En une du Monde du 8 juillet 2004, un réquisitoire de G. Martinet contre Battisti.
Je ne traiterai pas ici du droit légitime à l’exposé des opinions sur la violence, mais de distorsion des faits, d’ignorance, d’amalgame, de troncature de documents, d’insinuations malveillantes et de mensonges.
Le plus grave d’abord : Martinet prétend démontrer sur deux longs paragraphes que l’asile offert par la France concernait les Italiens qui n’ont pas commis de crime de sang. Il se réfère à une déclaration de Mitterrand datée du 22 février 1985. Or, tous les exilés politiques Italiens des « années de plomb » étaient évidemment accusés d’avoir commis de tels crimes. C’est pourquoi, deux mois plus tard, le 20 avril, devant le 65ème congrès de la Ligue des Droits de l’Homme, Mitterrand prononce une déclaration solennelle (que Martinet n’a pas lue) où cette mention ne figure plus. C’est cette parole-là , cet engagement dit « Doctrine Mitterrand » qui ont conduit des centaines d’Italiens à se réfugier chez nous. Martinet s’exprime sur ce point sans connaître ce texte essentiel qui rend caduc le précédent. Et, sans la moindre réserve, le Monde, qui en avait rendu compte naguère, publie désormais un « point de vue » qui le gomme.
L’effet de halo : à trois reprises, Martinet évoque les Brigades Rouges, organisation à laquelle Battisti n’a jamais appartenu. Au passage, le nom de Aldo Moro est cité.
Les références historiques hémiplégiques : Martinet agite l’épouvantail d’Action Directe. Mais il ne dit rien sur l’OAS dont les militants ont été graciés. Rien sur les factieux italiens (dont peu ont été inquiétés) responsables des terribles attentats de la gare de Bologne et de la piazza Fontana. Les activistes de droite sont effacés de la mémoire de Martinet.
L’amalgame insidieux : invoquant Rossana Rossanda « communiste intransigeante » (qui n’a rien à voir avec ce dossier), Martinet insinue que Battisti, ses soutiens et les Brigades Rouges sont de la même « famille ». Il faut l’avoir lu pour le croire : « même s’ils n’osent le formuler ouvertement », ceux qui s’opposent à l’extradition sont des crypto-terroristes.
La diabolisation : Battisti était « le chef militaire d’un groupe terroriste ». Où Martinet a-t-il été pêcher cette fable ? En vérité, il était un des plus jeunes militants d’un éphémère mouvement comptant quelques dizaines d’adhérents
Affirmation péremptoire : Battisti serait un tueur. « Il y a bien eu crimes de sang » assène Martinet. Battisti nie. Aucun témoin oculaire ne l’accuse, sa condamnation à la prison à vie, définitive, non révisable, est basée sur les déclarations évolutives d’un seul « repenti » qui a sauvé ainsi sa propre liberté.
Les arguties foireuses : pour Martinet, la justice italienne n’est pas suspecte car elle « poursuit Berlusconi et l’oblige à faire voter des lois qui, momentanément, le protègent ». Comprenne qui pourra : justice ficelée, instrumentalisée, donc justice libre. En vérité, toute une batterie de lois spéciales a été mise en place pour juger les protagonistes de cette époque de guerre civile larvée. Treize cas de torture, durant l’instruction du procès Battisti, ont été révélés. Amnesty International a dénoncé plusieurs fois le fonctionnement de la Justice Italienne.
A ce stade, s’impose l’amer constat gaullien : « La vieillesse est un naufrage ». Car force est de constater que Martinet, incohérent « ambassadeur de France », a perdu sa capacité d’information et a égaré son esprit cartésien dans la poche du jeune militant de gauche qu’il fut jadis.
Pourquoi parle-t-il, alors ? La raison apparaît implicitement au détour de deux phrases qui plaident pour une restructuration politique de l’Europe dont (« et nous ne devons pas [l’]oublier... ») fait partie l’Italie : « La social-démocratie européenne accepte l’économie de marché... » et « personne à gauche ne demande la renationalisation des entreprises privatisées. »
Et tout le monde est au fait des futures privatisations ? Des projets de généralisation de la précarité, de mise à mal de la sécurité sociale et des retraites et, par suite, de la nécessité d’un nouvel espace policier et judiciaire européen, de l’urgence a effrayer les peuples (cf. Gênes juillet 2001) pour verrouiller les velléités de contestation ?
