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Bac national, statuts publics, Education nationale, code du travail, conventions collectives de branche, un seul et même combat anticapitaliste !

Par Georges Gastaud, militant syndical de l’Education nationale depuis 40 années, secrétaire national du Pôle de Renaissance Communiste en France (PRCF) – Texte discuté et adopté par la Commission nationale Enseignement du PRCF, 9 novembre 2017

Profitant de la riposte insuffisante et passablement routinière que lui opposent les états-majors syndicaux euro-formatés (journées « saute-mouton » sans perspective, dialogue social bidon avec le MEDEF et/ou avec son appendice jaunâtre, la CFDT, allégeance à cette courroie de l’UE qu’est la C.E.S., refus d’organiser une manifestation nationale de combat ouverte à tous les militants (syndicaux, politiques et associatifs) du progrès social et appelant à la grève inter-pro reconductible...), le gouvernement Macron amplifie son offensive euro-thatchérienne ; son but est de mettre hors-de-combat le mouvement populaire pour liquider d’un coup ce qui subsiste des acquis sociaux et démocratiques conquis par les travailleurs au cours des deux derniers siècles...

Parmi ses cibles figure au premier rang le baccalauréat national, cette exception française positive en son principe ; le « bac » français est en effet un examen national anonyme qui, comme premier grade universitaire, donne directement accès à l’Université. Il en va tout autrement dans nombre de pays européens, notamment en RFA, sans parler des pays de tradition anglo-saxonne, où un tri rigoureux à base d’hyper-sélection sociale et financière barre l’entrée du Supérieur à la majorité des ex-lycéens, dont beaucoup sont précocement envoyés vers la vie active, l’apprentissage sous domination patronale ou... le chômage. Voulue par Macron et portée par le ministre Blanquer, la prochaine « réforme » du bac, devrait s’adosser à celle, très proche (janvier 2018 ?), du lycée. Alors qu’il faudrait consolider, voire reconstruire le bac national et l’Université en donnant à la seconde les moyens d’accueillir dignement tous les étudiants qui le souhaitent et en rendant au bac sa vraie signification, érodée par des années de barèmes sciemment laxistes*, la contre-réforme Blanquer visera clairement – seules certaines directions syndicales feignent encore de croire la « discussion » possible » – à transformer le bac en diplôme local, totalement dévalué et distribué principalement sur contrôle continu établissement par établissement, ce qui en ferait en réalité un diplôme sans valeur nationale, pour ne pas dire stigmatisant (car un tel « examen » vaudrait ce que vaut, dans les classements médiatiques, l’établissement concerné sur le « marché » éducatif). De la sorte, il serait aisé...

– d’engager en grand la dénationalisation de l’enseignement secondaire public, d’aggraver la concurrence entre lycées publics et plus encore, entre enseignement public et enseignement privé, que d’ores et déjà, des « présidents de grande Région » comme le sinistre Wauquiez (LR) privilégient grossièrement ;

– de détruire le statut national des professeurs et des autres personnels de l’Education nationale, statut qui est un héritage du CNR (très précisément, du ministre d’Etat et ancien mineur Maurice Thorez, auquel on doit aussi le statut des personnels du sous-sol...), autrement dit de priver les personnels de la sécurité de l’emploi, de les livrer à l’arbitraire total (recrutement, missions, renvoi...) de leur chef d’établissement et, par leur intermédiaire, de les soumettre à la bourgeoisie locale comme c’est déjà le cas dans ces pays anglo-saxons où le patronat local et les associations réactionnaires de parents d’élèves font souvent la pluie et le beau temps dans les écoles, voire dans les programmes scolaire : fin programmée de la laïcité scolaire, chape de plomb idéologique tombant sur une école publique déjà largement en voie, hélas, de caporalisation par l’idéologie dominante quand ce n’est pas directement par le MEDEF ; bref, le devoir des syndicalistes véritables est d’expliquer que diplôme national, statut national, Education nationale et laïcité scolaire garantissant au moins dans le principe l’accès aux « lumières communes », forment un bloc institutionnel progressiste (sinon dans leur réalité, très dégradée par des décennies d’attaques diverses, du moins dans leur « philosophie ») dont la cohérence clairement républicaine, laïque et nationale, doit être globalement défendue ; en réalité, certains dirigeants syndicaux enseignants se montrent plus soucieux de leur image « euro-politiquement correcte » que de l’intérêt des personnels et, de ce fait, ils accompagnent la dissolution maastrichtienne de l’Etat-nation français qui constitue pourtant le socle des statuts, des diplômes et de l’Education « nationale ». Une telle attitude voue les enseignants et la jeunesse scolarisée à une défaite sociopolitique historique... du moins si rien n’est fait pour bousculer ces états-majors décaféinés qui confondent l’internationalisme des peuples avec l’allégeance à l’UE supranationale, patronale et atlantique ;

