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Privatisation d’ EDF : Les investisseurs achèteront-ils ? The Economist.


Voici la traduction d’un article paru dans The Economist du 3 juillet. Il fait le point sur le dossier EDF du point de vue propre à cet hebdomadaire, c’est à dire libéral. Il arrive à des conclusions similaires à celles de Jean Marcel Moulin ( Voir ci-dessous ), c’est à dire que pour le capital, EDF ne vaut rien et ne mérite même pas d’être privatisée sauf, comme le note The Economist, à donner quelques sérieuses garanties. (UFICT-CGT EDF)


The Economist - 3 juillet 2004



Un immense changement français


Sous la pression de la libéralisation des marchés de l’énergie conduite par l’Union Européenne, le gouvernement français veut privatiser partiellement EDF, la plus grande compagnie électrique mondiale. Les investisseurs achèteront-ils ?


Quand, en 2002, le gouvernement français de centre-droit annonçait son intention de privatiser partiellement EDF, le groupe géant d’électricité, propriété nationale, sa tâche n’allait pas être facile. Mais le gouvernement et l’entreprise d’électricité n’étaient pas préparés aux niveaux de difficultés telles qu’elles sont apparues. Dans les dernières semaines, les salariés d’EDF ont envahi les rues pour protester contre l’examen du projet de loi, bientôt adoptée, qui ouvre la voie à la privatisation partielle. Ils ont provoqué aussi bien des coupures soigneusement ciblées, y compris dans les résidences privées de ministres du gouvernement, que des rétablissements de fournitures à des consommateurs coupés pour impayés.

La vente partielle d’EDF était prévue cette année, mais est désormais repoussée. Le point essentiel de la loi est le changement de statut d’EDF d’établissement public qui, à ce titre, était protégée contre les règles françaises de dépôt de bilan, à celui de société anonyme astreinte aux lois commerciales courantes. Ce changement annule de facto la garantie de l’Etat sur la dette d’EDF, critiquée par les services européens de la concurrence car considérée comme une aide illégale de l’Etat.

La garantie est importante car le bilan d’EDF est sous pression : sa dette nette s’élève à 24 milliards d’euros et dépasse ses fonds propres. Le retrait éminent de la garantie de l’Etat a incité les agences de rating à dégrader la notation de la dette d’EDF et à être plus attentives aux résultats financiers du groupe.

D’autant plus qu’un autre changement survient : à partir du 1ere juillet, EDF n’est plus un monopole protégé sur son territoire. Alors que quelques marchés électriques européens ont complètement été ouverts à la concurrence depuis la fin des années 90 (le marché britannique, par exemple), la France a montré peu d’empressements pour la libéralisation du sien. Mais aujourd’hui, tous les consommateurs non domestiques en France, représentant 70% du marché, sont libres de choisir leurs fournisseurs d’énergie. La liberté de choix suivra pour les particuliers en 2007.

EDF n’a pas été fractionnée en différentes entités de production, de transport, de distribution et commercialisation. En théorie, le marché est ouvert à la concurrence. Cependant, il y a surcapacité, EDF conserve un quasi monopole et son électricité est produite essentiellement par des centrales nucléaires dont le coût marginal de production est faible. EDF conserve également les réseaux français qui alimentent le pays.

La direction commerciale d’EDF - où elle sera en contact direct avec les consommateurs - affrontera les coups de la concurrence. Les vraiment très gros consommateurs d’électricité sont libres de choisir leurs fournisseurs depuis 2000. La part de marché d’EDF pour ce segment est tombé de 95% à environ 80%. Une ouverture supplémentaire du marché crée une réelle menace pour cette position dominante, du moins elle est supposée la créer.

Ce défi arrive juste au moment où EDF a besoin d’argent pour maîtriser son surendettement (François Roussely, président et directeur général depuis 1998, préfère parler pour EDF de « sous-capitalisation »). Les coffres du gouvernement sont trop peu garnis pour se permettre une injection massive de capitaux, aussi la privatisation partielle semble inévitable. Mais quelle est l’attractivité d’EDF pour des investisseurs extérieurs ?

