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Le clivage droite/gauche est-il dépassé ? D.Collin / Battre la droite pour mieux refonder la gauche, M. Dollez.








Le clivage droite/gauche est-il dépassé ? par Denis Collin.


Samedi 17 mars 2007.


Nous vivons une étonnante période politique. L’agitation médiatique et sondagière bat son plein. Les politologues multiplient les analyses devant la montée de François Bayrou dans les intentions de vote - mais de la coupe aux lèvres, il y a parfois loin... Toute une psychologie de bazar est mobilisée pour expliquer les sentiments des Français. Les spéculations vont bon train sur l’effondrement du clivage droite/gauche que certains comparent à un nouvel effondrement du mur de Berlin - rien moins que ça !

Dans tout cela, il y a un nombre considérable de billevesées que des experts qui se sont toujours trompés déversent à flots continus. Rares sont ceux qui entendent les analyses pertinentes masquées derrière l’écran de fumée jeté pour brouiller, autant que faire se peut, le jugement des citoyens. Jean-Luc Mélenchon juge, avec son franc-parler habituel, que le pays « en état d’insurrection civique », il estime que les Français « veulent tourner la page tant d’une politique libérale qu’ils haïssent que d’un système de partis et d’institutions qu’ils méprisent. On peut même assister à un double 21 avril où droite et gauche traditionnelles seraient éliminées ». Qui l’entend parmi tous les géniaux stratèges qui prétendent conduire la gauche à la victoire ? C’est pourtant de ce point de vue qu’on peut comprendre ce qui se passe dans le pays et qu’on peut en déduire les actions à entreprendre.

Essayons donc d’aborder les questions sur le fond.

Commençons par le commencement. C’est-à -dire par un peu d’histoire. Le clivage droite/gauche est un héritage de la révolution française : à gauche se sont assis les partisans les plus décidés de la révolution. Il a trouvé son prolongement dans l’alliance nouée dans les premières années de la IIIe République entre les républicains radicaux et les représentants du mouvement ouvrier. Cette alliance a cependant toujours posé problème. Les radicaux dont on disait méchamment qu’ils étaient comme les radis, rouges dehors et blancs dedans, ont toujours été des partisans de la libre entreprise et de l’économie de marché (on dirait aujourd’hui des « libéraux ») étaient considérés par les socialistes comme des alliés peu sûrs et les chefs socialistes alliés aux radicaux étaient soupçonnés de mettre ainsi le mouvement ouvrier à la remorque d’un parti bourgeois. Après la seconde guerre mondiale, c’est au sein même des partis se réclamant du mouvement ouvrier que le clivage s’est opéré. Atlantistes invétérés, les socialistes s’unissaient aux radicaux et aux démocrates chrétiens « centristes » contre les communistes inféodés à la bureaucratie stalinienne. La question de l’Union de la Gauche a donc toujours été une question problématique. Il n’est donc pas certain qu’il faille se contenter de regretter l’âge d’or (mythique, comme tous les âges d’or) de l’union de la gauche parce qu’en procédant ainsi on masque les réels clivages qui expliquent l’explosion de la gauche aujourd’hui.

On peut penser qu’il existe dans le pays une sorte de clivage droite/gauche très ancien et qui perdure en dépit des transformations de la « superstructure » politique. Les citoyens français sont majoritairement attachés à la laïcité (Bayrou en avait fait, en son temps, l’amère expérience) ; ils sont attachés à l’égalité non seulement formelle (celle qui veut que riches et pauvres aient également le droit de coucher sous les ponts, selon la formule d’Anatole France) mais aussi réelle, c’est-à -dire à cette fraternité institutionnelle que représente la sécurité sociale, l’assurance-chômage et plus généralement tous ces acquis sociaux qui découlent des grandes luttes ouvrières et qui ont été institutionnalisés en 1936 et 1945. Ils sont également attachés à la souveraineté populaire comme l’a montré le référendum de 2005 sur le TCE. Tout cela pourrait définir une « gauche réelle », bien loin de recouper les frontières de la gauche institutionnelle. De l’insurrection populaire contre la réforme Juppé en 1995 à la vaste mobilisation contre le CPE en passant par les mobilisations contre la réforme Allègre-Royal de 2000, ne manquent pas les exemples qui montrent la vitalité de cette « gauche réelle ».