– d’abaisser fortement les salaires des travailleurs du privé. Car ce sont en dernière analyse les salariés du privé, donc le prétendu « coût du travail », surtout celui des jeunes salariés et futurs salariés que cible la casse programmée du lycée, du bac national et de l’Université « à la française » déjà largement battue en brèche par les contre-réformes Pécresse et Fioraso. En effet, depuis le Front populaire (1936), qui imposa les premières conventions collectives de branche, et le gouvernement de la Libération issu de la Résistance, où le ministre communiste, ex-dirigeant de la fédération CGT de la Métallurgie Ambroise Croizat généralisa lesdites conventions, les contrats de travail du privé sont ancrés sur les diplômes et sur les qualifications garantis par l’Education nationale et par l’Université (laquelle dispose encore du « monopole de la collation des grades », un principe qu’a déjà ébréché Sarkozy au profit des « universités » privées). Les conventions collectives sont en effet adossées aux grades scolaires et universitaires, CEP, CAP, brevet, bac, bac + 2, + 3, + 4, etc. et c’est à partir de cela que le salaire, lié à la qualification nationalement certifiéé, donc échappant à l’arbitraire patronal direct, est nationalement cadré, ce qui donne évidemment un avantage majeur aux travailleurs, comme tout ce qui dépasse le cadre de l’entreprise et du rapport des forces individuel entre patron et salarié. Le lien à échelle nationale qualification/salaire, que complète le principe de la cotisation sociale fondateur de la Sécu et des retraites par répartition (elles aussi instituées par le communiste Ambroise Croizat...) solidarise ainsi objectivement, et pas seulement sentimentalement... l’Education nationale, ses diplômes, les agents publics, notamment les enseignants, et par leur entremise, tous les agents publics, aux travailleurs du privé ; la destruction du bac national et, dans la foulée, n’en doutons pas, des statuts nationaux, serait un coup terrible pour tous les travailleurs. Elle serait aussi un coup majeur contre l’unité de combat des jeunes en formation et de la classe laborieuse (en France, cette unité est stratégique pour notre classe, comme on l’a vu en 68, en 86 ou lors des luttes anti-CPE de 2006) ; ce n’est donc pas pour rien que le MEDEF, la droite et le gouvernement ne cessent d’attaquer l’école, les diplômes, le bac, l’Université publique, les grandes écoles scientifiques et les classes préparatoires (issues, dans leur principe, de la Révolution française) pour instituer un système néolibéral à l’anglo-saxonne de « compétences rechargeables tout au long de la vie » ; ce qui signifie en réalité une intense précarité pour les salariés auxquels plus rien ne serait d’emblée reconnu en terme de valeur professionnelle... pendant qu’à l’inverse, ledit MEDEF bénéficie de la sollicitude de l’Etat-Providence... patronal ! Derrière le thème alléchant de la « formation tout au long de la vie », du retour à l’apprentissage « dès 16 ans » (13 ans, disait la constitution européenne...), et de tous les projets néolibéraux que caresse Macron, on imagine la pression patronale permanente que les futurs salariés devront subir au détriment de leur santé, de leur vie privée, de leur aptitude à dire Non aux patrons et de leurs obligations familiales... surtout à l’heure de l’ « ubérisation » générale, de la « libéralisation du marché du travail » et de la pré-totalitaire « économie de marché ouverte sur le monde où la concurrence est libre et non faussée » que prescrivent les traités supranationaux qui définissent la sacro-sainte « construction » européenne !

· Il n’est donc pas difficile d’articuler la casse scolaire massive qui s’annonce aux autres contre-réformes visant à briser le Code du travail, DONC LES CONVENTIONS COLLECTIVES, DONC LES SALAIRES DES TRAVAILLEURS DE FRANCE, donc de la cotisation sociale et de la Sécu, des retraites et des indemnités chômage (de tout le salaire indirect des travailleurs !). Les directions de syndicats enseignants qui ne sonnent toujours pas clairement le tocsin contre la contre-réforme Blanquer du lycée (annoncée pour janvier !!!) et contre la casse du bac, qui ne font pas, ou peu, le lien entre la casse de l’école, celle de la fonction publique et les « lois Travail » successives, préparent ainsi, volontairement ou pas, le démantèlement du second degré français et le coup de grâce contre l’Université à la française. Car ceux-ci ne pourront pas être sauvé par les seuls enseignants, pas plus que les salariés du privé ne pourront seuls arrêter la casse du code du travail et des conventions collective qu’annoncent les Ordonnances Macron.

