Wech n’est ni un mot anglais ni un mot norvégiens. Il est algérien. Ce mot entra dans le Petit Robert, en 2009, avec la définition suivante : « Wech adverbe interrogatif : – De l’arabe dialectal. Pop. Comment ? Quoi ? Wech Wech ? Que se passe-t-il ? – Parler wech, wech, comme les jeunes de banlieues. ».
Quand il s’étonne, il sait dire "wech wech" comme les jeunes algériens ! Son excellence Monsieur l’ambassadeur est comme vous et moi. Il se promène en jean et pullover à Alger. Les gens de la rue Bab Azoun le prennent pour un touriste européen quand ils le voient avec sa femme négocier les prix dans cette rue populaire. Les marchands échangent le Salam avec eux et envient leur sympathie et leur modestie remarquables. Ils n’ont jamais su leur fonction !
Comme les bons navigateurs norvégiens, ils savent que Bab Azoun et Bab El Oued sont le baromètre qui mesure la tension économique à Dzaïr. Ils savent aussi que l’amitié des marins norvégiens et des marins algériens est de longue date. Ils ont lu dans leur histoire que les seuls bateaux franchissant le détroit de Gibraltar, à l’époque des frères Aroudj et Khair-Eddine, sans payer les droits de passage, étaient des bateaux norvégiens. Ils gardent en mémoire cette amitié et se promènent là où certains hauts responsables évitent de mettre les pieds !
L’École et la rue occupent une place primordiale dans tous les pays où la démocratie est mode de gouvernance. Face aux difficultés économiques et aux interrogations de la rue, les politiciens honnêtes se tournent toujours vers l’École pour chercher des réponses et trouver des solutions aux « wech wech » de la rue. C’est l’école qui corrige la rue quand le parlement ne répond plus à ses wech wech ! Les jeunes écoliers sont conscients des « wech wech » de la rue. Ils regardent et contribuent positivement au spectacle des hauts et des bas "tale3 habet" de Beur TV. Ils ont apprécié le comédien Noui quand il a présenté comment le premier ministre norvégien contrôle les "wech wech" de la rue en jouant le taxi el mekhfi de Othman Alliouat à Oslo.
Je suppose que les députés et sénateurs d’Amimirou sont allés à l’école et n’ont pas oubliés les bonnes mœurs. Je les invite à faire des efforts et apprendre une autre langue pour satisfaire le wech-wech du peuple. C’est la lecture dans une autre langue qui attendrit leurs cœurs et efface leurs sentiments de vengeance.
A l’école française nous avons appris la leçon de Blanquette, la chèvre de monsieur Seguin. Blanquette était docile et caressante. Elle vivait dans une écurie bien verrouillée. Même emprisonnée elle fournissait du lait pour son maitre. Son maitre ne savait pas que la liberté a un prix. Blanquette a une aventure avec un jeune chamois à pelage noir. Ils s’égarent dans la forêt. Blanquette entend la trompe de monsieur Seguin qui l’appelle. Blanquette refuse d’être à nouveau enfermée dans une écurie. Elle décida de rester en liberté dans la montagne. Elle se bat contre le loup toute la nuit. Au lever du jour, Blanquette, épuisée par un combat inégal, finit par se laisser dévorer. Blanquette est morte avec honneur. Elle a préféré la gueule du loup à une cellule écurie. Le président Boudiaf a bien qualifié le parlement d’écurie avant de verrouiller ses portes en 1992. Le courage de cette chèvre dépasse le courage de certains élus !
Wech, chèvre, fromage et pomme de terre à la menthe méritent une discussion en toute liberté.
Un professeur, un étudiant et un artiste sont dans la résidence de Monsieur l’ambassadeur. La résidence se situe à Ben Aknoun. Ils regardent la baie d’Alger et discutent le fromage politique d’une chèvre libre de tout engagement.
Le professeur parle de son métier d’éducateur et dit : "Par mon travail, mon sérieux, mes connaissances solides et mon rang dans la société, je gagne le respect et l’autorité de mes élèves. Les théories bizarres trouvées sur Internet et rabâchées par nos politicards demandent des éducateurs compétents pour convaincre leurs élèves et corriger leurs erreurs. Je suis persuadé que l’école demande la rigueur et le savoir. Mes élèves sont sérieux et m’écoutent ». Il s’arrête pour un moment, regarde son étudiant et continue. Je vous dis mon point de vue : « Le retour au sérieux à l’école s’impose. Le respect pour la personne qui représente ma fonction est indispensable si nous voulons une place de respect dans le monde."