The Economist a étudié les finances d’EDF. Ce qui en ressort, c’est l’image d’un groupe qui a utilisé quelques méthodes comptables contestables ; qui n’a jamais vraiment fait de profit ; qui a utilisé de manière imprudente les fonds réservés pour le démantèlement des centrales nucléaires et la gestion des déchets radioactifs ; qui manque de transparence sur le niveau de ses provisions pour le nucléaire ; et qui s’est livrée à une stratégie internationale imprudente et coûteuse (après de nombreuses relances pour une interview, EDF n’a pas souhaité répondre par écrit à nos questions pour finalement nous accorder un entretien téléphonique le 29 juin).

La première chose qui apparaît dans les comptes d’EDF, c’est que le groupe change de politique comptable aussi souvent que l’Italie à une époque avait l’habitude de changer de gouvernement. Les comptes de 2003 devaient être la comptes de référence pour la privatisation partielle. Et en 2003, EDF adopte, mais de façon plutôt sélective, les standards internationaux qui deviendront obligatoires pour les sociétés cotées dans l’Union Européenne en 2005.

L’effet de ce choix sélectif des nouvelles normes comptables a été d’augmenter la valeur des fonds propres de 5,4 milliards d’euros - environ une croissance de 40% - améliorant, ainsi, d’un trait de plume, son ratio super-tendu dette sur capital. La plus grande partie de ce changement provient de la méthode d’amortissement des centrales nucléaires.


Turbiner du chiffre

Les comptes 2003 d’EDF, comme de tradition, incluent les résultats pro-forma 2002, établis selon les mêmes méthodes adoptées pour 2003. De tels résultats pro-format des années antérieures permettent traditionnellement aux analystes externes de procéder à des comparaisons pertinentes avec ceux de l’année courante.

D’après cet examen, le résultat opérationnel d’EDF a augmenté sur la base pro-format de 33% en 2003. Cependant, en 2003, EDF a allongé la durée de vie de ses centrales nucléaires de 30 ans à 40 ans, par conséquent, elle a réduit considérablement les amortissements dans ses charges annuelles. Les résultats pro-forma 2002 ne prennent pas en compte cet allongement de vie, selon le principe qu’il s’agit d’un changement dans l’estimation comptable et non pas dans la méthodologie comptable - une distinction que beaucoup ne relèveront ou ne comprendront. Cette décision, conjuguée avec un gain ponctuel de 534 millions d’euros provenant d’un inventaire des actifs physiques d’EDF, a produit la plus grande partie de la croissance du résultat opérationnel d’EDF en 2003 qui était de 6,83 milliards d’euros, contre 5,15 milliards d’euros pro-forma en 2002.

Cette croissance doit être minimisée car EDF a commis une omission significative d’EDF dans l’adoption des normes internationales : celle traitant des avantages sociaux des salariés. La plupart des salariés d’EDF en France - environ 112 000 personnes - bénéficient d’un système de retraite généreux. Aujourd’hui, le système est financé par les cotisations des salariés et EDF se coltine le déficit annuel (et en croissance) - 2,04 milliards d’euros en 2003.

L’adoption des normes comptables internationales pour les prestations sociales aurait requis de la part d’EDF de provisionner pour ses engagements accumulés au titre des retraites. Aussi, de ces engagements, quel est l’ordre de grandeur ? Les comptes d’EDF ne mentionnent même pas cette information de base, une omission qui a conduit les commissaires aux comptes à émettre un avis réservé sur les comptes. Ils ont déclaré que les engagements étaient plus importants que les 18, 9 milliards de fonds propres de l’entreprise ; un rapport parlementaire, publié l’année dernière, évoquait le chiffre de 50 milliards d’euros. Avec un tel engagement dans ses comptes, EDF serait techniquement insolvable.

