Les femmes jouent un rôle de premier plan dans la Révolution bolivarienne. L’une d’entre elles, Lina Ron est devenue très populaire et en même temps la bête noire de la droite vénézuélienne, qui ne cesse de l’injurier, de la diffamer, la qualifiant de "révolutionnaire agressive" porteuse de roses pleine d’épines. Les actions du groupe de Lina Ron et de ses Cercles Bolivariens sont en particulier ciblées contre les puissants médias capitalistes qui sont le coeur de l’opposition réactionnaire, putschiste et fasciste qui fait tout pour écraser le processus démocratique révolutionnaire.
La question de la légitimité de la violence révolutionnaire du peuple se pose dans la situation d’extrême tension que traverse le Venezuela depuis plusieurs années.
PORTRAIT D’UNE ACTIVISTE DE RUE *
"Moi, Lina Ron, d’âge majeur, vénézuélienne, jouissant de toutes mes facultés mentales, domiciliée à Caracas, j’affirme, sous ma responsabilité : si la contre-révolution réussit le sabotage énergétique puisqu’au niveau patronal elle a échoué, et si Caracas se retrouve sans énergie ni essence et donc sans transport pour ravitailler la ville et mes ramasseurs d’ordures, mes indigents, mendiants et tous mes frères, les pauvres qui se trouveront sans nourriture faute de transports, j’affirme alors qu’avec tout mon ascendant sur les pauvres des collines, je m’en servirai pour leur dire de ne pas s’en faire, qu’à Altamara, au Country Club, à Prados del Este, à la Lagunita il y de la nourriture qui nous attend, bonne, exquise, délicieuse. Moi, il y a longtemps que je ne mange plus une bonne nourriture. Et bien nous irons en chercher là où il y en a" (La Razon, le 8/12/2002).
Cette déclaration a été largement publiée dans les médias patronaux pour effrayer les classes moyennes et supérieures. Voilà des gens qui pendant deux mois ont mené une action de sabotage contre un président démocratiquement élu en affamant un peuple, en ruinant un pays, et qui n’ont d’autres arguments que de jouer sur les peurs des 20% de Vénézuéliens qui disposent de 80% des revenus nationaux.
Comme l’a indiqué Chavez lorsque Lina Ron était emprisonnée suite à une plainte du recteur de l’Université de Caracas (UCV) où s’étaient déroulés des incidents provoqués par une prétendue "marche pour la démocratie" d’étudiants fascistes le 21 février 2002 : "Ron est une patriote qui a été satanisée" par l’opposition dans les médias.
Née il y a 44 ans en province dans une famille de 19 enfants, Lina Ron est venue à Caracas pour y faire des études supérieures. Elle ne mènera pas à son terme ses études de médecine à l’UCV mais elle y fera ses classes politiques, au sein, dit-on, du groupe Bandera Roja.
Dans le centre-ville de Caracas, Lina Ron s’est fait connaître pour ses actions au service des secteurs les plus marginalisés de la société (prostitué-e-s, malades du sida, sans-domicile, homosexuels...) et pour sa direction du centre culturel Artuve, du nom de son défunt mari.
Deux semaines après les attentats du 11 septembre 2001, elle s’était fait remarquée à la tête d’une manifestation où, sur la Place Bolivar, avait été brûlé un drapeau des EU. Depuis, on la voit dirigeant les manifestations de soutien à Chavez, mégaphone à la main. Celle que l’on appelle "La Comandante Lina Ron" ou "la Générale du chavisme" affirme avoir fait la connaissance personnellement de Chavez en 1997, mais avoir eu la certitude que "c’était l’homme" dès son apparition en 1992.
"Ma mission est de défendre la révolution dans la rue", disait-elle en 2002 d’un hôpital militaire où elle récupérait d’une grève de la faim commencée en prison.
L’incarnation du chavisme le plus radical, portant souvent le béret guévariste sur ses longs cheveux blonds, peut être rencontrée Place de la Révolution, dans un grand local vétuste, une sorte de cave, qui tient lieu de siège à son parti. Elle est la fondatrice de l’Union Populaire Vénézuélienne (UPV) qui se réclame du chavisme le plus pur et le plus radical et dont elle se considère comme le guide spirituel. Elle indique pouvoir compter sur 300 militants inconditionnels dans des secteurs-clés de la mobilisation populaire, que ce soit dans le centre de Caracas ou dans les quartiers pauvres des hauteurs de la capitale. La structure de base demeure le Cercle Bolivarien, composé de 7 à 11 personnes
La plus fameuse des activistes de rue du chavisme considère qu’il ne peut y avoir de changement sans violence. Elle a estimé, en février dernier, que la violence s’inscrivait dans le scénario du processus révocatoire. Elle pense que si la contre-révolution perd, elle cherchera alors à provoquer un bain de sang.