Mais pourquoi, idéologiquement parlant, les états-majors euro-formatées des syndicats enseignants et ouvriers refusent-ils de souligner publiquement ce lien évident entre casse de l’école, casse des « qualifs » et casse du contrat de travail privé ? Serait-ce parce qu’elles n’ont pas le courage éminemment politique, ou pour mieux dire, civique, de défendre le cadre national en voie d’euro-dissolution néolibérale avancée ? Il est vrai qu’une grande partie de la gauche politique, voire de l’ « extrême » gauche bobo, refuse de distinguer entre, d’une part, le nationalisme xénophobe du FN et la défense hautement légitime de la nation, cadre politique de la souveraineté populaire, d’autre part entre l’internationalisme populaire et le supranationalisme bourgeois que portent parallèlement le Parti de la Gauche Européenne (le PGE auquel adhèrent le PCF et, de moins en moins apparemment, le Parti de gauche), la Confédération Européenne des Syndicats (la CES), sans parler du « Parti Socialiste Européen » (PSE). Mais aussi et surtout, faire le lien que nous soulignons entre la défense de l’Education nationale d’une part (et de tous ses appendices institutionnels énumérés ci-dessus) et la défense des conventions collectives, ce serait assumer la dimension de classe anticapitaliste d’une défense conséquente de l’école publique ; symétriquement, ce serait confesser qu’il est impossible de mettre le camp du capital sur la défensive tant que l’on n’ose pas lier la défense des travailleurs à celle de l’indépendance nationale, comme osaient encore le faire hier le PCF ou la CGT d’Henri Krazucki. Bref, nos dirigeants fédéraux et confédéraux euro-béats, qui n’ont aux lèvres que le suicidaire et mensonger slogan de l’« Europe sociale » (pendant que l’on attend sans fin cette Arlésienne, l’UE détruit maintenant les acquis ancrés dans l’histoire nationale et internationaliste du prolétariat de France !), ne veulent pas construire les conditions du tous ensemble des travailleurs du public, des salariés du privé, et de ces travailleurs en formation que sont les lycéens et étudiants, de ces anciens travailleurs que sont les retraités, de ces travailleurs privés d’emploi que sont, très majoritairement, les chômeurs.

Pour cela il faut oser lier, comme le PRCF est quasi seul à le faire systématiquement en France, le drapeau rouge internationaliste du Travail au drapeau tricolore de la nation souveraine (comme ce fut le cas lors du Front populaire et de la Résistance, notamment à l’initiative de Jacques Duclos et de Benoît Frachon) pour démasquer l’euro-destructeur en chef de la France, Emmanuel Macron, dénoncer le dialogue social perdants et ses vecteurs délétères, CES et CFDT notamment, affronter l’UE et l’euro, refuser toutes les politiques (institutionnelles, territoriales, linguistiques...) qui désarticulent l’Etat-nation au profit de l’Union euro-atlantique des Régions, bref, retrouver la route gagnante, même si nul ne prétend qu’elle soit semée de roses, du combat de classe contre le grand capital et contre son UE, ennemi commun des services publics, du « produire en France » industriel et agricole, et de l’émancipation intellectuelle et sociale de notre jeunesse.

Georges Gastaud

(*) Quand un examen universitaire permet d’approcher, puis de dépasser, d’année en année 90% de réussite, cela après que – sans réels moyens de rattrapage pour les lycéens en échec ! - on a quasiment supprimé les redoublements, cette pseudo-« bienveillance » de l’institution scolaire envers les futurs bacheliers finit par montrer son visage pervers : il s’agit de dévaluer l’examen, de le frapper d’insignifiance absolue pour disqualifier le Second Degré, abaisser la culture des jeunes générations et réserver ainsi le Supérieur aux enfants de la bourgeoisie. La vraie « bienveillance » envers les lycéens consisterait au contraire, sans démagogie, à doter le Second degré et le Supérieur (ainsi, bien entendu, que l’Elémentaire et la Maternelle) des moyens humains, pédagogiques et matériels qui leur permettraient de donner vraiment aux jeunes un niveau culturel élevé. C’est cela la démocratisation du lycée et de l’Université que les communistes, la vraie gauche et les syndicats de lutte ont toujours défendue.

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