A la Courneuve les kalachs parle aux kalachs, faisant croire à une étincelle insurrectionnelle de la jeunesse populaire (celle qui trafique de la drogue) et qui vit, pourtant, derrière le périphérique.
Je n’habite pas loin de l’embranchement de l’A86 alors, ce lundi matin, quand j’apprends sur le comptoir du bar d’à côté que la nuit a été armée à quelques centaines de mètres, je n’en finis pas ma tasse. Luigi, qui sert le petit jus, m’avait dit un jour que dans le quartier la police ne se déplaçait jamais la nuit, sauf à hurler au meurtre ou à l’assassinat. La journée, ils évitent de descendre seuls. Ah ? Le quartier est pourtant calme tant qu’ils ne sont pas là . C’est la joie simple, un peu frustrée des fins de mois difficiles, une haine diffuse mais tenace des bourgeois, mais rien que de très banals sentiments pour une banlieue périphérique d’une mégapole comme Paris.
Il est un peu difficile de se renseigner sur l’événement. D’abord la version officielle, celle des journaux et des diffusions en ligne, parle d’une opération de guérilla. Je vous conseille l’interview bancale de ce policier et vous invite à écouter sa prestation hésitante et délirante.
Un homme armé d’un pistolet à grenaille tire sur une patrouille depuis son scooter. Pris en chasse - et sans que l’on en sache beaucoup plus sur ses intentions - il est interpellé avec trois autres prévenus. Depuis leur cellule de garde-à -vue, les prévenus demandent à être transférés à l’hôpital de Bondy. Sur le chemin, le fourgon de la police est pris en filature, immobilisé par deux véhicules banalisés. Il s’ensuit une fusillade. L’un des prévenus essaye de s’enfuir. Il est repris. Les tireurs eux aussi s’enfuient. Fin de l’histoire. Y-a-t-il quelqu’un capable de croire, justement, à cette histoire ? Des journalistes.
J’essaye de contacter les auteurs de tout ce papier. Impossible. Le policier syndiqué qui explique tout cela ne peut pas être joint non plus. Bon, une fois sur les lieux de la seconde fusillade, à l’embranchement de l’A86, je constate que l’endroit est bien désert. Pas le moindre indice de la fusillade. Dans cette histoire, je n’ai pas bien compris qui a tiré au fusil automatique sur le fourgon. Une troisième voiture ou un ou plusieurs hommes depuis les voitures qui immobilisaient le fourgon de la police ? A bout portant ou de loin ? Avec un ou plusieurs fusils ? Le certain est qu’il n’y a pas eu de blessé. Ni de dégât. Les tireurs doivent être forts mauvais ou très professionnels pour ne pas faire de dégât : ce genre de fusil, le kalachnikov, coupe un homme sans problème pour peu que l’on sache l’utiliser.
Il semble, à décrypter les messages subliminaux médiatiques, qu’il s’agirait d’une opération de libération des prévenus, ceux qui avaient tiré à la grenaille sur une patrouille au hasard. Ce n’est pas très prudent d’arroser au fusil le fourgon où sont menottés ses camarades. Passons. On remarque l’organisation presque parfaite des tireurs de pouvoir mobiliser en quelques heures deux ou trois véhicules et des fusils. On remarque le profond amateurisme à cibler une patrouille au hasard et à se faire attraper, à trois, quelques minutes plus tard. On remarque leur persuasion à se faire transférer à l’hôpital... Qui connaît les garde à vue dans les quartiers populaires, surtout pour avoir tiré à bout portant sur une patrouille, sait bien que c’est toujours le médecin qui se déplace... quand il se déplace. Passons sur toute cette mise en scène absurde.
J’ai beau passer plusieurs heures sur les lieux, rien n’y personne ne s’y attarde. Ni la police ni d’autres journalistes. La pluie lave les traces. Aucune image de la scène n’a été enregistrée. Les quelques passants n’y prêtent guère attention. Je demande au hasard. Un homme d’une quarantaine d’année me rigole au visage, je ne dois pas être d’ici pour croire à des choses aussi stupides. Une femme me dit que la police n’est pas à court de stratagèmes pour stigmatiser les gens d’ici. Enfin, un jeune de quinze ou seize ans m’affirme que rien ne s’est passé, sinon qu’il constate le renforcement des effectifs et des patrouilles de police depuis plusieurs jours. Et il conclut qu’après les élections, tout sera bien plus calme.
