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Forum Social Mondial de Nairobi : "Qu’est-ce que le FSM ? Quelque chose qui m’apportera des médicaments ?" par Joyce Mulama.





Dans deux mois environ, le Forum social mondial (FSM) 2007 démarrera dans la capitale kényane, Nairobi, marquant la première occasion où l’Afrique accueille seul l’événement.


IPS, Nairobi, 28 novembre 2006.


Avec ce pays est-africain abritant également Kibera - auquel on se réfère parfois comme le plus grand bidonville d’Afrique - on pourrait affirmer qu’il n’y a pas d’endroit plus approprié pour le FSM 2007. A quel meilleur endroit pourrait-on l’organiser si ce n’est à côté de l’une des communautés les plus affectées par les maux sociaux que le forum vise à combattre ?

Cependant, certains à Kibera, qui est situé au sud-ouest de Nairobi, voient les préparations du FSM de l’année prochaine avec ambivalence.

Durant une récente rencontre avec des membres du secrétariat du forum à Nairobi, environ 100 habitants de l’installation informelle ont accusé des organisations non gouvernementales (ONG) de s’associer à Kibera simplement pour acquérir de la crédibilité et collecter des fonds. Ces groupements n’ont apporté aucune amélioration significative à la vie des personnes vivant dans le bidonville, ont-ils indiqué.

Certains affirment que même des ONG bien établies font plus de mal que de bien à l’occasion, empêchant en réalité des membres de la communauté d’avoir une voix dans des rencontres comme le FSM. 

’’Ce sont des communautés affectées par la pauvreté, le VIH/SIDA, le chômage, entre autres. Mais nous entendons rarement la voix de ces gens. Au lieu de cela, ce sont des ONG bien établies qui parlent pour les communautés’’, a déclaré à IPS, Salim Mohammed, coordonnateur de programmes pour ’Carolina for Kibera’ une organisation de jeunes basée aux Etats-Unis.

’’Les communautés ne sont pas (si) naïves au point de ne pas pouvoir parler de leurs problèmes. Elles savent là où elles souffrent, et savent comment elles veulent qu’on s’attaque à leurs difficultés. Est-ce que les ONG peuvent cesser d’utiliser les problèmes des pauvres pour s’enrichir ? Peut-on donner une opportunité aux communautés de s’exprimer elles-mêmes à des rencontres comme le FSM ?’’

Conduits par l’activiste de la jeunesse Cosmas Musyoka, les habitants, présents à la récente rencontre du secrétariat, ont même fait pression pour qu’un événement se tienne à Kibera parallèlement au FSM 2007 — le Forum social de Kibera — pour leur permettre de parler avec beaucoup plus d’efficacité des problèmes auxquels est confrontée la communauté.

Une préoccupation clé a rapport avec la possession de terre dans des installations informelles, une question qui a alimenté des tensions entre des habitants des bidonvilles, les propriétaires terriens et les autorités.

Le gouvernement soutient que des habitations sur un domaine public ont été construites illégalement, et devraient être vidées. Toutefois, les habitants de ces communautés, dont certains ne connaissent aucune autre maison, ont le sentiment qu’ils méritent de posséder la terre, et ont résisté aux tentatives d’expulsion.

Des habitations des bidonvilles construites sur des terrains privés se sont également révélées litigieuses, avec la violence éclatant entre les propriétaires de ces habitations et ceux qui possèdent la terre.

’’Personne dans les bidonvilles n’est assuré de la terre sur laquelle il vit. Pour cette raison, il est difficile d’amener les gens à s’occuper de l’environnement’’, a déclaré Mohammed.

’’Comment les gens peuvent-ils s’en soucier s’ils n’ont pas un espace à entretenir ? Si la question de la propriété de la terre est réglée, alors toutes les autres choses suivront sans problèmes’’.

Pour Helen Moraa, le VIH/SIDA constitue une question également pressante.

’’Le FSM doit venir ici pour voir par lui-même les souffrances des personnes séropositives. Nous sommes supposés manger bien pour pouvoir prolonger notre vie et nous occuper de nos enfants. Mais c’est difficile parce qu’il n’y a pas d’argent pour acheter de la nourriture. Trouver même un seul repas par jour est un grand problème’’, a déclaré à IPS, la veuve, mère de quatre enfants, elle-même séropositive.