Il y a aussi une « droite réelle » dans ce pays, beaucoup plus restreinte que ne le disent ses résultats électoraux. Cette droite est composite. Elle retrouve souvent dans les idées de Le Pen une partie de ses propres idées : il suffit de voir comment s’effectuent les recrutements dans de très nombreuses entreprises pour comprendre que la « préférence nationale » chère au chef du FN est une triste réalité dont sont victimes, massivement, ceux qui ont un nom à consonance étrangère, voire ceux qui habitent un quartier « mal famé ». Une toute récente enquête vient une fois de plus de le rappeler. Il y a une droite qui défend avec opiniâtreté son coffre-fort, ses privilèges, contrôle les médias et l’économie et qui, si elle se dit « libérale », ne croît qu’au principe d’autorité. Ce « parti de l’ordre » a ses hommes dans tous les partis, même s’il s’exprime de manière privilégiée dans le clan Sarkozy.

La véritable tourmente politique dans laquelle nous sommes vient de ce que les partis institutionnels n’ont plus qu’un rapport lointain avec ce clivage politique profond, réel et aussi vieux que la République. Soyons plus précis. La droite, derrière Sarkozy et Le Pen, est bien à droite. Mais c’est l’effondrement de la gauche qui provoque ce qui apparaît comme un véritable chaos politique. Par un processus qui a commencé il y a longtemps (sans doute au moment du fameux tournant de 83/84 [1]), le principal parti de la gauche, le PS, s’est toujours plus éloigné de ses origines socialistes pour devenir une autre sorte de parti centriste ou de parti démocrate à l’américaine. Ce processus n’est pas sans rencontrer des résistances au sein de l’électorat (qui a majoritairement voté contre les consignes du parti en 2005), dans la base militante et même dans l’appareil. Les gros malins de la grande presse ne voient que des batailles d’éléphants, incapables qu’ils sont de comprendre les enjeux politiques et sociaux, les enjeux en termes de lutte des classes qui s’expriment dans ces batailles internes. L’évolution de Laurent Fabius qui l’a conduit à être un des porte-parole du « non au TCE » et à se présenter comme candidat à la candidature, était tout sauf une « bataille d’éléphants ». Fabius, qui est loin d’être un gauchiste, a senti que le sol se dérobait sous les pieds d’un PS dont l’évolution droitière conduit à son explosion.

Mais force est de reconnaître que Fabius a été largement battu au sein du PS alors qu’il était la dernière chance sérieuse pour la gauche de se souder, de se reconstruire et l’emporter contre la droite. Cette défaite exprime a contrario la poussée des courants qui dans le PS considèrent que la transformation socialiste de notre société est une lubie archaïque, qu’il faut s’adapter à l’ordre mondial impérialiste et que le PS n’a plus d’autre fonction que de faire passer en douceur, par ses liens avec le mouvement syndical en particulier, les fameuses « réformes indispensables », c’est-à -dire les contre-réformes exigées par le capital financier. Ayant renoncé au principe d’égalité au profit du principe d’autorité, le socialisme est réduit au « social », c’est-à -dire à la charité que les riches octroient aux pauvres, à conditions qu’ils se tiennent tranquilles, selon la formule du « gagnant-gagnant » de Mme Royal.