Je m’en vais, par hasard, derrière la porte d’Aubervilliers, là où sont réparés les véhicules de police, espérant voir ou apercevoir le fourgon criblé de balles suite à cette opération de guérilla urbaine. Le policier en faction rigole. Lorsque je lui dis que je suis pourtant journaliste, il rigole moins, contrôle mes papiers et me dit que le fourgon n’est pas ici. Impossible de savoir.
Je vous l’accorde, il n’y a pas grand chose. Soit je suis le plus mauvais des fouineurs soit il ne s’est rien passé. Soit la France est au bord d’une guerre dans les banlieues, contre les trafiquants de drogue, soit il ne s’agit que d’effrayer médiatiquement les votants. Les illuminés de Tarnac ne font pas vraiment trembler le bourgeois.
Revenons à nos barbares des cités. Le procédé a révélé toute sa puissance par le passé. Il faut pourtant, afin de finir sur ce mensonge, sur cette manipulation, déterminer exactement le fond de l’histoire. Sont-ce les policiers eux-mêmes, tel ou tel syndicat, un groupe propre exerçant au sein de la police, quelques taupes infiltrées dans les quartiers et qui organisent de petites actions en échange d’une réduction de peine ? Sont-ce des manoeuvres politiques (ou plus encore) pour assurer une petite émeute juste avant les élections ? Pas de chance : lundi soir, la nuit a été pluvieuse et froide, et à quelques jours d’examens important dans le cours d’une vie. Les sauvageons sont restés chez eux. Pourtant, qui a mis le nez dehors, de la station de métro Cadet à la Courneuve, a constaté l’impressionnante mobilisation des forces du désordre... au cas où. Une ministre de l’Intérieur aurait même passé une petite partie de la nuit du mardi soir dans un poste de police du 93.
Avant de réfléchir au mécanisme d’une telle manipulation, de s’interroger sur la complicité des médias officiels et d’en tirer une éthique toute neuve pour nos actions, il s’agit de simplement lancer un j’accuse à tous ceux qui ont, à cinq cent mètres de chez moi, organisé cette sordide mascarade : faut-il les imiter, les condamner ou s’en désintéresser ?
Techniques de surveillance totale pour compléter la technique décrite plus haut de manipulation médiatique.
La semaine dernière, nous étions en début d’après midi avec quelques camarades à la gare de Lyon, à Paris, suite à l’information de l’un d’entre nous que les services de sécurité de la SNCF et la police du rail préparaient une opération à la Poniatowski. La cible, les caddies boys, ces immigrés de l’Est qui proposent aux touristes de porter leurs bagages jusqu’aux taxi en échange d’une pièce. L’opération n’a pas eu lieu. Ou plutôt, les caddies boys étaient bien discrets. Dans la foule que dégueule la gare, les têtes passent et les corps vaquent à leurs occupations toute parisienne et, si l’on y prend garde, on ne voit que cet océan de visages.
Pourtant, à se fondre dans cette mer, nous repérons bien vite des passants aux biens étranges comportements. Un couple. L’homme photographie sa femme, en gros plan, et avec un si mauvais angle qu’il photographie surtout une table de la brasserie juste devant la gare. Et il prend beaucoup de clichés. Il a une oreillette. Elle aussi. Les deux n’ont pas l’air très amoureux. Ils parlent souvent au téléphone et restent une large demi-heure devant la gare à photographier, ma foi, nous ne savons pas trop qui. Un grand type attablé et qui lit le journal ? La pauvre vieille assise devant les portes et qui demande quelques pièces au passant ? Sans aucune paranoïa pourtant, nous remarquons vite qu’une grand type roux, casquette et barbe hirsute, canette de bière à la main, la vraie dégaine du traînard à dire vrai, est assis à l’écart et regarde les passants. Lui aussi à une oreillette. Et un autre type en costard qui passe et repasse. A ne pas faire attention, on y voit qu’un usager du rail. A exercer ses sens à l’espace publique, à distinguer son oreillette. Nous apprenons bien vite que nous sommes cernés. Mais que regardent-t-ils ? Qui surveillent-t-ils ?