Mais que fera donc la nouvelle loi ? Elle n’affecte en rien les droits généreux à la retraites des salariés d’EDF, mais réforme le financement et le statut juridique du système de retraite. A partir de janvier prochain, le système général de Sécurité Sociale versera une pension de base aux retraités d’EDF, bien qu’EDF aura payé cash une grosse somme, toujours en cours de négociation. Les droits spécifiques en sus de la retraite du régime général demeureront de la responsabilité d’EDF. En conséquence, EDF sera libérée de la plus grande partie de l’héritage de ses obligations de retraite ; les milliards d’euros du coût des retraites passeront dans les comptes de l’Etat plutôt que les siens. Cependant, si les comptes passés d’EDF avaient reflété ces coûts, l’entreprise n’aurait jamais fait un profit.

Même les provisions qui ont été retenues dans les comptes d’EDF ne disent pas toute l’histoire. EDF produit plus d’électricité à partir du nucléaire que toutes les autres compagnies électriques. La plus grande partie des coûts réside pour EDF dans le démantèlement des centrales en fin de vie, le retraitement du combustibles nucléaires et le traitement et stockages des déchets nucléaires.

Selon les règles comptables, l’estimation de ces coûts est incluse dans le coût du capital d’une centrale nucléaire dans le bilan de la compagnie électrique. Comme ces coûts seront pérennes sur des décennies (beaucoup de décennies) futures, ils sont actualisés pour prendre en compte l’effet temporel sur la valeur de la monnaie. Les provisions correspondantes sont établies dans les comptes et s’accroissent tous les ans pour refléter l’évolution de l’actualisation. Les sommes en jeu sont énormes pour EDF : les provisions nucléaires, même sur une base actualisée, s’élèvent à 26,8 milliards d’euros à la fin de 2003,.

Les consommateurs en France paient une charge particulière pour financer ces coûts. Cependant, EDF ne met pas cet argent dans un compte séparé pour faire face à ses futurs engagements. Au contraire, elle a été en capacité - et le demeure - d’utiliser ces sommes pour ses affaires et acheter des concurrents. La théorie est que de tels investissements généreront un retour suffisant pour faire face aux engagements nucléaires.

Ceci est légal ; savoir si c’est prudent est une autre affaire. Il y a une grande analogie avec une entreprise qui investirait les fonds de retraite de ses salariés dans ses propres affaires - plutôt que d’établir un fond identifié avec un statut juridique spécifique - si l’entreprise disparaît, il en est de même des retraites des salariés. Parce que le démantèlement est une opération de très long terme, une entreprise comme EDF, sans fonds externalisés pour financer le démantèlement, a fait un pari audacieux sur son existence et sa solvabilité pour les décennies à venir.

Dans d’autres pays, comme l’Amérique du Nord, l’Espagne et la Suède, la contribution des consommateurs est versé dans un fond indépendant et séparé sur lequel la compagnie électrique n’a pas ou très peu de droit de regard. Mais l’Allemagne, un autre grand producteur d’électricité nucléaire, n’exige pas de fonds séparés. Cela signifie qu’EDF, RWE et E-ON, les deux plus grands producteurs nucléaires allemands, possèdent un avantage concurrentiel sur à la fois leurs concurrents nucléaires et non-nucléaires.

Le sujet a été longuement débattu en Europe. Il y a deux ans, lors des premières lectures de la directive projetée de libéralisation du marché électrique, le Parlement européen a adopté un amendement qui exigeait une séparation juridique (sans droit de regard pour les compagnies électriques) pour les fonds destinés aux démantèlements et à la gestion des déchets nucléaires. Cependant, la Commission européenne a repoussé l’amendement, en clamant qu’elle était d’accord sur l’importance de la question mais qu’une directive spécifique serait plus pertinente.

Quand le sujet a été repris, il l’était dans une annexe de la directive sur la sûreté nucléaire et il est resté une échappatoire qui permettait aux compagnies de continuer à gérer les fonds, « si des raisons exceptionnelles et dûment justifiées, rendait la séparation juridique impossible ». D’autres péripéties ont suivi. Selon Derek Taylor, le patron à la sûreté nucléaire de la Commission, l’Allemagne a mené la résistance aux fonds séparés, épaulée étroitement par la France.