’’Nous ne recevons pas d’aide du gouvernement. Si le FSM peut nous aider, alors peut-être nous verrions une différence’’, a ajouté Moraa, qui est membre de ’Power Women Group’ à Kibera. Cette association d’entraide réunit 25 femmes qui ont contracté le virus du SIDA, et qui font des colliers de perles vendus à environ 14 dollars l’unité lorsque les affaires marchent bien. Mais c’est rarement le cas, selon Moraa.

Grace Akinyi, un autre membre du groupe — et également mère de quatre enfants — ignorait toujours ce qu’était le FSM lorsque IPS lui en a parlé.

’’Qu’est-ce que le FSM ? Est-ce quelque chose qui m’apportera des médicaments ?’’, a-t-elle demandé. ’’Mon mari est également malade, de même que ma fille aînée, âgée de 18 ans, ainsi que ses deux enfants. Aucun d’entre nous ne travaille. Le propriétaire ne veut pas savoir que nous sommes malades ; il attend son loyer à la fin de chaque mois’’.

’’Nous ne pouvons pas payer les frais de scolarité pour le reste de nos enfants ; ils sont dehors dans les rues’’, a ajouté Akinyi. ’’Par ailleurs, nous ne pouvons même pas nous offrir un simple repas, et pourtant, nous sommes des personnes malades et sous traitement. Les médicaments ARV ne suffisent pas parfois parce qu’ils ne sont pas disponibles dans tous les centres’’.

Des statistiques officielles fixent le taux de prévalence adulte de VIH du Kenya à six pour cent. Plus de 200.000 personnes dans le pays seraient dans le besoin de médicaments anti-rétroviraux (ARV) prolongeant la vie à l’heure actuelle — dont environ 110.000 en reçoivent.

Kadara Yusuf âgée de 16 ans, une autre habitante de Kibera, est également quelque peu dans le noir au sujet du forum 2007.

’’Je ne sais rien du FSM...Il y a eu des rencontres internationales durant lesquelles des gens ne font que parler, mais faisant très peu de choses’’, a-t-elle dit à IPS.

’’Tellement de choses ont été dites sur Kibera, mais les conditions de vie des gens à Kibera sont restées les mêmes depuis des années. Ceci montre que le monde ne se soucie pas des pauvres. Le FSM peut-il être une rencontre où il y aura moins de bavardages et plus d’actions ?’’

On estime à quelque 700.000 le nombre de personnes vivant à Kibera, une vaste étendue de huttes en terre de barre et d’égouts à ciel ouvert où les tristement célèbres ’’toilettes volantes’’ du Kenya font des atterrissages forcés. Ces ’’toilettes’’ sont des sachets plastiques dans lesquels des gens, qui n’ont pas d’installations sanitaires, défèquent et les lancent ensuite au loin (Voir ’DEVELOPPEMENT-KENYA : Des toilettes volantes toujours dans l’air’).

Onyango Oloo, coordonnateur du Forum social du Kenya - la section kényane du FSM - dit que cette institution travaille conjointement avec des habitants de Kibera pour faire en sorte que leurs préoccupations soient discutées au FSM 2007.

Créé comme une alternative au Forum économique mondial, une rencontre annuelle dans la station balnéaire suisse de Davos qui draine l’élite des entreprises et du monde politique, le FSM s’est tenu pour la première fois dans la ville brésilienne de Porto Alegre en 2001. Il rassemble une multitude de groupes et d’individus, principalement de la société civile, qui s’opposent à la mondialisation dans sa forme actuelle.

Le FSM a continué par se tenir au Brésil jusqu’en 2004, quand il a été accueilli par la ville côtière indienne de Mumbai — retournant à Porto Alegre l’année suivante.

Cette année, le forum s’est tenu dans plusieurs villes : la capitale du Mali - Bamako ; Caracas, au Venezuela ; et la capitale économique pakistanaise, Karachi.

Environ 150.000 personnes venant des quatre coins du monde devraient prendre part au FSM 2007 à Nairobi, selon le comité d’organisation.

Joyce Mulama


 Source : IPS www.ipsinternational.org

 Droits de reproduction et de diffusion réservés © IPS Inter Press Service.



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 Dessin : Ken Sprague www.kenspraguefund.org


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