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Quand les traders spéculent sur notre pain quotidien

Depuis un an, les prix mondial du blé a évolué en dents de scie dans une fourchette de prix trop bas pour fournir un revenu décent aux céréaliers. Il a suffit que l’offre mondiale soit légèrement supérieure à la demande pour que les traders fassent payer la facture aux producteurs pendant que les décideurs politiques regardent ailleurs.

Selon les chiffres donnés cette semaine dans l’analyse économique de FranceAgrimer, la tonne de blé français rendue au port d’embarquement pour l’exportation valait 230 dollars le 11 février 2015. Elle ne valait plus que 192 dollars le 9 mai de la même année. Mais elle remontait à 227 dollars au début de mois de juillet pour descendre à 175 dollars le 7 septembre. Elle franchira à nouveau le cap des 200 dollars au début de mois d’octobre, puis vers la mi-novembre, pour ensuite baisser régulièrement et tomber à 155 dollars en cette seconde quinzaine de février 2016.

Le prix du blé est mondial et spéculatif depuis pas mal d’années. Pour comprendre ce phénomène, il faut disposer des informations suivantes. Le monde du blé se partage entre pays exportateurs nets, pays autosuffisants et pays importateurs nets. Dans l’ordre, l’Union européenne à 28 est devenue le premier producteur mondial de blé tendre avec 158 millions de tonnes, dont 40 millions de tonnes pour la France, premier pays producteur de l’Union. La Chine arrive en seconde position avec 130 millions de tonnes et l’Inde prend la troisième place du podium avec 89 millions de tonnes. Ensuite arrive La Russie avec 59 millions de tonnes, suivie par les Etats Unis avec 55 millions de tonnes.

Hormis la Chine et l’Inde, tous ces pays cités plus haut sont des exportateurs nets de blé tendre auxquels s’ajoutent le Canada, l’Ukraine, l’Australie, le Kazakstan et l’Argentine. La production cumulée de ces cinq pays atteint 104 millions de tonnes. Depuis trois ans, la production mondiale de blé tendre dépasse légèrement la demande solvable. Le stock mondial de report est évalué deux fois par an au moment de la récolte. C’est le cas en juillet-août avec la récolte de l’hémisphère nord et en début d’année pour l’hémisphère sud. Quand le stock de report augmente, les traders spéculent à la baisse en vendant et en achetant sur le marché à terme du blé qui n’est pas encore récolté. Mais ces mêmes spéculateurs sont informés au jour le jour par des cabinets spécialisés du temps qu’il fait dans les grandes zones de production des principaux pays exportateurs de blé. Si une sécheresse ou de très grosses pluies risquent de compromettre la récolte d’un ou de plusieurs pays exportateurs, les traders vont momentanément spéculer à la hausse sur le marché à terme, conduisant le marché physique des ventes au jour le jour à réagir de même.

Telle est l’explication des faibles fluctuations des cours du blé français entre février 2015 et février 2016. Il y avait parfois des petits risques, mais pas de grosse alerte climatique. La France devrait disposer d’un stock de report de blé tendre compris entre 5 et 6 millions de tonnes au moment des prochaines moissons qui débuteront en juillet. C’est un peu plus du double que lors d’une année normale. En théorie, les prix devraient donc rester trop bas durant les prochains mois pour que les céréaliers tirent un revenu décent de leur travail. Pour que les prix augmentent dans les prochains mois sur ce marché purement spéculatif, il faudrait que des aléas climatiques comme des longues sécheresses ou des pluies provoquant des inondations viennent perturber la récolte dans plusieurs régions du monde.

Les prix bas de 2015 et 2016 auraient pu inciter certains pays importateurs nets à acheter davantage de blé pour constituer des stocks de sécurité, ce qui aurait fini par faire remonter les prix de quelques dollars la tonne. Mais les pays importateurs nets de blé tendre sont souvent confrontés à des difficultés budgétaires. C’est le cas de l’Egypte, premier importateur mondial de blé avec 11 millions de tonnes par an. Enfin, les pays producteurs de pétrole dont le prix ne cesse de baisser depuis 18 mois voient leurs caisses se vider. Du coup, sans l’arrivée d’aléas climatiques conduisant à réduire dans des proportions importantes la prochaine récolte de blé dans plusieurs grands pays exportateurs, il est peu probable que les cours du blé tendre remonteront dans le courant de l’année 2016.

Mais, si une telle catastrophe se produisait, elle serait payée par les populations des pays pauvres importateurs de blé et d’autres céréales comme cela s’était produit en 2007-2008 avec les émeutes de la faim dans de nombreux pays. Ainsi évolue le prix du blé, dans la totale indifférence des grands décideurs politique du monde capitaliste .

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Le Printemps des Sayanim
Jacob COHEN
Interview de l’auteur. Pourquoi ce titre ? J’ai voulu que le terme « sayanim » apparaisse d’emblée et interpelle le lecteur. On se pose la question, et la définition se trouve juste dans les premières lignes de la 4e. La problématique est installée, sans faux-fuyants, et sans réserve. Idéalement, j’aimerais que ce terme entre dans le vocabulaire courant, dans les analyses, et dans les commentaires. Voulez-vous nous la rappeler ? Les sayanim - informateurs en hébreu - sont des juifs (…)
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"Ce que nous faisons au Vietnam, c’est utiliser des Noirs pour tuer des Jaunes afin que les Blancs puissent garder la terre qu’ils ont volé aux (peaux) Rouges".

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