Poser ces questions n’est pas établir un lien factice entre les impératifs de l’ultra-libéralisme européen et le cauchemar que vivent un écrivain et sa famille. Les politiciens italiens ont aussi leurs exigences intérieures et notre gouvernement a besoin de prouver son ardeur anti-terroriste. D’où l’acharnement contre Battisti, bouc émissaire. Une deuxième fournée se prépare contre des réfugiés dont les noms sont écrits, pions d’une partie truquée qui les dépasse et qui nous concerne tous.
Maxime Vivas, écrivain (et partisan des renationalisations).
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8 juillet 2004
Bonjour,
Le comité de soutien national à Cesare Battisti relance une pétition en sa faveur. Une première vague avait permis de recueillir 24 000 signatures avant d’être stoppée par le revirement des médias (en premier lieu du Monde).
Depuis, la chambre de l’instruction s’est déclarée favorable à l’extradition. Chirac lui-même, recevant Berlusconi, a nettement exprimée son idée.
Une centaine de personnalités connues vont signer un texte (un appel à Chirac) qui paraîtra mardi dans un quotidien.
Parallèlement, le Comité de soutien souhaite parvenir à 100 000 signatures. Il s’agit de créer un nouveau rapport de force. Faute de quoi, les carottes sont cuites.
Tout ça est urgent : on pense que la décision définitive des juges pourrait intervenir cet été (le 15 août ???).
Vous pouvez, si vous le souhaitez m’envoyer vos signatures (nom, prénom, profession) ou les adresser directement à la Ligue des Droits de l’Homme qui a un site à cet effet.
Vous pouvez aussi diffuser ce courriel et en parler pour autour de vous pour recueillir des noms.
Merci pour lui.
Maxime
vivas.maxime@wanadoo.fr.
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LA FRANCE DOIT RESPECTER SA PAROLE
Nous n’acceptons pas que Cesare BATTISTI ou tout autre réfugié italien soit extradé. Ignorant une décision antérieure qui avait refusé, en 1991, l’extradition de Cesare BATTISTI et qui était revêtue de l’autorité de la chose jugée, déniant à ce dernier le droit à un procès équitable car il ne sera pas rejugé en Italie, l’avis de la Chambre de l’Instruction, du 30 juin 2004, atteste d’une justice rendue sous influence. A l’inverse de ceux qui poursuivent d’une vindicte acharnée une poignée d’hommes et de femmes qui ont reçu asile en France, nous entendons que notre pays ne renie pas la parole donnée et respectée par tous les gouvernements, de droite comme de gauche, depuis 1985.
Quels que soient les obscurs motifs qui conduisent le gouvernement à vouloir renier les engagements pris et à violer la règle de droit, nous sommes attachés au respect d’une éthique sans laquelle la politique n’est plus la gestion de la cité des Hommes mais l’exercice injuste du pouvoir.
Nous n’avons pas d’autre légitimité à faire entendre notre voix que de partager ces valeurs que les peuples ont forgées tout au long de leur histoire afin d’échapper à l’arbitraire des États et de protéger la dignité de chacun.
C’est pour cela que nous ne laisserons pas faire ce qui serait une violation des principes les plus fondamentaux de la République.
Nous appelons les citoyens à se mobiliser et à créer partout en France des comités contre l’extradition de Cesare BATTISTI et de tous les réfugiés italiens.
Nous demandons que la parole de la France ne soit pas trahie. C’est au Président de la République, gardien de cette parole et garant des principes de notre pays, qu’il incombe de les faire respecter.
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– Du même auteur :
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- Amnesty international éclaboussée par RSF via Le Monde
- Les otages, Reporters Sans Frontières et l’US Army.
- Le PCF, les USA et Cuba.
- Reporters sans frontières ou l’art de dédouaner les USA.
- Fête de l’Huma 2004.
- Berlusconi, Chirac : deux hommes intègres face à Battisti.
- Les larmes de Romain Goupil.
- Urgent : La vérité sur Cesare BATTISTI.
- Une palpitante histoire d’espionnage et de terreur en 4 chapitres.
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- La dérive d’un patron de presse : Philippe Val, épurateur ?
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