Alors que le milieu vital du PS est la démocratie parlementaire, en son sein se sont renforcées les tendances bonapartistes, la volonté de se situer « au-dessus des partis », ce que Mme Royal incarne à merveille, elle qui, à France 2 le 15 mars, s’est vantée de dire que c’était elle qui donnait la ligne - bonjour, la démocratie participative ! - et qu’elle n’allait pas « négocier » avec le PS. Mme Royal se prenant pour « mon général », veut un « lien direct avec les Français ». Bref, si on met de côté les formules décoratives et le pathos un peu ridicule sur le mode « je sais parce que je suis une mère de famille », elle n’apparaît pour beaucoup d’électeurs traditionnels de gauche que comme un Sarkozy à peine repeint en rose.

Faut-il, dans ces conditions, s’étonner si de très nombreux Français considèrent ce clivage droite/gauche comme non pertinent ? Ils n’ont pas eu besoin d’entendre Bayrou ou les savantes analyses des sondeurs. Il leur a suffi d’entendre Mme Royal. En mai 1981, François Mitterrand annonçait qu’on allait construire le socialisme en France ! Aujourd’hui, foin du socialisme, ne reste plus que la formule cléricale de « l’ordre juste ».

Beaucoup d’éminences de la direction du PS pensent et disent que tous ces électeurs de gauche qui disent vouloir voter Bayrou sont des irresponsables ou des bobos (là , c’est l’hôpital qui se moque de la charité !) ou, plus intello, que les Français devenant plus individualistes deviennent plus centristes. Ce sont des calembredaines. Les électeurs de gauche qui disent vouloir voter Bayrou [2]ne sont pas des idiots. Ils savent bien que Bayrou est, sur le plan économique et social, un homme de droite, pas très éloigné de Sarkozy, mais pas très éloigné non plus de Mme Royal. Il affirme même qu’il est plus proche de Royal et que son véritable adversaire est Sarkozy ! Mais ces électeurs cherchent les moyens de briser le carcan de la Ve République pourrissante. Ils tentent en quelque sorte d’instrumentaliser Bayrou. Puisqu’on leur a demandé en 2002 de voter Chirac pour faire barrage à Le Pen, pourquoi ne pas voter Bayrou pour faire barrage à ce véritable danger pour nos libertés qu’est Sarkozy ? C’est peut-être une erreur, mais c’est un raisonnement bien plus politique et bien plus sérieux que les coups de gueule de DSK et Royal contre Bayrou, coups de gueule auxquels personne de sensé ne peut apporter le moindre crédit.

Car aujourd’hui, s’il y a un véritable danger, ce n’est pas le « libéralisme » - un mot fourre-tout qui sert de chiffon rouge à agiter devant le nez d’une gauche politique qui a perdu depuis longtemps tout sens d’une analyse en termes de rapports de classes. Non, le véritable danger est celui de la mise en pièces de ce qui reste de nos libertés démocratiques. Sarkozy a dit ce qu’il fera, s’il est élu, et il a même commencé à le faire : faire évoluer la Ve République vers un État policier, contrôler les citoyens jusque dans leur vie privée, liquidant tous les droits des immigrés pour fabriquer au nom de « l’immigration choisie » une main d’oeuvre taillable et corvéable à merci afin de peser sur les revendications ouvrières, réglementer sévèrement le droit de grève dans le privé et s’orienter vers sa pure et simple suppression dans le secteur public. Or, curieusement, cette question des libertés, est pratiquement absente de la campagne électorale... Aux petits malins qui croient qu’on peut faire joujou avec cela, rappelons que le mouvement ouvrier anglais ne s’est jamais relevé de l’ère Thatcher, dont Blair (le modèle de Mme Royal, soit dit en passant) est le digne héritier. Rappelons également que Bush (le modèle de Sarkozy, en dépit de la pitoyable opération de chirurgie esthétique entreprise par Guaino pour transformer son nouveau maître en gaulliste) s’est vigoureusement attaqué aux droits fondamentaux des citoyens des États-Unis, notamment avec le Patriot Act.


