Pourquoi les différents gouvernements (Gauche ou Droite) veulent-ils en finir avec notre service public ferroviaire ?
La réponse à cette question qui est cadrée sur le plan national trouve ses réponses sur le plan international : le national et l’international sont des questions corrélatives. La France est un pays impérialiste doté d’un capital financier (toute-puissance des monopoles, c’est-à-dire des multinationales) particulièrement belliqueux.
De plus, la France est intégrée dans l’Union Européenne qui est une coordination de plusieurs impérialismes : l’UE est une machine d’extraction de la plus-value à grande échelle. Comme tous les pays du monde, la nation impérialiste française est dotée d’une force de travail nationale qui est réalisatrice de plus-value, c’est-à-dire du profit capitaliste.
Mais la force de travail publique, par exemple les cheminots, les postiers, EDF, la santé, etc., etc., n’est pas une force de travail réalisatrice de profits capitalistes, puisqu’elle exerce une mission de service public : là se situe la démarcation entre la force de travail publique et la force de travail privée.
En face du bloc impérialiste européen se dressent d’autres pays impérialistes en consolidation ou en devenir (exemple : la Russie, l’Inde, la Chine, etc., etc.) qui ont la même perspective : augmenter leurs taux de profits capitalistes. Sur le plan international, il y a donc une concurrence entre tous ces pays impérialistes, et cela même s’il existe effectivement une interdépendance entre tous ces pays impérialistes de par la mondialisation des forces productives.
Le point nodal de compréhension de ce processus se situe donc dans le lien absolu entre le profit et la force de travail humaine : car il ne peut pas y avoir de profit capitaliste sans qu’il y ait exploitation de la force de travail humaine. Il s’ensuit logiquement qu’il ne pourrait y avoir augmentation du taux de profit capitaliste s’il n’y avait pas, dans le même temps, augmentation de l’exploitation de la force de travail humaine.
Le bloc impérialiste européen doit donc trouver une solution pour augmenter son taux de profit capitaliste, ce qui établirait, dans le même temps, un rempart au développement fulgurant des pays impérialistes non européens concurrents.
La force de travail publique, donc les cheminots, entre autres, est ainsi une réserve de profit capitaliste en devenir : si elle est privatisée, elle pourra alors réaliser du profit capitaliste. Tous les gouvernements, de Gauche comme de Droite, sont les représentants d’un État Français qui est l’État des monopoles, c’est-à-dire un État totalement subordonné aux multinationales : c’est une des caractéristiques fondamentales du stade impérialiste ou capitalisme de monopole.
Les différents gouvernements français devaient donc trouver une solution afin d’engager le processus de privatisation de la force de travail publique que sont les cheminots, mais aussi de satisfaire les directives européennes et la politique des monopoles (Multinationales). Cette « nouvelle SNCF » constitue donc l’amorce d’un processus de privatisation qui s’avère une solution pour le capital financier français.
La dette qui avait été contractée par RFF a été répartie en trois entités :
– SNCF réseau : 46,2 milliards d’Euros.
– SNCF mobilité : 8,2 milliards d’Euros.
– SNCF de tête : 0, 2 milliards d’Euros.
Nous pouvons constater que SNCF réseau (ancien RFF donc), à elle seule, a récupéré une grande partie de la dette. Ces trois entités qui sont englobées dans le GPF détiennent toujours l’État comme actionnaire unique, mais un actionnaire qui est en réalité celui des monopoles.
Pour ce même État et ses différents gouvernements, cette « nouvelle SNCF » a enclenché un processus d’asphyxie financier afin de déblayer le passage pour les monopoles : Bouygues ou Vinci par exemple dévorent les Chemins de fer à une vitesse « grand V ».
En 2019, sera libéralisé le secteur des trains de voyageurs. Mais dans certains secteurs de la SNCF la libéralisation a été effectuée depuis très longtemps : chez SNCF réseau (le secteur des travaux et maintenance) les monopoles comme Bouygues ou Vinci sont déjà très prolifiques ! De là cette dérive de notre service public, une dérive qui ne sera pas résorbée...au contraire...
Comment cette dérive de nos chemins de fer se matérialise-t-elle sur le terrain ?
La libéralisation a été et est la cause de cette dérive de notre service public ferroviaire représenté par la SNCF. Cette libéralisation émane des directives européennes qui sont des obligations pour les États membres de l’UE.
