Piquant n’est-ce pas ! Il évoquait, lui, les classes sociales (qui luttent mais on sait qui gagne) et non le peuple (contre les élites).
Mais, s’agissant du classisme, soit des politiques de domination classe de la bourgeoisie et de sa classe d’appui proche, la différence est secondaire. Les attaques viennent d’en-haut et ne cessent de se succéder avec certes des différences.
Les classes sociales dominées peuvent vouloir, tout comme le peuple-classe 99%, passer alliance avec des élites, mais lesquelles ? Elites d’alternance ou élites d’alternative ? Alternatives ou alternative ? Quelle alternative à cette France, à cette Europe, à ce monde néolibéral où une minorité s’enrichit toujours plus ? Les inégalités s’accroissent avec le néolibéralisme et la mondialisation du capital et aucune alliance – ou bloc de classes – ne semble en capacité d’arrêter la machine à écraser les classes sociales pauvres et modestes et plus largement, mais avec des différences, l’ensemble des classes sociales subalternes regroupées sous le terme peuple-classe.
Pour Minc, nouveau « Chien de garde », il n’y a plus ou pas d’alternative. Peut-être simplement des alternatives aux marges du système avec des coopératives mais pas d’alternative au système capitaliste dominant. Même les services publics et la protection sociale subissent les logiques de rentabilité issues de la domination du principe de concurrence généralisée. Ce qui fait problème pour les solidarités à construire pour nos ainés (Raphaël Glucskman et les Ehpad).
Les élites sont au sommet de la société. Il s’agit d’un terme générique mais souvent l’histoire de ces élites a fait apparaître des distinctions.
Le pouvoir des élites intellectuelles n’est pas celui des autres élites. Les élites intellectuelles dispose d’un pouvoir d’influence, variable, quand les autres élites disposent d’un pouvoir de contrainte plus important.
– Les élites à pouvoir de contrainte
Il s’agit des élites autres qu’intellectuelles. Ce sont sont les élites économiques, les élites politiques et les élites administratives. On y ajoute aussi, de plus en plus souvent, les élites médiatiques (qui sont aussi pour certains journalistes des élites intellectuelles.) On laissera ici de côté les élites religieuses mais dans certains Etats, il est évident qu’elles ont du pouvoir à la fois idéologique, politique et policier (mœurs).
Ces élites appartiennent au 1% d’en-haut de la société et disposent de pouvoirs différenciés sur certaines fractions de peuple. Quand il y a pouvoir collectif d’ensemble – corporatisme d’en-haut qui « serre les coudes » pour conserver les privilèges – de ces quatre sortes d’élite alors ce pouvoir est très important contre le peuple-classe et plus largement contre la société.
On peut faire des subdivisions au sein des élites économiques dominantes entre la grande bourgeoisie, la classe capitaliste (qui appartient au 10% d’en-haut voire plus bas pour le petit patronat) et les élites managériales (cf. Bruno Rizzi repris par James Burnham). On évoque aussi en science politique l’oligarchie quand il y a conjonction du pouvoir économique et du pouvoir politique.
S’agissant des élites politiques, on parle aussi de « classe dirigeante », de nomenklatura au sens péjoratif de caste installée à vie. Nombre d’hommes politiques – et certaines femmes – sont élus à divers postes élevés de 25 à 70 ans.
Les élites administratives concernent la haute administration. Le rapport Silicani est pour la France à l’origine de la préconisation de surtraitements élevés au sein de la Noblesse d’Etat.
– Les élites intellectuelles ou le pouvoir d’influence
Ces élites disposent d’un fort capital culturel. Elles ont très souvent un parcours universitaire important. Elles passent beaucoup de temps et d’énergie à lire et écrire, à faire des conférences. Ces conférences sont un moyen d’influencer les publics en recherche de débats de confrontations d’idées. Certains sont constamment absents de ces débats. A ce sujet il importe de mentionner – sans développer ici – le pouvoir d’influence de la sous-culture de divertissement. Elle ne va pas mécaniquement contre un désir de culture savante mais souvent elle pousse plus à de la consommation marchande qu’à des activités sociales productrice de sens.
Certaines élites ont accès aux médias pour diffuser leur savoir scientifique ou leur philosophie ou leur idéologies. D’autres doivent se contenter de réunions publiques, de livres, de bulletins dans la presse associative et du web (avec des limites).
Concernant les idéologies diffusées par les élites intellectuelles on peut constater que la plupart sont compatibles avec le système capitaliste (défense de l’alternance plus que des alternatives). Mais le capitalisme n’est pas le seul critère d’appréciation. Certaines élites sont spécialisées dans l’antisexisme (contre le patriarcat), dans l’antiracisme, sur la laïcité, dans le domaine culturel et religieux.
Certaines élites affichent des positions alternatives, contra-systémique ou alter-systémique. On trouve ici des intellectuels de gauche ou des intellectuels associatifs ou altermondialistes qui développent des projets d’émancipation voire de pluri-émancipations.
Ce qui importe alors c’est la mise en mouvement des classes populaires fragilisées par le système. Quand la critique contestataire est dans la rue, la démocratie bouscule le jeu des élites. Cela vient en complément des pratiques alternatives. Et si un projet vient souder une contre-hégémonie alors il peut y avoir victoire.
Christian DELARUE
Lire : La gauche, le peuple et la stratégie contre-hégémonique (Christian Delarue) - Les blogs d’Attac
Pour Pierre Rosanvallon, une élite intellectuelle évoque la « société des inégalités » comme « société rouillée » (citant ici Tocqueville). La mondialisation apporte une contre-révolution des inégalités (qui s’accroissent). Pierre Rosanvallon cite la « sortie du monde commun du 1% d’en-haut » par l’importance faramineuse de l’accaparement de ce 1%.
Pierre Rosanvallon - « Refaire l’égalité » – YouTube