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Quand Manuel Valls montre son ignorance de la Tunisie chez Salamé et Pujadas

Une photo, à l’attention de Monsieur Manuel Valls, qui montre l’étudiante Khaoula Rachidi s’interposant, le 7 mars 2012, au risque de sa vie, pour que le drapeau tunisien ne soit pas remplacé par le drapeau de Daech qu’un salafiste vient de hisser en haut du bâtiment se trouvant à l’entrée de la Faculté des Lettres, des Arts et des Humanités de la Manouba (FLAHM), photo-symbole du combat de la femme tunisienne aujourd’hui, prouvant, soit dit en passant, qu’en Tunisie, contrairement à ses déclarations (voir ci-dessous), le voile n’est pas imposé aux femmes. Aussi, elles n’ont pas à « se battre précisément pour l’enlever », et, au demeurant, contrairement à ce qui s’est passé en Iran – pour citer l’(unique !) autre pays qui a intéressé Monsieur Valls, voir ci-dessous – l’État tunisien n’a jamais eu besoin de légiférer à ce sujet ; qui plus est, dès l’aube de l’indépendance, il a encouragé le dévoilement des femmes. Dans ce cadre, j’invite Monsieur Manuel Valls à visionner la magnifique vidéo suivante où l’on voit le Président Bourguiba dévoilant des femmes voilées.

« En affirmant qu’"en Tunisie, on oblige les femmes à porter le voile" , Manuel Valls a prouvé l’ampleur de son ignorance et celle d’une [certaine] gauche française en perte de repères » (1).

J’ai regardé, hier jeudi 5 janvier 2017, L’Émission Politique, animée par Léa Salamé et David Pujadas sur France 2, consacrée à Manuel Valls, émission dont est extraite ladite affirmation de ce dernier. Pour compléter la citation ci-dessus, il convient de préciser que Manuel Valls a dit, texto, lors de cette émission :

« [je voudrais] vous dire que, vous comme moi, nous avons une chance incroyable, c’est de pouvoir débattre [du voile], c’est de vivre dans ce beau pays qui est la France (...) Et puis, vous savez quand même, dans d’autres pays : je pense à la Tunisie, je pense à l’Iran, des femmes à qui l’on a imposé le voile se battent précisément pour l’enlever » (2)

Autrement dit, il a placé l’Iran et la Tunisie à égalité, quant à l’obligation du port du voile, et il a oublié ces monarchies du Levant, moyenâgeuses mais riches – il est vrai, la Tunisie ne possède pas de royalties à distribuer – où la condition de la femme, en particulier, et des droits humains, en général, sont idylliques, paraît-il ! C’est ce que retiendront les français moyens (et ses amis du Golfe), après cette émission qui a rassemblé des millions d’électeurs !

Un candidat à la magistrature suprême honnête ne dit pas n’importe quoi pour des raisons électoralistes ou mercantiles ! Dans tous les cas, je vous confirme, monsieur le premier-ministre-candidat, que, depuis plus de six décennies, le port du voile n’a jamais été imposé aux femmes de mon pays. Et, sachez, Monsieur le Premier-ministre-candidat, qu’aujourd’hui, les femmes tunisiennes, et avec elles tous les démocrates, se battent contre les Frères musulmans tunisiens dont le projet est l’adoption d’une constitution qui consacre la Sharia et dont le pouvoir socialiste actuel a honoré, plus d’une fois, les dirigeants (3). Dans ce contexte, il convient de rappeler une phrase culte d’un ministre des Affaires étrangères socialiste, phrase qui restera, j’en suis sûr, dans les annales diplomatiques, à savoir : « le Front al-Nosra fait du bon boulot » (4), dixit Laurent Fabius, en décembre 2012. Et, comme tout un chacun le sait, le Front al-Nosra est la succursale d’Al Qaïda en Syrie.

Si j’étais français, bien que ma sensibilité politique se soit toujours située à gauche, une telle complicité de Manuel Valls avec les dites monarchies – qui plus est, se trouvent être les sponsors du terrorisme islamiste international – pousserait mon cœur du côté de François Fillon qui, lui, a été nettement plus franc et plus ferme en ce qui concerne son positionnement vis-à-vis de ces monarchies.

Il convient de mentionner que Manuel Valls a dit ce qui est rapporté ci-dessus en réponse à l’intervention d’Attika Trabelsi, algéro-franco-tunisienne se définissant elle-même comme « musulmane et féministe », ancienne élève à l’École normale supérieure et militante au sein de plusieurs associations dont l’association Lallab dont il est question dans la vidéo suivante ; et c’est en tant que représentante de cette association qu’elle fut invitée sur le plateau de ce numéro de l’émission L’Émission Politique :

https://www.facebook.com/hashtag/nosvoilesnosrécits?source=feed_text&story_id=1322404584447191&pnref=story

En outre, je pense qu’Attika Trabelsi, en tant que tunisienne – donc, au courant de la réalité de son pays – aurait dû rectifier l’erreur de Manuel Valls.

Quant aux dames qui parlent de leurs rêves « pour demain » dans cette vidéo, j’ai envie de leur dire : mon rêve à moi pour demain, c’est que vous arrêtiez d’exhiber le voile comme obligation islamique (5).

Et, à leur attention, je reproduis ci-dessous, en conclusion, deux citations à propos du port du voile :

1. Qasim Amin, un intellectuel égyptien, a déclaré, en 1897, que « C’est quand même étonnant ! Pourquoi ne demande-t-on pas aux hommes de porter le voile ou de dérober leurs visages aux regards des femmes, s’ils craignaient tant de les séduire ? La volonté masculine serait-elle inférieure à celle des femmes ? ».

