RSS SyndicationTwitterFacebook
Rechercher

Les mémoires de Tony Blair ou combien le Tribunal de Nuremberg me manque.

Il y a probablement maints indices qui signalent la lente dégénérescence d’une société. Un pourrait être le contenu des programmes de divertissement dans les médias de masse. Un autre pourrait être le maire ("socialiste") de Paris recevant comme une princesse la criminelle de guerre Condoleezza Rice (diplomatie oblige, n’est-ce pas ?). Un autre pourrait être un haut responsable politique se déclarant "responsable mais pas coupable".

Un autre pourrait être plus simplement cet instant terrible où la courbe ascendante des horreurs croise la courbe descendante des indignations - pour former une croix sur l’avenir.

Comme par exemple lorsque le manuscrit d’un menteur invétéré, d’un criminel de guerre trouve un éditeur et que les médias en fassent un happening littéraire et qui trouve un public prêt à faire la queue pour mendier quelque dédicace. Sans oublier les librairies qui le vendent.

J’avoue que tout dans Tony Blair m’horripile : son sourire, son regard, sa posture, ses manières, son parler, ses coulées de sueur lorsqu’il éructe ses mensonges. A chacune de ses apparitions je me pose la même question : est-ce un fou ou un psychopathe ? Il paraît que le fou ne sait pas faire la différence entre le bien et le mal alors que le psychopathe, lui, le sait mais s’en fiche.

Quelle société malade peut glorifier un tel personnage ? La nôtre, pardi.

Comment en est-on arrivé à railler en leur temps les Idi Amin Dada et les Jean Bedel Bokassa là -bas pour finalement aboutir à idolâtrer un Tony Blair ici ? A chacun ses fous, à chacun ses psychopathes, me direz-vous. Les premiers se maintenaient grâce à la dictature et par la terreur. Mais nous, ici, c’est quoi exactement notre excuse ? Qu’il cause bien et que ses saloperies à lui, il les a faites en bon chien chien qu’il est sur des trottoirs situés bien loin de nos rues piétonnes et commerçantes ? A part ça, je ne vois pas, je ne comprends pas.

Certains esprits encore lucides réclament justice contre Tony Blair devant un tribunal international. De quoi est-il accusé ? Permettez-moi de reformuler la question : de quoi n’est-il pas accusé ?

Alors peut-être qu’un jour un juge cessera de froncer les sourcils dans ses efforts pour prononcer correctement les noms bizarres de tous ces étrangers qu’on lui présente et lèvera enfin la tête devant un nouvel accusé qui aura un nom plus facile à prononcer, dont les papiers seront très probablement en règle et tous ses domiciles connus.

En attendant, Tony Blair peaufine sa défense et réécrit l’histoire - pourtant récente - et affirme qu’il est encore convaincu qu’il fallait attaquer l’Irak. Oubliées les raisons invoquées à l’époque, il lui suffit d’en sortir de nouvelles de son chapeau, a posteriori. Un vrai gamin, avec ses "oui, bon, d’accord, mais...". Et oubliées le nombre vertigineux de victimes et de destructions commises en notre nom et pour des raisons que la plupart d’entre nous serions incapables de rappeler avec précision.

Incroyable renversement de raisonnement auquel on assiste. "Oui, il y a eu beaucoup de morts et nous les regrettons, mais c’est le prix à payer pour ...." (et là vous mettez le terme cool, dans le genre "démocratie" ou "liberté", mais surtout pas "du Nutella", même si tout le monde aime le Nutella).

Le prix à payer ? Un "prix à payer" subrepticement révélé après la livraison de la marchandise ? Pourquoi ne l’ont-ils pas annoncé avant, ce "prix à payer" ? Pourquoi n’ont-ils pas dit avant qu’on allait massacrer plus d’un million d’Irakiens pour les rendre plus démocrates ? Et raser leur pays pour qu’ils puissent être libres et circuler sans être gênés par un mur encore debout ?

Tony Blair a menti pour déclencher une guerre sous de faux prétextes et il tente à présent de se couvrir comme le ferait n’importe quel criminel. Et le tout à la face du monde et devant les médias et les assistances captivées et composées d’élites solidaires par réflexe (de classe ?) et probablement légèrement nerveuses à l’idée que justice soit faite et qu’elles soient appelées à la barre des témoins. Car il en fallu des complicités pour satisfaire les pulsions d’un golden boy gâté de la scène politique européenne.

Dans le meilleur des cas, nous sommes devant une grave erreur commise par des responsables qui, en persistant dans leur folie, sont devenus des coupables à part entière. Je dis bien "dans le meilleur des cas".

Car la vérité est celle-ci :

Si le Tribunal de Nuremberg, crée à la sortie de le deuxième guerre mondiale pour juger les dignitaires nazis, devait siéger aujourd’hui...

...Tony Blair, au lieu de donner aujourd’hui des conférences et de publier ses mémoires dont on s’en bat l’oeil (qui croira un seul traître mot ?), serait probablement condamné à la prison à vie ou pendu...

...si le Tribunal de Nuremberg.

C’est pour vous dire si l’Occident a fait des progrès depuis la deuxième guerre mondiale.

Viktor Dedaj
«  l’arbre de ma réflexion produit parfois d’étranges fruits »

URL de cet article 11419
   
Même Auteur
Cuba est une île
Danielle BLEITRACH, Jacques-François BONALDI, Viktor DEDAJ
Présentation de l’éditeur " Cuba est une île. Comment l’aborder ? S’agit-il de procéder à des sondages dans ses eaux alentours de La Havane, là où gisent toujours les épaves des galions naufragés ? Ou encore, aux côtés de l’apôtre José Marti, tirerons-nous une barque sur la petite plage d’Oriente, et de là le suivrons -nous dans la guerre d’indépendance ? Alors, est-ce qu’il l’a gagnée ? C’est compliqué ! L’écriture hésite, se veut pédagogique pour exposer les conséquences de la nomenclature (…)
Agrandir | voir bibliographie

 

La provocation est une façon de remettre la réalité sur ses pieds.

Bertolt Brecht

© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.