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TTIP : pour ne pas y entrer, le mieux est de sortir de l’UE

STOP UE c’est STOP TTIP : Entretien avec Georges Gastaud, secrétaire national du PRCF

Initiative Communiste : Alors qu’Obama et la Commission Européenne pressent les capitales européennes de finaliser le Grand Marché Transatlantique instituer par un nouveau traité de libre échange, le TTIP comment comprendre les critiques de ces derniers jours entendues à Berlin ou Paris ?

Georges Gastaud : Comme tout traité supranational (et non pas INTERnational), le Grand Marché Transatlantique nie la souveraineté que des nations DOMINEES, non des Etats-nations dominants, ici les USA, qui conservent la main sur leurs marchés publics (on appelait cela jadis des « traités inégaux ») : il s’agit donc bien d’un avatar, non de l’ « ultralibéralisme », mais du capitalisme monopoliste d’Etat et des relations inter-impérialistes à l’échelle transcontinentale. Le libre-échange commercial est à sens unique, la concurrence est en réalité, NON libre et GRAVEMENT FAUSSEE ; elle n’est, comme nous l’avons dénoncé au sujet de la zone euro/mark et de son articulation à la zone dollar, qu’un crypto-protectionnisme continental ou transcontinental des monopoles capitalistes, et centralement, des monopoles américains, secondairement, des monopoles allemands et franco-allemands qui, en quelque sorte, se « vengent » sur l’UE du Sud et de l’Est avec la bienveillance du maître yankee. Cela dit, la politique d’austérité liée à l’euro ayant mis l’UE en crise et l’Allemagne connaissant de ce fait une baisse dangereuse de son carnet de commandes en Europe, les rivalités entre la RFA et les EU s’aiguisent, chacun voulant pénétrer les chasses gardées de l’autre, avant tout – CME oblige ! – les marchés publics, la protection sociale, les retraites, etc.. Et cela occasionne de sourdes divergences au sein de la coalition gouvernementale allemande (Merkel et Gabriel, le ministre du SPD, plus « protectionniste »). Bref, comme l’avait compris Lénine, les tendances à l’hyper-impérialisme transnational (l’ainsi-dite « mondialisation », ou la cartellisation européenne) et désormais, transcontinental, n’éliminent pas les tensions inter-impérialistes fauteuses de guerres, en dernière analyse, elles exacerbent la conflictualité.

Initiative Communiste : Que penses tu de l’impact concret pour les ouvriers, les paysans, les salariés du TTIP ?

Georges Gastaud : Socialement parlant, le GMT est tourné, d’une part contre le monde du travail, salariés, mais aussi artisans, petits commerçants, paysans, puisqu’il va exacerber le « moins-disant social » en permettant de dynamiter les protections sociales que l’UE n’a pas encore arasées. Il vise d’autre part le petit et moyen capital puisque les appels d’offres transcontinentaux détruisent l’idée même d’un marché national et d’un marché local. Et bien évidemment, les plus ciblés seront les travailleurs des PME sur lesquels leur patrons tenteront de reporter la facture : la loi El Khomri et son inversion de la hiérarchie des normes arrive donc à point nommé. Une fois encore, sous l’apparence d’un libéralisme concurrentiel et débridé, la dé-segmentation générale des marchés, et même ici et là une dose de concurrence supplémentaire, ne fait qu’avantager les MONOPOLES capitalistes, et parmi eux, ceux des pays dominants.

Initiative Communiste : Et sur le plan culturel ? l’exception française qui est tant vantée par les milieux intellectuels en France qui bien souvent sont aussi parmi les soutiens de l’Union Européenne pourra t elle survivre à ce traité de libre échange imposé par l’Union Européenne ?

Georges Gastaud : Culturellement parlant, le GMT signifie la mort des langues nationales (arasées, dès aujourd’hui, par le tout-anglais impérial) et des cultures nationales (chanson, cinéma, organisation de l’université et de la recherche, tout sera tiré vers le bas par l’américanisation). Aucun baratin sur l’ « exception » culturelle ne doit ici être de mise : comment en effet « la » culture pourrait-elle être épargnée si la civilisation est marchandisée dans son ensemble ? En quoi en outre la manière de vinifier le raisin, de fabriquer un parfum ou de produire une carlingue échapperait-elle à la « culture » ? Et pourquoi l’activité des intellectuels dits créatifs serait-elle protégée tandis que le travail non moins noble de l’ouvrier, de l’ingénieur, du paysan, du chercheur, serait abandonné au tout-GMT ? Écrasante est aussi la responsabilité d’une certaine gauche « radicale » qui feint de combattre le traité sous le slogan « Stop TTIP ! ». Comment combattre l’uniformisation économique en portant un slogan libellé en globish, ce langage « distinctif » des élites planétaires qui méprisent la langue parlée par le peuple leurs pays respectifs (sauf une) ?