2. Tahar Haddad, un intellectuel tunisien, a comparé, en 1930, le voile à « la muselière qu’on met aux chiens pour les empêcher de mordre ». Évidemment, le « chien », ici, c’est l’homme (le mâle), et la muselière (du mâle) est portée à distance par la femelle !

Salah HORCHANI

Note ajoutée le 7 janvier 2017 : Réponse de Karim Guellati à Manuel Valls (6) (Extraits)

Monsieur le Premier Ministre,
Monsieur Valls,
Cher Manuel,
Camarade,

Vous avez, il y a quelques jours, énoncé une vérité partielle en affirmant qu’en Iran, comme en Tunisie, des femmes luttaient pour enlever le voile qu’on leur imposait. Vous avez énoncé une vérité partielle et comme toute personne qui s’adonne à cet exercice, vous avez induit un mensonge total.

La vérité est qu’effectivement, il y a des femmes en Tunisie qui s’élèvent lorsque certaines personnes veulent imposer le port de voile. Et en Iran c’est également le cas.

La partialité du propos, c’est de lier ces deux pays sur ce combat.

Seule option qui nous reste, Camarade, serait que vous ignorez tout de la situation de la femme en Iran, et notamment que le port du voile y est obligatoire. Mais compte tenu du rôle central de l’Iran dans votre dispositif diplomatique des dernières années, je ne peux pas imaginer que ce point ait échappé à votre vigilance. Sauf à considérer que vos préoccupations quant aux droits de la femme à cette époque-là n’étaient que résiduelles, et que la perspective électorale prochaine vous ai fait, aussi subitement que brutalement, prendre conscience qu’il y avait un sujet ici à creuser. Et vous avez creusé de biais, comme les tunisiens cherchant du pétrole à la frontière libyenne, si bien que vous vous pensiez arriver en Tunisie.

Mon Cher Manuel, il y a méprise, vous avez creusé à 12° latitude, et pour que votre comparaison ait un socle de vérité, c’est en Arabie Saoudite que vous vous êtes retrouvé. Même si vous roulez à l’Arabie Saoudite... pétrolium.

Vous avez jeté un voile sur le combat de 5 millions de femmes tunisiennes, non pas parce qu’elles luttent effectivement contre le port du voile imposé à certaines, mais parce que le port du voile institutionnalisé est un combat qu’elles ont gagné depuis fort longtemps, en 1956. La même année ou presque, elles ont également gagné la bataille de l’IVG, interruption volontaire de grossesse qui fut adoptée en France quelques 18 ans plus tard.

On ne va pas se voiler la face non plus, il reste beaucoup à faire en Tunisie pour les droits de la femme. Mais de là à comparer le combat en Tunisie avec celui à livrer en Iran, il y a un pas qui vient d’être allègrement franchi.

En 2015, Monsieur le Premier Ministre, vous comparaissiez tous les mercredis pour les questions aux gouvernements, devant 26,9% de femmes parlementaires françaises, alors que notre ministre de l’économie, qui est une femme, s’y exprimait la semaine dernière devant 30,88% de femmes députées. En Iran, si vous l’ignoriez, je vous le précise, elles sont 7%. Notre assemblée est plus féminine que la vôtre. Peut-être aussi, plus voilée. Mais pas par contrainte celles-là, plus par croyance religieuse, vraie ou fausse, par tradition, légitime ou pas, mais en aucun cas par contrainte, et encore moins parce qu’elles seraient sous une domination masculine. Voyez-y le fait que la Tunisie est une des filles, certes récente dans son Histoire longue de 3000 ans, de l’Islam.

[1] http://kapitalis.com/tunisie/2017/01/06/la-tunisie-et-le-coup-de-pied-de-lane-manuel-valls/

[2] in la vidéo ci-dessous de la minute 58 :45 à la minute 1 :01 :05 http://www.francetvinfo.fr/replay-magazine/france-2/l-emission-politique/l-emission-politique-du-jeudi-5-janvier-2017_1992029.html

[3] Voir à ce sujet, par exemple, mes deux articles intitulés « Anagramme et hadith du jour, à l’occasion de la visite en France de Rached Ghannouchi » et «  Ghannouchi en visite officielle en France : ce qu’il n’a pas dit à Elisabeth Grigou », parus, respectivement, sous les liens suivants :

https://blogs.mediapart.fr/salah-horchani/blog/230616/anagramme-et-hadith-du-jour-l-occasion-de-la-visite-en-france-de-rached-ghannouchi

https://blogs.mediapart.fr/salah-horchani/blog/270616/ghannouchi-en-visite-officielle-en-france-ce-qu-il-n-pas-dit-elisabeth-guigou

[4] http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2014/12/10/97001-20141210FILWWW00263-des-syriens-demandent-reparation-a-fabius.php

[5] Voir, à ce sujet, mon article intitulé « Le Voile Cultuel est d’origine chrétienne non évangélique », paru sous le lien suivant : https://www.legrandsoir.info/le-voile-cultuel-est-d-origine-chretienne-non-evangelique.html où je montre que « c’est avec l’Apôtre Paul, et non avec le Coran, que la coutume, au départ citadine et païenne du voile des femmes, acquiert un statut religieux et cultuel ».

[6] http://www.tunisiefocus.com/politique/femme-tunisienne-minterdit-de-voter-meur-valls-163470/


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La République contre son École
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Certains, après la sortie de « Main basse sur l’école publique », (1) n’ont pas voulu croire, au moins dans un premier temps, dans la radicalité des postulats et parti-pris idéologiques qui avaient présidé, comme nous le dénoncions alors, aux mesures initiées par Xavier Darcos. Puis la « fusée des réformes » a décollé, et les yeux de nombreux citoyens, au-delà même de la communauté éducative, ont été décillés. Les atteintes graves au service public d’éducation se sont succédées à un rythme (…)
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