Si on veut donner encore un sens au mot « gauche », il est assez simple :

- Liberté : c’est-à -dire défense des libertés démocratiques, des droits individuels, refus de la société du fichage (les empreintes génétiques dès la naissance, proposait un séide de Sarkozy) et du contrôle généralisé, défense des libertés politiques et donc liquidation du régime du coup d’État permanent de la Ve République, défense des libertés syndicales, de l’indépendance des syndicats à l’égard du patronat, du gouvernement, des partis et arrêt de la criminalisation de l’action syndicale. Et surtout liberté pour le peuple de décider librement de son sort, de s’affranchir des carcans imposés pas la bureaucratie européiste.

- Égalité : égalité des droits humains fondamentaux entre Français et immigrés, égalité des droits politiques (contre la mainmise des groupes du complexe militaire, industriel et financier sur la presse, l’édition, les médias), égalité dans l’accès aux droits sociaux garantis par le préambule de la constitution de 1946 annexé à l’actuelle constitution, donc droit au revenu permettant de vivre dignement, droit au logement pour tous, droit à la retraite, droit au travail.

- Fraternité : contre l’égoïsme élevé en vertu suprême par les tenants de la soi-disant « société de responsabilité », défense de la protection sociale, défense des retraites fondées sur le principe de la solidarité entre les générations. Et puisque entre frères tout est commun, nationalisations des industries stratégiques, des monopoles de fait, nationalisation du système bancaire, seul moyen de fournir aux classes moyennes laborieuses le crédit à bon marché pour résister aux trusts capitalistes.

En quelques mots, ce sont les grandes lignes du programme de la République sociale (ce que la France est censée être, selon les termes de l’article I de la constitution !). Appelons cela la gauche, si on le veut. En tout cas, au-delà du barnum électoral, il n’y a rien d’autre à faire qu’à développer ces idées et rassembler pour reconstruire une force politique exprimant les intérêts du peuple contre les « grands » qui le dominent. Et sur cette base, le 22 avril, comme nous n’avons guère le choix qu’entre de mauvais candidats, chacun trouvera bien le bon chemin.

Denis Collin
Philosophe. Professeur en lycée.
www.la-sociale.net




Battre la droite pour mieux refonder la gauche, par Marc Dollez.


Lundi 19 mars 2007.


Avec environ 35% des intentions de vote au premier tour, son plus bas niveau depuis 1969, la gauche est en passe, une fois encore, de perdre l’élection présidentielle.

Et pourtant elle devrait s’imposer sans coup férir, au regard du rejet massif de la politique de la droite, à plusieurs reprises depuis 2002, tant dans les urnes que dans la rue.

Et pourtant, face au danger Sarkozy, elle devrait rassembler tous les républicains attachés au modèle social français issu de la Résistance, inquiets de l’ultralibéralisme, du communautarisme et de l’atlantisme du ministre de l’intérieur.

Pourquoi alors un tel décalage avec la volonté du peuple et un tel décrochage avec le mouvement social ?

A l’évidence, le débat avec la droite n’est pas suffisamment frontal et la ligne de démarcation trop souvent franchie avec l’emprunt d’idées au camp adverse, d’où une grande confusion politique qui fait actuellement le lit de l’illusion centriste.

En vérité, la présidentielle s’apparente désormais plus à une compétition de personnalités qu’à une confrontation de projets politiques.

L’image prime sur les idées et les valeurs, le destin personnel sur l’ambition collective, le court terme sur la préparation du futur.

C’est le triomphe, mortifère pour la gauche, d’un marketing politique qu’elle devrait récuser au lieu de s’y couler.

C’est l’américanisation de notre vie politique, considérablement amplifiée par l’instauration du quinquennat et l’inversion du calendrier électoral, d’ailleurs voulues en leur temps par la gauche elle-même !

Pour l’avenir même de la République et de la démocratie, le moment est vraiment venu de s’interroger sur le principe de l’élection du président de la République au suffrage universel, porte ouverte au populisme et à toutes les aventures. Continuer à faire l’impasse sur le sujet pourrait un jour se payer très cher.