Un ami de Lina Ron estime que c’est la non-application des lois, l’impunité dont bénéficient les putschistes assassins, qui risque d’entraîner un bain de sang. Pour une autre de ses amies, qui s’exprime sur le site Aporrea (Asemblea Popular Revolucionaria de Venezuela), tous les médias du Venezuela qui dénoncent Lina Ron sont putschistes. Ces médias sont le noyau le plus actif de la conspiration fasciste contre le pays organisée par la CIA. Ils n’ont donc absolument aucune crédibilité ni aucune légitimité et doivent absolument être combattus.
Il est vrai que ces médias avec à leur tête les chaînes de télévision Globovision-Venevision, et les quotidiens El Universal-El Nacional sont de véritables partis politiques. C’est donc tout naturellement qu’on rencontre La Comandante et ses équipes dans les actions de protestation contre les médias saboteurs et que Lina Ron est dénoncée dans les rapports de RSF qui défendent ces médias. Néanmoins RSF a bien dû reconnaître que dans une action menée par des supporters présumés de Chavez contre ces médias le 21 septembre dernier, Lina Ron a eu un rôle modérateur, qui a permis aux journalistes mis en cause de récupérer leur matériel à l’exception d’une cassette.
L’ARGENT DE LA CIA
Comme le dit Eva Golinger, une avocate basée à Brooklyn (New York City) qui dirige le Comité de Solidarité avec le Venezuela de Chavez aux EU :
"La seule menace pour la démocratie vénézuélienne est l’opposition qui a fait un Coup et une grève illégale et reçu des millions de dollars pour assassiner Chavez et d’autres".
La National Endowment for Democracy (NED), une officine de la CIA, a reconnu avoir donné 1 million de dollars pour promouvoir la démocratie au Venezuela (en fait pour renverser Chavez). Peu de choses au regard des dizaines de millions de dollars qui ont alimentés les milieux putschistes du Venezuela. De l’argent sale et de l’argent des contribuables US a transité par une multiplicité de circuits tels que : Sumate (l’organisme qui a récolté les signatures en faveur du référendum révocatoire), l’Alliance pour le Progrès, l’AFL-CIO et l’archi-corrompue CTV (Centrale des Travailleurs du Venezuela), des groupes évangéliques et des oeuvres catholiques, des compagnies pétrolières, des banques commerciales et des firmes liées à la CIA, les valises diplomatiques, etc.
Que représentent en effet même 100 millions de dollars par rapport à la manne pétrolière qui se chiffre en milliards de dollars. Le pétrole, c’est 80% des exportations du Venezuela, 55% de ses recettes fiscales, 25% de son PIB. Rien qu’en un mois de sabotage pétrolier, l’opposition putschiste a fait perdre au pays 4 milliards de dollars, soit 4,57% de son PIB. Cela n’a pas empêché Bush de qualifier Chavez d’incompétent. Mais ce qui fait du Venezuela une "priorité stratégique" pour les EU c’est d’abord son potentiel de réserves de 380.000 millions de barils de pétrole, supérieur à celui de tout autre pays de l’OPEP.
L’enjeu est tellement considérable que Maria Corina Machado, la dirigeante de Sumate, est absolument sûre que ses amis gringos vont éliminer Chavez, lui évitant ainsi, à elle et à ses amis, les 8 à 16 de prison auxquels s’exposent, au terme de la loi vénézuélienne, ceux qui ont reçu de l’argent de l’étranger (Machado a publiquement reconnu que son organisme avait reçu 53 400 € de la NED pour "promouvoir la démocratie").
Si par extraordinaire Chavez était désavoué par les urnes le 15 août, ce serait sans doute la première fois au monde qu’un chef d’Etat élu démocratiquement est congédié de cette façon à mi-mandat par l’argent sale des EU.
A côté de la violence permanente exercée contre le peuple vénézuélien par l’Empire et ses organes locaux, celle dont on accuse Lina Ron et ses amis apparaît comme la toute petite expression de la colère d’un peuple en état de légitime défense.
Max Keler
*Un livre a été publié sur Lina Ron, qui n’est disponible qu’en espagnol, de Joaquim Murieta : "Lina Ron habla", Caracas, Editorial Fuentes, SRL, 2003.
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