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Syrie – La traversée de l’Euphrate à Deir Ezzor

Les trois dernières semaines ont été marquées, en Syrie, par une consolidation accrue des positions du gouvernement syrien. Cela va probablement continuer, mais un nouveau front de conflit avec la force d’occupation américaine au nord-est de la Syrie se développe à propos de la ville de Deir Ezzor et des zones rurales riches en pétrole à l’est de la ville. (voir carte agrandie)

La semaine dernière, l’armée syrienne a libéré Sukhnah à l’est de Palmyre de l’occupation de l’État islamique. Les combats ont été moins durs que prévu. Après que la ville a été presque entièrement encerclée et que le commandant local de l’EI a été tué, les forces ennemies ont fui principalement vers l’Euphrate et Deir Ezzor.

Deux grandes poches de l’EI sont en train de se former à l’est d’Hama. L’encerclement de 3 000 kilomètres carrés de ce territoire est maintenant terminé et les forces restantes de l’EI sont chassées de la poche par des hélicoptères russes et des commandos de l’armée syrienne. Cela mettra la route d’approvisionnement vers la ville d’Alep hors de danger. La deuxième poche sera aussi bientôt encerclée. Dans le courant de la semaine prochaine, l’armée syrienne aura consolidé l’ensemble de la zone. Les troupes qui encerclent actuellement les poches seront alors en capacité de rejoindre l’avancée vers Deir Ezzor plus à l’est. Il n’y aura plus de risques de grandes attaques de surprise dans le dos de des forces qui avancent.

Une attaque de ce genre a récemment submergé un avant-poste du désert en tuant 18 combattants d’un groupe soutenu par l’Iran et allié du gouvernement syrien. Ces unités perdues ont été remplacées par des Gardes révolutionnaires iraniens. L’injection d’unités du Corps des gardiens de la révolution (Pasdaran en perse) en Syrie est un phénomène nouveau. Jusqu’à présent, les Pasdaran se contentaient de commander des unités irrégulières recrutées en Irak ou en Afghanistan, ou de conseiller des unités de l’armée syrienne. Alors que l’Iran envoie plus de forces aux côtés du gouvernement syrien, le Hezbollah libanais aurait réduit son engagement de 20 000 à environ 5 000 soldats. Cela a été rendu possible par le fait que plusieurs zones tenues par les « rebelles » à l’ouest de la Syrie et près de la frontière libanaise ont été pacifiées et consolidées. La seule zone de la partie occidentale de la Syrie où il y a encore des combats actifs est la zone qui va de l’enclave de Ghouta-est à l’est de Damas. Un mélange de combattants d’al-Qaeda (Jabhat al-Nusra) et de salafistes de Faylaq Al-Rahman continuait jusqu’ici de rejeter les offres de cessez-le-feu. Mais du fait que leurs pertes ont augmenté au cours des dernières semaines et que leur approvisionnement est devenu difficile, Faylaq Al-Rahman a abandonné le combat aujourd’hui. Avant peu les éléments d’al-Qaïda renonceront également à se battre et accepteront les offres d’évacuation vers la province d’Idleb.

Après la défaite totale des groupes salafistes d’Ahrar al-Sham, Idleb est devenu le refuge et la forteresse d’Al Qaeda en Syrie. La Turquie a limité ses approvisionnements dans la région à de l’aide humanitaire, et les luttes intestines entre différents groupes locaux et al-Qaïda font un carnage quotidien. Pour l’instant, aucun des camps — que ce soit la Syrie, la Turquie ou les États-Unis et leurs forces par procuration kurdes —, n’a envie de se lancer dans l’entreprise coûteuse de libérer la région. La situation pourrira jusqu’au printemps.

Stratégiquement, les États-Unis ont perdu la guerre contre la Syrie. Il ne leur reste qu’à vaincre l’EI à Raqqa et à partir. Mais l’armée impériale étatsunienne, les néo-conservateurs et les interventionnistes libéraux ne peuvent pas se satisfaire d’une telle issue. Ils tentent d’empêcher l’inévitable.

L’attaque contre Raqqa de la force d’occupation étatsunienne située au nord-est de la Syrie et de ses forces par procuration kurdes progresse lentement. La résistance de l’EI continue d’être forte et la ville est « détruite pour la sauver ». Les forces kurdes trouvent avantage à prolonger ce combat pour se procurer toujours plus de soutien et d’équipement étatsuniens.