Face au professeur et son étudiant, se trouve l’artiste. Il prend la parole et dit : "Grâce à ses œuvres, l’artiste vous transmet un message d’une réalité que vous vivez chaque jour. Parfois, il vous fait rêver ! Parfois il vous transporte dans l’imaginaire. Il vous fait vivre dans des mondes différents au vôtre. Il vous rend le sourire perdu. L’artiste est votre remède efficace contre tous les maux que certains politiciens vous transmettent par leur incompétence. Une caricature, une chanson, une scène théâtrale ou un regard d’un clown peuvent rendre la joie, le sourire et l’espoir à un peuple taraudé par un quotidien dur. Ils lui font oublier les idées farfelues de ses responsables. Quant à moi, je gagne difficilement ma vie. Je vis dans les hauteurs de Blida. Je préfère la solitude à la mauvaise compagnie. Je vis dans l’oubliette et personne ne me connait. Je remercie mon ami professeur qui me rend visite quand il veut discuter abstrait. Il aime la pomme de terre préparée à la menthe sauvage. C’est un plat pas cher. Nous mangeons pomme de terre et nous discutons politique comme tous les algériens. Le professeur a l’art de faire parler les gens. Dieu merci nous sommes libres et nos bouches ne sont pas cousues !"
L’étudiant prend la parole et dit : "Depuis l’indépendance à ce jour, le métier d’éducateur, la vie de l’étudiant et la valeur de l’artiste ne cessent de se dégrader chez nous. Il n’y a plus de respect pour ces fonctions dans notre société. J’avais à peine deux ans quand Boudiaf est retourné à Alger. J’ai lu sa première déclaration : Il faut mettre les compteurs à zéro, s’attaquer aux causes et aux conséquences de la crise. Je ne veux pas que le sang coule à nouveau dans mon pays. Je tends la main à tous..... Hélas ! La politique du « hak-sac » a détruit les principes des braves. Nous vivons le temps des médiocres et l’argent a renversé l’échelle des valeurs. Quant à l’ambassadeur, il représente l’image de son peuple dans le pays où il exerce. C’est la première fois que je rencontre un ambassadeur. C’est dommage, il n’est pas algérien. C’est la première fois que je regarde des hauteurs d’Alger la beauté de mon pays. Je viens de l’intérieur du pays. Cette vue me fait oublier le bourbier de Bab-Ezzouar. Maintenant, je réalise pourquoi nos amis français sont restés 132 ans.
L’étudiant veut se confesser. Il regarde la baie, imagine la trompe de Monsieur Seguin et la relie à la trompette de Rousseau. Il prend un souffle profond, fixe son regards sur la baie d’Alger et récite un passage des confessions de Rousseau : "Que la trompette du jugement dernier sonne quand elle voudra, je viendrai, ce livre à la main, me présenter devant le souverain juge. Je dirai hautement : Voilà ce que j’ai fait, ce que j’ai pensé, ce que je fus. J’ai dit le bien et le mal avec la même franchise. Je n’ai rien tu de mauvais, rien ajouté de bon ; et s’il m’est arrivé d’employer quelque ornement indifférent, ce n’a jamais été que pour remplir un vide occasionné par mon défaut de mémoire. J’ai pu supposer vrai ce que je savais avoir pu l’être, jamais ce que je savais être faux. Je me suis montré tel que je fus : méprisable et vil quand je l’ai été ; bon, généreux, sublime, quand je l’ai été : j’ai dévoilé mon intérieur tel que tu l’as vu toi-même. Être éternel, rassemble autour de moi l’innombrable foule de mes semblables ; qu’ils écoutent mes confessions, qu’ils gémissent de mes indignités, qu’ils rougissent de mes misères. Que chacun d’eux découvre à son tour son cœur au pied de ton trône avec la même sincérité, et puis qu’un seul te dise, s’il l’ose : je fus meilleur que cet homme-là"
Emu par le texte et la mémoire de ce jeune, l’ambassadeur fait signe à ses invités de passer au salon. Avec politesse et courtoisie, dans un français à la norvégienne, il demande à ses invités de patienter un moment. Il va préparer du thé. En son absence les invités ont poursuivi la discussion en arabe dialectale. L’artiste a demandé à l’étudiant de ne pas accrocher un tableau politiquement noir au mur de la résidence norvégienne. La fierté algérienne s’accroche aux nez de nos artistes.