Leur pauvre camouflage, malgré tout, et leurs manières pas très fines, laissent supposer qu’ils ne sont pas sur la piste de l’ennemi publique numéro un. Non, ils sont plutôt sur la piste de l’ennemi commun, le citoyen lambda, la statistique criminelle qui sommeille en chacun de nous. Pour être bien sûr que la cible est l’immense masse des gens anonymes, nous filons les mouchards, et si bien qu’ils nous repèrent. Ce jeu n’a pas d’autre importance que de les voir, finalement, se disperser et se retrouver un peu à l’écart, le couple, le clochard, le type en costume et quelques autres, fumant une cigarette et parlant, nous imaginons, de leur travail comme tous les salariés du monde. A la lumière de cette après-midi, les plus pacifistes d’entre-nous on pris des mesures drastiques quant à leurs habitudes quotidiennes. Et, 1984 écrit sur les murs de Paris, d’autres s’amusent à utiliser le livre d’un brigadiste anglais comme un mode d’emploi. Comme nous le conclurons un peu plus loin, nous nous demandons si la société existe.
F. est un militant qui est venu à nous dans notre périple sur le thème de l’état des luttes. Pas sectaire pour un sou, et parce que des sous nous n’en avons pas, nous avons baladé nos coeurs et nos gueules dans toutes les brasseries des contestations. F. est plus venu à nous que nous à lui. L’histoire n’aurait pas beaucoup d’importance si elle n’était, elle aussi, la démonstration implacable du niveau d’intrusion des services de l’état dans nos quotidiens. F. est infiltré depuis un an dans un parti d’extrême gauche qui se bat avec toute la légalité et la franchise des jeunes révoltés pour faire vivre son idée trotskyste d’un monde meilleur. Ne rions pas s’il reste encore des marxistes en France. La négation de l’histoire n’empêche pas de former des militants sincères. Pour les méthodes, tout s’apprend au contact du monde et de ses expériences. Participant aux réunions de ces militants sincères, nous rencontrons F. Il se dit sans domicile. Il se dit farouche partisan de l’action. Il se dit sous contrôle judiciaire et fraîchement sorti de prison. Le simple fait qu’il soit à la rue justifie notre proposition de l’aider dans cette phase difficile. Nous connaissons assez la rue pour ne pas soupçonner le traquenard. Il viendra donc en un éclair faire le tour de nos lieux. Puis il partira. Puis, malgré tout, rompu à la vigilance, nous le cuisinerons, un dimanche après-midi, dans un parc de Paris. Ah la triste taupe ! En cinq minutes à peine il propose des armes, des équipes de combattants, des explosifs et toutes les conneries que sa condition de balance peut offrir. Entendons-nous bien et expliquons les faits. La police n’est pas avare de réduction de peine pour ceux qu’elle attrape : Si tu ne veux pas passer quelques mois à te faire déboiter le caisson, et nous y veillerons, aide-nous à récolter quelques informations ! Lui est un de ces fils à Papa des beaux quartiers de Paris englouti un jour d’ennui et victime de sa pauvreté intellectuelle dans les bourbiers de l’extrême droite. Classiquement supporter du PSG. De ratonnades en actes antisémites, il tombe un jour. Et il se liquéfie au contact de la police. Ou il y trouve sa voie. Il balance sévère le gaillard, tant et si bien qu’on le missionne pour infiltrer l’autre bord sous couvert de rédemption. Simplement, à part la lutte des classes, il ne sait pas grand chose... Ah si, l’action et les armes. D’ailleurs il est venu au rendez-vous avec son petit pistolet d’alarme pour impressionner notre équipe (il ne doit pas savoir que nous sommes habitués à des conflits nettement moins puériles). Ce qu’il n’avait pas prévu, c’est le micro sous une veste et le regard d’acier dans nos yeux pour les basses castes humaines qui collaborent à la terreur totale. Lui, pourtant armé, part sans demander son reste, sinon miauler, après ces confessions de collaboration au renseignement de l’état, de ne pas faire sauter sa couverture aux amis du parti. Erreur la taupe, tu es démasqué et nous sommes quittes pour une modification drastique de notre propre coopérative.
