La décision du gouvernement portugais est un réel encouragement pour la campagne BDS. S’appuyer sur un savoir-faire acquis dans des conditions aussi violentes, illégales et immorales a été jugé inacceptable.
Le ministère portugais de la Justice a annoncé qu’il s’était retiré d’un projet conjoint – financé par l’Union Européenne – avec le ministère israélien de la Sécurité publique, la police nationale israélienne et l’université israélienne Bar Ilan. Le projet intitulé Law Train, qui vise à uniformiser les méthodes d’interrogatoire de la police, a suscité la controverse au Portugal en raison de la vive opposition à la participation d’Israël dans le programme européen « Horizon 2020 » et les violations répétées des droits de l’homme par les institutions et organisations israéliennes qui participent à ce programme.
Le gouvernement portugais a subi une forte pression des groupes de la société civile qui militent pour la fin de la coopération avec Israël. Les partis politiques ont dénoncé au Parlement l’usage systématique de la torture par la police israélienne et le rôle du ministère israélien de la Sécurité publique dans la détention illégale de milliers de prisonniers politiques palestiniens.
Le mouvement BDS salue la décision du Portugal
Jamal Juma’, coordinateur de la campagne Stop the Wall – une organisation membre du Comité national palestinien du BDS (BNC) – a salué la décision de principe prise par le gouvernement de centre-gauche du Portugal :
« Cette décision prise par le Portugal donne de l’espoir à notre peuple et envoie un message fort à Israël qu’il n’y aura pas de business aussi longtemps qu’il poursuivra son agression militaire contre Gaza et sa répression en Cisjordanie. Ce projet de l’UE donne une reconnaissance tacite au contrôle et à la répression du peuple palestinien par Israël, et détourne les yeux des abus notoires d’Israël à l’encontre des Palestiniens, la torture étant considérée comme une ’technique d’interrogatoire’ de routine. »
Le projet de cinq millions d’euros vise à développer les techniques pour unifier les méthodes de questionnement par les polices [européennes] par « l’amélioration des compétences d’interrogatoire » et en comblant ce que l’on qualifie de « lacunes dans la culture, la législation, le style des interrogatoires ». Les forces de police impliquées contribueront avec leur « expérience dans l’interrogatoire et la lutte contre la criminalité, à développer le système ». Le ministère israélien de la Sécurité publique et la police d’Israël sont accusés par les organisations de défense des droits de l’homme et par les Nations Unies, de pratiquer les détentions illégales, d’user de façon routinière la torture lors des interrogatoires, et de se servir d’une violence excessive contre les manifestants palestiniens.
Intensifier la campagne pour le Boycott, et mettre un terme aux projets de l’Union Européenne
Le Service Public Fédéral de Justice de Belgique et le ministère de l’Intérieur et la police de l’Espagne, des entreprises privées, des universités et des institutions de recherche, restent impliqués dans le projet dans le cadre de l’initiative européenne pour la recherche : « Horizon 2020 ». Après cette nouvelle victoire, les groupes soutenant le mouvement BDS en Espagne et en Belgique se sont engagés à intensifier leur campagne pour mettre fin au projet.
« Nous remercions les organisations de la société civile et les partis politiques du Portugal qui ont agi avec nous pour construire une solidarité effective basée sur l’appel au Boycott, au Désinvestissement et aux Sanctions (BDS) et assurer qu’il n’y aura aucun risque de prolifération des pratiques illégales et inhumaines israéliennes dans leur propre système de justice », a déclaré Juma’.
Une coalition sans précédent au Portugal, faite de groupes de solidarité, d’organisations de défense des droits de l’homme et de militants anti-racistes – avec également l’association représentant les officiers de la Révolution de 1974 – s’est réunie sur la base d’un rapport de Stop The Wall exposant la coopération et ses conséquences sur les droits de l’homme et la liberté des Palestiniens. Le Parti communiste portugais et le Parti des Verts avaient vivement interpellé les ministres des Affaires étrangères et de la Justice sur la question.
Le Movimento Pelos Direitos do Povo Palestino e Pela Paz no Medio Oriente (MPPM), initiateur de la coalition de la société civile contre le projet, a déclaré :
« Nous nous félicitons de la décision du Ministère de la justice de mettre fin à la participation de la police portugaise dans le projet Law Train. Le désengagement par le gouvernement portugais, est une victoire de toutes les forces qui en Palestine, au Portugal et en Europe, ont appelé à mettre fin à ce projet de coopération avec l’appareil répressif d’Israël . »
Aucun partenariat avec L’État de l’Apartheid !
Ces nouvelles ont été diffusées alors que le prisonnier palestinien Bilal Kayed poursuivait sa grève de la faim illimitée depuis le mois de juin 2015. Il y a actuellement plus de 7000 prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes, beaucoup d’entre eux étant incarcérés sans inculpation. Le Comité des Nations unies contre la torture à en mai dernier, une nouvelle fois exhorté Israël à prohiber l’usage de la torture, et a dénoncé son usage courant ainsi que tous les autres mauvais traitements lors des interrogatoires. Les organisations de défense des droits de l’homme ont toujours condamné ces traitements violents, en particulier à l’égard des Palestiniens mineurs.
Riya Hassan, coordinateur européen pour le comité directeur du BDS, a conclu :
« Cette dernière victoire est une nouvelle preuve que les gouvernements européens commencent à se soucier d’avoir Israël comme partenaire dans des projets qui risqueraient alors de porter atteinte aux libertés fondamentales, à la démocratie et aux droits de l’homme. Il y a encore un long chemin à parcourir pour mettre fin à la complicité de l’Europe avec l’Apartheid israélien. Le projet Law Train se poursuit avec les autres participants et ce n’est qu’un des nombreux projets militaires et de sécurité financés par la Commission européenne avec l’argent des contribuables. »
Notes :
Dans le cadre de la campagne dans le reste de l’Europe, des députés du Portugal, d’Espagne et de Belgique ont écrit à la Commission européenne pour dénoncer le projet. Les groupes de la société civile envisagent des actions de protestation. L’an dernier, 73 députés ont publié une lettre dans une initiative inter-partis, appelant l’UE à mettre fin au financement des entreprises militaires israéliennes impliquées dans des violations graves du droit international.
Depuis le début du cycle de financement « Horizon 2020 » en 2015, la campagne Stop the Wall, le Comité directeur du mouvement palestinien pour le Boycott, le Désinvestissement et les Sanctions (BNC) et la Coordination européenne des comités et associations pour la Palestine (ECCP), ont ciblé conjointement la participation d’Israël au programme « Horizon 2020 », en particulier la coopération avec le secteur militaire et répressif d’Israël. Dans le cycle précédent, qui s’est étalé de 2007 à 2013, l’UE a financé plus de 1500 projets de recherche et de développement avec participation israélienne. L’industrie aérospatiale israélienne (IAI) a été à elle seule impliquée dans plus de 16 projets, bénéficiant d’un financement européen et public pour un total de 148,5 millions d’Euros.
La torture est systématique dans les prisons d’Israël. Un rapport récent dévoile que 97% des mineurs palestiniens en détention n’ont eu accès à aucune assistance juridique avant et pendant leur interrogatoire. Durant les interrogatoires, 28,7% d’entre eux ont été soumis à des violences verbales ou à de l’intimidation, à l’isolement ou aux agressions sexuelles, tandis que 27,5% ont été soumis à la violence physique, y compris l’étouffement, les coups de poing, et à la pratique consistant à cogner la tête des enfants interrogés contre les murs.
23 août 2016 – BDS Movement – Traduction : Chronique de Palestine – Lotfallah
18 septembre 2016