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Colombie : Les médias dominants au service de la politique étrangère des Etats-Unis, par Garry Leech.


Colombiajournal, 14 février 2006.


Une série d’événements survenus ces derniers jours illustrent parfaitement la contribution des medias dominants à la propagande des gouvernements états-unien et colombien. Le fait que les medias s’en remettent de façon systématique aux sources officielles, bien que connaissant parfaitement les mensonges et les manipulations de ces mêmes sources officielles, nous donne à penser que les medias dominants sont bien heureux de servir la politique étrangère des Etats-Unis en abreu vant les citoyens états-uniens de désinformation et de mensonges éhontés. Le récent massacre de six membres d’une même famille en Colombie et la publication d’un rapport des Nations Unies ont mis en évidence pour tout le monde la nature propagandistique des medias.

Le 12 février 2006, l’agence européenne Reuters et l’agence espagnole EFE rapportaient la nouvelle selon laquelle des rebelles de gauche appartenant aux Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC) avaient massacré six membres d’une même famille, dont une dame de 80 ans. Comme c ’est si courant dans ce genre de cas, la nouvelle était entièrement basée sur les déclarations d’un officiel relevant du gouvernement colombien. Comme toujours en Colombie, le gouvernement soutenu par les Etats-Unis a immédiatement attribué le massacre aux FARC, malgré l’évident manque de preuves. Sans aller chercher plus loin, les medias ont servilement publié des articles régurgitant l’accusation officielle selon laquelle les FARC étaient les responsables.

Des medias tels que le Houston Chronicle et ABC News ont immédiatement commencé à publ ier les dépêches d’agence à propos du massacre. Ennemi principal de Washington dans la guerre contre la drogue et contre la terreur en Colombie -malgré le fait que les forces pro-gouvernementales tuent davantage de civils et malgré le fait que les paramilitaires sont davantage impliqués que les guérillas dans le narcotrafic-, les FARC ont été dûment vilipendées aux yeux des citoyens états-uniens.

Comme cela s’est si souvent produit en Colombie, il a par la suite été révélé que les FARC n’étaient finalement pas les responsables du massacre. Bien que généralement plusieurs semaines pas sent avant que la vérité ne soit révélée dans ce genre de cas, en cette occasion un officiel gouvernemental a clarifié les choses seulement deux jours après la publication du premier article rapportant le massacre. Le ministre de l’intérieur du département de l’Antioquia, Jorge Mejà­a, a reconnu après une enquête initiale, que « le mode opératoire indiquait que les coupables étaient des paramilitaires qui se sont démobilisés mais qui sont restés dans la région ».

Et comme cela se produit également souvent les medias dominants, qui ont reporté la nouvelle avec profusion pour condamner les FARC, n’ont pas rendu compte des nouveaux éléments disponibles. Ni Reuters, ni le Houston Chronicle, ni ABC News n’ont pris la peine d’informer le public que les affirmations qu’ils avaient faites antérieurement étaient apparemment fausses et que les éléments de preuves disponibles désignaient plutôt comme coupables les paramilitaires d’extrême droite supposément démobilisés. Seule l’agence de presse espagnole EFE a rendu compte de l’évolution de l’affaire.

La disposition des medias dominants à simplement dégurgiter n’importe quelle affirmation provenant des officiels gouvernementaux sans aller chercher plus loin c’est le modus operandi des correspondants étrangers en Colombie - comme ailleurs dans le monde. Les officiels gouvernementaux savent parfaitement que cela leur offre la chance extraordinaire de réaliser de la propagande et que la vérité, quand elle est finalement connue, ne sera que rarement mise à la connaissance des citoyens. En d’autres termes, les officiels savent bien que les medias ne les tiendront pas pour responsables de ces mensonges.

De son côté l’industrie médiatique affirme simplement que sa couverture est « objective » parce qu’elle ne fait que publier des déclarations émises par d’autres ; sans considération quant à la véracité, ou pas, des affirmations des personnes interviewées. Cependant lorsque les journalistes ou les medias décident de s’en remettre presque exclusivement aux sources officielles pour informer, ils effectuent le choix éditorial délibéré de ne présenter qu’un point de vue aux citoyens. Et, inévitablement, c’est le point de vue du gouvernement, lequel est très soucieux du type de présentation des événements reçue par les citoyens. En d’autres termes, le media choisit alors simplement d’agir en porte-parole du gouvernement, notamment quant aux questions de politique étrangère, lesquelles sont rarement traitées en détail.

La couverture servile des medias lors de ce massacre en Colombie a été davantage mise en perspective le lendemain de la publication des premiers articles. Le 13 février 2006 les Nations Unies ont rendu public leur rapport annuel sur les droits humains dans lequel il est signalé qu’il y a eu une augmentation des exécutions extrajudiciaires de la part de la police et des militaires colombiens durant l’année 2005. Ce rapport indique plus loin que les forces gouvernementales ont souvent couvert les corps des victimes avec des vêtements de guérilleros pour les présenter comme des personnes mortes au combat. Selon ce rapport, « il y a eu des cas où les commandants eux-mêmes ont enco uragé l’action de couvrir les victimes comme s’il s’agissait de guérilleros pour cacher la vérité et simuler un combat ».

Le rapport des Nations Unies n’est que la dernière révélation d’une longue histoire de preuves accablantes montrant que le gouvernement travestit la vérité de façon continue afin que les FARC soient accusées de crimes qu’elles n’ont pas commis. Etant donné que les médias savent cela et étant donné qu’ils sont conscients du fait que les officiels font souvent des déclarations qui postérieurement s’avèrent mensongères, on pourrait imaginer que les journalistes et les rédacteurs pussent en venir à so nger qu’ils sont simplement utilisés à des fins propagandistiques. On pourrait donc espérer qu’ils devinssent plus prudents quant à la publication d’articles basés exclusivement sur des sources officielles.

Il se trouve, cependant, que les medias ne s’inquiètent pas du tout de la menace qui pourrait peser sur leur crédibilité et ils continuent de se comporter comme ils l’ont toujours fait. Le refus de modifier leur modus operandi, de la part des medias, ainsi que leur refus de tenir les officiels gouvernementaux responsables de leurs mensonges, nous conduit à penser qu’ils ont consc iemment accepté leur rôle d’instrument de propagande de la politique étrangère des Etats-Unis.

Garry Leech


 Source : www.colombiajournal.org/colombia228.htm

 Traduction : Numancia Martà­nez Poggi


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Michael PARENTI
Analyste politique progressiste de tout premier plan aux États-Unis, Michael PARENTI, docteur en Sciences Politiques de l’Université de Yale, est un auteur et conférencier de renommée internationale. Il a publié plus de 250 articles et 17 livres. Ses écrits sont diffusés dans des périodiques populaires aussi bien que dans des revues savantes, et ses textes engagés l’ont été dans des journaux tels que le New York Times et le Los Angeles Times. Ses livres et ses conférences, informatives et (…)
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