Un acte d’équilibrage

Il n’y a pas moyen de dire à partir des comptes d’EDF, combien ont été récoltés auprès des consommateurs et siphonnés des réserves destinées aux démantèlements et à la gestion des déchets nucléaires. Cependant, si EDF avait été obligée d’isoler ces fonds, son endettement aurait été certainement supérieur de plusieurs milliards. « Sans les fonds de démantèlement, EDF aurait presque été en banqueroute » affirme Claude Turmes, rapporteur au Parlement européen pour la libéralisation du marché de l’électricité. « Je ne peux pas prouver que j’ai raison ; EDF ne peut pas prouver que j’ai tort. »

Il y a aussi une incertitude énorme concernant le montant des provisions nucléaires d’EDF qui comprennent 12,1 milliards d’euros pour les coûts de démantèlement et 14,7 milliards pour le retraitement et la gestion des déchets nucléaires. Pour commencer, la manière d’EDF d’estimer les coûts de démantèlement semble plutôt arbitraire. Elle établit ce coût à 15% du coût de la centrale nucléaire suivant les recommandations d’une commission gouvernementale de 1979. En fait, aucun réacteur nucléaire de taille géré par EDF n’a jamais été démantelé.

Et les coûts qui s’étendront sur plusieurs futures décennies sont sujets à toutes sortes d’incertitudes, y compris en terme d’inflation, de taux d’actualisation, du profil temporel des cash flow, des changements dans les régulations institutionnelles et environnementales, etc. Les commissaires aux comptes ont attiré l’attention sur ce point dans leur rapport d’audit. Dans ses comptes, EDF donne des détails insuffisants concernant les hypothèses de calcul des provisions et aucune révélation n’est faite sur ces coûts sur une base non actualisée.

De plus, les coûts de démantèlement sont susceptibles d’être manipulés en étant « actualisés au loin » à partir du simple expédient qui consiste à repousser dans le temps une partie du processus. Même l’allongement de la durée de vie des centrales nucléaires de juste 10 ans en 2003 a réduit les engagements pour le démantèlement, sur une base actualisée, de 2,3 milliards d’euros. EDF insiste sur le caractère prudent et conservatoire de sa politique de provisions et sur la mise de côté de 2 milliards d’euros dans ses comptes pour les coûts de démantèlement.


Un champion français ?

La libéralisation en Europe a déclenché une vague de fusions et acquisitions dans l’industrie de l’électricité. La valeur de ces opérations a augmenté de 3,5 milliards d’euros en 1999 à un pic de 42,7 milliards en 2001. Les prix des actions des compagnies se sont envolés. E-ON et RWE, avec leur accès aux fonds de démantèlement, se sont engagés pour des opérations d’un montant total de 47,5 milliards d’euros entre 2000 et 2002.

EDF s’est jointe à la frénésie. Depuis 1988, elle a suivi une politique d’expansion agressive dans les autres pays européens comprenant la Grande-Bretagne, l’Allemagne, l’Espagne, et l’Italie. En 2003, plus du quart des ventes consolidées d’EDF provenait des compagnies achetées en Europe contre 10% en 1988.

Mais dans quelle mesure EDF a-t-elle dépensé son argent avec sagesse ? Un indice : ses opérations internationales en Europe et en Amérique Latine ont produit toutes confondues une perte après impôts de 1,1 milliards d’euros en 2003 - bien que cela n’inclue pas les coûts des grandes restructurations des filiales déficitaires d’Allemagne et du Brésil.

Un autre indice peut être trouvé dans un rapport cinglant publié l’année dernière par une commission d’enquête parlementaire dirigée par Philippe Douste-Blazy, aujourd’hui ministre de la santé, sur la gestion des entreprises publiques. Le rapport critique vertement la présidence de M.Roussely. Pour quelques grosses opérations d’EDF, les procédures usuelles - comme l’information du conseil d’administration ou des représentants de l’Etat qui sont supposés donner leur accord - n’ont pas été respectées. La commission d’enquête a émis de « sérieuses réserves » à propos des plans de croissance externe internationale d’EDF : il n’y avait pas de critères stricts ou des exigences de retour sur investissement ; les financements des opérations demeuraient vagues ; il n’y avait pas d’études d’impact des opérations sur l’endettement du groupe, etc.