Où l’explication de la mauvaise nouvelle réactionnaire est une bonne chose.
Nous nous demandons véritablement si la société existe en tant que telle, tel que le mot lui donne sens. Une société suppose une unité, un vague sentiment de lien humain, de solidarité et de confiance. Si la Police a le besoin de décupler ses effectifs, de réviser le taux moyen de répression toujours à la hausse, c’est bien parce que les troubles se font, eux aussi, plus grands. Les civils aux ordres ont infiltré l’espace publique dans une vaste opération orwellienne. Ils sont la masse noire dans les manifestations, dans les groupes, dans les partis, dans les réunions, dans les gares. Dès qu’il y a plus de quelques individus, translucides ou pas, la surveillance se met en place, à encadrer, à patrouiller, dans les entreprises et autres carcans de malheurs ; dans les universités et autres administrations ; dans les trains, sur les autoroutes. Ils sont la classe toujours plus vaste et forte de la police la plus dangereuse, une police morale, politique, administrative, une police des bonnes moeurs capitalistes. La police de proximité est bien largement dépassée et remplacée par la police d’intimité, une police corporelle qui se cache derrière un passant, se déguise en mendiant ou en voyou, s’infiltre sous les plus bas masques pour piéger, parfois des idiots, parfois des esprits si humains qu’ils n’en voient pas le loup sous ses airs libertaires. Ils miment les plus téméraires d’entre nous pour tromper le briseur de vitrine ; au radical révolté ils lui proposent des armes ; le partisan possible ils l’envoient au casse-pipe. La police dans la rue, reine du spectacle, dicte sa loi aux maîtres d’école et aux travaillants, elle prépare les têtes et les corps au bagne perpétuel, partout elle écoute, elle photographie, elle filme, elle surveille, elle rend des comptes sur les moindres possibilités qui s’élèvent, se forment et se défont dans le mouvement le plus naturel de résistance à ce qui nous empêche de vivre souverains. Cette défiance toujours présente, cette révolte latente, est bien l’aveu du refus d’un écrasant diktat sur le cours de nos vies et sur celui de La Vie. Personne n’aime collaborer mais la peine est sévère, toujours plus lourde. Un mot laissé sur cahier, un sms mal orienté, une parole qui ne tombe pas dans l’oreille du sourd, chaque mouvement hors du champ ordinaire est dicté par la force de l’oppression, sournoise ou violente, et d’autant plus facile à isoler et traiter. La médecine n’y peut rien pourtant, c’est un pré vertement plus philosophique que de cultiver la lutte. La situation en permet plus de contenir la totalité des individus par de simple et massive propagande consumériste. Le degré de la répression augmente dans la mise en place d’un réseau d’agents du spectacle strictement immergés dans les parties libres, sinon de la société, au moins du peuple. De leur société en tout cas. Parce que cette société existe bien. Ce n’est pourtant que l’addition des existences personnelles et similaires, des existences soumises et donc contrôlables. C’est très loin, à l’opposé même, de ce qu’ils accordent au sens du mot, de leur sens du mot, dans tous les cas ce n’est pas le sens d’unité qu’ils nous vendent. Si le cours est rompu par quelques marées rebelles, la nature pourrait bien rompre toutes les digues. Dans ce flot violent, alors, comme Brecht, nous ne pouvons que voir les rives violentes qui l’enserrent, le compriment, le détournent, et finalement le rendent toujours plus violent et incontrôlable.
La stratégie de l’infiltration totale et profonde, la réalité de la spécialisation des forces de l’état au renseignement, au renseignement de son propre territoire et de tous ses sujets, les preuves toujours plus nombreuses des coups fourrés, des falsos positivos (tactique de contre insurrection de l’armée nationale colombienne qui déguise en guérilleros les pauvres des quartiers populaires qu’elle assassine ensuite) à l’européenne est un empêchement toujours plus grand de toutes les possibilités révolutionnaires. Puisque le niveau embryonnaire de chaque intention de libération est déjà une action morte-née, repérée et détruite. Puisque le spectacle produit une vérité qui n’est pas, un pseudo-monde dangereux, il nécessite toujours plus de policiers. Pas pour nous protéger ou pour prévenir une possible infraction. Dans la réalité, la pieuvre policière surveille tout et chacun. A additionner les forces de la gendarmerie et celle des polices, on obtient les mêmes effectifs que les forces d’active de nos trois armées nationales et pourtant ces dernières sont éparpillées sur tout le globe. La question est la suivante : sur notre territoire, contre qui l’État est-il en guerre ?
