Sous le titre « Les médecins étrangers en grève », le NOUVEL OBS.COM (23.12.05) publie un article sur la grève des 6000 médecins étrangers qui exercent en France.
>> L’article du NouvelObs
« Ces praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue) protestent contre leurs différences de statut [...] par rapport aux médecins français titulaires, qui se traduit par des rémunérations moindres. »
L’article est illustré par une photo où l’on voit des médecins au teint mat, groupés dans un amphithéâtre ET POURVUS D’UN PAQUETAGE !
Un ami (merci Olivier) m’envoie ce mail : « Si je ne me trompe pas, la photo qui illustre cet article vient de Cuba, ce sont des médecins en attente pour partir aux USA lors du cyclone Katrina. »
Pour en avoir le coeur net, j’envoie le document à un ami français qui vit à La Havane et qui me répond ceci (merci Jacques-François) : « Ce sont des médecins du contingent Henry Reeve (qui répond à des situations d’urgence dans le monde) réunis dans la salle de réunions plénières du palais des Congrès de La Havane.
Le contingent a été créé à l’occasion du Katrina, mais il peut s’agir d’une réunion au même endroit précédant leur départ pour le Guatemala (puisque Bush n’en a pas voulu à la Nouvelle-Orléans), ou encore pour le Pakistan où ces hommes et ces femmes, des jeunes pour la plupart, font un travail incroyable dans des conditions absolument terribles de froid (sur les contreforts de l’Himalaya) et d’éloignement des coutumes locales, mais avec un coeur terrible et des moyens sidérants de modernité, dont des hôpitaux de campagne aménagés pour offrir jusqu’à des soins intensifs. En pleine montagne, là où personne ne va jamais, surtout pas des médecins !
Les reportages télévisés des envoyés spéciaux de la télévision transmettent la grandeur de cette mission et de ces médecins capables d’un tel dévouement. Et la population locale a fini par l’apprendre, qui accourt en toujours plus grande quantité pour se faire soigner pour la première fois de sa vie par un médecin. Il existe environ vingt mille personnels de santé cubains qui font le même genre de travail dans de très nombreux pays du tiers monde. »
L’inadéquation entre la photo et l’article du Nouvel-Obs fait naître les questions suivantes :
- Les médias ont le droit à l’erreur, mais aussi le devoir de rectifier ; le Nouvel-Obs a usé de son droit. Accomplira-t-il son devoir ?
- Comment pourra-t-il le faire par un simple « Erratum » puisque ses lecteurs ne savent rien du contingent Henri Reeves ?
- La photo est signée Associated Press ; les médias internationaux étaient donc informés de ce rassemblement de départ pour une mission humanitaire. En ont-ils parlé ?
- Le Nouvel-Obs avait reçu il y a des mois cette photo, correctement légendée. A quel critère a-t-il obéi en décidant d’abord de l’archiver ?
- Notre presse offrira-t-elle à ses lecteurs une réflexion sur ce paradoxe : un pays riche comme la France est obligé d’importer des médecins pour soigner la population tandis qu’un pays pauvre comme Cuba en forme pour ses besoins et ceux des autres ?
- Comment se fait-il que ces diplômés cubains choisissent de rentrer ensuite au pays, dans l’enfer que nous décrivent habituellement le Nouvel-Obs et les autres médias ?
- Les lecteurs n’aimeraient-ils pas savoir aussi qu’une petite île des Caraïbes est en mesure d’envoyer dans le monde plus de médecins que les pays riches ?
- Quand l’ensemble de la presse française renoncera-t-elle à consacrer à Cuba des informations à charge, à l’exclusion de toute autre ?
Maxime Vivas
Ouragan Katrina : la leçon de Cuba et l’ aide qu’ elle a offerte sans publicité.