Les États-Unis ont mis en place 12 bases, grandes et petites, dans le nord-est de la Syrie tenu par les Kurdes. Les Kurdes, sous le contrôle des Unités de protection du peuple (YPG), un groupe anarcho-marxiste autoritaire, espèrent que les forces américaines vont s’installer de façon permanente dans la région et vont les soutenir durablement. Mais les États-Unis sont un partenaire peu fiable et leur intérêt stratégique est fonction de leurs relations avec la Turquie qui s’oppose avec véhémence à un contrôle kurde sur quelque partie que ce soit de la Syrie.

L’armée américaine a l’intention d’avancer le long de l’Euphrate, vers Deir Ezzor et plus à l’est jusqu’à la ville frontalière d’Abu Kamal, à partir de Raqqa. Un deuxième front se déplacerait du nord vers l’Euphrate pour prendre les champs de pétrole d’al-Omar. Cela mettrait les importantes réserves de pétrole du nord de l’Euphrate qui sont encore actuellement sous le contrôle de l’EI dans la zone occupée par les Etats-Unis. Il semble peu probable que ce plan américain réussisse. Le (probable) plan syrien (ci-dessous) semble plus réaliste.

Selon ce plan, l’armée syrienne avancera sur Deir Ezzor à partir du nord-ouest le long de la rive sud de l’Euphrate et à partir du sud-ouest à travers le semi-désert syrien. Après avoir libéré Deir Ezzor, l’armée syrienne traversera l’Euphrate et continuera d’avancer sur les deux rives du fleuve jusqu’à la frontière irakienne pour libérer toutes les zones sous le contrôle de l’EI. La traversée de l’Euphrate nécessitera un important soutien russe.

Les États-Unis n’ont pas assez de forces par procuration pour aller vers l’est et le sud et attaquer Deir Ezzor. Les zones sont arabes et le recrutement de forces de procuration arabes par les américains s’est avéré déplorable. Quelques centaines de combattants plus ou moins fiables sont insuffisants pour une opération plus importante. Les efforts pour déplacer des combattants tribaux de la région frontalière jordanienne vers les zones kurdes au nord ont largement échoué. Tout le monde pense que les États-Unis ne pourront pas tenir longtemps leurs positions dans l’est de la Syrie, entourées qu’elles sont de pays qui rejettent une entité contrôlée par les Kurdes en Syrie. Les intérêts à long terme des tribus arabes sont avec le gouvernement syrien.

Israël voudrait que les États-Unis s’engagent davantage. Pour ce pays, le rétablissement complet du contrôle du gouvernement syrien sur la Syrie est un « scénario cauchemardesque ». Israël veut une Syrie balkanisée où il peut monter les uns contre les autres différents groupes sectaires ou ethniques. Israël a peu de chance d’obtenir exactement ce qu’il veut, mais il va continuer à faire pression pour la création d’une zone autonome kurde sous le contrôle des États-Unis. Pour être économiquement viable, cette zone a besoin des champs de pétrole du nord de l’Euphrate. On peut donc s’attendre à ce que l’armée américaine et les experts sous influence israélienne tentent d’empêcher l’armée syrienne de traverser l’Euphrate pour reprendre les champs pétroliers.

Je pense que la traversée de l’Euphrate avec la conquête des champs de pétrole sera l’objet du prochain conflit entre les États-Unis et la Russie sur le théâtre de guerre syrien.

Moon of Alabama

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LA TYRANNIE DU BIEN VIEILLIR
Martz Didier, Michel Billé
La tyrannie du Bien Vieillir, voilà bien un paradoxe ! Il faut être un peu iconoclaste pour aller s’en prendre à une si belle idée, qui fait si largement consensus : « bien vieillir ». Bien vieillir, qui pourrait être contre ? Qui ne le souhaiterait pas pour soi-même et pour autrui ? Qui oserait affirmer préférer vieillir mal ? C’est que le désir de bien vieillir de chacun sans trop d’inconvénients est devenu un slogan qui anime les cercles politiques, court dans les maisons de retraite, (…)
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T.D. Allman (dans un hommage à Wilfred Burchett)

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