Plus fondamentalement encore, l’état actuel de la gauche résulte pour beaucoup de la profonde crise d’identité qui la secoue et affecte particulièrement le Parti Socialiste depuis qu’au pouvoir il s’est avoué impuissant face aux lois du marché.

La leçon du 21 avril 2002, terrible sanction de cette impuissance politique, n’a pas été tirée, comme le « oui » au projet libéral de constitution européenne l’a confirmé.

S’y ajoutent, consternant constat, la division et l’émiettement des forces de gauche qui ont assuré la victoire du Non, privant pour le moment le vote fondateur du 29 mai 2005 de toute perspective politique.

La gauche va mal. Toute la gauche.

Il serait vain de le nier sous prétexte de prochaines consultations électorales car, dans tous les cas de figure, sa refondation s’impose.

L’affirmer maintenant n’est en rien démobilisateur pour le scrutin à venir ; au contraire, cette perspective crédibilise davantage encore la nécessité de battre tout de suite la droite.


3 conditions, 3 engagements

Non, la défaite de la gauche n’est pas inéluctable car celle-ci dispose de réserves importantes qui, faute de discerner une alternative antilibérale, sont indécises et hésitantes.

Il est encore temps de les mobiliser.

C’est évidemment au Parti Socialiste et à sa candidate, seule en mesure de représenter la gauche au second tour, qu’il appartient pour l’essentiel de créer les conditions de la mobilisation et du rassemblement de toute la gauche.

Il y en a principalement trois, sachant que l’appel à battre Sarkozy pour indispensable qu’il soit n’est guère suffisant, comme le démontrent les enquêtes d’opinion.

- Renouer avec le combat frontal contre la droite, projet contre projet.

Pour la gauche, la présidentielle est avant tout un débat de fond sur le choix de société et non « un lien direct entre le peuple et une personnalité », comme l’a malencontreusement affirmé la candidate. L’oublier est une faute majeure.

- Ecarter irrémédiablement toute hypothèse de gouvernement ou d’alliance avec l’UDF. Cette clarification est d’autant plus urgente que certaines voix parmi les plus autorisées l’évoquent sans détour.

Un tel scénario signifierait la remise en cause de la stratégie d’union de la gauche et l’implosion du Parti d’Epinay.

- Placer la question sociale au coeur de la campagne, en s’adressant aux salariés et à la jeunesse, à tous ceux qui, plongés dans la pauvreté, la précarité et la peur du lendemain, souffrent durement de l’implacable et cynique logique financière du capitalisme.

L’urgence sociale exige des mesures concrètes et d’application immédiate pour revaloriser le pouvoir d’achat, assurer à chacun le droit à l’emploi, au logement, à l’éducation, à la santé. Mettons les en débat sans plus tarder.

Engageons nous, sans faux-fuyants, sur la généralisation des 35 heures et la garantie de la retraite à 60 ans.

Expliquons précisément comment nous nous opposerons aux licenciements boursiers et lutterons contre les délocalisations.

Renforçons le rôle irremplaçable et les prérogatives de l’Etat, seul garant de l’égalité républicaine.

Plutôt que d’appeler au vote utile, qui ne favorise pas la diversité indispensable au rassemblement, mieux vaut expliquer ce qui changerait vraiment avec une présidence socialiste.

Dans cet esprit et au-delà du désaccord avec le « pacte présidentiel », trois engagements de la candidate seraient particulièrement révélateurs du sens que la gauche, revenue aux responsabilités, donnerait à son action :

- Abrogation de toutes les lois antisociales et liberticides de la droite, à commencer par la loi Fillon sur les retraites, et ainsi clairement afficher l’impossibilité de facilement s’en accommoder, comme cela a été le cas dans le passé.

