Jean Moulin aura été l’une des meilleures incarnations d’un Front populaire dont il ne sera pas inutile de rappeler, dans les temps que nous vivons, que son axe principal était constitué par la lutte antifasciste.
Celle-ci était d’abord née en Allemagne, à la suite d’un affrontement extrêmement violent survenu entre nazis et communistes au parlement de Prusse, le 25 mai 1932 : on y avait relevé plusieurs blessés graves.
Face à cette violence extrême, le Parti communiste allemand (KPD) avait lancé un appel à l’action antifasciste et à la création de comités de lutte dans tout le pays.
Il faut ici retenir la définition que le secrétaire général du KPD, Ernst Thälmann, donnerait de l’action antifasciste elle-même :
"Elle est un point de ralliement, au-dessus des partis pour une lutte sans merci contre le fascisme, des travailleurs qui y sont prêts. Ce n’est pas une organisation, mais un mouvement de masse. C’est un courant, où se jettent toutes les forces combattantes qui veulent vraiment mener la lutte, l’attaque de masses contre le gouvernement actuel, qui mène la mise en place à court terme de la dictature fasciste. La direction des comités d’unités formés dans les usines, dans les rues, etc., doit évidemment être dans les mains des travailleurs voulant lutter eux-mêmes."
"Point de ralliement au-dessus des partis", "mouvement de masse" : voilà l’adversaire à dresser en face du fascisme et du gouvernement qui y conduit.
C’est à cet endroit, qu’il faut introduire deux citations de l’homme qui aura été, à la fois, le patron et l’ami de Jean Moulin durant les dix-huit années qui s’étendent de 1925 à 1943 : Pierre Cot.
L’ouvrage qu’il a rédigé et publié aux États-Unis en 1943, "Le procès de la République", porte la dédicace suivante :
"A mes camarades du Front Populaire qui poursuivront jusqu’au bout la lutte engagée au lendemain du 6 février 1934 contre le Fascisme et l’Hitlérisme."
Il y écrit :
"Non seulement je m’honore d’avoir été un des partisans et des militants du Front Populaire, mais je demeure obstinément fidèle à la pensée dont il fut l’expression. Je vois dans le Front Populaire la tradition de la révolution française ; je pense que seule l’union des forces populaires et révolutionnaires françaises, communistes compris, libérera la France de la domination fasciste et permettra un renouveau de la démocratie."
"Communistes compris" : Jean Moulin s’en souviendra, et en mourra.