Quelques opérations sont distinguées. Par exemple, EDF a montré une « réelle et surprenante imprudence » selon le rapport, quand elle a obtenu en 2001 le contrôle d’EDENOR, une compagnie d’électricité argentine. Mais une opération, qui a laissé EDF avec des engagements de 10 milliards d’euros, a reçu les plus acerbes critiques. Le rapport affirme qu’EDF a pris des risques qui « étaient certainement excessifs » quand elle a acheté avec opportunisme une part de Montedison, un conglomérat coté et lourdement endetté qui contrôlait EDISON, deuxième compagnie d’électricité italienne et réel objectif d’EDF.

Dans les trois premières semaines de mai 2001, EDF happe 20% de Montedison pour un coût de 1,1 milliards d’euros, soit une prime de 40% par rapport au prix de l’action au début de l’année 2001. Plutôt que d’obtenir l’accord préalable du Trésor pour aller au-delà des 3% comme elle était supposée de faire, EDF a informé le Trésor seulement après que sa part atteigne 11%. M. Roussely a donné une explication sur cet enchaînement d’évènements que le rapport qualifie comme « loin d’être satisfaisant ».

Lorsque EDF a révélé l’étendue de sa part selon les règles des opérations boursières italiennes, le gouvernement italien s’est aussitôt empressé d’édicter un décret, depuis transformé en loi, en protestant contre EDF qui tentait de pénétrer en force le marché libéralisé italien alors que le marché français demeurait pour une grande partie fermé. La loi, directement tournée contre EDF, restreint le droit de vote des entreprises publiques à 2% dans les compagnies italiennes des secteurs de l’électricité et du gaz. Ainsi par sa tentative désespérée de rentrer sur le marché italien de l’électricité, EDF paie un prix vraiment fantaisiste pour une part qui lui donne peu voix au chapitre.

Pour sauvegarder un peu de valeur, EDF a été obligée de se jeter dans les bras de FIAT et d’autres pour constituer Italenergia, un outil crée pour monter une offre d"achat gagnante sur Montedison. En échange de sa part dans Montedison, qui a été rebaptisé EDISON en 2002, EDF a reçu 18% dans Italenergia, et de FIAT, Fenice, une entreprise de service. Fenice était évaluée à 500 millions d’euros à la date de l’échange, mais est inscrite des mois après pour 43 millions d’euros dans les comptes d’EDF.

En 2002, se désespérant pour un prochain contrôle à n’importe quel prix, EDF a signé des contrats d’options d’achats pour début 2005 avec les autres actionnaires d’Italenergia pour acquérir les 82% restant pour 3,7 milliards d’euros. Si elle est dans l’obligation d’acheter ces actions, ce qui probable, EDF deviendrait l’actionnaire principal d’EDISON (avec 62% des parts). Selon la loi italienne, EDF devra alors faire une offre pour les 18,5% des actions d’EDISON dans les mains du public - un coût de 1,1 milliards d’euros au cours actuel de l’action. Ainsi, EDF est confrontée à une sortie de liquidité de presque 5 milliards d’euros en 2005, rien que pour cette opération.

Si cela se produit, EDF finirait de payer 5,4 milliards d’euros pour sa participation dans EDISON, qui a réalisé un résultat avant taxes de seulement 156 millions d’euros dans les activités de coeur de métiers. Et EDF n’aurait toujours que 2% de droit de vote dans EDISON. Dans ses comptes de 2003, EDF a provisionné 855 millions d’euros, représentant une estimation du montant qu’elle aurait à surpayer aux actionnaires d’Italenergia.

