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Avec Marx , "brisons" l’Etat européen !

Michel PEYRET
27 mars 2009

AVEC MARX, «  BRISONS » L’ETAT EUROPEEN !

Je ne cesse de le dire : tous ceux qui veulent changer la société et le monde ne peuvent faire l’impasse d’un retour à la lecture de Marx ou de sa découverte. Et, aujourd’hui, alors que montent à nouveau les luttes populaires sur des aspects essentiels de la vie, voire de la survie, l’intérêt constaté par les libraires des jeunes vers l’achat des oeuvres de Marx est tout à fait significatif.

REVENIR A MARX

Revenir à Marx, c’est constater que des pans entiers de cette oeuvre, et certainement parmi les plus essentiels, n’ont connu aucune application concrète par les régimes qui se disaient, ou se voulaient, communistes. Ainsi les étatisations qui se sont substituées à la propriété privée des grands moyens de production et d’échanges ont confisqué le pouvoir induit par la propriété au profit d’un hyperétatisme castrateur de toute démocratie, de tout pouvoir réel au peuple.

Pourtant les textes de Marx de la fin avril et de mai 1871, c’est-à -dire ses écrits pendant la Commune elle-même, sont-ils le reflet puissant de ses fortes réflexions sur l’Etat issues du vif d’une non moins forte, et même tragique expérience, de celles qui permettent de saisir jusqu’à l’essence même des phénomènes qui peuvent être masqués ou estompés dans les périodes où la lutte des classes ne prend pas ce caractère d’acuité et de transparence, un peu à la façon dont les caractéristiques profondes du capitalisme apparaissent en toute clarté dans la crise qu’il connait aujourd’hui.

LA COMMUNE, L’ANTITHESE DU POUVOIR D’ETAT

Pour Marx, la Commune est l’antithèse du pouvoir d’Etat :

«  Ce pouvoir d’Etat est, en fait, la création de la bourgeoisie ; il fut l’instrument qui servit d’abord à briser le féodalisme, puis à écraser les aspirations des producteurs, de la classe ouvrière vers leur émancipation. Toutes les réactions et toutes les révolutions n’avaient servi qu’à transférer ce pouvoir organisé - cette force organisée pour maintenir en esclavage le travail - d’une main à une autre, d’une fraction des classes dominantes à une autre. Il avait été pour les classes dominantes un moyen d’asservissement et de lucre. Il avait puisé des forces nouvelles dans chaque changement nouveau. Il avait servi d’instrument pour briser tout soulèvement populaire, pour écraser les classes laborieuses après qu’elles eurent combattu et reçu l’ordre d’assurer le transfert de ce pouvoir d’un groupe de ses oppresseurs à un autre groupe. Ce ne fut donc pas une révolution contre telle ou telle forme de pouvoir d’Etat, légitimiste, constitutionnelle, républicaine ou impériale. Ce fut une révolution contre l’Etat lui-même, cet avorton surnaturel de la société : ce fut la reprise par le peuple et pour le peuple de sa propre vie sociale. Ce ne fut pas une révolution faite pour transférer ce pouvoir d’une fraction des classes dominantes à une autre, mais une révolution pour briser cet horrible appareil même de la domination de classe. »

EN 1918, LENINE VEUT AUSSI BRISER L’ETAT

En 1918, c’est encore cette thèse que l’on entend chez Lénine. Réfutant Vandervelde et Kautsky, il les accuse de citer de Marx et Engels tout ce qu’on veut, sauf ce qui est absolument inacceptable pour la bourgeoisie, ce qui distingue le révolutionnaire du réformisme :

«  Tout ce que l’on veut en ce qui concerne la conquête du pouvoir politique par le prolétariat puisque pratiquement la chose est déjà confirmée dans un cadre uniquement parlementaire Que Marx et Engels aient jugé nécessaire, après l’expérience de la Commune, de compléter le Manifeste communiste partiellement vieilli par l’explication de cette vérité que la classe ouvrière ne peut pas simplement s’emparer de la machine d’Etat toute prête, qu’elle doit la démolir, là -dessus pas le moindre mot ! Vandervelde, de même que Kautsky, comme s’ils s’étaient entendus, passe sous silence absolu ce qu’il y a justement de plus essentiel dans l’expérience de la révolution prolétarienne, ce qui distingue justement la révolution prolétarienne des réformes bourgeoises. »

EN MAI 2005 LE PEUPLE FRANCAIS A DIT NON A L’ETAT EUROPEN

Le 29 mai 2005, à sa façon, le peuple français faisait une sorte de révolution ! Il disait NON au Traité constitutionnel européen qui aurait couronné la création et l’existence d’un véritable Etat européen ! Nous étions bien là dans les prolongements, tout à la fois concrets et théoriques, des enseignements que Marx avait tiré de l’expérience de la Commune ! Par son vote souverain, le peuple français «  brisait » bien le processus de construction de cet Etat européen ! Il fallait à nouveau tirer tous les enseignements de cette décision souveraine d’une importance capitale !

Pour leur part, le lendemain, le 30 mai 2005, Alain Bocquet, Francis Wurtz, Marie-George Buffet, Nicole Borvo, dirigeants du PCF et dotés de mandats électoraux, s’adressaient en ce sens au Président de la République :

«  Le peuple a rendu ce dimanche un verdict sans appel dans les urnes. A l’occasion du référendum, il a rejeté le traité établissant une Constitution pour l’Europe qui lui était soumis.

