Paris Normandie, 14 novembre 2005.
En Colombie, des escadrons de la mort formés de paramilitaires sillonnent la nuit les bidonvilles de la banlieue sud de Bogota pour éliminer les
jeunes qu’ils considèrent comme des délinquants ou des bons à rien. A Ciudad Bolivar, bidonville d’un million d’habitants, plus d’un millier d’enfants et adolescents ont été tués ces cinq dernières années et 600 autres ont
disparu, sous le regard indifférent voire complice de la police, selon des
organisations non gouvernementales et les habitants de ces quartiers.
Les paramilitaires, baptisés les « balafreurs », font généralement irruption
après 21h en camionnettes blindées blanches escortées de motos de police.
Ils perquisitionnent les maisons et enlèvent des jeunes dans les cafés ou en
pleine rue, raconte Jason, un élève du secondaire. « Un peu plus tard arrive
un camion de l’administration pour charger les cadavres des jeunes, selon
jason.
Certaines victimes d’enlèvement n’ont même pas 12 ans. Les corps sont
retrouvés une balle dans la nuque, dans des terrains vagues environnants »,
explique-t-il.
Leur vie ne tient qu’à un fil
Les paramilitaires, entraînés à chasser les guérilleros, s’en prennent de
plus en plus souvent aux jeunes de Ciudad Bolivar qui, pour eux, ne sont que
des délinquants et des trafiquants de drogue.
Sur les murs des ruelles de cette localité aux maisons misérables
construites de bric et de broc, de nombreux graffitis des Autodéfenses Unies
de Colombie (AUC - milices d’extrême droite) rappellent aux jeunes que leur vie ne tient qu’à un fil. « Les bons enfants vont dormir tôt, pour ce qui
concerne les mauvais, nous nous chargeons de les endormir », lit-on sur un
mur lépreux.
Les rares survivants de ces opérations « de nettoyage social » se terrent et gardent le silence car les paramilitaires sont omniprésents. Ainsi « un jeune
qui avait survécu par chance à un massacre de paramilitaires en octobre
2004, a écrit depuis l’hôpital une lettre à ses parents pour leur dire qu’il
était encore en danger. Il fut assassiné quelques jours plus tard dans
l’hôpital même », raconte l’un de ses camarades.
Les habitants du quartier et plusieurs représentants d’ONG accusent la
police de connivence avec les groupes de paramilitaires qui font régner
l’ordre dans ces quartiers à forte concentration de chômeurs.
Selon les témoignages des résidents, principalement des réfugiés fuyant la guerre dans les zones rurales, les plaintes n’aboutissent jamais. En
septembre, des milliers de jeunes du bidonville ont manifesté dans le centre
de Bogota pour dénoncer l’indifférence complice des autorités. Selon Lilia
Solano, directrice de l’ONG justice et vie, plusieurs « policiers en civil
ont filmé les manifestants et quelques jours plus tard, quatre dirigeants du
mouvement étaient assassinés ».
Dans une pétition envoyée au maire de gauche de Bogota, Luis Eduardo Garzon, des habitants de Ciudad Bolivar ont dénoncé la collusion entre la police et les paramilitaires. « Non seulement la police ignore nos plaintes mais nous encourage à obéir aux ordres des milices », affirment-ils. De manière
systématique, les autorités attribuent ces innombrables meurtres à des
règlements de compte entre bandes de jeunes délinquants ou de trafiquants de drogue.
– Sur RISAL : La paramilitarisation de la Colombie.<BR>
http://risal.collectifs.net/article.php3?id_article=1190
Otages en Colombie : La vérité à propos des contacts entre la France et les FARC-EP, par Carlos Lozano Guillen.
Réaction à l’article sur Ingrig Betancourt dans le N°1 de l’écorégion, par J. C. Cartagena.
Colombie : L’échec du Plan « Patriota » qui avait pour objectif l’anéantissement des FARC, par Miguel Urbano Rodrigues.