- Refus absolu du diktat européen sur la libéralisation de l’électricité et la libéralisation de l’ensemble du secteur postal, et ainsi affirmer la volonté de la gauche de mener sa politique, y compris contre Bruxelles.

- Renforcement réel des pouvoirs d’une Assemblée Nationale à élire à la proportionnelle, le plus vite possible sans attendre 2012, et ainsi rendre le pouvoir aux représentants du peuple.

Dans ces conditions, la victoire à la présidentielle deviendrait possible.

Sur ces bases, la refondation de la gauche s’engagerait favorablement.


Retrouver l’authenticité socialiste

Souhaiter ardemment la victoire de son camp n’interdit pas la lucidité : la gauche est à refonder.

«  L’ordre juste » n’a évidemment rien à voir avec la lutte des classes ou un socialisme réformiste, pas plus que la démocratie d’opinion avec la démocratie militante ou le « New Labour » de Tony Blair avec le Parti de Jaurès et de Mitterrand.

Une page se tourne. L’avenir du Socialisme est en jeu en France comme en Europe où, après plusieurs électrochocs au cours du XXe siècle, la social-démocratie a perdu ses principaux repères, ses « défenses immunitaires » pour reprendre l’expression de Pierre Bourdieu.

Cette fragilité résulte de sa conversion au libéralisme économique et de son incapacité, après la chute du mur de Berlin, à définir un projet alternatif de transformation sociale.

En France, depuis le tournant libéral de 1983, la question est posée au Parti Socialiste : inscrit-il toujours son action dans le but de la transformation vers un autre mode d’organisation sociale ou considère t’il le capitalisme comme « l’horizon indépassable » ?

Ou, autrement dit, qu’est-ce qu’être Socialiste aujourd’hui ?

«  Celui qui ne consent pas à la rupture avec l’ordre établi,...avec la société capitaliste, celui-là , je le dis, ne peut pas être adhérent du Parti Socialiste ».

La réponse de François Mitterrand, au congrès d’Epinay en 1971, fait écho à celle de Jaurès, dans son célèbre discours sur « les deux méthodes » en 1900 : « Le Parti Socialiste est un parti d’opposition continue, profonde, à tout le système capitaliste, c’est-à -dire que tous nos actes...doivent être dirigés vers la suppression la plus rapide possible de l’iniquité capitaliste ».

Le monde a beaucoup changé, mais pas l’exploitation de l’homme qui s’est même enrichie de moyens modernes massivement plus efficaces.

En ce début de siècle, le Socialisme reste cette idée neuve pour la justice sociale, l’égalité entre les hommes et la libération des peuples.

C’est la conviction de nombreux militants, à l’intérieur comme à l’extérieur du Parti Socialiste, qui ne se résignent pas à la faiblesse et à l’impuissance actuelles de la gauche.

Au renoncement et à la soumission, ils entendent toujours opposer le volontarisme politique, la transformation sociale et un véritable internationalisme ; à l’obscurantisme et aux intégrismes de tous poils, le progrès et la laïcité.

Face au libéralisme sous toutes ses formes, ils veulent porter un projet de société, fidèle aux idéaux de la gauche et aux valeurs de la République, adapté aux évolutions sociales, économiques et environnementales de notre temps.

C’est le sens de la refondation socialiste à engager, qu’elle que soit l’issue de la présidentielle, pour redonner toutes ses couleurs à la gauche.

La perspective est enthousiasmante.

Elle suppose cependant que tous ceux qui la partagent puissent enfin et rapidement se retrouver.

Marc DOLEZ, député PS du Nord, animateur de Forces Militantes.
http://www.forces-militantes.org




Ils ont peur ! par Vincent Présumey.






 Dessin : Ceuta, par Manuel Loayza.


[1Voir Denis Collin et Jacques Cotta : L’illusion plurielle, JC Lattès, 2001

[2qui disent, cela ne veut pas dire qu’ils vont le faire !


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