«  En conséquence, il apparaît nécessaire que vous retiriez votre signature, engageant la France sous réserve de ratification, au bas de ce document.

«  Vous avez dit vouloir «  tenir compte » de l’expression de la souveraineté populaire. Le premier geste à faire, symboliquement, nous semble être celui-ci. »

LES TRAITES SONT FORCLOS

Ainsi donc, dans la plus grande clarté, ces dirigeants du PCF prenaient acte de ce que cette mouture du Traité constitutionnel était rejetée par le peuple français, qu’elle n’avait donc plus aucune légalité. Le Traité était forclos, et ce d’autant que le peuple hollandais prononçait le même verdict !

On connait les tribulations politiciennes qui conduisirent les instances dirigeantes européennes, y compris françaises à s’asseoir sur la volonté démocratiquement exprimée par les peuples français et hollandais, et à s’orienter vers une nouvelle mouture, copie conforme de la précédente, celle du Traité de Lisbonne, laquelle bien évidemment devrait éviter d’être confrontée à nouveau à des référendums et seulement soumise aux parlements nationaux bien plus dociles et favorables que leurs peuples à la poursuite de la construction de l’Etat européen. Bref, un véritable déni de démocratie !

Ce mode parlementaire de ratification n’était pas, hélas pour les porteurs du projet, possible en Irlande où le recours au référendum était légalement obligatoire pour ce faire. Las, le vote majoritaire des Irlandais en faveur du NON au Traité de Lisbonne remettait à nouveau tout en question !

Le 13 juin 2008, le PCF donnait son opinion. Le peuple irlandais «  a su par son vote rejeter la mise en concurrence effrénée des salariés, la pression sur les dépenses publiques et les salaires, le sacrifice des services publics, LA MILITARISATION DE L’UNION EUROPEENNE...Le NON irlandais est porteur de la promesse d’un nouvel avenir pour l’Europe. Engageons-nous dans cette voie. »

Cependant, pour ce faire, le PCF devait constater que le Traité de Lisbonne était mort-né :
«  La présidence française qui s’ouvre dans quelques jours doit proposer d’arrêter le processus de ratification et d’engager l’élaboration d’un nouveau traité fondateur de l’Union européenne sur de tout autres bases et dans de toutes autres formes, rompant avec celles qui la conduisent de crise en crise. »

Pour ma part, je ne suis pas pour un nouveau Traité de Rome mais je prends note de ce que en juin 2008 le PCF reconnaît alors qu’avec le NON irlandais au Traité de Lisbonne, c’est l’ ensemble des traités constitutifs de ladite «  Union européenne » qui n’ont plus de valeur légale ! Bref, l’Union européenne, en fait l’Etat européen, n’existe plus !

DES REVOLUTIONNAIRES FATIGUES

En ce début de printemps 2009, les temps apparaissent avoir changé ! Les révolutionnaires fatigués d’aujourd’hui - mais sont-ils même encore révolutionnaires - n’ont plus d’ambition forte face aux tenants de l’Europe du capital, face à cet Etat europén nouveau carcan des peuples du continent.

Ainsi acceptent-ils aujourd’hui de considérer comme valables et existantes des structures de cet Etat européen, tel le Parlement européen, qui ne sont pourtant que l’application des traités reconnus n’avoir plus de légitimité de par la souveraineté des peuples !
Ainsi acceptent-ils d’apporter leur caution aux viols renouvelés perpétrés à l’encontre de la volonté des peuples !

NE PAS ACCEPTER LE VIOL DES PEUPLES

D’autres que moi l’ont également dit, et l’ont dit sans ambiguïté, tel Jacques Nikonoff, ancien Président d’ATTAC :

«  Il faut que toute la gauche s’y fasse et le reconnaisse, l’Union européenne n’est pas un cadre aménageable. Elle est à déconstruire pour que les peuples réapprennent à disposer d’eux-mêmes tout en retrouvant les voies de la solidarité internationale. L’idée même d’une «  autre Europe » est devenue obsolète dès lors que l’oligarchie rejette la démocratie. Elle est en train de bâillonner les peuples d’Europe, elle est un garot, un noeud coulant qui étouffe l’espoir Cette Europe ne sera jamais sociale, ni démocratique, ni féministe, ni écologiste...

«  Sortir de l’Union européenne n’est pas une stratégie seulement applicable à la France. Nous considérons que tous les pays doivent sortir de ce système monstrueux...pour rebâtir des coopérations entre pays européens, sur les décombres de l’eurolibéralisme ! C’est tout le contraire du nationalisme... c’est une démarche internationaliste... »

Et Jacques Nikonoff de citer Jean Jaurès dans «  L’armée nouvelle » :

«  Ce qui est certain, c’est que la volonté irréductible de l’Internationale est qu’aucune patrie n’ait à souffrir dans son autonomie... C’est dans l’Internationale que l’indépendance des nations a sa plus haute garantie ; c’est dans les nations indépendantes que l’Internationale a ses organes les plus puissants et les plus nobles. On pourrait presque dire : un peu d’internationalisme éloigne de la patrie ; beaucoup d’internationalisme y ramène. Un peu de patriotisme éloigne de l’Internationale ; beaucoup de patriotisme y ramène. »

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