POUR NE PAS ENTRER DANS LE GRAND MARCHE TRANSATLANTIQUE, LE MIEUX EST DE SORTIR DE L’EURO, de l’UE et de l’OTAN !

Initiative Communiste : Comment empêcher ce Grand Marché Transatlantique que la Commission Européenne et la classe capitaliste sont en train d’imposer aux peuples, sans aucun mandats démocratiques, par la force ?

Georges Gastaud : LA MEILLEURE FAÇON DE NE PAS ENTRER EST... D’EN SORTIR : sortir sur le champ des négociations sur le GMT, mais plus encore, claquer la porte de la zone euro et de l’UE qui négocie dans notre dos. Loin de faire obstacle à l’impérialisme étasunien, l’UE – pour laquelle Obama fait indécemment campagne en plein référendum sur le « BREXIT » – est le SAS qui conduit de la dissolution de l’Etat-nation et des droits sociaux y afférents, au GMT dont la police mondiale se nomme OTAN.

Hollande, assez de baratin sur la « protection de notre modèle social et culturel » que vous les attaquez tous deux de mille manières, notamment en arasant le Code du travail ou, tout dernièrement, en augmentant les quotas de chanson anglophone sur les radios. Ne mettons pas les pieds dans le GMT, sans quoi il faut se faire du souci car ceux-là même qui aujourd’hui nous disent si sottement qu’il faut « réorienter l’Europe » ou « gérer autrement » l’euro, nous expliqueront demain, si le GMT « passe », qu’il faut « refonder le TTIP sur des bases progressistes ». Et ils trouveront toujours pour cela un Parti de la Gauche Euro-atlantique assortie d’une Confédération Transatlantique des Syndicats...

Georges Gastaud a publié en 2015 Marxisme et universalisme, classes, nations, humanité (éditions Delga). Ainsi que de Lettres ouvertes aux bons français qui assassinent la France et de Mondialisation capitaliste et projet communistes (1997) aux éditions Le temps des cerises

Un entretien réalisé par www.initiative-communiste.fr

 http://www.initiative-communiste.fr/articles/europe-capital/tafta-ne-entrer-grand-marche-transatlantique-mieux-de-sortir

COMMENTAIRES  

01/05/2016 17:27 par macno

« TTIP pour ne pas y entrer, le mieux c’est de sortir de l’Euro »,
ou
pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué...
C’est bien la première fois que Georges Gastaud me fait éclater de rire, et sur un pareil sujet, faut y arriver !
C’est quand même beaucoup, beaucoup plus simple de ne pas signer ce traité que de changer de monnaie ET d’Économie...
De toute façon ce traité ne se fera pas, tout doucement aux Z’infos le terrain est préparé dans ce sens. Du moins rien ne se fera avant un autre président étasunien.
Deuxième sujet d’hilarité :
« Écrasante est aussi la responsabilité d’une certaine gauche « radicale » qui feint de combattre le traité sous le slogan « Stop TTIP ! ». Comment combattre l’uniformisation économique en portant un slogan libellé en globish ? »
« Stop » c’est du « globish » ?
Je ne sais pas si à l’avenir je m’arrêterai devant un panneau du code de la route rédigé dans une langue étrangère qui plus est impérialiste...Mais qui va payer les dégâts et/ou la contravention ?
Soit dit en passant "stop" n’est pas du « globish », mais tout simplement un mot anglais bien pratique en cas d’urgence...
C’est qui cette... "gauche radicale" qui a osé commettre une telle infamie ?