L’ambassadeur revient. La simplicité élimine de faux luxe des plateaux argentés. Du thé et un snack dans un plateau inox. Il dépose le plateau et demande à ses invités de déguster le sandwich et de lui dire son gout et son origine. Nous assistons à un test de gastronomique chez un diplomate nordique. Le sandwich se compose de deux tranches de pain brun et des rondelles type « cachirs Bellat ».
Les invités gouttent les rondelles. L’étudiant fait des grimaces. La viande a un gout étrange. Nous allons nous habituer à ce sandwich. Nous l’accepterons comme nous avons accepté la shwarma syrienne. Les algériens aiment découvrir. Ils vont appeler ce sandwich "shawarma norvégienne". L’artiste pense que le sandwich est bon mais il n’arrive pas à identifier la pâte rouge brique qui le rend délicieux. Enfin le professeur donne sa réponse au test. Le sandwich a le gout de fromage de chèvre. Il est rouge. La couleur est naturelle. Elle vient peut-être de l’extrait de betterave. L’artiste pensait que le professeur plaisantait. L’ambassadeur garde son silence puis dit « le professeur a raison ».
L’étudiant demande à son excellence d’introduire la technologie de fabrication de ce fromage rouge betterave en Algérie. L’ambassadeur répond : "le fromage chèvre se produit en Kabylie. Introduire un fromage norvégien en Algérie est presque impossible. Les algériens ne connaissent pas la Norvège. Ils sont habitués aux fromages français.... Ils mangent français et pensent français ! La France a choisi la Kabylie pour ce type de fromage car dans ce lieu la chèvre est connue par la qualité et la quantité de son lait".
Le professeur intervient « Ce type de chèvre existe dans tous les massifs montagneux du littoral maghrébin. On le trouve aussi dans le Sud tunisien et le haut Atlas. Il n’est pas spécifique à la Kabylie. J’ai l’honneur de dire à Votre Excellence, l’Algérie est un pays vaste ! Vous pouvez introduire ce fromage à Ghardaïa. Je vais vous parler wech, wech, comme les jeunes de de Bab El Oued : L’Algérie n’est pas une écurie française ! Wech wech ! C’est encore la France qui décide de quel lait de chèvre nous fabriquons notre fromage. Vous êtes vétérinaire et vous connaissez mieux que nous le comportement de la chèvre algérienne. Je vous renvoie aux écrits de Mustapha Hannane de l’Université Abderrahmane Mira de Béjaia ‘Lait cru de chèvre en Algérie’. Hannane nous dit que la chèvre kabyle est une chèvre autochtone qui peuple les massifs montagneux de la Kabylie et de l’Aurès. Elle est robuste et massive, de petite taille, de couleur noirâtre ou blanchâtre avec de longs poils. C’est une mauvaise laitière. Elle est appréciée pour sa viande. Par contre La chèvre du M’zab est une bonne laitière et très fertile. Cette race est très appréciée dans l’est méditerranéen pour ses capacités laitières et fait partie du rameau Nubio-Syrien.
L’artiste intervient : "Wech Dzair Gourbi ? Wech wech ! La France a induit en erreur les fabricants de fromage en Algérie". Elle leur a conseillé la mauvaise laitière..... Wech ! Alilou a accepté ça ? D’ailleurs le fromage de son excellence est meilleur que le fromage « wash wash » que les français nous ont conseillé. Je vous invite ce weekend dans ma modeste demeure à Chérai pour manger la pomme de terre dans une sauce à la menthe ....
En conclusion : Les grands hommes mangent de ce que mange le peuple ! Mieux vaut un plat de pomme de terre à la menthe dans la tranquillité qu’un plat, payé par un argent mal acquis, au restaurant la Masa de New York’s Time Warner Center. Son excellence admet que la vue sur mer de sa résidence est l’une des meilleures vues dans le monde. Cette baie a son histoire. Il a lu les aventures de Charles Quint et sa défaite sur cette baie. La beauté et l’histoire de cette baie ont fasciné son Excellence. Il demanda à notre artiste Bellat de peindre cette baie sur une toile pour sa demeure à Skye. L’artiste accepte sa demande avec un grand sourire d’artiste. Le tableau est peint avec la signature Zouhaier. Son Excellence regardera ce tableau et gardera les beaux souvenirs de Dzaïr el Bhadja et son histoire.