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Italie : quand la dictature est à nos portes.

illustration : "Mussolini". 1933. Fresque de Diego Rivera au New Workers School de New York.

Un rapide balayage de la presse francophone suffirait à nous l’apprendre. La situation politique italienne est devenue plus qu’inquiétante -elle l’est déjà depuis plusieurs années. Les mouvements sociaux de ces dernières semaines, qui ont vu défiler plusieurs centaines de milliers de personnes, disent pourtant combien la résistance est potentiellement forte, dans un pays où les agressions et les crimes racistes se sont multipliés depuis septembre , où les déclarations officielles se suivent pour réhabiliter le fascisme . Pour autant, devant une gauche désorganisée ou qui a renoncé à dire son nom , face à un monde syndical très largement impuissant, la péninsule se retrouve une fois de plus confrontée au risque de rebellions autonomes, fragiles et manipulables, promptes à faire le jeu d’un pouvoir qui sait jouer sur les peurs. Dans un tel contexte, qui pourrait bien servir de modèle à la France -dont les évolutions récentes ressemblent sous de nombreux aspects aux premières années du berlusconisme, avec l’efficacité accrue d’une recette éprouvée-, la solidarité internationale a son rôle à jouer. Elle est, parmi d’autres, un rempart nécessaire contre une fascisation du régime qu’on peut désormais évoquer comme une menace réelle. En octobre dernier, le juge di Pietro a ainsi déclaré : "Quand la dictature est à nos portes, on doit résister immédiatement, pas quand il est trop tard."

Le 23 octobre dernier, Francesco Cossiga, figure historique de la démocratie chrétienne, ex-président de la république italienne, sénateur à vie, a tenu sur trois journaux des propos qui sur plusieurs points contreviennent aux lois d’un pays démocratique. Devant les manifestations de masse des étudiants, il a appelé à renouer avec la stratégie de la tension, dont les méthodes sont enfin reconnues par ceux qui les ont mises en oeuvre : "Laisser faire (les étudiants). Retirer les forces de police des rues et des universités, infiltrer le mouvement avec des agents provocateurs prêts à tout, et laisser pendant une dizaine de jours les manifestants dévaster les magasins, brûler les voitures et mettre la ville à feu et à sang. (...) Ensuite, assuré du consensus populaire, le bruit des sirènes des ambulances devra dominer celui des voitures de police et des carabiniers. (...)
Dans le sens où les forces de l’ordre devront massacrer les manifestants sans pitié et les envoyer tous à l’hôpital. Ne pas les arrêter, parce que de toute façon les magistrats les remettraient aussitôt en liberté, mais les frapper, et frapper aussi ces professeurs qui les agitent.
"

Plusieurs plaintes ont été déposées contre lui. Nous les soutenons toutes, mais nous avons décidé de nous associer à la première d’entre elles, rédigée à Rome par un simple citoyen italien, monsieur Piero Leone. Une pétition a été lancée qu’on pourra retrouver en page d’accueil du site : www.dormirajamais.org. La pétition peut être aussi relayée directement avec le lien suivant : http://www.easy-petition.com/cossiga/

Olivier Favier


(1) Le 14 septembre, un jeune d’origine burkinabée est tué à coups de barres de fer par les gérants d’un snack-bar milanais. « Sale nègre », entendent les témoins. Le 18 septembre, à Castel Volturno, dans les environs de Naples, sept personnes, dont six Africains, sont massacrés par les tueurs de la Camorra. Le 29 à Parme, un autre jeune d’origine ghanéenne ressort du commissariat avec un oeil poché et une jambe en compote. Faute d’avoir compris son nom de famille, les policiers ont écrit sur ses papiers : « Emanuele Negro ». Le 2 octobre à Rome, un homme d’origine chinoise est roué de coups par cinq adolescents devant un arrêt de bus. Que dire enfin des mesures de ségrégation prises à l’encontre des Roms en juillet dernier, qui ont rappelé à certains les lois raciales de 1938 ?

(2) Exemple parmi tant d’autres, le ministre de la défense Ignazio La Russa a déclaré, lors des cérémonies commémoratives du 8 septembre dernier : « Ce serait ne pas écouter la voix de ma conscience que de ne pas commémorer les soldats de la république sociale de Salò qui, de leur point de vue, se sont battus pour les valeurs de la patrie et ont résisté à l’avancée des troupes anglo-américaines en Italie. Ils méritent aussi le respect de tous ceux qui considèrent l’histoire de l’Italie avec objectivité. »

(3) Walter Veltroni, rival malheureux de Silvio Berlusconi aux dernières élections, a affirmé sur El pais le 1er mars dernier : « Nous sommes réformistes et non de gauche ». Ce qui n’a pas empêché le nouveau président du conseil de le décrire quelques mois plus tard comme un « nouveau Staline ».

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