Si EDF contrôle Italenergia et par conséquent EDISON, elle aura également à consolider la dette de ces entreprises. Italenergia a une dette de 1,1 milliards d’euros et EDISON, bien qu’elle soit vendu toutes les activités hors du coeur de métier en 2003, a toujours une dette nette de 4,1 milliards d’euros. Ainsi, en incluant les sorties de liquidité pour les actions, le total de la dette supplémentaire dans les comptes d’EDF serait de 10 milliards d’euros.

Il est peu étonnant, alors, que les critiques vont s’amplifiant en France contre la gestion d’EDF par M.Roussely. Mais il y aussi une prise de conscience latente que la France fait face à un bien plus gros problème en essayant de privatiser son géant de l’électricité qu’on ne pouvait l’imaginer. A cause de la nature extrême des incertitudes financières, EDF ne peut pas aisément offrir des conditions attractives à de potentiels acquéreurs d’actions. En réalité, ses besoins futurs en apport de capital sont immesurables. Les investisseurs avec les engagements légales - retraites ou fonds mutuels par exemple - ne seront pas en mesure d’acheter de telles actions risquées à moins qu’elles ne soient assorties de quelques garanties. S’ajoute les difficultés politiques d’une privatisation partielle, et cela commence à ressembler à un projet infaisable.

Plutôt que d’essayer de lever de nouveaux capitaux, EDF ferait mieux d’accepter qu’elle est in-privatisable et chercher plutôt à vendre quelques-unes de ses filiales étrangères. Ses actifs britanniques devraient rapporter des milliards. Cela sera difficile à avaler pour la fierté française. Mais une vente controversée qui pourrait horriblement mal tournée ? Ce serait encore plus difficile.

The Economist


 Source : Syndicat des Ingénieurs, Cadres, Techniciens et Agents de Maitrise des Services Centraux d’ EDF.
22, 30 avenue de Wagram - 75382 Paris cedex 08
cgt-ufict-wagram@edf.fr.



La privatisation ne se justifie ni institutionnellement ni financièrement


Par Jean Marcel MOULIN  [1]


EDF a assuré, avec un succès certain, sa mission de développement d’un service public de l’électricité de qualité et de proximité, offrant des tarifs parmi les plus compétitifs en Europe et réduisant la dépendance énergétique d’un des pays les plus démunis en ressources énergétiques.

 L’internationalisation massive, rapide et par acquisitions financières n’est pas une nécessité stratégique pour EDF :

 Au sein de l’Union Européenne, l’espace électrique est en pratique extrêmement restreint : ce qui n’est plus vendu directement par EDF aux clients réputés "perdus" est vendu sur le marché de gros de l’électricité (par exportations notamment). Au total, il n’y a donc pas de pertes de part de marché.

 En revanche, l’entreprise publique et citoyenne EDF a la responsabilité et le potentiel de mener des programmes ambitieux de coopération avec les électriciens des pays du Sud, visant à rendre effectif le droit d’accès à l’électricité

 Le statut public constitue un avantage stratégique et non un inconvénient : la loi Française est strictement conforme à la Directive européenne électricité et les Traités européens sont explicitement neutres quant à la propriété du capital des entreprises.

 Il n’y a pas de besoin structurel de cash : EDF n’a jamais été contrainte à renoncer à des acquisitions stratégiques en raison de ressources financières insuffisantes. Les opportunités sont, en réalité, peu nombreuses.


EDF appartient à la Nation


EDF appartient à l’état, aux collectivités locales, aux usagers et au personnel. Les investissements, parfois très lourds, comme le programme nucléaire et celui du réseau grand transport, ont été financés par l’autofinancement et les obligations (emprunts EDF), dont les charges ont toujours été supportées par les tarifs payés par les usagers.

De quel droit, au nom de quoi, au profit de qui, va-t-on spolier la Nation de ces biens en les vendant en bourse par cette privatisation ?


Quelle serait la valeur d’EDF ?


