Je l’écrivais déjà dans mon article du jour d’avant : la #spanishrevolution est le reflet d’une société espagnole en crise d’un point de vue politique, institutionnel et social. On se tromperait à croire que c’est le taux de chômage élevé qui a mis le feu aux poudres. Ce dernier n’a pas joué d’autre rôle que celui d’être le terreau sur lequel à poussé de manière vertigineuse un malaise beaucoup plus large : la crise globale d’un système global dans lequel des citoyens réduits à l’état d’objets aux mains de pouvoirs inhumains (an-humains) cherchent comment redevenir sujets et protagonistes de leur existence. Il n’est plus seulement question d’un monde autre possible, mais de la nécessité et de l’urgence de le mettre en place.
Personne ne sait ce qu’il en sera des campements (acampadas), ni quelle sera la réaction des pouvoirs judiciaire, politique ou de la police ; de la même manière que personne ne sait, à l’heure actuelle, la manière dont les organisateurs arriveront à garder allumée la flamme de l’illusion et d’une Utopie retrouvée (en même temps que la mémoire historique) si d’aventure les places venaient à être délogées. C’est de cela -et de bien d’autres choses- que discutent en ce moment les différentes Assemblées du mouvement ; il s’agit, ni plus ni moins, que de passer à une deuxième phase, sans laquelle la fleur présente, en puissance, dans l’esprit Sol, tardera à s’ouvrir. Il s’agit, ni plus ni moins, d’organiser le mouvement et de lui offrir les moyens qui lui permettent de continuer à produire ses effets au-delà de l’implacabilité de l’actualité la plus immédiate.
Ceux qui vont très rapidement se rendre compte de l’urgence d’un changement par ailleurs nécessaire, ce sont ceux-là même qui dimanche soir se montraient exultant pour ce qui, en fin de compte, n’est pas autre chose qu’une victoire à la Pyrrhus, une « écrasante » majorité issue d’urnes aussi en manque d’illusion qu’orphelines de près de 40% de tous ceux qui n’ont pas daigné s’en approcher. Et de fait, voilà bien le parti majoritaire : le parti de l’abstention et des votes blancs et nuls. Il n’est pas inutile de rappeler, à ce stade, que le PP, le parti le plus voté hier, a obtenu quelque 37% des voix de l’ensemble des à peine 60% d’inscrits ayant introduit leurs bulletins dans les urnes. L’abstention reste, encore et toujours le problème… L’abstention et le manque de culture politique d’une Société dont les racines Romaines poussent vers un toujours plus de Panem et Circem.
Mais l’urgence est réelle, évidente et je ne vais pas m’y étendre (d’autres le font et l’ont fait beaucoup mieux que moi), comme je ne m’étendrai pas non plus sur un système électoral injuste au point qu’un parti -tel IU- avec plus de 1.5 millions de voix, ne soit pas en mesure de constituer son propre Groupe parlementaire, cependant que des partis Régionalistes, ultra minoritaires dans l’ensemble de l’électorat, vont jusqu’à peser le double d’un point de vue politique, tout en ne représentant qu’un demi million de voix environ. Simplement souligner que le plus voté hier (celui qui a « écrasé » les autres), le PP, a obtenu un peu plus de 8 millions de votes, soit un peu plus de cinq fois ceux de IU -ce qui, si les élections avaient été législatives aurait permis aux uns une majorité absolue au Parlement et, aux autres, quelques 7 ou 8 députés tout au plus… Système appelé de Loi d’Hondt, effectivement, imprésentable et par rapport auquel on peut se poser la question des raisons « obscures » qui poussèrent les Pères de la Constitution à opter pour lui, dès la fin de la dictature.
La crise généralisée qui tient le pays (comme la majeure partie de la Planète) au bord du gouffre, pieds et poings liés aux banques internationales et à de « généreux » pays émergeants acheteurs de dettes publiques, pousse, depuis plus de deux ans, les municipalités et les régions vers la banqueroute : il n’y a plus d’argent, les caisses sont vides et les moyens manquent… Je suis impatient de voir de quelle manière les partis aux commandes vont affronter ces vérités indigestes et les faire passer auprès de ce peuple « souverain » sans que les mesures à venir (qui ne seront pas autres que les diktats de la BCE, du FMI et de la BM) ne le heurtent et le blessent au point de lancer la révolte, la vraie.
En Espagne, comme en Grèce, comme en France, aux USA, etc. l’enjeu pour les alternatives (et donc, aussi, pour le mouvement de la #spanishrevolution) réside dans le comment articuler toutes ces énergies, parfois si diverses, jusqu’à les élever au niveau d’une force politique commune. Force, politique, commune -chaque mot sur le même plan et identiquement signifiant. Toute fois que l’enjeu, essentiel, pour les pouvoirs réellement existants -quels qu’ils soient- (et j’ai déjà martelé comment on a l’impression qu’il n’y aurait d’autre alternative possible, aujourd’hui, quà choisir entre le capitalisme dur ou celui « à visage humain »), leur enjeu n’est autre que de trouver les meilleurs outils, les plus efficaces qui empêchent ces mouvements contestataires dispersés et divers de se trouver une commune articulation, que jeunes, alternatifs, ouvriers, chômeurs, minorités, employés de grands groupes, fonctionnaires, etc. réussissent à avancer unis ; c’est à cette entreprise qu’ils consacrent le plus gros de leurs efforts, sur cela qu’ils axent leurs campagnes de manipulation médiatique, qu’ils restructurent et désocialisent, etc.
Car, nous en sommes tous conscients -les jeunes des places d’Espagne, aussi bien que les détenteurs des rênes du Pouvoir ou que les Grands Argentiers - la véritable alternative n’est pas autre que celle que je rappelais dans mon article du jour d’avant, à savoir : changer le système dans le sens d’une démocratie réelle, non formelle, tout de suite, ou sombrer dans une barbarie qui s’approche à grands pas, un peu plus chaque jour.
José Camarena 230511
(article traduit de l’original, en espagnol, par l’auteur)
© Hozé 5/2011
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