01/05/2016 19:46 par Vania

Article intéressant . Parlant de la culture , la réforme Najat-Belkacem du collège est en face avec le Traité:abolition de l’enseignement du latin, diminution des heures de français, la langue anglaise érigée en langue" supérieure" face aux autres langues étrangères...Comme dit M Gastaud :"Comment la culture pourrait-elle être épargnée, si la civilisation est marchandisée dans son ensemble ?" et j’ajouterai quand l’OCDE a remplacé le ministère de l’éducation pour les choix des programmes ?

02/05/2016 04:14 par Vania

Correction:Je voulais dire"est en phase avec le traité....."
Vania

02/05/2016 08:23 par cunégonde godot

Lucide et intelligente interview de M. Gastaud, qui fait le tour de la question "TTIP", en pointant bien les responsabilités des européistes en général – et des européistes "marxistes" en particulier – dans leur interminable "longue marche de trahison nationale"...
C’est dans la désunion et la contradiction (référendums 1992 et 2005) que le peuple français a "suivi" ses politiques et leurs grotesques porte-voix médiatiques, c’est par l’union qu’il en sortira, ou il disparaîtra de l’Histoire. Pendant ce temps, la pseudo-gauche "euro-marxiste" (sic) et donneuse de leçons fait du tri sélectif place de la République, à Paris – "sa" place.
Au secours !....

02/05/2016 08:34 par Scalpel

C’est

quand même beaucoup, beaucoup plus simple de ne pas signer ce traité que de changer de monnaie ET d’Économie...

Ben oui, Macno (future) !
"Plussimple", en "désobéissant" aux Traités...comme le fit, pardon, comme le promit le saigneur Tsipras au grand bonheur des rentiers au détriment du peuple Grec qu’il a trahi, saignée sans précédent, oui, mais "degauche".
Et puis pourquoi "changer de monnaie" quand l’euro calibré pour et par le premier exportateur mondial (de très loin, même la Chine est un nain en comparaison) achève de massacrer notre industrie, exsangue, en donnant un avantage inouï à la toute puissante Allemagne sur le sol européen, son premier marché ?
Pourquoi "changer d’Économie" sic (avec une majuscule comme à une divinité) quand celle-ci, produit dans les mêmes proportions dantesques misère et millionnaires (16 % de la population sous le seuil de pauvreté et bientôt TROIS MILLIONS de millionnaires, 3,7 millions à l’horizon 2019 selon une étude du Crédit Suisse menée en 2014, 2 134 000 millionnaires recensés à l’époque) ?
Comme vous le dites du texte plus haut en substance : ce serait désopilant si ce n’était effroyable.
Je veux bien entendre que sortir de l’UE n’est pas une garantie en soi pour avoir de la justice sociale (personne ne peut dire le contraire même si une sortie en est la condition sine qua non), mais de là à en conclure que seule l’UE peut en être le cadre, ce que vous clamez en creux...cela relève du non sens.

02/05/2016 09:24 par macno

@ ho hé, Scalpel !
Quand j’écris : « C’est quand même beaucoup, beaucoup plus simple de ne pas signer ce traité que de changer de monnaie ET d’Économie... », je précise que le sujet de l’article est le TTIP, pas l’Euro. Je ne porte en cela aucun jugement sur "sortir de l’euro ou non". Ce sont deux sujets qui n’ont rien à voir l’un avec l’autre : tout pays d’’Europe ne faisant pas partie de l’UE peut très bien adhérer (ou non) au TTIP...
Admettons l’hypothèse de sortie de la France de l’UE et donc de l’euro, mais "par la porte de droite", rien n’empêcherait alors son gouvernement de signer le TTIP. Le traité identique dans le Pacifique, le TPP si je me souviens bien, est négocié séparément par chaque État.
Mon commentaire n’était qu’une appréciation des difficultés que ces deux opérations représente(raie)nt...
Que ce traité parte déjà à la poubelle (chose qui ne présente aucune difficulté), ensuite on s’attaquera aux gros morceaux que sont l’UE et l’Euro.
C’est clair ?

