Le Cheikh Rached Ghannouchi, Président-Fondateur et Guide Suprême du Parti Islamiste Tunisien Ennahdha au Pouvoir, a déclaré, plus d’une fois, avant la formation du Gouvernement issu de l’élection de l’Assemblée Nationale Constituante : « "¯Nous sommes tous d’accord pour conserver l’Article 1 de la Constitution (de 1959) qui déclare que l’Islam est la religion et l’Arabe la langue officielle du pays"¯ » et qu’« "¯il n’y aura pas d’autres références à la religion dans la Constitution"¯ ». Cette dernière déclaration date du 4 novembre 2011, une dizaine de jours après les élections et une cinquantaine de jours avant la formation du dit Gouvernement, à une époque où le Parti Ennahdha, n’ayant pas obtenu la majorité absolue aux élections de ladite Assemblée, évitait d’effaroucher la base des Partis qui sont ses alliés, aujourd’hui, dans la Troïka au pouvoir. Et, quelques jours avant ces élections, il a déclaré, lors d’un débat avec un Moderniste, comme il apparait dans l’Article, intitulé " From Arab Spring to post-Islamist summer" , rapporté dans le Lien ci-dessous : « Le spectre islamique va de Ben Laden à Erdogan (le Premier Ministre turc actuel)(…)Pourquoi allons-nous adopter des modèles qui se situent loin de notre pensée, comme celui des Talibans ou le Modèle Saoudien, alors qu’il y a d’autres modèles Islamiques à succès qui sont plus proches de nous tels que les modèles turc, malaisien ou indonésien et qui combinent Islam et Modernité ».
http://www.thehindu.com/opinion/lead/article2529040.ece
Mais, en marge du débat à l’Assemblée Nationale Constituante qui s’est tenu le 28 février 2012, le Guide Suprême a déclaré : « L’Article 1 de la Constitution (de 1959) stipule que ’’la Tunisie est un État libre, indépendant et souverain"‰ ; sa religion est l’Islam, sa langue l’Arabe et son régime la République’’, et il pourrait mentionner que la Sharia est la source principale de la législation tunisienne"¯ ». Il jetait, déjà , aux oubliettes ses belles promesses électorales et feignait d’oublier que dans les Constitutions Turque, Malaisienne et Indonésienne, il n’est nullement question de Sharia, qui plus est, la Turquie fait partie de la douzaine de pays par le monde qui sont constitutionnellement laïques.
Cette dernière déclaration est, en réalité, sa profonde conviction et montre la constance de sa position vis-à -vis de la Sharia, étant donné qu’il a affirmé clairement et sans aucune ambigüité, voilà plusieurs années avant la Révolution de Jasmin, que « la lutte pour la liberté est seulement une étape pour appliquer la Sharia », comme le certifie la vidéo suivante :
https://www.facebook.com/profile.php?id=854949538&ref=ts#!/photo.php?v=166058780150491
Mais, Nicolas Machiavel, précurseur de la realpolitik , était passé par là , lui qui avait affirmé, en 1532, en substance, dans son ouvrage « Le Prince » que « le seul but d’un prince devait être la recherche du pouvoir, indépendamment des questions religieuses et morales ». En effet, lors d’un Meeting populaire, organisé le dimanche 25 mars 2012 par Ennahdha, le Cheikh Rached Ghannouchi a annoncé, dans le cadre de la rédaction de la nouvelle Constitution, la décision d’Ennahdha de reconduire tel quel l’Article 1 de la Constitution de 1959, sans faire mention, aucune, à la Sharia et a déclaré, comme le montre la Vidéo ci-dessous :
« Si nous maintenons notre demande concernant la Sharia, nous ne sommes pas sûrs que, lors du vote, nous aurons les 51% (…) l’Article 1 (de la Constitution de 1959) est suffisant pour qu’aucune loi non conforme à l’Islam ne puisse passer (…), après tout, il n’y a pas de différence entre l’Islam et la Sharia, c’est exactement la même chose(…) il y a des gens qui ont peur de la Sharia(…) ils ne sont pas encore prêts à aller plus loin pour l’instant (…), mais le temps viendra où les Tunisiens seront convaincus que la Sharia est ce qu’il y a de mieux, il ne faut pas se presser, celui qui n’est pas convaincu aujourd’hui, il le sera demain, si demain il ne sera pas convaincu, son fils, lui, le sera ».
https://www.facebook.com/photo.php?v=140854462706803&set=vb.185603771463757&type=2&theater
Comment s’y retrouver, dans ce double langage et ces multiples volte-face ?
Doit-on voir, aussi, l’ombre de Machiavel, depuis cette décision, soi-disant, consensuelle d’Ennahdha, dans le péril extrémiste brun-vert importé, déviance de notre Sainte Religion, étranger à notre bien-vivre-ensemble séculaire, qui essaye, de plus en plus, de gangréner notre Tunisie, de détruire notre « tunisianité », basée sur les valeurs d’échange, d’ouverture et de tolérance, issues d’une civilisation trois fois millénaire ? Sa stratégie, combinant discours de haine et violence crescendo, bénéficie de la bénédiction du Pouvoir d’Ennahdha, Pouvoir qui a montré, par ailleurs, son amateurisme, son inexpérience, son incompétence et son ignorance, aussi bien pour gouverner le Pays que pour respecter les aspirations de ceux qui ne sont pas de son bord, jusqu’à les traiter de collabos de Zinochet, d’ennemis du Peuple, d’athées, de mécréants, d’ennemis de Dieu et de je ne sais de quel autre nom d’oiseau d’un autre temps tel que « anarchistes staliniens »,…, Pouvoir qui n’ a pas hésité à matraquer, sauvagement, le 7 avril 2012, les Diplômés-Chômeurs, puis, le 9 avril 2012, les Militants de la Société Civile, en général, et de Sidi Bouzid, en particulier , principales composantes du fer de lance de notre Révolution de la Dignité, de la Liberté et de la Démocratie, Révolution que la quasi-totalité de nos Gouvernants Islamistes d’aujourd’hui ont vécue en spectateurs et, pour beaucoup parmi eux, de l’étranger, dont leur Guide Suprême.
Salah HORCHANI