L’Iran a appelé, dimanche, le monde à « parler d’une seule voix » contre les « actions irresponsables » des États-Unis, après l’annonce attendue, faite par Washington, le 19 septembre, de rétablir unilatéralement les sanctions des Nations unies contre Téhéran. Pour mémoire, et conformément à des menaces brandies il y a un mois, l’administration Trump a officiellement décrété une procédure dite de snapback (retour à zéro), censée permettre à l’un des signataires de l’accord sur le nucléaire iranien, signé en juillet 2015 par Barack Obama, de revenir au régime de sanctions en cas de non-respect de ce même accord, un mécanisme judiciaire jugé illégal par les autres membres du Conseil de sécurité de l’ONU, les États-Unis s’en étant retirés unilatéralement en 2018.
« Nous attendons de la communauté internationale et de tous les pays du monde qu’ils s’opposent à ces actions irresponsables du régime à la Maison-Blanche et qu’ils parlent d’une seule voix », déclare Saeed Khatibzadeh, porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères. « Le monde entier dit que rien ne s’est passé. Cela s’est simplement passé dans le monde imaginaire de Mike Pompeo », estime encore Saeed Khatibzadeh, à l’heure où le patron de la diplomatie états-unienne menace non seulement l’Iran, mais également tous ses partenaires économiques éventuels de sévères représailles économiques.
Washington reste isolé
« Les États-Unis saluent le retour de quasiment toutes les sanctions de l’ONU contre la République islamique d’Iran auparavant levées », s’est ainsi félicité Mike Pompeo en décrétant les mesures punitives « à nouveau en vigueur » depuis samedi soir. « Si des États membres de l’ONU ne remplissent pas leurs obligations d’appliquer ces sanctions, les États-Unis sont prêts à utiliser leurs propres outils pour punir ces défaillances », prévient le secrétaire d’État, tandis que Donald Trump pourrait préciser l’ampleur des mesures de rétorsion états-uniennes dans un discours attendu demain devant l’Assemblée générale de l’ONU.
Washington demeure cependant largement isolé dans sa politique de pression maximale sur Téhéran. Sans surprise, le ministère russe des Affaires étrangères a dénoncé hier la déclaration unilatérale de Mike Pompeo, estimant que l’initiative des États-Unis était illégale, la qualifiant de « performance théâtrale » portant « un grand coup à l’autorité du Conseil de sécurité » des Nations unies.
Paris, Londres et Berlin font front
Dans ce dossier, l’administration Trump a effectivement échoué à convaincre ses partenaires, y compris au sein de l’Union européenne, Royaume-Uni inclus. « Toute décision ou mesure prise dans l’intention de rétablir les sanctions n’aura aucun effet juridique », prévenaient ainsi Paris, Londres et Berlin dans une lettre commune adressée vendredi à la présidence du Conseil de sécurité. Toutes les parties en présence prennent néanmoins l’initiative états-unienne au sérieux, tant la politique agressive du département d’État menace les récalcitrants au concept d’extraterritorialité du droit étasunien, censé s’élever au-dessus de toutes les législations internationales, de sévères amendes pécuniaires. En juin 2014, l’ex-chef de l’État français François Hollande avait en vain tenté d’attirer « l’attention du président Obama sur le caractère disproportionné des sanctions envisagées » contre BNP Paribas, accusée d’avoir violé des sanctions décrétées contre des pays de « l’axe du mal », dont l’Iran et le Soudan. La banque sera in fine condamnée à verser environ 10 milliards de dollars au Trésor américain, sous peine de se voir littéralement exclue du premier marché financier mondial. Alors que le Trésor américain travaille main dans la main avec les autres agences gouvernementales (CIA, département de la Justice...) pour nourrir ses accusations, le président démocrate avait adressé une fin de non-recevoir à son homologue français, expliquant ne pas pouvoir se mêler à des affaires judiciaires internes, au nom de la « séparation des pouvoirs ».