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Comment le néopuritanisme a dépolitisé la jeunesse arabe

Il y a une image que j’aime particulièrement pour désigner la culture arabe, c’est celle de la porte dérobée : une certaine idée de l’espace privé, qui souvent échappe à l’Occidental, habitué depuis plusieurs décennies à ce que les affaires de mœurs fassent l’objet de quelque bruyant militantisme, en un spectacle politico-médiatique à mon sens aussi inutile qu’embarrassant pour la collectivité. Un mode de communication subtil et pudique, basé sur la suggestion et l’émission de signes, à la différence de l’échange direct qu’on connaît chez nous, plus franc et pragmatique. Et les spécificités culturelles et langagières de ces sociétés du non-dit ne peuvent être négligées si l’on entend aborder sereinement l’idée d’un progrès arabe en faveur des libertés individuelles à l’ère de la globalisation.

Si le monde arabe permettait il y a cinquante ans un véritable dialogue intellectuel sur la scène publique — autant qu’au sein des foyers —, par la voix de ses écrivains, chercheurs, historiens, hommes et femmes de convictions, notamment autour de la nécessité décoloniale, il semble aujourd’hui souffrir d’une inquiétante uniformisation de la pensée, qu’on tente d’orienter toujours plus vers un néopuritanisme tribal, importé en partie des monarchies du golfe Persique.

Lorsqu’on échange avec des citadins du Maghreb et d’Égypte ayant vécu leur jeunesse dans les années 1970, 1980 ou 1990, ceux-ci cachent difficilement leur nostalgie quant à la vitalité de la scène culturelle d’alors, où les artistes faisaient rayonner les villes et naître des vocations, où les librairies étaient fréquentées et les places de cinéma accessibles ; et où la télévision diffusait encore, au lieu de mélos affligeants, des documentaires intéressants.

Ce néopuritanisme ostensible qui a cours dans le monde arabe, produit de l’idéologie frériste – basée en substance sur la crainte de Dieu et la soumission de la femme – ayant su se servir des réseaux numériques pour se répandre auprès d’une jeunesse en perte de repères, peut aussi s’expliquer par un vaste mouvement de réaction communautaire vis-à-vis d’un Occident perçu comme traître et décadent, où un progressisme corrompu a résolument franchi les limites de la raison et du bon sens. Mais entre l’ultralibéralisme fou et la bigoterie agressive, au-delà de la symétrie grossière des extrêmes, une voie raisonnable est possible : la voie fédératrice sur laquelle se sont engagés les leaders historiques d’un socialisme arabe, ouvert et intelligent.

Soumis à un conformisme virulent sans autre issue que le départ vers l’étranger, à la marginalisation et une répression silencieuse, les jeunes Arabes politisés se font de plus en plus rares – sinon discrets – dans des sociétés où le pluralisme, la défense de la laïcité et de l’égalité sont considérés comme des menaces libertaires pour une autorité peu sûre d’elle-même, et que ses propagandistes ne manquent jamais d’imputer à des « agents occidentaux » fantômes en mal de grabuge.

Sans possibilité de se former, de s’épanouir intellectuellement, personnellement, sans offre culturelle digne de ce nom, les jeunes doivent – au-delà du discours mortellement consensuel d’universitaires craintifs et de médias d’État –, se contenter d’écrans abrutissants, d’un système éducatif foncièrement inégalitaire qui par les lois sacrées du capital favorisent les étudiants du privé, ou au mieux des tribunes des stades de foot pour laisser aller leur ferveur anarchiste en un exutoire autorisé, quand ils ne sont pas à subir la tyrannie d’un tribalisme familial nécessairement intrusif et désindividualisant.

Quelques voix courageuses et singulières continuent, malgré tout, de s’autoriser une existence militante, ou de prôner au moins l’échange et la réflexion plutôt que la raideur idéologique et l’allégeance aux bien-pensants ; quelques associations résistent ici et là à l’abandon généralisé de la jeunesse, quand les rares subventions dont elles bénéficient ne finissent pas dans les poches des « responsables » locaux...

Désengager la jeunesse, c’est lui refuser le droit à l’émancipation et alimenter toujours plus les tensions sociales et les frustrations individuelles, en un climat de suspicion délétère, propice à ce que le pouvoir redoute précisément plus que tout : l’expression d’une révolte populaire. Aussi, quel mauvais calcul de sa part ! Pour qui connaît le monde arabe, ses manières et sa tradition du marchandage, nul doute que la solution devrait passer par la négociation plutôt que par la fièvre du dégagisme... Aux peuples de faire pression s’ils ne veulent pas renouer complètement avec les dogmes imbéciles du totalitarisme.

Au fait, qu’en est-il de la « normalisation » des rapports avec Benyamin Netanyahou et « la seule démocratie du Moyen-Orient » ? Où en est-on de la « solidarité » des dirigeants des pays arabes avec leurs « frères » palestiniens sous les bombes depuis six mois (ou 75 ans, c’est selon) ? Les prières ne seraient-elles donc pas suffisantes ?

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traduit par à ngeles Muñoz avec la collaboration de Sara Albert Madrid, février 1939. La Guerre d’Espagne touche à sa fin. Leonor va connaître l’exode, la torture, la condamnation à mort, et les longues années de prison... L’horreur quotidienne de l’univers carcéral franquiste tel que l’ont vécu des milliers de femmes et d’enfants est décrite ici par Juana Doña avec un réalisme sans concession et sans complaisance. Ce livre est son témoignage. Écrit en 1967, publié seulement après la (…)
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