Ces directives obéissent à des ordres très durement imposés aux États et il s’ensuit que la direction de la SNCF est dans l’obligation de les mettre en application : le résultat est que la base travailleuse subit les conséquences de ce processus destructeur. Ce processus de libéralisation est en réalité un processus de marchandisation de notre service public : ils souhaitent que la SNCF sorte du cadre public et devienne une entreprise capitaliste.
Prenons un exemple concret avec les travaux d’un changement de rail : lorsqu’un monopole, donc une multinationale (ETF, Bouygues, Vinci, etc....) intervient pour changer un rail, ce même rail devient inévitablement une marchandise comme toutes les autres : sa perspective est conditionnée par le profit et rien d’autre. Mais une marchandise est dotée d’une valeur, c’est-à-dire qu’une marchandise est la cristallisation d’une quantité de travail humaine incorporée en elle-même.
Ce qui mesure la quantité de valeur d’une marchandise n’est rien d’autre que le temps de travail socialement nécessaire et réalisé lors de la production de la marchandise (dixit Karl Marx dans Le Capital). Il s’ensuit donc que le rail devenu marchandise ne peut pas échapper à cette règle inhérente au mode de production capitaliste.
Les monopoles exploitent des ouvriers qui travaillent dans des conditions atroces (contrats précaires ou pas de contrats, pas de pauses, ordres très durement émis et heures de travail dépassant le cadre légal).
Et ces pauvres ouvriers exploités par ces mêmes monopoles n’ont d’autre solution que de subir ces conditions de travail atroces et doivent donc travailler le plus vite possible : c’est ce qu’on appelle la politique de rendement. De plus, les monopoles ne veulent pas former ces ouvriers (réduction des coûts) et il en résulte que ceux-ci n’ont aucune connaissance technique relative à un changement de rail par exemple.
Cela engendre des problèmes techniques lors des différents chantiers et il n’est pas rare que les voyageurs subissent le retard de leurs trains du fait que ces chantiers sont très mal gérés.
Cette situation s’est réellement produite, dernièrement, à la gare de Bondy en Seine-Saint-Denis. L’entreprise privée qui est une filiale du monopole Vinci, intervenait pour changer un appareil de voie à la gare. Les ouvriers très fatigués de cette entreprise, sans formation, soumis à une pression psychique et physique énorme, travaillaient le plus vite possible donc et ont arraché des câbles et plusieurs défaillances graves se sont accumulées lors de ce même chantier.
Finalement, tous les trains du matin ont été arrêtés, car le chantier en retard ne permettait pas la reprise de la circulation des trains. C’est ainsi que les voyageurs s’accumulaient sur le quai de la gare de Bondy à 6h du matin et en milieu de semaine !
Les voyageurs étaient alors bloqués sur le quai et on pouvait entendre ces mêmes voyageurs mécontents qui insultaient les cheminots : mais il n’y avait aucun cheminot sur place lors de ce chantier ! Comme la plupart des chantiers actuellement, puisque ce sont les monopoles et leurs filiales qui accaparent les marchés !
Les médias du capital affirment que les retards des trains trouvent leurs causes dans les prérogatives des cheminots eux-mêmes, alors que ce sont des monopoles qui interviennent (n’oublions pas que les dirigeants des médias sont mis en place par les dirigeants politiques) ! Cela permet au capital d’influencer l’opinion publique qui devient très hostile aux cheminots !
Le cheminot n’est pas soumis à cette logique de profit et il n’est donc pas soumis à un temps de travail particulier. Pour le cheminot (de même pour l’infirmier, le postier, l’agent EDF, etc....) l’important était alors sa mission de service public : il faisait donc primer la qualité du travail sur la quantité de travail.
Cette situation révèle donc une contradiction qui présente deux aspects : d’un côté une politique de rendement et de profit, et de l’autre une politique de service public. Notre service public SNCF mettait en avant ces trois mots d’ordre autour desquels gravitait le travail des cheminots :
1. Confort.
2. Régularité
3. Sécurité.
Alors que les monopoles, actuellement, mettent en pratique un seul mot d’ordre : faites vite car le profit nous attend !
Le processus de destruction de notre service public SNCF trouve donc deux points nodaux :
1- L’aspect anti-démocratique de l’Union Européenne et sa volonté de transformer cette entreprise publique SNCF en une entreprise capitaliste intégrée dans des spéculations financières et accords de marchés, etc.
2- Le processus de libéralisation qui permet le passage aux monopoles.
