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Vénézuéla : référendum, fraude, chantage et intimidation

2 décembre 2003

Campagne de signatures pour organiser un référendum au Venezuela

VENEZUELA : LA DROITE RE-SIGNE. ET RE-FRAUDE ?

par Paul-Emile Dupret

Les opposants du président Chávez continuaient à récolter des signatures, ce dimanche 30 Novembre, pour convoquer le cas échéant un référendum révocatoire, et ayant recours de la sorte à un important mécanisme de démocratie participative qui avait été introduit dans la Constitution par le parti du Président lui-même. L’Organisation des États américains (OEA) et le Centre Carter ont reconnu que le gouvernement avait offert toutes les conditions pour que l’opposition puisse exercer ce nouveau droit qui n’existe dans aucun autre pays de la planète ; à savoir la possibilité pour les électeurs de révoquer tout mandataire élu, à la moitié de son mandat, si le peuple estime qu’il ne l’exerce pas de façon satisfaisante.

Mais comme l’opposition ne semble pas à même de récolter les 2,5 millions de signatures correspondant à 20% des électeurs, qui sont nécessaires pour convoquer le référendum révocatoire, (et encore moins les 3,8 millions de votes pour le gagner), elle a commencé une recherche désespérée de signature, et notamment en trichant.

Il flotte déjà une forte odeur de fraude à Caracas. Le porte-parole du Conseil national électoral (CNE) a annoncé qu’il allait adopter des sanctions contre les membres de l’opposition qui avaient exigé la signature des malades dans les hopitaux, en échange des soins de santé. Tandis que les télévisions commerciales ont lancé une offensive générale pour faire croire qu’il y a une pénurie de formulaires, ce qui justifierait le peu de signataires, le même porte-parole a démenti catégoriquement ces affirmations, en expliquant que le nombre de centre ne disposant pas de formulaires est minime, qu’il s’agit d’une situation tout à fait normale. Et qu’il suffit d’aller dans un autre centre dans le quartier. Le Conseil national électoral a aussi fait retirer les bureaux parallèles dotés d’ordinateurs avec lesquels l’opposition fichait les signataires. Cependant ces bureaux parallèles continuent à fonctionner, mais dans des maisons privées adjacentes aux bureaux officiels.

La veille, un groupe d’observateurs internationaux, parmi lesquels le juge Eric Halphen, le député italien Luigi Marino, le dirigeant du Mouvement des sans terres, Isaias Vedovatto, et la député hondurienne Doris Gutierrez, avaient dénoncé au cours d’une conférence de presse, le fait qu’ils avaient pu constater que la droite utilise des moyens d’intimidation pour tenter de forcer les gens à signer. Ils ont vu qu’à la plupart des tables de vote, les responsables de bureau donnent à chaque signataire une carte imprimée en couleur prouvant qu’il a voté, et sur laquelle il est invité à apposer son empreinte digitale et sa signature. Peu de jours auparavant divers employeurs ont annoncé qu’ils vérifieront que tous leurs employés ont bien signé et s’il disposent de la précieuse carte.

Le texte de la carte spécifie que le porteur de la carte "a laissé pour l’histoire la preuve de son souhait de chercher une issue pacifique (...) à la crise du pays". On en déduira donc que ceux qui ne sont pas titulaire de la carte sont violents, et ne méritent pas d’emploi, ni de pitié s’il s’agit de les réprimer demain.

Cependant l’odeur de fraude provient avant tout du divorce entre la réalité des faits, à savoir des tables de recollection assez désertées dès le second jour, et le discours triomphaliste, virtuel, divulgué dans les médias nationaux et internationaux, selon lequel le processus va bien, il y a une avalanche de signatures, on a dépassé toutes les attentes, etc.. Ces déclarations triomphalistes de l’opposition contrastent avec ce que les observateurs ont pu constater directement, à savoir une baisse considérable de l’affluence des signataires à partir du second jour.

Ce contraste entre les annonces virtuelles et la réalité de la rue, permet de penser que l’opposition prépare une méga-fraude, comme elle l’a fait en février pour éviter le coût politique de se laisser compter, et de voir s’effondrer toute son image internationale basée sur de la désinformation massive, distillée depuis des années au niveau national et international, selon laquelle Chávez est impopulaire et que les gens sont avec l’opposition. Début février 2003, pour détourner l’attention de l’opinion de l’échec de la "grève" pétrolière, la droite avait annoncé la récolte de 4 millions de signatures qui furent déclarées nulles par le nouveau Conseil national électoral nommé par consensus.

Divers observateurs internationaux ont exprimé leur préoccupation du fait que le règlement prévoit que ceux qui ont récolté les signatures peuvent les garder en leur pouvoir et les livrer au CNE après plusieurs jours, ce qui pourrait faciliter les fraudes.

Mais il y a des éléments importants en faveur de Chávez. L’appui populaire croissant au projet bolivarien, suite à la mise en place des programmes de réforme agraire, de réforme du foncier urbain, le plan médical Barrio Adentro, les plans éducatifs comme les écoles bolivarienne et le plan Robinson, l’accès à l’eau potable, etc.

Joue aussi en sa faveur le fait que l’opposition pourrait penser à deux fois avant de reprendre le chemin de la déstabilisation. Parce qu’elle est divisée, et parce qu’elle a subi des échecs à répétition, ce qui l’a considérablement démobilisée. En outre, à la différence d’il y a un an et demi, elle ne contrôle plus l’entreprise pétrolière PDVSA, et le groupe d’officiers qui s’était prêté à organiser le coup d’État a été écarté.

Et sur le plan international, ses grands alliés (Bush, Aznar, Blair, Berlusconi...) sont très occupés avec la guerre d’Irak et ne peuvent se payer le luxe du financement d’un nouveau front de guerre dans cette partie de l’Amérique latine.

Écrit à Caracas, le 30 novembre 2003.

Source : http://risal.collectifs.net/article.php3?id_article=759

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Viktor Dedaj

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