EDF a une valeur très élevée pour la collectivité nationale, mais, en raison des provisions qui devraient être faites par une entreprise privatisée, EDF, telle qu’elle est, ne pourrait être achetée que pour une valeur faible par un investisseur privé :

 L’acheteur privé, par prudence, tend à maximiser les valeurs des différents éléments du passif (démantèlement des centrales nucléaires, aval du cycle du combustible nucléaire, comptes de concessions de distribution, engagements retraites) pour n’estimer que la part la plus probable de la richesse à laquelle il aura droit. EDF, pour un investisseur privé ne vaudrait pas grand chose, au plus quelques milliards d’euros : -58 (valeur négative) à +2Md€.

 De l’autre coté, pour la collectivité nationale, l’entreprise publique EDF, en situation de régulation publique (pas de sous estimation de la durée de vie des centrales nucléaire, prise en compte de sa capacité à peser sur les coûts de l’aval du cycle du combustible nucléaire, pas de nécessité de provisionner les comptes de concessions de distribution ni les engagements retraites), avec son rapport salarial actuel, vaut beaucoup plus : de 16 à 50 Md€.

Pour privatiser le gouvernement va donc faire prendre en charge par l’Etat les dettes et les engagements car il doit vendre EDF à un prix suffisant au regard de l’opinion publique tout en garantissant des profits substantiels aux acquéreurs privés.

Il ne s’agit alors que d’appliquer le principe libéral classique : les dettes et les engagements de long terme sont pour la Nation, les réductions de droits pour le personnel, les bénéfices pour les actionnaires.

Avec le processus actuel de préparation de la privatisation, on aboutira à l’étonnant paradoxe dans lequel l’Etat vendrait EDF en apparence pour quelques dizaines de milliards d’euros, tout en reprenant à sa charge des engagements futurs équivalents voire supérieurs. Ainsi la collectivité se dépossèderait d’une entreprise dégageant chaque année entre 4 et 5 milliards d’euros de bénéfice pour un gain net voisin de zéro.


La privatisation c’est :


 La perte de la propriété des usagers-citoyens sur EDF

 Le transfert, de charges actuelles et futures à l’Etat

 La réduction des droits du personnel, des collectivités locales, des usagers

... pour le seul bénéfice des acquéreurs privés


EDF une privatisation annoncée qui masque une spoliation à venir de la collectivité nationale


Jean Marcel MOULIN


 Toute la démonstration chiffrée ICI :

http://sudenergieedf.free.fr/sections/EDF/CR/ex%E9g%E8se.htm



Immobilier : Bulle, Krach, Boum !


Chronique d’une mort annoncée : L’école maternelle, par Attac Midi Pyrénées.

Le Venezuela retire ses capitaux des USA, par Philippe Grasset.

"Vous devez être ceux qui menacent, pas ceux qui sont menacés. Vos dents doivent rayer le parquet."<BR>
M. André Daguin, patron ultra réactionnaire de l’hôtellerie.<BR>
Les intégristes libéraux, le « contrat nouvelle embauche » et l’explosion qui vient, par Gérard Filoche.

RSF. La liberté de la presse et mon hamster à moi, par Viktor Dedaj.



[1Derrière le pseudonyme collectif de Jean-Marcel Moulin, des cadres
supérieurs d’EDF et de GDF souhaitant conserver l’anonymat, prennent
position contre ce qu’ils appellent la « privation-spoliation » de
l’entreprise du service public de l’énergie. Ils mettent à la
disposition des citoyens leurs données, leurs réflexions et formulent
des contre-propositions.


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1914-1918 La Grande Guerre des Classes
Jacques R. PAUWELS
Dans l’Europe de 1914, le droit de vote universel n’existait pas. Partout, la noblesse et les grands industriels se partageaient le pouvoir. Mais cette élite, restreinte, craignait les masses populaires et le spectre d’une révolution. L’Europe devait sortir « purifiée » de la guerre, et « grandie » par l’extension territoriale. Et si la Première Guerre mondiale était avant tout la suite meurtrière de la lutte entre ceux d’en haut et ceux d’en bas initiée dès 1789 ? C’est la thèse (…)
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Honte à tous ceux à gauche qui ont tourné le dos à Assange. J’ai vu ce que vous avez fait, bande d’enfoirés.

Daniel Fooks

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