02/05/2016 15:59 par cunégonde godot

@ macno,
Il n’y a pas plus de sortie de l’UE par la "porte de droite" ou par la "porte de gauche" qu’il n’y a d’entrée par la "porte de droite" ou par la "porte de gauche". C’est absurde.
Sortir de l’UE c’est recouvrer sa souveraineté – nationale ou populaire, appelons-la comme on voudra. La souveraineté n’est ni "degauche" ni "dedroite". Elle est seulement la condition de la démocratie et la possibilité d’une politique. Renoncer à la souveraineté nationale – l’ "Europe" de Maastricht, c’est d’abord cela – c’est renoncer à la démocratie et à toute politique indépendante (et la "sixième" république une farce pour enfants de chœur).
Ce n’est qu’en toute souveraineté qu’on peut mettre en œuvre un projet politique de "gauche". Ou non.
Dans l’ "Europe", la France n’a pas de politique du tout, autre que celle que lui imposera toujours l’Allemagne et les Etats-Unis et leurs alliés otanesques : la Grande-Bretagne et la Turquie (les autres Moyen-Orientaux sont contrôlés par les lobbys pétroliers). C’est exactement ce qui se passe aujourd’hui. Le TTIP (dont les "négociations" sont secrètes) est le prolongement du Traité de Maastricht pour lequel les croyants européistes français ont voté avec ferveur (jusqu’où va se nicher la haine de soi quand même !...).

02/05/2016 19:43 par Aris-Caen

Encore un bon billet de vrai communiste ;

02/05/2016 21:45 par macno

@ cunégonde godot
Non, mille fois non, sortir de l’UE c’est recouvrer une souveraineté c’est certain, mais celle du seul gouvernement qui l’aura décidé et mis en œuvre, point.
Il peut ensuite s’en foutre totalement de la souveraineté de la "populace", rien ne pourrait l’obliger à en tenir compte...
À la limite (faisons un raisonnement par l’absurde, enfin c’est à espérer...), envisageons une dictature d’extrême droite nationaliste issue d’un putsch militaires, elle peut très bien décider de sortir de l’euro, qu’est ce qui l’en empêcherait ? Rien...
Où serait alors la "souveraineté du peuple" ?
Dans les prisons...
Le pays serait pourtant bien sorti de l’euro, de l’UE, et peut-être bien aussi de l’OTAN (mais là, rien n’est vraiment certain)...
Pour retrouver sa souveraineté nationale, je suis d’accord sur le fait fait que récupérer sa monnaie est l’opération indispensable pour ce faire, mais récupérer sa monnaie n’est pas l’opération suffisante pour (enfin) acquérir une véritable souveraineté populaire , tout dépend de la couleur politique du gouvernement en place...
Il faut donc un projet politique bien défini à l’avance et qui tienne la route, qu’il soit populaire, souverainiste et écologiste etc..., pour accompagner cette sortie de la vue de ces trois gorgones pétrifiantes que sont l’euro, l’UE et l’OTAN ...
C’est ce projet politique qui demande l’élaboration d’une stra-té-gie et que Jacques Généreux a soigneusement dévoilée la sienne il y a 4 ans. Mais l’avez vous seulement lue, et sans les lunettes des préjugés, car comme je l’ai déjà dit, elles rendent aveugles...
Je ne vais pas entrer dans les détails, mais la stratégie de Jacques Généreux (nous on peut), elle n’est pas simple et n’est certes pas gagnée d’avance . Il en faudra du monde et de l’énergie pour la faire triompher. Mais en existe t-il une autre, de véritable stratégie, à part celle de la baguette magique ?

02/05/2016 23:20 par mandrin

en cas du non au référendum de Maastricht, Mitterrand avais surement un plan B pour contourner cette situation et l’histoire le démontre par ceux qui ont suivis, Sarkozi pour le traité de Lisbonne, Tsipras pour la Grèce et surement un plan B pour les anglais en cas de non au référendum de Juin(Obama a prévenu)...et a la remarque l’appartenance politique de ses trois là diffère les uns des autres,pourtant un destin commun les relie, celui des Judas.
Conclusion sa se décide dans une loge de pouvoir, le reste n’est qu’ enfumage et donne l’illusion d’ impliquer les peuples pour leur avenir.

Y a qu’une chose a faire, botter le cul de l’oligarchie Yankees et leur larbins hors du continent...en faire un boat people direction Washington DC et si le radeaux sombre corps et bien par grand fond abyssale, sa ne pourras être qu’une bénédiction."Alléluia"..
Une révolution de temps en temps émergent d’un mouvement spontané de tous et bien tous ensemble histoire de faire le ménage pour une nouvelle donne, et reconquérir nos libertés !

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