Pour notre part, l’expérience nous fait défaut, prisonnière qu’elle est de ce pseudo-monde. Le chemin est complexe sur la route de la vraie information. Nous connaissons les limites de chaque chose, l’auto-censure n’est que la conséquence de notre certitude quant à la capacité d’infiltration et de contrôle de l’état sur nos projets. Nos journaux sont bien plus lus par les renseignements généraux que par les camarades nouveaux. Nos réunions publiques sont mités par de frais écoliers poulagas, nos manifs dirigés par de nerveux syndicalistes déguisés, nos gares pleines de la flicaille en civil, les gangsters sont en fait des policiers en opération de propagande par le fait, et les représentants corporatistes sont à l’oeil des patrons. Impossible de ne céder qu’aux clubs très fermés de l’intime conviction pour parler et imaginer, pour construire et se battre. De bien petites brigades, dès qu’elles s’élèvent, sont anéanties. De bien gentils journaux, dès qu’ils écrivent trop, disparaissent. De bien maigres récoltes certainement quand les paysans sont en prison ou à la guerre.
Conclusion toute « journalistique »sur cette contribution à la guerre en cours.
Lorsque et si une police s’arroge les pouvoirs du contrôle absolu sur tous et sur chaque chose, il faut bien se garder de crier à la dictature, il est un peu tard : cela n’est que l’effet. La cause est bien le degré de résistance à leur société par ceux qui la subissent. Le glissement vers des lois d’exceptions permanentes, le fait accompli de criminaliser toutes formes d’expressions populaires et libertaires ou d’actions contre l’ordre, n’est pas le signe de la perte de contrôle de la réaction mais de sa bonne organisation. Parallèlement, c’est la preuve de la possibilité d’un événement hors de leur ordinaire, extra-ordinaire et d’une situation dès lors révolutionnaire.
Les élites ne sont pas plus paranoïaques que leurs sujets. La course est largement entamée contre l’ennemi intérieur, le repli sur les frontières en est une preuve, le relent nationaliste, la chasse au complot, à la tête de turc, la multiplication des systèmes de surveillance, de filtres, de quotas, de ratissages, de sanctions par de lourdes peines et la multiplication des peines courtes, une gigantesque concentration dans des conditions les plus déplorables d’Europe, les camps de la rééducation au bon ordre, etc.
Le journalisme n’est pas seulement un art nécessaire qui doit renaître sous une forme ou une autre, il doit simplement être. Que les élites disposent de leurs canaux propagandistes, de leurs agents et de leurs satellites, ne peut pas être ignoré. Lutter pour plus de justice et de liberté passe forcément par la mise en place d’un système de diffusion des idées et investigations des forces progressistes. Il ne saurait s’agir d’objectivité, cette sainte absurdité. Il s’agit d’une guérilla de l’information, contre le mensonge massif. La seule guérilla réelle est bien celle-là . Guérilla parce que nos moyens sont disproportionnés, guérilla parce que nos vies sont en danger ; on y meurt moins qu’ailleurs.
Il n’y a pas de sujet tabou, il ne doit pas y en avoir sous peine de voir naître des monstres mythologiques dans les imaginaires collectifs. Peut être que tout cela nous conduit à une certaine technique de camouflage mais l’anonymat n’est pas un artefact de notre ego mais simplement une tactique. Peut-être que tout cela nous conduit à une certaine propension à la radicalité, mais la liberté n’existe pas sans une totale transparence concernant les processus d’oppression en cours. Il faut bien choisir entre parti imaginaire et action réelle, entre avant-garde invisible et organisation médiatique, mais jamais le lien ne se distendra entre les majorités liées et opprimées d’un côté, et les acteurs de la lutte contre le mensonge de l’autre.
Archibald Emorej
et la Coopérative Éditoriale
http://www.ceiad.info/