La position de la CGT Cheminots
Dans son journal La tribune des Cheminots la CGT Cheminots a pointé du doigt l’aspect anti-démocratique de l’UE et sa volonté de pulvériser notre service public par ce processus de libéralisation.
D’ailleurs, dans un article de ce même journal qui traitait de négociations concernant le libre-échange, la CGT Cheminots écrivait : « TTIP (Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement), TAFTA (Transatlantic Free Trade Agreement), GMT (Grand marché transatlantique) sont autant de sigles qui désignent les accords du grand marché transatlantique. Il s’agit d’un texte qui, depuis de nombreux mois maintenant, est « négocié » dans le dos des peuples et traite de la nature des liens qui doivent régir les relations entre l’Europe et les États-Unis. Ce projet de traité menace les services publics et toutes nos règles sociales, environnementales, alimentaires et sanitaires. Son adoption signifierait l’ouverture forcée de nos frontières aux OGM, à la viande clonée et au poulet lavé au chlore, au nom de la libre circulation des marchandises ».
Un peu plus loin, dans ce même article, la CGT Cheminots expliquait que : « Les négociations se déroulent à huis clos, sans consultation du public. Les parlements nationaux ne sont même pas informés des détails des textes de négociation de la Commission ». Elle ajoutait : « L’objectif de cette duperie est de redonner du souffle à un capitalisme en crise en créant le plus grand marché mondial de circulation des capitaux et de marchandises et en élargissant le champ de la concurrence au maximum d’activités humaines ».
Depuis le début, les militants syndicaux de la CGT Cheminots, leurs sympathisants et les cheminots non syndiqués ont lutté contre la réforme ferroviaire et pour la défense de notre service public. L’obstacle qui avait ralenti le développement de la lutte syndicale et ainsi permis à la réforme ferroviaire et à la libéralisation de passer facilement se situe sur le plan politique.
En effet, le syndicalisme de classe est conditionné par des bases politiques fermes. La direction de la CGT est une direction réformiste/opportuniste qui est noyautée par La France Insoumise et PCF/FDG. Ces organisations politiques qui régissent la direction syndicale ne veulent pas en finir avec le mode de production capitaliste et ses monopoles, car elles espèrent en réalité un bel avenir dans le capitalisme.
Cela pose un véritable problème aux cheminots, sachant que ce sont justement ces monopoles qui leur retirent le pain de la bouche ! Ceci étant dit, il y a une ligne de démarcation très nette qui doit être effectuée entre la direction CGT (Nationale ou Cheminots) intégrée au système capitaliste et les militants de la CGT Cheminots à la base qui sont dotés d’une véritable volonté révolutionnaire : le problème est qu’ils sont mal orientés.
Les militants de la CGT Cheminots sont solides, forts et d’une abnégation féroce. Ce ne sont donc pas les militants de la CGT Cheminots qui posent problème, ni les délégués du personnel d’ailleurs, mais leur direction syndicale. Il y a évidemment des dirigeants intègrent, mais ils ont été isolés par la structure réformiste/opportuniste.
Lors de la lutte contre la loi travail, nous avons constaté que les militants et sympathisants de la CGT Cheminots étaient dotés d’une volonté ferme et qu’ils constituaient une base militante sur laquelle les salariés peuvent s’appuyer pour les défendre devant les attaques du patronat. La direction syndicale est une bureaucratie parasite, une aristocratie ouvrière qui espère un bel avenir dans le capital : là est le problème...
Les révolutionnaires existent toujours à la CGT Cheminots, mais ils sont isolés et totalement subordonnés à la direction réformiste/opportuniste. La tactique est simple, mais demande de l’abnégation et de la patience, car elle doit s’articuler sur le long terme et prendre appui sur une approche dialectique de la situation objective.
Dans un premier temps, il faut une adhésion en masse à la CGT. Ensuite, grâce à une approche dialectique juste et cohérente (parallèlement à un parti révolutionnaire fort), il en découlera une cristallisation de la contradiction fondamentale englobant deux aspects : d’un côté les idées réformistes, et de l’autre les idées révolutionnaires.
Ensuite, les idées révolutionnaires prendront inévitablement le dessus sur les idées réformistes. Finalement, les idées révolutionnaires organiseront tous les militants et sympathisants qui récupéreront ainsi leur outil syndical et le redonneront ensuite aux salariés.
Non à la destruction de notre service public ! A bas la classe capitaliste !