlement iranien, alors que leur dispersion sur les cantons électoraux ne leur permettrait pas, normalement, d’obtenir un seul député.

L’Iran chiite respecte ainsi à la lettre les injonctions du Coran, qui oblige tout Musulman à protéger les « gens du Livre », Chrétiens et Juifs, ces derniers, au nombre de vingt-cinq mille environ, bénéficiant en Iran des mêmes droits que les Chrétiens.

Bref, au Moyen-Orient, en matière de liberté de culte et de protection des minorités religieuses, le pays des Ayatollahs, pourtant régulièrement diabolisé, pourrait donner bien des leçons aux grands alliés de l’Occident.

Pierre PICCININ
Professeur d’histoire et de sciences politiques
Website : http://pierre.piccinin-publications.over-blog.com

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